Intervention de Jean-Pierre Pont

Réunion du mardi 4 mai 2021 à 18h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Pont, rapporteur :

Je ne reviendrai pas sur l'état de la situation sanitaire qui justifie le dépôt de ce projet de loi. Je ne retiens qu'une seule donnée, dont fait état le Conseil scientifique dans son avis du 21 avril : la situation sanitaire fin mai sera moins bonne que celle qui était observée l'année précédente au cours de la même période. Face à ce constat, il serait inconcevable de laisser le pays désarmé à compter du 2 juin prochain. Prétendre que l'on pourrait se dispenser des mesures de freinage de la circulation du virus à l'échéance de l'état d'urgence sanitaire relève d'une rhétorique plus que dangereuse.

Le projet de loi que nous a présenté le ministre apparaît donc à la fois nécessaire, adapté et proportionné à l'état de la situation sanitaire. Je me réjouis qu'il tienne compte de la position exprimée par notre commission lors de la discussion du dernier projet de loi de prorogation : sortir de l'état d'urgence sanitaire dès que possible et déterminer, au moment opportun, le régime transitoire qui lui succédera afin de poursuivre, de manière proportionnée, la lutte contre le virus, tout en permettant la reprise des activités. Tel est l'objet de l'article 1er qui instaure un régime transitoire similaire à celui que nous avions bâti à la sortie du premier état d'urgence sanitaire et qui avait été applicable du 11 juillet au 16 octobre 2020.

Je sais que nos débats porteront, de nouveau, sur la durée de mise en œuvre de ce régime et le prétendu chèque en blanc qu'accorderait le Parlement au Gouvernement dans la gestion de cette crise. J'aurai l'occasion de répondre à de tels arguments mais permettez‑moi d'ores et déjà d'observer que nous discutons aujourd'hui du septième projet de loi relatif à la gestion de la crise sanitaire en à peine plus d'un an. Le Gouvernement a effectué six déclarations, en application de l'article 50‑1 de la Constitution, devant l'Assemblée nationale, dont cinq ont été suivies d'un vote. En outre, les ministres répondent chaque semaine, en séance publique ou en commission, aux questions des parlementaires. La présence des ministres ce soir témoigne encore une fois du lien robuste et constant qui lie le Gouvernement au Parlement dans la gestion de cette crise, et je veux l'en remercier.

Nos débats sur l'article 1er porteront néanmoins sur trois sujets nouveaux : l'un figurait dans le projet de loi initial et deux nous ont été soumis hier soir sous forme d'amendements du Gouvernement. Nous aurons l'occasion d'en discuter mais je constate que ces trois dispositions – le passeport sanitaire pour les déplacements et le passe sanitaire pour l'accès à certains grands événements ainsi que la prorogation du couvre-feu jusqu'au 30 juin – s'inscrivent dans l'équilibre fragile et exigeant que cherche à atteindre ce projet de loi : favoriser au maximum la reprise des activités tout en maintenant les mesures nécessaires à la lutte contre l'épidémie.

À ce propos, messieurs les ministres, je souhaitais vous interpeller sur la mise en œuvre du passe sanitaire. J'estime, en tant que médecin, qu'il ne doit pas conduire à un relâchement des comportements et à l'abandon des gestes barrières, surtout dans le cadre des grands rassemblements. En effet, nous savons que la vaccination n'empêche pas une personne d'être porteuse du virus, et donc d'être contagieuse. Le Conseil d'État l'a d'ailleurs rappelé très clairement dans une récente décision. Pouvez-vous nous apporter des garanties à ce sujet ?

J'en viens à l'article 2 qui, en prévoyant une durée dérogatoire de déclaration de l'état d'urgence sanitaire pour la période estivale, a pu susciter des interrogations et des critiques, lesquelles ont d'ailleurs été légitimement renforcées par l'avis du Conseil d'État. Je vous proposerai un amendement qui devrait permettre d'y répondre. Il visera à réduire la durée d'application de ce dispositif dérogatoire, précisera ses conditions de mise en œuvre et prévoira une information renforcée du Parlement pendant cette période.

Alors que l'article 3 prévoit l'adaptation des deux premiers articles en Nouvelle‑Calédonie et en Polynésie française, l'article 4 permettra un double renforcement du régime de la quarantaine et de l'isolement, dans la foulée des récentes décisions prises par le Gouvernement pour l'élargissement de notre contrôle sanitaire aux frontières, et du régime de contrôle des infractions aux règles de police sanitaire.

