Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Réunion du mercredi 5 janvier 2022 à 9h30

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • révocation
  • électeur

La réunion

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La réunion débute à 9 heures 30.

Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet, présidente.

La Commission examine la proposition de loi constitutionnelle visant à instaurer un droit de révocation des élus (n°4751) (M. Alexis Corbière, rapporteur).

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Mes chers collègues, sans doute la proposition de loi constitutionnelle que je m'apprête à vous présenter ne suscite-t-elle guère votre adhésion, mais je vous invite à l'examiner sans a priori. Ayant pour origine un constat simple, celui de la grave détérioration de notre vie civique, qui se manifeste de la façon la plus spectaculaire par une abstention très forte, elle traduit notre volonté d'inciter les citoyens à retourner aux urnes en leur octroyant des droits nouveaux de nature à modifier les rapports qu'ils entretiennent avec leurs représentants.

Cette proposition de loi est simple, forte et conforme aux fondements de notre tradition républicaine.

Je veux insister tout d'abord sur l'abstention, dont on dit parfois qu'elle est une grève civique. De fait, lors des derniers rendez-vous électoraux, le peuple, souverain en république, ne s'est pas présenté. Ce phénomène ne doit pas rester dans l'angle mort de nos débats : nous sommes face à une urgence démocratique. Nous estimons, pour notre part, que si beaucoup ne voient plus l'intérêt d'aller voter, c'est parce que les institutions de la Ve République concentrent l'essentiel des pouvoirs entre les mains du Président de la République, au détriment notamment du Parlement. Aussi voulons-nous que le citoyen dispose de droits non seulement le jour du scrutin, mais aussi entre deux rendez-vous électoraux. Tel est l'objet de notre proposition de loi : le droit de révoquer les élus, nouveau droit démocratique, susciterait l'implication des citoyens, des électeurs. Il s'agit ici de remédier concrètement à une situation politique identifiée.

Bien entendu, pour mon groupe, le droit de révocation s'inscrit dans le projet plus général de modifier radicalement nos institutions. En effet, si nous étions aux responsabilités, nous convoquerions une assemblée constituante afin que le peuple désigne des représentants chargés de débattre, puis d'adopter de nouvelles institutions, qui formeraient la VIe République. Toutefois, il nous a semblé pertinent de profiter de cette journée réservée à notre groupe pour débattre, voire adopter dès à présent le droit de révocation, qui nous semble compatible avec les institutions actuelles. Un tel droit modifierait profondément la nature des relations entre le mandant et le mandataire, entre le peuple et ses représentants, puisqu'il permettrait à nos concitoyens, dans des conditions qui restent à préciser dans une loi organique, de rappeler un élu s'ils le jugent pertinent.

Que les choses soient claires : si cette procédure ne fait pas partie de notre droit constitutionnel, son instauration ne marquerait pas une rupture avec notre histoire. Déjà sous l'Ancien régime, le système dit des commis de confiance permettait à ceux qui désignaient leurs représentants au sein des assemblées communales de les remplacer. Aux termes de l'article 15 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, « la société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration ». Quant au projet d'article V de la Constitution adoptée en 1793, il proclame sans ambiguïté que « la souveraineté réside essentiellement dans le peuple français ; tous les fonctionnaires publics sont ses mandataires : il peut les révoquer de la même manière qu'il les a choisis ». Enfin – chacun appréciera cette référence comme il l'entend, mais elle appartient à notre patrimoine républicain et politique –, en 1871, lors de la Commune de Paris, il fut proclamé que « les membres de l'assemblée municipale, sans cesse contrôlés, surveillés, discutés par l'opinion, sont révocables, comptables et responsables ». Le droit de révocation est donc une idée ancienne dans le débat démocratique français ; il a été, sinon mis en application, du moins proclamé dans des textes importants.

Aussi notre proposition de loi constitutionnelle vise-t-elle à mettre en œuvre le référendum révocatoire. Il s'agit d'offrir la possibilité aux électeurs, si un certain nombre d'entre eux en font la demande, de révoquer un élu, cette révocation ne pouvant intervenir qu'à l'issue du premier tiers de son mandat et avant la dernière année de celui-ci.

J'insiste sur le fait que de nombreux pays disposent déjà, dans leur attirail législatif et démocratique, de dispositions s'apparentant au droit de révocation. Ainsi, aux États-Unis, la procédure dite de recall existe dans vingt-huit États ; elle a rang constitutionnel dans seize d'entre eux et rang législatif dans les douze autres. À titre d'exemple, Arnold Schwarzenegger a été élu gouverneur de Californie à la suite de la révocation du gouverneur précédent. Une procédure analogue existe dans certains pays d'Amérique latine, tels que la Bolivie ou l'Équateur, ainsi que dans certains pays d'Europe, notamment en Allemagne, au Royaume-Uni ou en Autriche, selon des modalités variées qui ne sont pas exactement conformes à la proposition que je vous présente. En tout cas, ces exemples étrangers attestent de la faisabilité d'une mesure jusqu'à présent ignorée par notre droit constitutionnel.

Nombre de nos concitoyens expriment le sentiment que nous ne nous adressons à eux que lors des échéances électorales et ont trop souvent l'impression que les décisions prises ne sont pas conformes à leurs attentes. En créant un lien plus vivant, plus dynamique entre représentés et représentants, ce droit nouveau accordé à nos concitoyens favoriserait une démocratie plus active, en leur permettant d'exercer également leurs droits civiques entre deux échéances électorales. Serait ainsi créé un cercle vertueux : le souverain pourrait garder le contrôle sur ceux qui le représentent.

Il ne s'agit pas d'instituer un système chaotique d'élections permanentes. Ainsi, le droit de révocation pourrait ne s'exercer qu'une seule fois au cours d'un mandat et le seuil requis pour l'organisation de la nouvelle consultation pourrait être suffisamment élevé pour empêcher qu'elle ne soit déclenchée par la seule opposition ou par un noyau d'irréductibles. Si l'on fixait ce seuil à 10 % du corps électoral, par exemple, il ne pourrait être atteint qu'à la suite d'une mobilisation certaine, provoquée par un trouble réel des électeurs. Je vous rappelle que beaucoup d'entre nous n'ont été élus que par 15 % à 20 % des électeurs inscrits...

Enfin, nous proposons que le droit de révoquer les élus soit applicable à tous les mandats, en particulier au mandat présidentiel. De fait, sous la Ve République, le Président de la République n'est pas responsable durant son mandat : il n'a de comptes à rendre à personne – c'est d'ailleurs la raison pour laquelle il ne peut venir devant l'Assemblée nationale. Or il me semble que si le corps électoral savait qu'il peut, le cas échéant, convoquer une nouvelle élection, cela apaiserait la situation. C'est en effet la confirmation d'un lien direct fort entre représentés et représentants qui apaisera notre vie démocratique et créera les conditions d'une plus forte participation aux scrutins. Sans quoi, nous risquons de laisser s'installer un système de basse intensité démocratique dans lequel les représentants seront élus par un petit nombre d'électeurs mobilisés et où se renforcera le sentiment populaire que les décisions ne sont pas prises au nom des citoyens.

Je vous invite donc à réfléchir à notre proposition. Comprenons-le bien, les tensions sont importantes : nous traversons une véritable crise démocratique. J'y insiste, car nul d'entre nous ne peut demeurer insensible au fait que, lors des derniers scrutins, régionaux et municipaux, les deux tiers de nos concitoyens ne sont pas venus voter – les deux tiers ! En république, le souverain, c'est le peuple. Lorsqu'il ne se présente pas aux urnes, nous ne pouvons pas nous contenter de dire que c'est sa faute, et en rester là. Nos institutions exacerbent la distance entre les représentants et les représentés ; il faut accorder à ces derniers des droits nouveaux.

Parmi les différentes mobilisations sociales qui sont intervenues au cours du quinquennat, celle des gilets jaunes a d'abord été suscitée par une colère fiscale, puis elle a exprimé des exigences sociales, mais aussi démocratiques ; je pense notamment à l'instauration du référendum d'initiative citoyenne. La recherche d'une démocratie plus active, offrant des droits nouveaux aux citoyens, me semble être au cœur des préoccupations de la majorité de nos concitoyens. Du reste, nous avons réalisé une étude d'opinion à l'occasion de cette niche parlementaire : la proposition de créer un droit de révocation recueille l'adhésion de 75 % des personnes interrogées ! L'idée circule, donc ; il s'agit de l'organiser de manière sérieuse. En république, nous devons être attachés à l'idée fondamentale que le souverain, c'est le peuple : c'est lui qui décide et, à ce titre, il doit pouvoir retirer le mandat qu'il a accordé.

Enfin, la révocation est possible dans le mouvement associatif, le mouvement sportif et même dans le monde de l'entreprise, auquel vous êtes, pour certains d'entre vous, particulièrement attachés. Il est en effet possible à celles et ceux qui ont confié des responsabilités à une personne de lui retirer son mandat à l'occasion d'un conseil d'administration ou de l'assemblée générale des membres de l'association. Pourquoi cela ne serait-il pas possible dans notre vie démocratique ?

