Le texte qui nous vient du Sénat nous convient parfaitement. Il fait la part belle au contrôle par le Parlement, à l'équilibre entre les pouvoirs, à la territorialisation et il respecte le secret médical. À défaut d'être paré de toutes les vertus, il se conforme aux éléments fondateurs du pacte républicain : le contrôle de l'action du Gouvernement. C'est l'un des pouvoirs que nous tenons de la Constitution et l'on n'abuse jamais de l'article 24 de la Constitution pour contrôler et évaluer l'action du Gouvernement. Nous ne sommes pas là pour voter tout simplement la loi.
La semaine dernière, malgré une situation bloquée, le Gouvernement a refusé d'évoluer, ce que la majorité a traduit par son vote en CMP. Le désaccord, en effet, est profond entre la majorité du Sénat et celle de cette Assemblée mais rappelons-en les éléments. Le Conseil d'État et le Conseil constitutionnel, à juste titre, évoquent une proportionnalité des voies et moyens. Du reste, le Conseil d'État, que l'on sent mal à l'aise, a imposé au Gouvernement un rapport à la mi-février mais ce rapport ne sera pas obligatoirement suivi d'un débat, sauf à en croire un engagement verbal du Gouvernement. On sait ce que valent les promesses !
Nous ne sommes pas d'accord quant à la durée des moyens que la majorité s'apprête à confier au Gouvernement, dans un renoncement à notre rôle démocratique de contrôle. Nul ne conteste quelques évidences. C'est vrai, l'épidémie semble redémarrer, en particulier dans certains territoires ultramarins, comme la Guyane, la Polynésie française, la Nouvelle-Calédonie. Personne ne conteste les chiffres ni le fait que le Gouvernement doive disposer des moyens nécessaires mais vous nous proposez une clause de revoyure au milieu de l'été 2022 ! Selon certains de nos collègues, le Parlement aurait largement usé de son pouvoir de contrôle. Certes, mais le passé ne fait pas l'avenir ! Vous nous proposez d'enjamber l'élection présidentielle, les élections législatives, rompant ainsi l'équilibre déjà compliqué des pouvoirs dans une Vème République très rationnalisée. C'est un renoncement à l'exercice de nos pouvoirs, pour ne pas dire une forme d'abdication.
La question de la territorialisation, introduite en commission des Lois par un amendement voté à une voix, a été vidée de sa substance. Il est bien clair qu'on ne veut voir qu'une tête et le Gouvernement s'accommode très bien d'un seul régime, pour l'ensemble du territoire, sans tenir compte des critères d'hospitalisation ni des taux d'incidence. Le passe deviendra une sorte de passeport du quotidien, alors qu'il avait été dénoncé par la présidente de la commission des Lois en mai dernier. Le ministre Olivier Véran s'était engagé à ce que le passe ne dépasse pas l'été. Il est aujourd'hui un outil banalisé. Et que dire du secret médical, de cette brèche ouverte au profit des chefs d'établissement ! Tout est en place pour banaliser l'état d'urgence sanitaire. J'ai bien compris qu'il ne s'agissait que du cadre mais nous nous y habituons. La sortie de l'état d'urgence sanitaire se dérobe de mois en mois. Dans ces conditions, nous ne voterons pas le texte tel que vous nous le proposerez, monsieur le rapporteur. Nous serons là pour rappeler nos droits et nos devoirs et les pouvoirs constitutionnels du député, représentant du peuple et des citoyens français.