L'article 5 me semble essentiel en ce qu'il permet d'intégrer les données recueillies par les systèmes d'information mis en œuvre aux fins de lutter contre l'épidémie de covid-19 au SNDS. Ce versement, qui se fera de manière sécurisée et respectueuse de la protection des données personnelles, vise à aligner les modalités de recueil des informations relatives à la covid-19 sur le régime de droit commun. Il constitue un outil indispensable pour améliorer, à terme, la prise en charge et la connaissance médicales et pour apprendre à mieux faire face aux éventuelles épidémies à venir. J'espère vivement que nos discussions permettront de dissiper les malentendus qui ont pu apparaître sur cet article.

Parallèlement aux mesures que je viens d'évoquer, le projet de loi assure une transition en douceur vers la sortie définitive de crise et le retour à la normale, en prorogeant et en adaptant plusieurs mesures d'accompagnement.

Ainsi, des adaptations et prolongations pourront être prises par ordonnance, en vertu de l'article 7, s'agissant de l'activité partielle, de l'indemnisation chômage des intermittents du spectacle et de la trêve hivernale – qu'il s'agisse de l'interdiction des coupures d'énergie ou des sursis à expulsion. Je rappelle que nous avions déjà opportunément prolongé la trêve hivernale jusqu'à fin mai.

L'article 6, quant à lui, prévoit de proroger, pour l'essentiel jusqu'au terme du régime transitoire, le 31 octobre prochain, toute une série d'aménagements qui, j'insiste, ne sont que des possibilités, et non des obligations, et qui ont pour but d'adapter diverses modalités au plus près des besoins et de la situation sanitaire.

Ces aménagements ont trait au fonctionnement des juridictions, des assemblées délibérantes locales, des organes collégiaux des personnes publiques et des entreprises, des établissements sociaux et médico-sociaux ou encore des assemblées de copropriété. L'article proroge aussi des aménagements en matière de droit du travail et prévoit une validité prolongée de six mois des avoirs délivrés à leurs clients par les professionnels du sport et de la culture.

Enfin, le projet de loi apporte, avec son article 8, des aménagements bienvenus aux scrutins de juin prochain, qui sont le fruit du dialogue entre le Gouvernement et les élus locaux, les associations d'élus et les forces politiques nationales. Nous avions, en février dernier, décidé du report des scrutins régionaux et départementaux de mars à juin et déjà apporté des ajustements – extension de la période de campagne électorale ou diffusion sur les chaînes de télévision de clips pédagogiques sur les élections à venir.

L'article poursuit ce travail et prévoit des mesures de deux ordres. S'agissant de la campagne électorale, il permet la numérisation des professions de foi et une extension de la période d'affichage électoral – deux amendements destinés à étendre encore plus cette période vous seront d'ailleurs proposés ; il prévoit également l'organisation de débats électoraux avant chaque tour pour les régionales – là aussi, des aménagements vous seront suggérés. S'agissant des opérations de vote, l'article permet leur tenue en extérieur et assouplit de manière pérenne des obligations logistiques portant sur le matériel électoral – nombre d'isoloirs et de tables.

Je profite de mon intervention pour vous interroger, messieurs les ministres, sur deux sujets qui, certes, ne concernent pas directement notre projet de loi, mais qui sont incontournables sur le terrain. Est-il prévu de renforcer le soutien financier apporté aux communes pour compenser les dépenses engagées en matière d'équipements de protection et, plus généralement, pour assurer la bonne tenue sanitaire des scrutins ? S'agissant du nettoyage des lieux de vote, dans les écoles notamment, des mesures particulières sont-elles prévues pour concilier le bon déroulement des dépouillements, le nettoyage des locaux et la reprise de l'école le lundi matin ?

Ces interrogations visent à renforcer la pertinence de l'article 8, dont l'objectif est de permettre aux scrutins de juin prochain de se dérouler dans les meilleures conditions possibles au regard de la situation sanitaire et d'adapter la campagne au contexte. Les aménagements prévus sont tout à fait judicieux, et les auditions que j'ai conduites ont d'ailleurs montré que l'article recueillait l'adhésion des élus locaux.

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