Quatre-vingt-dix-huit pour cent, soit la quasi-totalité des 7 000 places de détention devant être livrées durant le présent quinquennat, sont en phase opérationnelle. Tous les terrains ont été acquis. Les programmes fonctionnels sont validés. Le choix des groupements est effectif à 95%. Les travaux de construction de plus de la moitié de ces places ont débuté. L'année 2023 verra l'inauguration, outre des SAS de petite dimension, de grands établissements : ceux de Caen-Ifs, Troyes-Lavau, Bordeaux-Gradignan, en partie, et Basse-Terre. Celui de Lutterbach ouvrira en octobre prochain, suivi en 2022 par celui du Koné, en Nouvelle-Calédonie. Sans être directement en charge de ce programme de construction, j'en suis l'avancement de près, en espérant qu'il ne prendra pas de retard. Il me parait tout à fait légitime que les députés en soient informés.
Le budget de l'immobilier est confronté à trois questions, dont celle de la maintenance. De nombreux progrès ont été réalisés. La gestion déléguée de la moitié du parc s'appuie sur des contrats comportant des garanties. Les établissements concernés ont moins mal vieilli que les autres. En tant que jeune directeur d'établissement pénitentiaire, je m'opposais à cette gestion initiée par le ministre Chalandon. Avec le recul, elle me semble toutefois une bonne chose, les fonctionnaires n'étant pas les mieux à même d'entretenir les bâtiments.
Cent trente à 140 millions d'euros sont nécessaires pour entretenir l'autre moitié du parc. Depuis quelques années, la représentation nationale nous les accorde.
Enfin, certains établissements particulièrement vétustes comme à Varces, Poissy ou Fresnes requièrent un plan massif de rénovation. Il reviendra au prochain quinquennat de mobiliser les sommes correspondantes.
L'agence publique pour l'immobilier de la justice (APIJ) gère le programme de construction d'établissements neufs.
J'avoue mon ignorance quant aux CEF gérés par la PJJ. Je ne m'occupe que de la carte pénitentiaire pour les mineurs. Rappelons que 800 d'entre eux sont incarcérés en établissements pénitentiaires pour mineurs (EPM). Je pense comme vous qu'il convient de trouver une cohérence entre ces dispositifs infra-pénitentiaires et les EPM.
J'espère que tout le monde se montrera raisonnable désormais et que les prisons ne se retrouveront pas submergées de détenus. Je m'avoue assez inquiet. J'assume et revendique même le côté répressif de mon métier. Nous ne saurions faire abstraction du principe de réalité, y compris en ce qui concerne la récidive, dont le risque augmente avec la surpopulation carcérale. S'il me paraît indispensable d'enfermer certaines personnes, je garde des doutes sur l'opportunité d'une telle mesure appliquée à d'autres.
Un dispositif que vous avez voté m'apporte un espoir, celui de la libération sous contrainte (LSC) automatique pour de courtes peines et des reliquats de peine très réduits. Elle pourrait concerner de 3 500 à 4 000 détenus. Il me semble dans notre intérêt de laisser sortir ces personnes via un mécanisme permettant de les contrôler à la première incartade.
L'information des magistrats est permanente. Parfois, même, en tant que DI de Paris, je les indisposais par la quantité d'informations que je leur transmettais, or je n'étais pas le seul parmi mes collègues à agir ainsi. Je souhaite que leur soit communiquée, par département, une offre pénitentiaire crédible indiquant le nombre et le type de places de prison, de places en placement extérieur et de bracelets disponibles, ainsi que tous les mécanismes susceptibles de donner un contenu aux peines de probation.
Les enseignants, depuis deux ou trois ans, font régulièrement la grève des remontées d'information. J'ai écrit à mon collègue de la direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO) pour régler cette question de primes non alignées. Je rends en tout cas hommage à ces enseignants pour l'œuvre très utile qu'ils mènent en termes de prévention de la récidive.
Je ne nie pas les violences des surveillants envers les détenus mais ne les surestime pas non plus. Elles restent en tout cas inadmissibles. La reconnaissance majeure que je souhaite pour le personnel pénitentiaire doit aller de pair avec son exemplarité. Sans vouloir tout mélanger, je garde un œil aiguisé sur ce phénomène, que je tiens à mieux connaître. Son suivi et son traitement éviteront en outre les amalgames. Toute profession compte des brebis galeuses, mais nous n'en dénombrons pas plus parmi les surveillants de prison qu'ailleurs.
Nous vous informerons du résultat des dernières élections dans les établissements pénitentiaires.
