Intervention de Jean-Pierre Pont

Réunion du vendredi 3 septembre 2021 à 14h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Pierre Pont, rapporteur :

Nous ouvrons cette session extraordinaire avec le neuvième texte relatif à la gestion de la crise sanitaire en l'espace de dix-huit mois, alors que la France fait face, depuis le début de l'été, à une quatrième vague portée par la virulence du variant delta. Le pays et son système hospitalier ont été mis, une nouvelle fois, à rude épreuve. Pour affronter l'épidémie, nous avons pu compter sur les deux principaux piliers de notre stratégie sanitaire : le déploiement massif de la vaccination et l'extension opportune du périmètre du passe sanitaire, permise par l'adoption de la loi du 5 août 2021.

Si l'optimisme peut-être de mise, malgré une situation qui demeure fragile et qui appelle à la prudence, l'inquiétude reste très forte dans la plupart des collectivités d'outre-mer. Celles-ci sont confrontées à une situation sanitaire qui s'avère partout préoccupante, voire dramatique, avec des taux d'incidence jamais atteints, une saturation des capacités hospitalières et une mortalité qui rappelle que la covid-19 continue de tuer – principalement des personnes non vaccinées.

En Polynésie française, la situation est sans précédent. Le taux d'incidence est supérieur à 3 000 sur le territoire, il avoisine même les 4 000 dans les îles Sous-le-Vent, et les hôpitaux sont entièrement saturés. En Guadeloupe, une amélioration s'amorce mais la situation demeure très dégradée : le taux d'incidence est supérieur à 1 000 et le taux d'occupation des lits de réanimation s'élève à 92 %. En Guyane, la situation se détériore de nouveau avec une circulation plus importante du variant delta et un taux d'incidence en hausse de 16 % la semaine dernière.

Si des raisons structurelles rendent ces territoires particulièrement vulnérables à l'épidémie, ainsi que l'a rappelé le Conseil scientifique dans son avis du 29 août, la situation s'explique aussi, malheureusement, par une progression plus lente qu'ailleurs de la vaccination.

La prorogation de l'état d'urgence sanitaire en Guadeloupe, en Guyane, à La Réunion, en Martinique, en Polynésie française, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, doit s'accompagner de la poursuite indispensable des efforts exceptionnels déployés en faveur de ces territoires.

La solidarité nationale a permis une mobilisation sans précédent des personnels de santé. Quatre rotations ont été effectuées depuis le 10 août au profit des Antilles et de la Polynésie française, permettant le renfort de 1 600 personnels soignants. En parallèle, les efforts ont été démultipliés pour organiser l'évacuation, au 31 août, de soixante-sept patients vers la métropole.

Je me réjouis que le dispositif d'indemnisation de l'activité partielle et les deux fonds de solidarité pour les entreprises aient été reconduits et renforcés dans les territoires ultramarins.

Le projet de loi que nous examinons cet après-midi est technique. Il est néanmoins indispensable pour que les mesures nécessaires à la lutte contre l'épidémie, autorisées par le régime de l'état d'urgence sanitaire, puissent être poursuivies jusqu'au 15 novembre. Contrairement au régime de sortie de crise, mis en œuvre par la loi du 31 mai, le régime de l'état d'urgence sanitaire permet de limiter la circulation des personnes hors de leur domicile – un couvre-feu a été instauré dans l'ensemble de ces territoires ; la Guadeloupe, la Guyane, La Réunion, la Martinique et la Polynésie française connaissent un confinement, parfois différencié, plus ou moins strict. Ces mesures sont difficiles et éprouvantes, mais elles sont les seules à même de protéger la santé des populations.

La prorogation est justifiée par la situation sanitaire dans les territoires concernés et par la nécessité d'y maintenir un instrument de réponse rapide et réactive face à un virus imprévisible. Elle est aussi proportionnée dans sa durée, qui est d'un mois et demi : la date du 15 novembre correspond à l'échéance fixée au niveau national pour le régime de gestion de la crise sanitaire, que nous avons voté avec la loi du 31 mai et prorogé par la loi du 5 août. Par ailleurs, elle a été validée par le Conseil scientifique et le Conseil d'État.

L'article unique proroge également jusqu'au 15 octobre le dispositif dérogatoire de déclaration de l'état d'urgence sanitaire applicable à Mayotte depuis la loi du 5 août 2021. S'il est décrété avant cette échéance, l'état d'urgence sanitaire sera en vigueur, lui aussi, jusqu'au 15 novembre. Si le taux d'incidence à Mayotte est l'un des plus faibles du territoire national, il a cependant augmenté de 50 % ces sept derniers jours.

L'application de ce dispositif est également étendue aux trois autres territoires d'outre-mer où l'état d'urgence sanitaire n'est pas en vigueur – Saint-Pierre-et-Miquelon, Wallis-et-Futuna et la Nouvelle-Calédonie.

L'échéance du 15 novembre 2021 est cohérente avec la perspective de l'examen par le Parlement, à l'automne, d'un projet de loi qui permettra de définir, en fonction de l'évolution de la situation sanitaire, le cadre juridique adapté pour poursuivre les mesures nécessaires à la lutte contre l'épidémie, en métropole comme dans les outre-mer. Je ne doute pas que le Parlement prendra à nouveau toute sa part.

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