Intervention de Dimitri Houbron

Réunion du mercredi 5 janvier 2022 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDimitri Houbron :

Je pensais qu'il était inutile de rappeler les raisons pour lesquelles nous avons été amenés à prendre des décisions douloureuses depuis presque deux ans, des décisions acceptées par nos concitoyens, bien conscients qu'aucun pays n'échapperait à cette pandémie, qu'importent les dirigeants. Et pourtant, nous voilà réunis pour examiner une proposition de loi qui vise tout simplement à supprimer, à défaut du virus, les règles sanitaires !

L'exposé des motifs met en lumière les fondements erronés de cette proposition de loi et ne fait que révéler les positions du groupe FI. La covid-19 ? Une aubaine pour le pouvoir macronien, qui l'utiliserait pour museler le pays et s'assurer une réélection. Le passe sanitaire ? Une mesure inefficace – comme toutes les autres d'ailleurs – prise dans le secret du Conseil de défense.

Vous expliquez que, grâce au régime de l'état d'urgence sanitaire, l'exécutif aura tous les pouvoirs pour bâillonner le débat démocratique à l'aube des élections présidentielle et législatives. C'est oublier que nous avons connu, pendant la pandémie, trois scrutins électoraux dont les résultats, pardonnez l'euphémisme, n'ont pas été très favorables à la majorité. Mais il a été aussi reproché au Gouvernement d'avoir maintenu ces élections, comme il lui a été reproché d'avoir pensé à les reporter de quelques semaines.

Aucune mesure sanitaire ne peut entraver l'expression de la démocratie. D'ailleurs, La France insoumise pourra prochainement en témoigner car, en vertu de notre Constitution, et comme toutes les formations politiques, elle ne sera pas concernée par les jauges établies pour les événements, en intérieur et en extérieur.

Vous déplorez le fait que le Parlement ne pourra pas débattre avant le mois de juillet en raison des élections, mais vous regrettez aussi la « continuité d'une valse de textes de loi votés par la majorité présidentielle depuis le 23 mars 2020 et leurs décrets d'application. » Parfois nous ne votons pas assez, parfois nous votons trop. Il faut choisir !

Dans le même paragraphe, vous indiquez que l'état d'urgence sanitaire a été « désactivé, réactivé, prolongé, puis re‑prolongé, selon le bon vouloir du Gouvernement, en particulier dans les territoires d'outre‑mer. » Le Gouvernement est responsable de ne pas connaître à l'avance l'évolution d'une épidémie mondiale, de ne pas prédire l'apparition des variants, de ne pas contrôler ses formes, dans des pays étrangers comme le Brésil, l'Afrique du Sud ou encore l'Inde, qui affectent les territoires ultramarins.

S'agissant du Conseil de défense, vous expliquez que « tout ce qui s'y dit est couvert par le secret‑défense. Ainsi, les participants s'exposent à des poursuites pénales s'ils révèlent tout ou partie des discussions ou des propos tenus par Emmanuel Macron. » Cette phrase, qui laisserait croire au retour des lettres de cachet, dissimule le fait que la France est le seul pays au monde où des perquisitions ont été effectuées au domicile d'un Premier ministre et de deux ministres à la suite de plaintes. C'est bien la preuve que rien n'est bâillonné. Il est irresponsable de laisser croire à l'existence d'un clan autocratique, enfermé dans un bureau, qui dicterait le quotidien de 67 millions de personnes.

S'agissant de la prétendue inefficacité du passe sanitaire, je relève que les pays qui s'y étaient refusés ont dû revoir leur copie et prendre des décisions beaucoup plus strictes. En Allemagne, le passe sanitaire est désormais obligatoire dans les entreprises et les transports ; les Néerlandais ont passé les fêtes de fin d'année confinés et le resteront jusqu'au 14 janvier ; l'Espagne a réinstauré l'obligation du port du masque à l'extérieur.

Vous proposez de rendre à nouveau les tests gratuits en oubliant que, depuis le 15 octobre, ils ne sont payants que pour les majeurs non-vaccinés. Ceux-ci peuvent bénéficier de la gratuité si leur état de santé le justifie, s'ils sont cas contact, lorsqu'ils présentent une prescription médicale ou qu'ils ont besoin d'un test négatif pour recevoir des soins en établissement de santé. Loin d'être froide et inhumaine, la règle est juste et proportionnée.

Bien que vous ayez concédé que le vaccin évite les formes graves de la maladie, il est permis de croire que vous n'en ferez jamais une arme contre le virus.

Nous voterons contre cette proposition de loi visant à abroger tout l'arsenal juridique relatif à la crise sanitaire.

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