Le fonctionnement de notre démocratie et de nos institutions est en souffrance : ce constat est largement partagé par les élus et, surtout, par les Français. Nos compatriotes voudraient se sentir vraiment représentés. Or pour instaurer une juste représentation, il faut instaurer la proportionnelle aux élections législatives. C'est un objectif largement partagé par les Français, comme j'ai pu le constater lors du Grand débat national.
Le groupe Mouvement démocrate et démocrates apparentés souhaite de longue date que soit réintroduite la proportionnelle. Ce mode de scrutin n'a été appliqué qu'aux élections législatives de 1986. Quelques mois plus tard, l'une des premières initiatives du Premier ministre nouvellement nommé, Jacques Chirac, a consisté à rétablir le scrutin majoritaire, toujours en vigueur.
J'avais rejoint le Mouvement démocrate dès 2007, en raison, entre autres, de sa volonté de redonner tout son éclat et toute sa vitalité à notre système démocratique, de son ambition d'œuvrer à l'indispensable modernisation du fonctionnement de nos institutions. Nous en aurions particulièrement besoin en cette période de crise sanitaire, où notre démocratie est mise à rude épreuve.
La proportionnelle semble être un serpent de mer politique. Elle a figuré dans les programmes de plusieurs candidats à l'élection présidentielle, notamment dans ceux de deux candidats élus, Nicolas Sarkozy et François Hollande, qui n'ont pas traduit leur promesse de campagne dans le code électoral. Emmanuel Macron a souhaité, à son tour, « que le Parlement soit élu avec une dose de proportionnelle pour que toutes les sensibilités y soient justement représentées ».
Cette conviction, défendue par mon groupe, vise principalement à assurer une représentation politique des Français la plus juste et la plus fidèle possible. Il s'agit de faire en sorte que notre assemblée soit le miroir de la nation. Sans cela, nos concitoyens ont le sentiment de vivre une sorte de trahison représentative, et je les comprends. Scrutin après scrutin, nous voyons s'amplifier la désaffection des Français pour les consultations électorales et, plus largement, pour nos institutions démocratiques. L'abstention et la défiance sont les fossoyeurs de notre démocratie. Pour ma part, je refuse de rester les bras croisés lorsque je vois mes concitoyens se détourner de nos institutions. Le scrutin proportionnel n'est évidemment pas la seule solution à ce problème, mais il constitue un levier d'une puissance considérable.
Je sais que cette mesure suscite des inquiétudes – certaines ont d'ailleurs déjà été exprimées. La première crainte découle des élections législatives de 1986, qui ont vu l'entrée de l'extrême-droite à l'Assemblée nationale. Cependant, je crois profondément à l'intelligence de nos concitoyens et je leur fais confiance quant aux choix qu'ils seront amenés à faire. Plus encore, je préfère de très loin que le débat se déroule au sein de notre hémicycle, plutôt que de voir certains alimenter le ressentiment des Français en courant sur les plateaux des chaînes d'information en continu sans réaliser le travail sérieux et concret que nous menons à l'Assemblée nationale. La deuxième inquiétude porte sur l'absence de majorité qui découlerait de ce mode de scrutin. Au contraire, le scrutin proportionnel vise aussi à renforcer la légitimité de notre Parlement et à maintenir la stabilité du régime de la Ve République – vous l'avez dit vous-même, monsieur le rapporteur, en évoquant les législatives de 1986.
Nous ne pouvons pas nous satisfaire de la crise de légitimité de la représentation dont souffre notre assemblée et qui fragilise notre démocratie. Contrairement à ce qu'a expliqué M. Rudigoz, les modes de scrutin pratiqués ailleurs en Europe ont démontré l'efficacité de la proportionnelle, car la formation de coalitions et le travail mené en commun par différents partis ne peuvent que renforcer les régimes politiques. Il est grand temps que notre pays s'engage à son tour dans cette direction – il y est largement prêt.
Certains prétendent que les conditions de la mise en œuvre d'une telle réforme ne seraient pas réunies. Il est évident qu'il n'y aura pas de moment naturellement propice : ce moment viendra lorsque nous l'aurons décidé. La crise sanitaire ne nous dispense pas des exigences démocratiques quant à la représentation de nos concitoyens, bien au contraire.
Le président de notre groupe, Patrick Mignola, a déposé au début de l'année une proposition de loi relative au scrutin législatif à la proportionnelle intégrale, ainsi qu'une autre proposition de loi visant à introduire une dose de proportionnelle lors des élections législatives. Au mois de janvier, le MoDem a également publié un livre blanc dans lequel il recommande le retour du scrutin de liste proportionnel pour les élections législatives. Vous le savez, nous sommes particulièrement mobilisés sur ce sujet, depuis très longtemps. Nous devons en débattre et avancer ; cette proposition de loi nous en donne aujourd'hui l'occasion. Aussi, fidèles aux valeurs que nous défendons depuis tant d'années et à notre volonté de donner à notre assemblée le vrai visage politique de la France et des Français, nous voterons en faveur de ce texte.