Pour conclure, le droit de révoquer les élus nous semble renouer avec la promesse républicaine : le souverain doit pouvoir conserver ses droits à tout moment. Il faut l'entendre et lui donner la possibilité de rappeler ceux qu'il a désignés pour nommer d'autres représentants.

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Nous sommes appelés à débattre d'un texte qui a pour ambition de remédier à la crise démocratique que traverse notre pays. À l'évidence, cette crise existe, et nous nous devons de trouver des solutions. Mais l'instauration d'un référendum révocatoire n'en est pas une. Du reste, monsieur le rapporteur, cette proposition, que votre mouvement politique a souvent défendue, n'a jamais été plébiscitée, comme en témoignent les résultats des élections – les sondages ne suffisent pas, en la matière.

Nous ne voterons donc pas en faveur de ce texte, car il est juridiquement inopérant, politiquement irresponsable et philosophiquement contradictoire.

Il est juridiquement inopérant car, lorsque le dogmatisme rencontre le populisme, il passe bien souvent à côté de la règle de droit. Or, voyez-vous, en matière constitutionnelle, c'est problématique. Vous souhaitez constitutionnaliser un principe de révocabilité applicable et opposable à l'ensemble des titulaires d'un mandat électif. Soit, mais donnez-vous les moyens de votre politique : précisez, à l'appui des articles 11 et 68 de la Constitution, le champ matériel de la révocation ; abrogez, en toute logique, la prohibition du mandat impératif, proscrit à l'article 27 ; donnez-vous au moins la peine d'encadrer le mécanisme – à moins que votre inconscient ne soit bonapartiste et rêve de le détourner à des fins plébiscitaires ; enfin, départagez ce qui est révocable et ce qui ne l'est pas. Mais encore eût-il fallu, pour cela, que vous déposiez des amendements, organisiez des auditions...

En bref, monsieur le rapporteur, vous pensez ouvrir le champ des possibles, mais vous fermez la porte au réel, car votre texte est inapplicable.

Il est également politiquement irresponsable. Un illustre professeur mettait en garde : en matière d'ingénierie constitutionnelle, il ne faut pas s'inspirer de l'archer, car la flèche peut manquer la cible. Votre cible est le lien entre gouvernants et gouvernés, et vous la manquez. Empiriquement, ni le recall américain, qui a bombardé Arnold Schwarzenegger gouverneur de Californie, ni le référendum vénézuélien, dont a pu tirer profit Hugo Chavez en 2004, n'ont démontré la vertu du dispositif proposé.

Par ailleurs, pour écrire une bonne Constitution, il faut avoir un esprit de système, autrement dit, être, d'une certaine manière, un bon joueur de billard. Or, sur les bandes de ce billard, votre droit de révoquer les élus se cogne : au mieux, la révocation possible de tous nuira à l'engagement de chacun, mènera à l'institutionnalisation de la défiance et à la polarisation extrême des antagonismes ; au pire, elle conduira à une contestation systématique des résultats des urnes par les mauvais perdants et à une action politique « court-termiste », les élus cherchant à s'adapter au risque d'une révocation pouvant intervenir à tout moment. Voilà qui est peu compatible avec la planification écologique de type mélenchoniste – je dis cela, je ne dis rien !

Enfin, et surtout, ce texte est paradoxal dans ces termes. J'y vois en effet une quadruple négation.

Négation, d'abord, du député en tant qu'élu de la nation, puisque vous renvoyez son mandat aux intérêts catégoriels et géographiques d'une circonscription.

Négation, ensuite, de la souveraineté nationale, par essence indivisible, qui appartient au peuple, lequel l'exerce par ses représentants et par la voie du référendum, sans pouvoir être fragmentée dans l'expression de sa volonté dès lors qu'« aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s'en attribuer l'exercice ».

Négation, par conséquent, du projet national, car vous faites la courte échelle à des coalitions du mécontentement. Voici votre projet : « Le citoyen révoque » ! Son rôle est purement négatif. C'est ainsi que la révocation, loin d'éclairer la volonté générale, l'obscurcit, compte tenu de raisons multiples et variées qui trouvent ainsi un lit commun pour s'exprimer sans convergence possible.

Négation, enfin, des corps intermédiaires, écartés du lien direct et absolu qui serait établi entre représentants et représentés.

Au fond, les termes du problème sont mal posés. Ce qui importe, en effet, c'est moins la confiance dans tel ou tel mandataire que la confiance dans les institutions politiques, que notre majorité s'est évertuée à rétablir depuis 2017, en assainissant l'infrastructure de la vie politique. Nous avons ainsi redonné confiance en interdisant aux parlementaires d'exercer l'activité de représentant d'intérêts, garanti la transparence en imposant à tout candidat à l'élection présidentielle de fournir une déclaration d'intérêts et d'activités en sus de la déclaration de patrimoine, favorisé le pluralisme des idées en renforçant le contrôle des comptes des partis politiques, conforté la démocratie communale – cette petite république dans la grande – grâce au droit à la formation des élus, à une meilleure conciliation entre vie professionnelle et familiale et engagement politique et à la revalorisation historique des indemnités de fonction des élus locaux. Nous avons, enfin, valorisé l'engagement de la jeunesse, en abaissant, par exemple, le seuil requis pour la saisine citoyenne du Conseil économique, social et environnemental à 150 000 pétitionnaires âgés de 16 ans et plus.

Mes chers collègues, élever cette démocratie de la gâchette au rang constitutionnel est, à l'évidence, une fausse promesse de revitalisation, et les élus qui l'adopteraient se rendraient coupables d'un mensonge de plus. Aussi voterons-nous contre cette proposition de loi constitutionnelle.

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Dans une démocratie libérale comme la nôtre, le pouvoir appartient au peuple, qui l'exerce de manière libre mais aussi responsable, en assumant ses choix. Lorsqu'on élit un député pour cinq ans, on s'informe avant de prendre la décision de lui confier ce mandat.

Celui-ci n'est pas impératif ; il est bien représentatif – c'est important. Toujours, au cours de l'histoire, face à des événements imprévus, les représentants du peuple ont pris librement les décisions qui leur semblaient nécessaires et utiles. Par ailleurs, les mandats électoraux sont, en France, de cinq ou six ans : c'est une durée tout à fait raisonnable.

Le moment de l'élection est celui où nous sommes supposés construire un sens partagé, un sens collectif. Or, avec votre proposition de loi, monsieur le rapporteur, on risque de s'éloigner progressivement de cette ambition pour se rapprocher d'un modèle dans lequel prévaut la volonté de choisir un représentant qui répond individuellement à chaque préoccupation. Même si, en tant que députés, nous ne sommes élus que d'une circonscription, ensemble, nous représentons la nation. Si, demain, notre élection pouvait être remise en cause par une révocation, nous nous retrouverions dans une logique de représentation d'intérêts catégoriels, intérêts qui peuvent varier au fil du temps, en fonction des circonstances, qui ne correspondront jamais à la somme des intérêts individuels de chacun des agents électoraux et qui se conjugueront de façon différente selon le moment.

Nous sommes particulièrement attachés à la Ve République. Celle-ci a favorisé la stabilité de nos institutions et des choix politiques, permettant à notre pays de se redresser après la deuxième guerre mondiale et d'affronter les crises et les difficultés. Ainsi, en 2008, Nicolas Sarkozy a pu gérer, dans la stabilité et avec force, parce qu'il disposait de temps, une crise financière majeure que jamais notre pays n'avait connue depuis la dernière guerre.

Bien entendu, il faut des bornes à ces mandats. Ces bornes existent. Ainsi, même si la procédure n'a jamais été utilisée, le Président de la République peut être révoqué par l'Assemblée nationale. De même, le Conseil constitutionnel peut faire appliquer un certain nombre de décisions de justice et révoquer des élus. Quant au Gouvernement, il peut décider de révoquer des maires ; cela est arrivé à plusieurs reprises, notamment au cours de ce quinquennat, lorsque l'intérêt général était dangereusement mis en cause.

Nous serons toujours opposés aux propositions – y compris à certaines de celles relatives au vote blanc – qui tendent à déresponsabiliser l'électeur. En effet, la démocratie fonctionne parce que l'électeur est responsable de ses choix et conscient de leurs conséquences, et parce qu'il se projette dans le temps en prenant des décisions sérieuses.

Nombre de nos concitoyens estiment déjà, alors que les élections ont lieu tous les cinq ou six ans, que les politiques sont en campagne permanente. Il est vrai que, plus que jamais, nous avons eu droit, durant ce quinquennat, à cinq ans de propagande et de coups politiciens, sans qu'à aucun moment un véritable travail de fond ait été engagé. Si, en outre, la révocation est possible, nous n'aurons jamais le temps de travailler en faveur de l'intérêt général. Or, ce que nous souhaitons avant toute chose, c'est nous occuper du quotidien de nos concitoyens.

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Monsieur le rapporteur, vous avez évoqué, et c'est un élément intéressant, la désaffection française – mais elle est commune à une grande partie des démocraties libérales – pour la question électorale, la perte de sens démocratique. Il convient de regarder cette réalité en face, car les chiffres sont alarmants. Selon le baromètre du Centre de recherches politiques de Sciences Po, le CEVIPOF, 55 % des Français, soit plus d'un sur deux, estiment que la démocratie fonctionne mal ; c'est considérable ! Autrement dit, l'idée d'une vie en commun régie par des institutions démocratiques n'est pas effective. Plus alarmant encore, pour 77 % de nos concitoyens, la politique évoque des notions négatives telles que la méfiance ou le dégoût.

