Intervention de éric Dupond-Moretti

Réunion du mercredi 5 mai 2021 à 14h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux :

Le risque est de faire de quelque chose d'assez simple une usine à gaz qui ne puisse plus fonctionner. Il est, je le redis, formidablement pédagogique de permettre aux Français de découvrir leur justice.

Monsieur Houbron, la Cour de cassation statue en droit. C'est la plus haute juridiction française. Il n'y a aucune difficulté à ce qu'on la voie. Si vous parlez au président la Cour européenne des droits de l'homme Robert Spano, où les audiences sont filmées, il vous dira qu'il ne voudrait pour rien au monde faire marche arrière. Les audiences du Conseil constitutionnel sont déjà filmées. Les magistrats, qui sont la bouche de la loi, seront, pour beaucoup, fiers qu'on les voie faire leur travail, tout comme les greffiers. Ce serait d'ailleurs intéressant de consacrer toute une émission au travail du greffier ! On expliquerait ce qu'il fait et en quoi il est essentiel au fonctionnement judiciaire.

L'autorisation de filmer ne peut pas être confondue avec le droit à l'image. Ce sont deux choses différentes. Imaginons que vous souhaitiez valoriser, dans un procès, la technique expertale de l'odorologie – le flair des chiens. J'ai le souvenir de l'avoir découverte dans une affaire. Un film avait été diffusé pour expliquer comment travaillaient les chiens. Alors que j'étais extrêmement sceptique, j'ai été convaincu. Voilà un autre sujet d'émission : les techniques expertales ! Imaginons que l'on arrive avec l'autorisation de filmer et que trois personnes refusent alors que l'expert aura très envie d'expliquer sa spécialité. Filmons et floutons ceux qui n'ont pas envie d'apparaître à l'écran, sans quoi le système grippe ! Il y aura toujours quelqu'un pour refuser qu'on filme et on ne filmera pas. Mais alors quand retrouve-t-on ces experts ? C'est pourquoi il ne faut pas confondre autorisation de filmer et protection du droit à l'image. C'est l'exception qui permet de ne plus flouter et de diffuser l'image avec le nom.

Ces situations sont si complexes que, si on les soumet à autorisation préalable, il n'y aura pas un film. On va perdre le but vers lequel nous souhaitons aller. Avis favorable à l'amendement CL325 et défavorable à tous les autres.

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