Intervention de Dimitri Houbron

Réunion du mercredi 24 novembre 2021 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDimitri Houbron :

Cette proposition de loi et cette proposition de loi organique, fort intéressantes, ont le mérite d'appeler notre attention sur une problématique ancienne, aujourd'hui renouvelée par de nouveaux enjeux relatifs au défi environnemental.

Quelles sont les limites au droit de propriété ? En droit français, la propriété et protégée en tant que droit fondamental. Les textes anciens et contemporains y accordent une grande importance, à commencer par la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789, dont l'article 2 fait de la propriété l'un des droits naturels et imprescriptibles de l'homme et l'article 17, un droit inviolable et sacré. Des limites encadrent néanmoins le droit de propriété. Elles sont posées par la Constitution, par de nombreuses lois, ainsi que par la jurisprudence ; en témoigne le célèbre arrêt Clément-Bayard, dans lequel la Cour de cassation considère comme un abus de droit le fait d'utiliser l'espace de sa propriété dans l'unique intention de nuire à son voisin.

Je pense qu'en lisant les intitulés de ces propositions de loi, nous avons tous à l'esprit les travaux de l'éminente juriste Judith Rochfeld sur la conciliation entre les communs et les enjeux climatiques – je regrette d'ailleurs que nous n'ayons pu l'auditionner.

La proposition de loi a pour objet de donner une définition claire de ce que sont les biens communs, la proposition de loi organique confiant, quant à elle, au CESE le rôle d'attribuer ce statut. Des difficultés apparaissent rapidement à la lecture de ces textes. D'une part, la définition du bien commun est extrêmement large : ce statut concernerait des biens matériels ou immatériels, quels que soient le régime de propriété et les droits fondamentaux qui s'y rattachent. La rédaction de l'article unique porte donc en elle son incontournable inconstitutionnalité. Comment décemment adopter un texte dont l'une des dispositions prévoit de ne pas respecter nos droits fondamentaux ? Je distingue derrière cela l'ombre d'une volonté excessive.

D'autre part, qu'en est-il du statut juridique attenant à cette définition ? Quelles conséquences juridiques aurait une telle catégorisation juridique ? Des expropriations seraient-elles envisageables ? Si oui, dans quel cadre juridique et avec quelles garanties ?

En dépit de la pertinence des questions soulevées par ces propositions de loi, le groupe Agir ensemble ne pourra pas voter en leur faveur.

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