Il nous faut trouver des solutions à cette crise profonde. C'est pourquoi, depuis le début de la législature, le groupe MODEM travaille sans relâche à l'approfondissement de la participation citoyenne, qui est, selon nous, la condition de la revitalisation de notre démocratie. Nous avons défendu des propositions fortes en ce sens, comme la reconnaissance du vote blanc ou l'instauration de la proportionnelle, et nous continuerons de le faire. Le rapport de la mission d'information créée à la suite des dernières élections régionales pour identifier les ressorts de l'abstention et les mesures permettant de renforcer la participation électorale, rapport qui a été publié le mois dernier, comporte également des propositions intéressantes.

De fait, il convient d'étudier toutes les possibilités techniques de favoriser la participation citoyenne. Cependant, votre texte – reprenant en partie l'article 4 de la proposition de loi tendant à instaurer un référendum d'initiative citoyenne, que vous aviez défendue ici même en janvier 2019 – ne me semble apporter aucune réponse aux enjeux que nous avons évoqués.

Il est, certes, intéressant de réfléchir à ces questions, mais votre proposition de loi est un trompe-l'œil : elle vise à endormir les citoyens sans apporter aucune amélioration concrète à la démocratie française. De fait, les termes employés manquent de clarté ; or, comme M. Gouffier-Cha l'a souligné, lorsque l'on touche à la Constitution, il faut être très précis. Ainsi, la formule « se tiendrait à la demande de toute initiative soutenue par un pourcentage défini des électeurs » me semble floue. La référence à « un pourcentage défini d'électeurs » n'est, à l'évidence, pas à la hauteur d'un texte constitutionnel. Souhaitez-vous maintenir le seuil de 5 % que vous proposiez en 2019 ? Il aurait été utile de nous soumettre la proposition de loi organique dont il est question dans votre texte.

Surtout, celui-ci conduirait à rendre l'élu entièrement dépendant, tout au long de son mandat, des moindres mouvements de l'opinion publique. Cette dernière est, certes, importante ; nous devons l'écouter. Mais ce n'est pas ainsi que l'on fait de la politique. Certaines décisions impopulaires sont parfois très difficiles à prendre, comme l'illustre l'actualité. Pourtant, elles doivent être prises, dans un esprit de responsabilité citoyenne, au titre du mandat d'intérêt général qui nous a été confié.

Ce n'est pas cet outil qui nous permettra de progresser. Nous devons améliorer la démocratie représentative, qui est une force, et les institutions de la Ve République, qui sont stables et permettent une gouvernance puissante, en renforçant les processus de démocratie participative. Nous l'avons fait en partie avec la réforme du Conseil économique, social et environnemental, mais il faudra aller plus loin. Cette articulation entre vie civile, vie civique et vie politique mérite d'être améliorée ; c'est sans doute ainsi que nous réglerons l'importante question que vous soulevez, celle de l'interstice électoral. Comment le citoyen s'exprime-t-il et participe-t-il à la vie citoyenne entre deux élections ? Tel est l'enjeu de notre démocratie moderne. La solution ne consiste certainement pas à permettre la révocation des élus au gré des crises qui peuvent survenir et des décisions, parfois impopulaires, qu'ils doivent prendre.

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Monsieur le rapporteur, je vous remercie de nous soumettre cette proposition de loi constitutionnelle. La réflexion sur les institutions est essentielle à un moment où la démocratie représentative est affaiblie et le système politique quasiment à bout de souffle. Toutefois, le remède que vous préconisez pourrait être, me semble-t-il, contre-productif.

Votre texte conduirait, en fait, à instaurer le mandat interactif, ou impératif ; c'est l'une des critiques les plus fortes que l'on puisse lui adresser. L'exercice du pouvoir n'est jamais aisé, en particulier en ce moment, où l'on nous soumet des textes sur lesquels nous devons prendre des positions qui ne sont pas faciles. Ce que les électeurs attendent de nous, c'est que nous fassions des choix, souvent difficiles, et que nous expliquions les arguments sur lesquels ils sont fondés.

Dans le système que vous préconisez, l'élu risquerait d'être dans la main des électeurs. Certes, il doit leur rendre des comptes au cours de son mandat, et de nombreux élus l'ont compris, qui publient des comptes rendus de mandat réguliers ou participent à des discussions et des réunions. Est-ce suffisant ? Sans doute pas : souvent, la forme n'est pas satisfaisante et l'interrogation n'est pas toujours partagée avec les électeurs. Pour autant, nous ne sommes pas favorables à un mandat interactif qui, en outre, accélérerait le temps. Or un mandat de cinq ans, c'est court – on s'étonne d'ailleurs que celui des sénateurs soit de six ans, mais c'est ainsi : le Sénat a toujours su se mettre à l'abri…

Néanmoins, votre constat, sévère, doit nous inciter à agir. Ainsi, le rôle local du député devrait être défini dans la Constitution : la mission de contrôle qui nous incombe – trop souvent caricaturée lors des fameuses semaines de contrôle, qui n'ont guère d'utilité malgré la qualité des intervenants – s'en trouverait renforcée. Qu'il soit élu à la proportionnelle ou pas, le député doit rendre des comptes et contrôler l'application des lois qu'il a votées ainsi que leurs effets dans les territoires. Une telle évolution implique que le pouvoir exécutif accepte d'avoir des interactions avec les parlementaires, qui pourraient se rendre dans les administrations et enquêter sur l'application des lois. Je sais, pour avoir tenté de le faire, que ce n'est pas simple : j'ai ressenti une forte résistance. L'approche constitutionnelle a donc toute son importance en la matière.

D'autres textes auraient été utiles, notamment pour lutter contre l'abstentionnisme, qui est l'un des problèmes de la démocratie représentative. Ainsi, nous avions proposé d'autoriser le vote par voie postale pour l'élection présidentielle : en Allemagne, cette procédure a fait progresser la participation de dix points ! Mais cette mesure a été rejetée, au prétexte, assez effrayant, que nous n'aurions pas la capacité d'endiguer la fraude.

Nous devrions par ailleurs accroître les pouvoirs du Défenseur des droits. Tout ce qui favorise les contre-pouvoirs est utile, tout ce qui affermit le pouvoir du Parlement – car c'est là que le peuple s'exprime – doit être préservé. Il faut renforcer la démocratie parlementaire ; je ne crois pas que ce soit en instaurant le droit de révocation que nous y parviendrons. Le citoyen assume la responsabilité de son vote. Quant à l'élu, s'il se comporte mal, il existe des voies judiciaires pour le rappeler à l'ordre.

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L'objectif de la proposition de loi – renforcer la confiance des citoyens dans la vie politique – est louable, et partagé par l'ensemble des sensibilités politiques représentées au sein de notre commission.

Dans un rapport sur la révocation populaire de maires et d'élus locaux publié en juin 2019, la Commission européenne pour la démocratie par le droit, plus connue sous le nom de Commission de Venise, recense les nombreux bienfaits de l'instauration d'un système de révocation, tels que le comblement du déficit démocratique créé par la fréquente baisse du taux de participation aux élections ou la prévention de l'ingérence d'influences ou d'intérêts indus dans les affaires de la collectivité. Mais elle note que la révocation populaire « présente aussi des risques considérables. [...] elle peut être détournée (par les partis dans leur lutte contre leurs rivaux politiques, mais aussi par des élus sortants cherchant à peser artificiellement sur la situation électorale) et devenir une arme politique. Elle peut aussi être distordue par des groupes d'intérêts ou de pression cherchant à déstabiliser la gouvernance et à lui faire perdre son efficacité en empêchant des responsables de prendre certaines mesures ou décisions par peur de la révocation. Cela rend les charges publiques moins attrayantes, et peut induire des comportements irresponsables. »

Compte tenu des enjeux actuels – je pense notamment à la crise environnementale –, il est essentiel que les élus ne soient pas en campagne permanente et qu'ils osent entreprendre des actions qui ne porteraient leurs fruits qu'à long terme. Or la pression permanente que ferait peser la menace de la révocation anesthésierait l'action publique, et même le courage des élus, alors que nous allons être amenés à prendre des décisions de plus en plus difficiles.

Dans l'exposé des motifs de votre proposition de loi, monsieur le rapporteur, vous citez l'exemple des vingt-huit États fédérés américains qui prévoient une procédure dite de recall. Mais, vous l'admettrez, l'existence cette procédure de révocation s'explique par une histoire et une culture profondément différentes de la nôtre – Tocqueville le dirait mieux que nous. Ainsi, elle permet de révoquer, dans certains États, des fonctionnaires et des juges, dont l'élection participe de la conception de la démocratie américaine. En d'autres termes, il ne semble pas judicieux d'insérer dans notre droit quelques-unes des briques d'un dispositif démocratique étranger sans prendre celui-ci en compte dans sa globalité. Encore une fois, dans ces États américains, la révocation n'a de sens que si elle est également applicable à des fonctionnaires et à des juges.

