Intervention de Alain Tourret

Réunion du mercredi 15 décembre 2021 à 10h05
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Tourret :

J'ai été maire pendant trente-six ans, conseiller régional ou vice-président de région pendant vingt ans et député pendant quinze ans, tout cela en une seule vie. Cela m'a appris à prendre un peu de recul et à écouter les gens, afin de comprendre ce qui est le plus agréable et le plus efficace pour eux.

Les élus sont aimés. Il arrive de recevoir des menaces, c'est vrai, mais la population aime son maire, se sent proche de lui, et c'est très important. C'est pourquoi je regrette que certaines compétences aient été transférées aux préfets, au détriment des maires. On a supprimé la réserve parlementaire, mais pourquoi revient-il aux préfets de décider de l'attribution des aides du FDVA ? Pour gérer ma réserve parlementaire, j'avais constitué une commission composée de dix conseillers généraux ; elle était paritaire et représentait tous les secteurs de ma circonscription. J'adressais à cette commission tous les dossiers qui me parvenaient et c'est elle qui prenait des décisions, que j'ai toujours suivies. J'ai été maire de ma commune pendant trente-six ans et, pendant trente-six ans, elle n'a jamais eu droit à la réserve parlementaire, parce que je me l'étais interdit. Ce système faisait l'unanimité et les gens n'ont pas compris qu'on le supprime.

La réserve parlementaire a permis de soutenir des projets très intéressants. Dans le conflit israélo-palestinien, une initiative extraordinaire consistait à accueillir les enfants palestiniens malades du cœur dans l'un des grands hôpitaux d'Israël. Il fallait 7 000 euros pour sauver un enfant. Ma réserve parlementaire m'a permis de sauver des enfants palestiniens, avec l'aide des médecins israéliens. Je peux vous assurer que c'est l'une des choses qui m'a fait le plus chaud au cœur.

En ce qui concerne les frais de mandat, je crois que nous nous sommes trompés. Pour ma part, je suis partisan d'une augmentation de la rémunération globale des députés, avec une fiscalisation à 100 % : le député ferait ce qu'il veut de cette somme, et tout serait très simple. On supprimerait ainsi l'avance de frais de mandat. C'est d'ailleurs ce que je me suis appliqué à moi-même : je n'ai pas touché à l'AFM depuis plus de trois ans – près de 300 000 euros vont ainsi être rendus à l'État.

C'est une solution qui peut être rejetée par certains, mais qui est logique. Je serais favorable à l'organisation d'une vaste convention qui associerait les parlementaires et le personnel de nos deux assemblées : elle aurait pour but de fixer une rémunération qui serait à peu près la même pour les députés et les administrateurs. Il y aurait ainsi une référence commune et on ne pourrait plus se faire attaquer.

Le contrôle des dépenses, tel qu'il a été introduit, a quelque chose de tatillon. Actuellement, on est obligé de donner des justificatifs sur le montant de nos repas. J'ai été invité avec un ami dans un bon restaurant, près d'ici ; on m'a donné un papier attestant que la note ne dépassait pas 150 euros. Il est tout de même curieux d'en arriver là. La solution que je propose avait d'abord été retenue par nos responsables politiques, puis ils l'ont rejetée, par peur que l'augmentation de la rémunération de base des députés ne renforce l'antiparlementarisme.

Il faut renforcer le pouvoir législatif ; y renoncer, c'est, de fait, renforcer l'exécutif. Il n'y a qu'à voir la manière dont le pouvoir des préfets s'est accru depuis quatre ans, surtout depuis le début de la crise sanitaire, qui leur a donné les pleins pouvoirs. La démocratie ne repose plus que sur un pied, l'exécutif.

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