Ce projet de loi est attendu et marquera, c'est certain, l'histoire des collectivités locales.
Le 15 janvier 2019, le Président de la République lançait le grand débat. En sont ressorties des attentes fortes qui se sont imposées à nous : renforcement de l'action publique de proximité ; meilleure prise en compte des particularités locales ; assouplissement de l'organisation territoriale des politiques publiques. Les acteurs locaux aspiraient à être mieux compris et soutenus dans l'exercice de leur mission. Ils exprimaient une fatigue résultant des réformes institutionnelles incessantes, les traumatismes engendrés par les lois NOTRe et MAPTAM n'étant toujours pas résorbés pour certains d'entre eux. Avec la loi « engagement et proximité », nous avons redonné aux élus, en particulier aux premiers d'entre eux, les maires, la possibilité d'agir sur le quotidien des citoyens et de mettre en œuvre leurs engagements.
La revalorisation de l'action des élus ainsi actée, le Gouvernement a repris l'ouvrage pour nous proposer un texte utile et pragmatique. Celui-ci ne peut être appréhendé avec des œillères occultant tout ce qui a été fait sous cette législature pour conforter l'action des collectivités territoriales. En matière financière, je pense à la sanctuarisation de la DGF et aux efforts importants en faveur de l'investissement, avec la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), en période ordinaire, et la dotation de soutien à l'investissement (DSIL), en période extraordinaire, avec principalement le plan de relance.
S'agissant du principe de différenciation, nous avons commencé à lui donner une concrétisation en adoptant la réforme des procédures d'expérimentation, qui a constitué la première pierre de l'édifice. Sans entrer dans le détail des dispositions des articles 1er à 5 du présent projet de loi, je relèverai néanmoins l'affirmation du principe de différenciation, indispensable à la mise en œuvre d'une approche plus fine et plus intelligente des politiques publiques, pour répondre aux problématiques spécifiques des différents territoires. Qu'il s'agisse des mesures adaptées aux enjeux transfrontaliers, de l'expérimentation tant attendue d'un financement différencié du RSA en métropole ou du développement du pouvoir réglementaire des collectivités locales, nous jetons les bases d'une pratique qui devra inéluctablement être prolongée à l'avenir.
Je relève également un nouvel acte de décentralisation routière, avec les articles 6, 7 et 8 qui permettront notamment et principalement de transférer des routes du réseau national pour les confier à titre expérimental aux régions.
Concernant les gestionnaires de collèges et lycées, le Gouvernement a proposé un début de réponse aux difficultés constatées sur le terrain depuis des décennies, avec l'article 41 – malheureusement supprimé par le Sénat. Je serai donc favorable à son rétablissement sous la forme aménagée proposée par le Gouvernement.
Initialement composé de 84 articles, ce texte a quasiment triplé de volume à l'issue de son examen par le Sénat. Il en compte désormais 217. Nombre de ces ajouts s'avèrent pertinents et ont vocation à jeter les bases d'un travail conjoint entre nos deux chambres. Certains articles devront néanmoins être supprimés, mais je souhaite ici saluer les deux rapporteurs du Sénat, Françoise Gatel et Mathieu Darnaud qui, comme à leur habitude, ont œuvré pour les collectivités locales, avec la force de persuasion qui les caractérise. Nous les retrouverons, avec mes collègues Maina Sage et Élodie Jacquier-Laforge, en commission mixte paritaire pour, j'en suis persuadé, travailler conjointement, dans le respect de nos deux assemblées, au renforcement des collectivités dans le cadre novateur que nous souhaitons tous.
Avec mes deux collègues rapporteures de la commission des lois, mais aussi avec les rapporteurs des trois autres commissions saisies du texte, nous avons mené un travail approfondi et fructueux, fondé sur l'écoute et le pragmatisme. Je salue également la contribution de la délégation aux collectivités territoriales et de son président, Jean-René Cazeneuve. Je souhaite adresser mes remerciements à notre ministre des relations avec les collectivités locales, Jacqueline Gourault, à son cabinet, ainsi qu'à la direction générale des collectivités locales (DGCL) et à son directeur.
Madame la ministre, vous avez engagé le travail de concertation sur ce texte il y a maintenant près de deux ans. Depuis, vous n'avez pas dévié de votre cap, faisant preuve d'une constance et d'une détermination sans faille. Je sais que le souci d'écoute et de concertation a été permanent, jusqu'à la dernière minute sur certains sujets, notamment aux articles 6 et 7, et qu'il se poursuit encore sur d'autres – je pense à la métropole Aix-Marseille-Provence.
Je nous souhaite des débats de fond constructifs et sereins, qui aboutiront, j'en suis certain, à une loi équilibrée et juste, dans l'intérêt de toutes les collectivités territoriales de métropole, de Corse et d'outre-mer.