Par ailleurs, l'article 27 de notre Constitution proclame que « tout mandat impératif est nul ». Concrètement, une élection n'est pas un contrat comportant une obligation de résultat. Du fait de l'héritage démocratique de notre pays, notre mandat ne se traduit pas par un contrat écrit : nos promesses de campagne ne sont pas des devis, notre profession de foi n'est pas une facture, notre bulletin de vote n'est pas un chèque de banque, notre élection ne procède pas d'un appel d'offres. C'est bien plus abstrait, et nous le savons.

J'ajoute que la possibilité de révoquer des maires au cours de leur mandat existe. Cette procédure est méconnue du grand public, car elle ne fut activée par le Conseil des ministres qu'à six reprises depuis 1958. Les maires concernés furent révoqués à la suite d'une condamnation en justice, notamment pour avoir tenu des propos outranciers lors de la cérémonie de commémoration de l'Armistice du 11 novembre, pour attentat à la pudeur sur des mineurs de moins de 15 ans, pour détournement de fonds…

Même si la proposition de loi constitutionnelle se fonde sur un diagnostic avéré et partagé, la solution préconisée risque de créer des problématiques hautement inflammables. Le groupe Agir ensemble ne votera donc pas en faveur de ce texte.

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Je remercie Alexis Corbière de présenter, dans le cadre de notre niche parlementaire, cette proposition de loi constitutionnelle visant à instaurer le droit de révoquer les élus, qu'il s'agisse du Président de la République, des parlementaires ou des élus locaux.

S'inspirant de la méthode du référendum d'initiative citoyenne, cette procédure permettrait de donner corps à l'idée de responsabilité des élus devant les électeurs et d'apporter ainsi un correctif concret à la crise démocratique. Ce nouveau droit permettrait l'expression de la souveraineté populaire en toutes circonstances : la volonté du peuple ne se réduirait plus à un simple bulletin glissé dans l'urne à chaque échéance électorale ou à la participation à de rares référendums dont l'initiative appartient aux représentants.

Comment peut-on déplorer la crise de la représentation et la progression d'une abstention devenue massive quand les électeurs ne disposent d'aucun moyen de contrôler l'exercice du mandat qu'ils ont confié ? C'est précisément en raison de l'absence de responsabilité des élus devant les électeurs que l'abstention progresse d'année en année, sur fond d'engagements non tenus ou dévoyés qui alimentent une résignation toujours plus grande.

Aux dernières élections législatives, le taux d'abstention était de plus de 50 % : plus d'un électeur sur deux n'est pas allé voter pour cette assemblée nationale. Les élections suivantes – européennes, municipales et législatives partielles – ont confirmé cette tendance et, lors des dernières échéances, la grève civique a atteint des niveaux extrêmement préoccupants : le taux d'abstention a été de plus de 70 % aux élections départementales et régionales en 2020.

Face à ce constat, l'instauration d'un droit de révocation des élus favoriserait l'implication citoyenne de ces derniers et des électeurs tout en modifiant la nature des campagnes électorales, car une attention toute particulière serait accordée à la délibération collective autour des programmes électoraux. Vertueux à tous les niveaux, ce droit nouveau s'appliquerait en attendant que le peuple souverain redéfinisse les règles du jeu politique en écrivant la Constitution d'une VIe République, après la convocation d'une assemblée constituante.

Plusieurs pays se sont déjà engagés dans cette voie de progrès démocratique, notamment sur le continent américain. Aux États-Unis d'Amérique, vingt-huit États fédérés prévoient une procédure de révocation. Quant à la Bolivie ou à l'Équateur, ils ont inscrit dans leurs constitutions respectives ce mécanisme applicable à toutes les fonctions électives, du simple élu local jusqu'au Président de la République.

Même si la forme de la révocation varie d'un État à l'autre, ces exemples étrangers attestent de la faisabilité d'une mesure jusqu'à présent ignorée en France. Aussi les députés de la France insoumise proposent-ils d'instaurer un droit de révocation des élus à tous les échelons électifs : maires, conseillers municipaux, présidents et conseillers départementaux ou territoriaux, parlementaires, jusqu'au Président de la République. Le référendum révocatoire pourrait se tenir à l'issue du premier tiers de leur mandat et avant la dernière année de celui-ci si une pétition référendaire réunit un pourcentage suffisant du corps électoral d'origine. L'expression de la souveraineté du peuple, le contrôle populaire des mandataires et la légitimité des élus en sortiraient grandis, grâce à une procédure qui garantirait dans le même temps la stabilité des institutions.

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Je vous remercie d'avoir nourri la discussion de vos réflexions et arguments – plus ou moins vifs, mais il en est ainsi du débat démocratique – et je forme le vœu qu'elle se poursuive, notamment le 13 janvier dans l'Hémicycle.

Permettez-moi tout d'abord de souligner que vos réflexions sont celles d'élus – ne le prenez pas mal, je m'inclus dans ce constat. Or peut-être le propos d'un élu est-il différent, sur ce sujet, de celui d'un citoyen qui ne détient pas de mandat électif. Certains d'entre vous estiment que le dispositif proposé favoriserait la tyrannie des minorités : soyons attentifs à ce que le cercle restreint des élus n'en devienne pas une. J'ai en effet entendu des propos qui peuvent choquer : on a dit – pardonnez-moi de ne pas me souvenir des termes exacts qui ont été utilisés – que, si le droit de révocation était instauré, les élus seraient entre les mains du peuple. Oui, en toutes circonstances, le souverain, c'est le peuple ! C'est lui qui doit décider de ce qu'il fait de ses élus. Nous n'avons pas à nous méfier d'un peuple insouciant qui, tête folle, pourrait prendre des décisions déraisonnables.

D'aucuns ont dit que certaines décisions étaient difficiles et impopulaires. Parlent-ils de décisions qui seraient minoritaires dans le pays ? Dans ce cas, il ne faut pas les prendre ! Sinon, on acte le fait qu'on exerce un pouvoir autoritaire. Il faut, inlassablement, expliquer, convaincre, se demander pourquoi un argument ne passe pas ou plus, au lieu d'invoquer l'ignorance du peuple. On a forgé le concept de populisme : non seulement il ne faudrait plus parler au peuple, au motif qu'il ne comprend rien – alors que nous, nous serions les « sachants » –, mais nous devrions louer nos institutions de continuer à fonctionner même lorsqu'il ne va plus voter ! C'est précisément là que réside l'instabilité, mes chers collègues : lorsque les deux tiers des électeurs ne viennent plus voter, les institutions ne sont plus stables, en vérité – c'est un problème fondamental.

Il ne faudrait pas, dites-vous – en vous appuyant sur la Constitution, selon laquelle aucune section du peuple ne peut s'attribuer l'exercice de la souveraineté nationale –, qu'une minorité exerce le pouvoir contre la majorité. Mais prenons l'exemple de mon élection : formellement, j'ai été élu, au second tour, par 59 % des électeurs de ma circonscription ; en réalité, seulement 21 % des inscrits sont venus voter. Autrement dit, près de 80 % des électeurs de ma circonscription n'ont pas voté pour moi – et d'autres députés ont été élus dans les mêmes conditions. On peut toujours dire que les électeurs sont des imbéciles désintéressés qui ne comprennent rien ; je n'y crois pas. J'estime, pour ma part, que nous devons donner des droits nouveaux aux citoyens, non pas seulement pour qu'ils puissent remplacer un mauvais élu par un bon, mais aussi pour que change la manière dont le pouvoir s'exerce.

Vous affirmez, monsieur Gouffier-Cha, que nos propositions n'ont pas été validées lors des élections. Pardon, mais lors de la dernière élection présidentielle, le candidat Jean-Luc Mélenchon, qui défendait la proposition que nous vous soumettons, a rassemblé sept millions de voix, soit 19,5 % des suffrages, contre 24 % pour le candidat de la majorité. La différence vous est, certes, favorable, mais l'écart n'est pas si grand que l'on puisse affirmer que notre proposition a été balayée par les électeurs.

Vous dites que le dispositif proposé favoriserait les coalitions d'oppositions. Mais le président Macron n'a-t-il pas été élu précisément par une coalition d'oppositions à la candidate qu'il affrontait au second tour ? Son élection n'a pas été pour autant invalidée. Tout cela n'a pas de sens.

Peut-être n'avez-vous pas bien compris ma proposition : il s'agit, non pas de donner la possibilité à une minorité de désigner un candidat, mais de permettre, si un nombre significatif d'électeurs le souhaitent, qu'un nouveau scrutin soit organisé et que le peuple souverain s'exprime à nouveau.

M. Balanant a soulevé une question pertinente. Peut-être me suis-je mal fait comprendre : mon propos, aujourd'hui, est de discuter avec vous du principe du droit de révocation, ses modalités d'application étant renvoyées à la discussion ultérieure d'une proposition de loi organique. En 2019 – je remercie notre collègue du MODEM de l'avoir rappelé –, nous avions fixé, dans une proposition de loi précédente, à 5 % du corps électoral le seuil à atteindre pour convoquer les électeurs. On peut estimer que ce taux est trop bas et qu'il permettrait aux éternelles oppositions de provoquer l'organisation d'une consultation – encore que convaincre 5 % des électeurs de convoquer une nouvelle élection n'est pas si facile. Aussi pourrions-nous très bien fixer ce seuil à 10 %, voire à 20 %. C'est une discussion d'ordre technique.