Je ne suis pas adepte des lettres ouvertes, préférant m'exprimer à visage découvert. Les directeurs de SPIP savent que je leur ai apporté un soutien entier. Le site de la DAP indique ainsi que je me suis déplacé à Rouen, vendredi dernier, dans ce but. J'ai moi-même été auditionné par des missions d'inspection et ne nie pas le malaise de ces directeurs de SPIP. L'obligation de moyens n'équivaut pas à une obligation de résultats. Il faut garder la tête froide. Si une défaillance est avérée, il convient d'y remédier, sans toutefois verser dans les amalgames. Il n'appartient pas au DAP de commenter l'actualité mais d'agir. Nul ne gagnera à opposer la police et la gendarmerie, d'une part, à la justice, de l'autre. Exerçant tous un métier difficile, nous devons tous œuvrer dans le même sens, sans sombrer dans des polémiques stériles.
J'ai lu la note de l'IPJ. Nos prisons hébergent 23% d'étrangers, un chiffre en très légère augmentation. Parmi eux, une moitié viennent du Maghreb, les personnes originaires de cette région étant de toute façon surreprésentées parmi les étrangers en France pour diverses raisons historiques. Je m'accorde avec vous à considérer ces sujets trop importants pour les traiter de façon polémique.
En tant que DI de Paris, j'ai vécu 5 incursions violentes à Fresnes, dont une a failli coûter la vie à un père et sa fille dans un incendie. Hier encore, j'ai été en communication avec un agent agressé alors qu'il portait secours à une jeune femme, elle-même victime d'une agression. Une crise en France touche les professions chargées de la sécurité publique. J'estime inadmissible que les agents pénitentiaires continuent à craindre pour leur sécurité, de retour chez eux. Je tiens à les protéger. Nous allons sécuriser les domaines, sans pour autant les convertir en bunkers.
Je compte lancer un grand plan de protection des domaines pénitentiaires, prévoyant la mise en place d'équipes locales de sécurité pénitentiaire. Il faut améliorer les dispositifs d'alerte. Je souhaite également établir une meilleure communication avec les parquets afin d'informer les agents des suites de leurs plaintes. Si ces mesures ne suffiront sans doute pas à éradiquer les violences, nous devons au moins aux agents un soutien et ne pas rester les bras ballants.
Vous avez constaté mon enthousiasme pour l'administration pénitentiaire et les agents qui la servent. Son utilité sociale mérite d'être mieux connue, de même que sa dimension humaine. Les métiers impliqués, très divers, permettent, plus qu'ailleurs, des promotions sociales. Je me bats pour une amélioration des statuts et des rémunérations, certes raisonnée.
Concernant le placement extérieur, sans tout déconstruire pour reconstruire ensuite, il convient de remettre les choses à plat. J'y vois un dispositif extrêmement intéressant, notamment en cas de violences conjugales, pour limiter les incarcérations, d'autant qu'il présente des garanties supérieures à d'autres aménagements de peine. Il faut l'utiliser et en discuter avec les associations pour revoir les prix de journée, afin que ceux-ci correspondent aux services offerts : hébergement, suivi psychologique, traitement psychiatrique ou accompagnement social. Les associations doivent, de leur côté, être transparentes sur leurs autres sources de financement.
J'interrogerai le nouveau DI de Paris sur la question des logements, de toute manière complexe pour tous les jeunes fonctionnaires et en particulier ceux qui viennent des outre-mer, ce qui est le cas de plus de la moitié des agents stagiaires en Île-de-France.
Des actions uniques sont toutefois menées en leur faveur. Tous les surveillants, à leur arrivée en région parisienne, sont gracieusement logés pendant un mois en foyer ou à l'hôtel. Une politique volontariste a en outre été mise en place. Le service des ressources humaines de la DI indique aux futurs fonctionnaires à l'École nationale de l'administration pénitentiaire (ENAP) quels documents leur seront demandés. Le jour même de leur arrivée, leur établissement d'affectation les reçoit. Une offre d'hébergement doit leur être proposée en moins d'un mois.
Lors de mon arrivée à la DI de Paris, voici cinq ans, tous les week-ends suivant l'affectation de stagiaires, des syndicalistes menaçaient de planter des tentes aux abords des établissements pénitentiaires. Deux ans après, ce n'était plus le cas. Des progrès ont donc eu lieu.
Nous avons passé des conventions avec la société nationale des chemins de fer français (SNCF), la régie autonome des transports parisiens (RATP) et même des agences immobilières pour favoriser les colocations, qui permettent en outre de lutter contre l'isolement. Nous mobilisons jusqu'aux préfets. Je vous accorde que ce dispositif devrait être plus simple. Nous y regarderons de nouveau de plus près. Quoi qu'il en soit, il revient aux agents, à partir de nos propositions, d'effectuer eux-mêmes les démarches. Notons que certains élus locaux se mobilisent, à Fleury ou à Bois-d'Arcy, par exemple.