Nous parlons de la matière correctionnelle. La question de la détention provisoire est théoriquement réglée dans le code de procédure pénale depuis belle lurette : la loi la définit comme l'exception, le principe étant la liberté. Mais il est des exceptions qui deviennent des principes. Le travail d'enquête exceptionnel que les parlementaires ont effectué après l'affaire d'Outreau avait déjà identifié le recours à la détention provisoire comme l'une des questions à traiter. Il s'agit de changer de paradigme et, peut-être, de culture.
Le principe retenu est que, après huit mois, ce sera la surveillance électronique ; si le juge en décide autrement et maintient en détention provisoire, il devra motiver sa décision. Sans dénaturer le texte, auquel je crois, j'estime que c'est par petites touches, comme celle-ci, que l'on fera évoluer les mentalités.
Le projet de loi est cohérent avec le « bloc peines » institué par la loi de programmation et de réforme pour la justice du 23 mars 2019. Il s'agit de réaffirmer, en faisant preuve de la nuance fondamentale en ces matières, que l'on ne renie rien de la prison et de son utilité mais que, pour les infractions dites de basse intensité, l'incarcération est criminogène et fait plus de mal que de bien à la société – les chiffres le démontrent et je suis prêt à en débattre. Il est plus facile de céder à l'invective, à la critique nihiliste ! C'est l'illustration que tout homme qui fait quelque chose a contre lui la grande armée des gens qui ne font rien du tout.
Imposer une motivation spéciale au bout de quatre mois me paraît rapide. Le délai de six mois, quant à lui, ne correspond pas aux échéances actuelles de la détention provisoire ; il n'aurait pas beaucoup de sens. Une période de huit mois est raisonnable. Par ailleurs, j'entends préserver l'équilibre entre l'ambition du projet de loi et la charge de travail supplémentaire que cela créera pour les magistrats.
Pour ces raisons, je suis défavorable à ces amendements, même si j'en comprends la philosophie.