Aujourd'hui, encore une fois, il s'agit de discuter avec vous du principe : est-il pertinent de considérer que l'une des raisons de la désaffection de nos concitoyens pour les urnes est liée à leur sentiment qu'une fois leurs représentants désignés, ils ne sont plus des électeurs dotés de droits civiques mais en quelque sorte des mineurs politiques ?

Nos collègues du groupe LaREM répondent que notre proposition manque son but, qu'ils ont déjà agi pour remédier au problème. Soit, mais force est de constater, sans même juger de la pertinence des mesures adoptées, que l'abstention a continué de progresser. Ma proposition n'est peut-être pas pertinente, mais les leurs n'ont pas été efficaces. Poursuivons donc le débat, en nous épargnant les arguments trop faciles.

J'en ai relevé un autre : notre proposition ne serait pas compatible avec la planification écologique. Pour ma part, je suis défavorable au mandat impératif : on est amené, lorsqu'on est aux responsabilités, à prendre des décisions face à des événements imprévus – la crise du covid-19, par exemple, n'a pas fait l'objet, et pour cause, de discussions en 2017. Mais nous devons toujours garder à l'esprit que notre action doit recueillir l'adhésion de la majorité. Or j'affirme que notre système, en raison du confort qu'il donne parfois aux élus et de la faible intensité démocratique qui s'est installée, nous éloigne de cette préoccupation. Je reprends les termes qui ont été utilisés par plusieurs d'entre vous : il faudrait savoir prendre des décisions difficiles, impopulaires... Il y a tout un champ sémantique qu'en tant que républicain, je n'apprécie pas. En république, on ne prend pas de décisions qui ne sont pas approuvées par la majorité de nos concitoyens. Pour le dire crûment, on ne gouverne pas contre le peuple ! Accepter que les électeurs ne se déplacent plus, voire prendre des décisions sur lesquelles ils ne sont pas d'accord, c'est créer les conditions d'une tentation autoritaire dans le pays.

Soyons attentifs à ce qui se passe aujourd'hui. Je n'apprécie pas que beaucoup de nos concitoyens, estimant notre système démocratique bloqué, cèdent à la brutalité, voire envisagent une solution autoritaire. Or nous avons parfois nous-mêmes inoculé un poison dans la vie démocratique en considérant qu'en définitive, on peut se satisfaire d'institutions fortes qui donnent à une personne le pouvoir de prendre des décisions, le cas échéant contre le peuple. Il est là, le bonapartisme, monsieur Gouffier-Cha : dans des institutions autoritaires se passant de la consultation du peuple et créant de grands personnages omniscients qui peuvent gouverner sans chercher à convaincre, voire se permettre, forts de la pompe et de la puissance que leur confère le mandat présidentiel, d'avoir des mots volontairement provocateurs envers une minorité. Cela ne rend pas service à la démocratie : nous devons convaincre en permanence.

Madame Untermaier, nous réalisons tous des comptes rendus de mandat. C'est intéressant et indispensable, mais avouez que l'on ne peut pas s'en contenter. Des mairies cherchent désormais à créer des conseils de citoyens mais, ces organes n'ayant aucun pouvoir, les citoyens n'y participent pas : ils ont le sentiment que cela permet uniquement à l'élu, au sachant, de s'exprimer, de s'expliquer et, en définitive, de ne présenter que ce qu'il a prévu de présenter. Ainsi, seuls ses fidèles et quelques autres personnes sont présents. Pour que les gens soient motivés, pour qu'ils soient pleinement citoyens, il faut que le pouvoir soit en jeu, donc qu'ils aient la possibilité de confirmer ou de révoquer.

Encore une fois, je suis défavorable au mandat impératif : ce n'est pas l'objet de ma proposition. L'élu doit pouvoir prendre sa décision en conscience, en fonction des éléments dont il dispose. En revanche, il faut qu'il ait un rapport plus vivant avec ceux qu'il représente, lesquels doivent pouvoir le révoquer, dans un cadre raisonnable – on peut même envisager que la révocation d'un élu ne puisse être discutée qu'une seule fois au cours du mandat. Un tel dispositif me paraît pertinent et à la hauteur de la crise que nous traversons. Je suis conscient – je ne suis pas naïf – que cela bouleverserait notre vie démocratique, mais nous avons besoin de rompre avec des pratiques que je considère comme antidémocratiques ou tout au moins de faible intensité démocratique.

Ce serait, avez-vous dit, monsieur Gouffier-Cha, la « démocratie de la gâchette ». En ces temps où nous sommes, les uns et les autres, régulièrement menacés – je l'ai moi-même été par des gens d'extrême droite qui ont utilisé un fusil –, je préférerais que l'on évite d'employer ce vocabulaire, même si je comprends l'image. Mais admettons : de quelle arme s'agit-il ? du peuple ? Mais enfin, quand le peuple se mobilise, ce n'est pas une arme à feu !

Quant à nos collègues du groupe LR, ils sont, on le sait, très favorables aux institutions de la Ve République. Pour ma part, je n'adhère pas à la doxa selon laquelle la IVe République est le pire des régimes, coupable de bien des maux auxquels la Ve République aurait remédié. N'oublions pas que cette dernière est née dans un moment de grande crise démocratique, je dirai même, en étant provocateur, de quasi-guerre civile, marquée par un coup d'État militaire. Qui plus est, lors de sa création, le général de Gaulle avait pris l'engagement, notamment auprès de Gaston Monnerville, que le Président de la République ne serait pas élu au suffrage universel direct. Lorsqu'en 1962, il est revenu sur cet engagement – à la suite de l'attentat du Petit-Clamart –, Gaston Monnerville s'en est offusqué et a déclaré qu'il s'agissait d'une forfaiture. Nous ne devons pas oublier ces débats ni les circonstances dans lesquelles sont nées les institutions actuelles. Lorsqu'on évoque leur solidité, je pense au village Potemkine : cette solidité n'est qu'apparente, dès lors que le peuple ne se rend plus aux urnes.

À l'argument selon lequel le Gouvernement peut révoquer des maires, je réponds qu'il est préférable que ce pouvoir soit entre les mains du peuple, car un gouvernement, même paré des meilleures intentions, est de nature politique. Il pourrait donc éventuellement révoquer un maire qui ne lui serait pas favorable, même si, jusqu'à présent, ces révocations ont été fondées sur des raisons objectives.

Enfin, notre collègue d'Agir ensemble – qui a, et je l'en remercie, exprimé, malgré son désaccord sur le fond, la volonté que nous réfléchissions ensemble à ces questions – a évoqué la Commission de Venise. Mais celle-ci n'invalide pas le droit de révocation ; elle constate : « Dans quelques pays […], [la révocation populaire] a été introduite, en particulier depuis les années quatre-vingt du siècle dernier, comme une réponse possible au besoin de revitalisation de la démocratie par la participation plus directe des citoyens ; les exemples d'application pratique de ces dispositifs se multiplient. » La commission ne propose pas d'instaurer ce droit, mais elle considère que, là où il s'applique, il « participe à la revitalisation du fonctionnement démocratique ». De même, le fait qu'aux États-Unis, la révocation puisse s'appliquer à des fonctions qui, en France, ne sont pas électives n'invalide pas l'éventuelle introduction dans notre droit de ce dispositif ; il atteste que celui-ci contribue, ailleurs, à la vie démocratique.

Mes chers collègues, encore une fois, prenez garde de ne pas apparaître, lorsque vous critiquez ce texte, comme des élus qui rejettent toute contrainte supplémentaire qui leur serait imposée par le corps électoral, car celui-ci pourrait s'étonner que vous vous méfiiez de lui, au point de considérer qu'il userait à mauvais escient des droits nouveaux qui pourraient lui être accordés.

Quant à moi, pour le dire clairement, je préfère me tromper avec la majorité du peuple que d'avoir apparemment raison avec une minorité. J'y insiste, actuellement, une minorité exerce le pouvoir. Observez la sociologie de ceux qui votent : ce sont souvent ceux de nos concitoyens qui ont les revenus les plus élevés et sont les plus éduqués, de sorte que s'installe progressivement – je vais être provocateur – une forme de démocratie censitaire. Ce sont des citoyens au même titre que les autres : je n'institue pas de hiérarchie. Mais prenons garde qu'à terme, ne se mobilisent plus que des intérêts privés, des groupes de pression, au détriment des milieux populaires, majoritaires dans le pays.

Notre proposition est-elle la réponse définitive à la crise démocratique ? Non, elle n'est sans doute pas suffisante, je vous le concède ; du reste, j'ai indiqué qu'elle s'inscrivait dans le cadre plus général de la VIe République que nous appelons de nos vœux. Mais elle en est un des éléments fondamentaux. Le droit de révocation permettrait, en outre, d'en finir avec l'extrême concentration des pouvoirs dans les mains du Président de la République, ce personnage si singulier de notre vie politique au regard des institutions des autres pays démocratiques. Dans aucune autre démocratie libérale, un personnage ne détient autant de pouvoirs en ayant si peu de comptes à rendre à la représentation nationale. Ce système d'irresponsabilité n'est pas sain.

L'instabilité est là, la crise s'aggrave un peu plus à chaque élection et témoigne du dégoût que ressentent nombre de nos citoyens. La situation est dangereuse, en vérité. Or je ne veux pas qu'à cette crise soit apportée une réponse autoritaire, « peuplophobe » en quelque sorte, qui consisterait à gouverner sans le peuple et à renforcer toujours plus les pouvoirs des représentants.

Article unique

La commission rejette l'article unique.

L'ensemble de la proposition de loi est ainsi rejeté.

Puis la Commission examine la proposition de loi visant à restaurer l'État de droit par l'abrogation des régimes d'exception créés pendant la crise sanitaire (n°4744) (Mme Mathilde Panot, rapporteure).

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Cette proposition de loi vise à abroger les régimes d'exception créés pendant la crise sanitaire : elle implique donc l'abrogation du passe sanitaire et du passe vaccinal, dont nous débattons actuellement, précisément parce que notre ambition n'est pas « d'emmerder les Français » ni de transiger avec les exigences de santé publique.

J'imagine que certains seront tentés de nous traiter d'irresponsables, d'obscurantistes et même d'assimiler cette proposition à une politique digne de Trump ou de Bolsonaro, comme je l'ai entendu de la bouche du ministre des solidarités et de la santé lundi soir, en séance publique. C'est dire la difficulté que vous avez à distinguer la vaccination du passe sanitaire ou vaccinal – et de la critique qu'on peut en faire. Rassurez-vous, nous voudrions remplacer cela par tout autre chose – tout ce que vous ne faites pas aujourd'hui.

Je suis fière de faire partie du camp des réfractaires qui réunit la Défenseure des droits, l'Organisation mondiale de la santé (OMS), qui appelle à convaincre plutôt qu'à contraindre, la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), qui a demandé, en vain, le bilan sanitaire des instruments liberticides mis en œuvre par le Gouvernement et même, à certains égards, le Conseil scientifique, qui appelle à un changement de cap dans la stratégie de lutte contre le virus.

Commençons par votre premier argument : le passe sanitaire permet de lutter contre l'épidémie. Depuis sept mois qu'il est appliqué, il n'en est rien : les contaminations au variant omicron s'élèvent aujourd'hui à 300 000 cas par jour.

Le vaccin, nous en sommes tous ici convaincus, permet de lutter contre les formes graves. Nous savons aussi que nous pouvons contracter le virus et le transmettre, même avec trois doses. Munies d'un passe vaccinal, des personnes vaccinées pourront se rendre dans n'importe quel lieu fermé, se croire immunisées et contaminer une personne non vaccinée ou vaccinée quelques jours plus tard. Cette illusion de sécurité est contre-productive, voire dangereuse.

Le plus surprenant, c'est que depuis juillet 2021, date à laquelle le passe sanitaire a été déployé, nous n'avons aucune donnée qui permette d'étayer son efficacité. Rien ! Depuis sept mois, vous imposez à la population un dispositif sans fondement scientifique, sans évaluation aucune. Les Français s'interrogent sur ces mesures inintelligibles et arbitraires.

Le 27 décembre, Jean Castex a annoncé l'interdiction formelle d'enlever son masque dans un TGV pour manger un sandwich. On nous annonce que, finalement, on pourra manger en cas de besoin physiologique. Grand seigneur ! Comment définit-on un besoin physiologique ? Est-ce avoir un peu faim ou être à la limite du malaise vagal ? Dans le même temps, on a le droit de s'entasser dans les rames de métro ou dans des salles de classe, dépourvues de purificateurs d'air ; on peut boire un verre, assis, mais pas debout ; on peut enlever son masque chez soi mais on doit le porter en extérieur, bien que la contamination par aérosol soit, en toute logique, plus faible à l'air libre. L'absurdie généralisée, le non-sens permanent !

Prenons le second argument : les passes sont une obligation vaccinale déguisée. Le 29 décembre 2021, en commission des Lois, le ministre Olivier Véran a livré une fine analyse ethnographique du profil des personnes non vaccinées, distinguant trois catégories que je pourrais résumer ainsi : les personnes éloignées du système de santé, les flemmards et les timbrés. Ceux-là, le Président veut les emmerder jusqu'au bout ! De tels propos sont indignes et révèlent la seule ambition de cette mesure qui n'a rien de sanitaire : créer un ennemi de toutes pièces.

Qui pensez-vous convaincre quand Emmanuel Macron stigmatise et insulte de la sorte une partie de nos concitoyens ? Ajouter qu'« un irresponsable n'est plus un citoyen » est un comble de la part d'un président de la Ve République, irresponsable par nature. Après la déchéance de citoyenneté, bientôt l'exclusion des soins des personnes non vaccinées ? Voilà à quel genre de folie ces propos peuvent conduire !

Jeter en pâture une partie des Français permet au Gouvernement d'évacuer sa responsabilité dans le chaos. La vaccination est un fait social : il s'agit d'un acte dont les conditions de mise en œuvre sont produites politiquement ; elles le sont par la confiance. Si des personnes ne sont pas convaincues, c'est aux non-convaincants de rendre des comptes.

Le refus de certaines personnes d'aller se faire vacciner n'est pas étranger aux mensonges obstinés du Gouvernement, sans aucun mea culpa depuis le début de la crise sanitaire : Agnès Buzyn a parlé d'un risque modéré d'importation des cas depuis Wuhan, Sibeth Ndiaye a expliqué que le port du masque n'était pas nécessaire, le Président de la République a nié l'existence d'une pénurie de masques. Et je ne compte pas les méthodes brutales, les récentes déclarations du Président qui hystérisent le débat, l'écrasement du Parlement et l'état délabré de l'hôpital public, dont nos concitoyens sont les spectateurs affligés.

Cette politique sourde et brutale s'est abattue sans discernement dans les outre-mer où l'état d'urgence sanitaire a sans cesse été prorogé, ou redéclaré, par pure commodité. L'obligation vaccinale déguisée y a été imposée à coups de matraque et de gaz lacrymogènes, dans une confusion totale entre persuasion et répression. La santé publique y est abandonnée depuis des années et la population n'a toujours pas accès à l'eau courante pour se laver les mains.

Le Gouvernement cherche à nous rassurer en expliquant qu'il applique, en parallèle, une politique d'« aller vers ». Or le taux de vaccination des personnes de plus de 80 ans est d'à peine 87 %, soit l'un des plus bas sur le plan européen. La politique d'« aller vers » existe-t-elle vraiment ? Où sont les chiffres ? Dans l'hémicycle, on nous parle de porte-à-porte : combien de personnes, avec quels moyens, avec quels arguments ? Jamais la représentation nationale n'a été informée des modalités ou de l'avancement de la campagne vaccinale, comme de bien d'autres choses, tant le Parlement a été piétiné ces derniers mois !

C'est aux régimes d'exception que nous devons cette situation absurde et dangereuse pour notre démocratie. Du 13 novembre 2015 au 1er novembre 2017, et depuis le 23 mars 2020, les états d'exception sécuritaire, sanitaire, ou les deux à la fois, poursuivent de manière quasi continue leur travail de sape démocratique.

Depuis mars 2020, dix lois se sont succédé pour créer et prolonger ces états d'exception, à raison d'une loi tous les deux, trois ou quatre mois, examinées dans des conditions déplorables et dans la précipitation, afin d'avaliser des décisions prises dans l'obscurité du Conseil de défense.

Cette situation nous pose une question fondamentale : à quoi nous habituons-nous ? Une stratégie implacable est à l'œuvre : à l'état de sidération initiale, qui justifiait, aux yeux du plus grand nombre, le déploiement de mesures extraordinaires a succédé un état de lassitude et de résignation. Ces régimes d'exception produisent un effet cliquet redoutable : lorsqu'une mesure est mise en place, elle est comme irréversible. L'accoutumance de notre République aux régimes d'exception présente un véritable danger. De nombreux juristes et défenseurs des droits humains nous alertent – de la Défenseure des droits à la Commission nationale consultative des droits de l'homme (CNCDH).

Car ces régimes d'exception donnent lieu à une extension accrue du pouvoir exécutif, réduisent les libertés et produisent un déséquilibre des pouvoirs. Depuis mars 2020, l'exécutif donne ordres et contre-ordres, parle et se renie aussitôt. C'est ainsi qu'Olivier Véran a pu expliquer : « à titre personnel, je ne suis pas favorable à un passe sanitaire pour aller au restaurant, au cinéma ou pour pratiquer des activités de la vie quotidienne. » Comme il est savoureux que vous nous traitiez d'irresponsables quand vous étiez vous-même opposés à cette discrimination !

La culture du contrôle permanent n'est pas la nôtre. Avec le passe vaccinal, partout sur le territoire, des professionnels du transport, de la culture, des commerçants, des restaurateurs, des serveurs et des agents de sécurité contrôleront de manière systématique une autre partie de la population et devront désormais procéder à des vérifications d'identité. Et pour quels résultats? Non, les états d'exception ne garantissent pas la protection vis-à-vis du virus. Une véritable politique sanitaire exige de prendre en compte l'impact des mesures liberticides sur les suicides, la santé mentale des jeunes et des enfants : chez les 11-14 ans, on a relevé en 2021 une augmentation de 61 % des gestes suicidaires, de 140 % des idées suicidaires et de 93 % des troubles de l'humeur. De même, n'existe-t-il pas des conséquences dramatiques en matière de dépistage du VIH, de traitement du cancer, d'accueil en EHPAD, de prise en charge des autres pathologies et, au-delà, de décrochage scolaire et universitaire ?

Mais le Gouvernement persiste et signe, au nom de la théorie des circonstances exceptionnelles. Or, cela fera bientôt deux ans que nous connaissons une pandémie. Je crains que nous n'en soyons qu'aux débuts d'une nouvelle ère, si nous ne nous attaquons pas aux racines du phénomène. Cette crise sanitaire préfigure le type de restriction des libertés publiques que nous pourrions connaître avec le dérèglement climatique.

S'il faut nous habituer, nous devons procéder autrement. Une autre gestion sanitaire est possible. Dans les années 1980, on n'a pas attendu de trouver un vaccin pour lutter contre le VIH : on a privilégié les gestes barrières – le port du préservatif – et le dépistage. Vous, vous déremboursez les tests et vous faites du passe l'alpha et l'oméga de votre politique de santé.

Cette idée fixe n'a d'autre objet que de dissimuler la casse méthodique de l'hôpital public. Depuis le début du quinquennat, 17 900 lits ont été fermés. En 2020, ce sont 5 700 lits d'hospitalisation complète qui ont disparu, alors que la population endurait les deux premiers confinements – confinements justifiés par la saturation des capacités hospitalières dont vous êtes tributaire. Aujourd'hui, des personnes atteintes de maladies chroniques subissent des déprogrammations d'opérations et des retards de diagnostic, des enfants ne peuvent être admis aux urgences pédiatriques, faute de lits et de soignants.

Il est temps de mettre en place une véritable démocratie sanitaire où le Parlement et les citoyens pourront décider collectivement de la stratégie à adopter face au covid et aux futures épidémies.

Les alternatives existent : restauration d'un service public hospitalier gratuit et de qualité, avec formation, embauche et augmentation des salaires des personnels ; tests gratuits ; généralisation des purificateurs d'air ; instauration de roulements pour le travail, les transports et les écoles ; création d'un pôle public du médicament.

Où en est-on de la distribution gratuite des masques FFP2, notamment aux enseignants et aux personnels de l'éducation ? Des chaînes de production pour en produire ? Des capteurs de CO2 ? Où en est-on du plaidoyer de la France en faveur de la levée des brevets sur les vaccins, afin de faire du vaccin un bien public mondial ? Car nous ne sortirons pas seuls de cette épidémie. Garantir un accès universel au vaccin relève de l'intérêt général humain. Toutes ces mesures correspondent à des amendements ou à des propositions de loi que vous avez refusés.

Une réelle politique de santé publique, pensée sur le long terme, doit se substituer au chantage permanent qui consiste à opposer protection de la santé et sauvegarde des libertés. Couvre-feux intempestifs, confinements à répétition, applications téléphoniques, QR code, passe sanitaire, passe vaccinal, il est temps d'en finir avec cette fuite en avant autoritaire. Collègues, il est temps de retrouver le goût de la liberté !

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Le 16 mars 2020, à 20 heures, le Président de la République annonce la mise en place d'un confinement. Deux mois plus tôt, le gouvernement chinois avait placé progressivement sous quarantaine plusieurs villes, avant l'Italie, le 9 mars, et l'Espagne, le 15 mars.

Le monde entier découvre alors les courbes exponentielles des contagions et des morts. Quels que soient les systèmes de santé, tous les pays doivent prendre des mesures importantes pour enrayer une épidémie dont on ne connaît que le nom et à peine quelques symptômes. En France, les premières mesures sont prises par la combinaison d'un article du code de la santé publique relatif aux menaces et crises sanitaires graves et de la théorie des circonstances exceptionnelles, si rarement utilisée dans notre histoire récente.

Le 18 mars 2020, un projet de loi est présenté en Conseil des ministres : il vise à encadrer juridiquement l'état d'urgence sanitaire afin de sécuriser les mesures qui ont été prises et de prévoir, compte tenu de leur ampleur, le contrôle du Parlement. Nous accordons alors au Gouvernement des pouvoirs exceptionnels et temporaires, extrêmement encadrés : les décrets de mise en œuvre feront l'objet de recours devant les juridictions administratives, seule une loi pourra proroger le régime de l'état d'urgence sanitaire – ce sera le cas de la loi du 11 mai 2020 – et le Gouvernement devra remettre des rapports très réguliers, faisant état des mesures prises. La loi du 9 juillet 2020 prévoit que dès lors que les pouvoirs octroyés au Gouvernement ne seront plus nécessaires, ils ne seront plus utilisés.

C'est cela un État de droit. C'est cela, agir en responsabilité.

Parce que nous savons la situation fragile – l'été suivant en attestera –, nous mettons alors en place un régime de sortie de la crise sanitaire. Des pouvoirs sont accordés au Gouvernement, là encore, mais dans une moindre mesure. Plus de confinement, plus de couvre-feu, mais le contrôle du Parlement se poursuit et le Gouvernement doit continuer de lui remettre des rapports et les deux chambres peuvent, dans le cadre du contrôle et de l'évaluation de ces mesures, requérir toute information complémentaire.

C'est cela un État de droit. C'est cela, agir en responsabilité.

Depuis le début de l'épidémie, plus de 55 heures ont été consacrées à ces travaux en commission, plus de 135 heures en séance publique, sans compter les débats en cours. À cela, s'ajoute l'important travail de contrôle, avec la remise de rapports et des auditions régulières du ministre de la santé et du président du comité scientifique.

Le Conseil constitutionnel exerce aussi son contrôle : à l'été 2021, il a censuré une disposition concernant l'isolement obligatoire, que nous pensions utile. Nous en avons pris acte, sans jamais remettre en question son contrôle.

C'est cela un État de droit. C'est cela, agir en responsabilité.

Au printemps 2021, après deux périodes d'état d'urgence sanitaire, le pays regagne progressivement les libertés qui ont été restreintes par nécessité. Il faut alors trouver des outils qui permettent de retourner à la vie normale sans compromettre une situation encore fragile. Nous découvrons ce qu'est un variant.

Le Parlement prévoit, avec la loi du 31 mai 2021, la mise en place d'un passe sanitaire, d'abord pour les grands rassemblements. Le dispositif est élargi aux lieux ayant une certaine capacité d'accueil, mais la jauge est écartée. Alors que le rebond épidémique menace d'être particulièrement fort, la loi du 5 août 2021 prévoit l'application du passe aux bars et aux restaurants. Le dispositif est proportionné, s'agissant du recueil de données. Le fait de conserver l'une de ces informations constitue un délit, tout comme celui de demander l'un des justificatifs hors les cas prévus par la loi.

C'est cela un État de droit. C'est cela, agir en responsabilité.

La situation sanitaire s'améliore, malgré l'apparition de variants bien plus contagieux, delta puis omicron. Pourtant, le pays tient, la vie est presque normale, grâce à une vaccination massive, à l'esprit exemplaire d'une grande majorité des citoyens et aux mesures de freinage.

Voilà l'histoire du régime de l'état d'urgence sanitaire et du régime de gestion de la sortie de crise sanitaire, deux régimes qui ont permis depuis mars 2020 de protéger la santé des Français et que le groupe FI propose ce matin de supprimer, purement et simplement.

Que proposez-vous, face à une crise sanitaire d'une telle ampleur ? De ne rien faire, si j'en juge vos interventions dans le cadre de l'examen du nouveau projet de loi ? De créer des lits d'hôpitaux supplémentaires, alors même que, sans mesures de freinage, aucun pays n'aurait pu encaisser le nombre d'hospitalisations que prédisaient les scénarios, pourtant optimistes, au début de la crise.

Cette proposition de loi est dangereuse. Vous omettez volontairement ce qu'ont permis les régimes de gestion de la crise sanitaire : un équilibre constant entre la protection de la santé des Français et les libertés constitutionnellement garanties. Grâce à ces outils, cela fait un an et demi que nous tenons, dans la tempête épidémique. Nous avons toujours eu la conviction que l'esprit de responsabilité devait l'emporter sur les vaines querelles politiciennes.

C'est cela, un État de droit. C'est cela, agir en responsabilité. Nous voterons contre cette proposition de loi.

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Le groupe Les Républicains ne s'est jamais opposé au principe même d'un état d'exception. Au regard de la situation que nous avons connue et des problèmes qu'il nous reste à traiter, recourir à un état d'exception est plutôt bon signe. Heureusement que les règles de privation de liberté, que certaines règles sanitaires, que des règles de restriction de nos interactions sociales ont été construites dans le cadre d'un état d'exception et non dans le cadre du droit classique. Autrement, cela supposerait que ces règles survivent à la crise sanitaire.

Depuis le début de la crise, nous avons toujours été attentifs à la façon dont cet état d'exception était reconduit. Nous ne nous sommes jamais opposés à sa reconduction, mais nous avons toujours été particulièrement vigilants et exigeants – ce qui a souvent conduit à nous opposer – quant à sa temporalité.

De mémoire d'homme, nous sommes confrontés à une crise inédite. Nous sommes face à une menace que nous ne connaissions plus ou que nous n'avions plus l'habitude de gérer. Il fallait que nos outils juridiques s'adaptent aux tâtonnements naturels, évidents et nécessaires des politiques publiques. Oui, nous tâtonnons dans la gestion de cette crise, car nous ne savons pas nécessairement où nous allons.

Nous nous sommes battus et mobilisés pour que les outils juridiques que nous déployions pour gérer cette crise s'adaptent à l'évolution de la découverte technique et scientifique. Nous n'avons pas toujours été entendus. Ce fut le cas lors de la dernière prorogation de l'état d'urgence sanitaire, qui va bien au-delà d'un délai qui nous semble raisonnable et respectueux du débat parlementaire, et donc de la souveraineté nationale. C'est l'une des raisons pour lesquelles nous nous sommes opposés au dernier texte d'urgence sanitaire. L'actualité nous a donné raison puisque nous revoilà en train de discuter d'un nouveau texte, dont l'appellation « adaptation des outils de la gestion de crise », certes, est différente, mais qui n'est, en fait, que la poursuite de ce tâtonnement progressif et de cette découverte d'éventuels nouveaux outils utiles pour juguler la crise.

Telle a toujours été la position du groupe Les Républicains. Si nous ne sommes pas opposés aux outils de gestion de la crise, nous avons toujours demandé qu'ils soient monitorés, contrôlés au plus près par la représentation nationale au regard de l'impact qu'ils ont sur le quotidien des Français.

Nous ne pouvons donc pas soutenir la suppression pure et simple de l'état d'urgence sanitaire. Nous pensons que le contrôle doit toujours en être renforcé, que la surveillance et le questionnement du Gouvernement par la représentation nationale doivent être accrus ; nous pensons aussi qu'il est nécessaire de laisser au Gouvernement les moyens de gérer cette crise sanitaire afin d'en sortir au plus vite.

Alors que des échéances électorales majeures se profilent dans quelques semaines, la gestion de la crise sanitaire est devenue plus politique et plus électoraliste que sanitaire. Nous le regrettons. Votre proposition de loi arrive à un moment où, malheureusement, elle contribue à la politisation de la crise sanitaire et sert, in fine, les intentions du Président Emmanuel Macron, candidat à sa succession.

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Depuis 2020, la France, comme le reste du monde, vit une situation hors norme causée par une pandémie que nul pays en Europe n'a durablement réussi à endiguer. Depuis 2020, la vie de nos concitoyens, la vie même de notre démocratie sont rythmées par des vagues épidémiques successives que nous affrontons collectivement. Depuis 2020, nous avons toujours, me semble-t-il, agi avec réalisme, en tenant compte non pas de considérations politiciennes mais de la science et de l'intérêt général. Depuis deux ans, les Français ont fait preuve d'une résilience formidable qu'il faut remarquer et saluer. C'est aussi cette force qui nous a permis de tenir.

Pour protéger les Français, nous avons adopté des mesures exceptionnelles, des mesures parfois difficiles, mais toujours guidées par la nécessité. Dès mars 2020, notre groupe a soutenu la création d'un état d'urgence sanitaire qui a doté le Gouvernement d'outils permettant de réagir rapidement et efficacement à la situation. Les confinements et les couvre-feux ont mis à l'épreuve nos concitoyens, mais ont permis d'endiguer l'épidémie et de maintenir à flot notre système de santé.

Par la suite, le développement du vaccin nous a ouvert une porte de sortie à long terme ; le groupe démocrate a alors plaidé avec force pour la mise en place d'un régime transitoire permettant de sortir de l'état d'urgence, sans pour autant baisser la garde. Nous avons souligné l'importance d'imposer des garde-fous démocratiques et de ne maintenir des restrictions qu'à condition qu'elles soient proportionnées aux risques. C'est le fil conducteur de notre action depuis le début de cette crise.

Toutefois, nous avons toujours mis en garde contre l'erreur qui consisterait, sous la pression des médias ou du vœu légitime de nos concitoyens d'en finir avec cette crise, à se précipiter, en jetant à l'eau les outils qui sont nécessaires pour nous protéger.

Cet été, nous avons fait face à l'émergence du variant delta, inédit par sa contagiosité et sa dangerosité. Alors que nous disposions du vaccin, il aurait été intolérable de laisser la situation hors de contrôle. Nous avons donc adopté le régime transitoire, afin d'inclure le passe sanitaire. Celui-ci n'est finalement rien d'autre qu'un passe pour la liberté. Il a permis de laisser ouverts les établissements que nous aimons fréquenter, les lieux de culture, les bars, les restaurants, les écoles. Il me semble que le passe sanitaire est tout le contraire d'un outil de contrainte. Il nous a permis de traverser la quatrième vague cet été, en évitant une masse considérable d'hospitalisations et de décès, malgré des taux de contamination élevés.

Que préconisaient les oppositions ? Je m'en souviens parfaitement : détruire des dizaines de milliers d'emplois, détruire des entreprises, attaquer le moral des Français, notamment des plus jeunes, en reconfinant le pays et en arrêtant la vie sociale. Je suis sensible aux chiffres que vous avez donnés, madame la rapporteure, concernant la jeunesse : elle est abîmée et il faudra la soutenir davantage encore.

Le Conseil scientifique, autorité indépendante, a souligné toute l'utilité du passe pour atteindre un des taux de vaccination les plus élevés du monde. Vous avez critiqué l'absence chiffres. Ils existent pourtant : 10 millions de personnes supplémentaires se sont fait vacciner après l'instauration du passe sanitaire. On peut se poser la question : êtes-vous vraiment pour la vaccination ? Ma remarque n'est nullement polémique.

Sur la recommandation du Conseil scientifique, qui nous alertait notamment sur le risque d'émergence d'un nouveau variant – tiens, tiens ! –, nous avons voté la prolongation du passe sanitaire. Celle-ci s'est accompagnée de la mise en œuvre d'un état de vigilance sanitaire, en faveur duquel le groupe démocrate avait plaidé avec force, ce qui a permis de maintenir des outils à la disposition du Gouvernement, tout en associant étroitement le Parlement à leur utilisation. Nous continuons d'assumer cette ligne avec l'instauration du passe vaccinal.

Madame la rapporteure, à l'heure où les menaces à l'encontre de députés prolifèrent, sous l'effet de la désinformation, du scepticisme et de l'antiparlementarisme ambiant, il est particulièrement irresponsable – utiliser ce terme me peine – d'affirmer que les mesures que nous avons adoptées violent l'État de droit. C'est tout le contraire. L'Assemblée a été saisie de douze textes, ce qui signifie qu'elle a été consultée bien plus que douze fois. À chaque fois, nous avons voté ces textes en toute indépendance et en pleine connaissance de cause. Nous avons prévu de nombreux dispositifs assurant le contrôle régulier plein et entier du Parlement sur l'action gouvernementale.

Il est tout aussi irresponsable, en plein milieu d'une cinquième vague épidémique où le taux de contamination bat tous les records, de proposer au Parlement de renoncer à ces outils, à la fois nécessaires et entourés de garanties démocratiques fortes. Le groupe Mouvement démocrate et Démocrates apparentés votera contre ce texte.

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Les sujets extrêmement complexes dont nous débattons embrassent toute l'organisation de nos institutions. Aussi est-il difficile, en seulement quelques instants, d'échanger et de construire de façon positive.

Derrière l'excès de la proposition de loi, qui explique que les pleins pouvoirs sanitaires sont donnés à l'exécutif, le seul fait d'évoquer les régimes d'exception revient à oublier une réalité objective : la France est dotée d'un Conseil constitutionnel – que nous avons saisi – et d'un juge administratif – qui n'a pas non plus failli en appliquant, dans un État de droit, les dispositions prises sous ce régime d'exception. Il ne faudrait pas qu'on puisse laisser nos concitoyens penser que nous sommes dans un régime où le Parlement ne fait rien, que l'exécutif a la main sur tout. Ce serait nier notre travail parlementaire qui reste, j'en conviens, très insuffisant. Comme vous, je déplore que le Parlement, dans son ensemble, soit insuffisamment entendu. Nous l'avons ressenti au cours du précédent quinquennat, comme nous le ressentons à l'heure actuelle. Je pense qu'il arrive que la majorité le vive tout aussi mal. À titre personnel, travailler, animée de mes convictions, dans une concertation plus construite avec les divers groupes, est ce vers quoi je tends.

L'état d'exception figure dans notre Constitution, et c'est une bonne chose. Qu'on puisse le mettre en mouvement à l'occasion de la crise sanitaire me semble important. Je vous rejoins sur la nécessité d'encadrer fortement sa temporalité, car s'installer dans un état d'urgence peut se révéler dangereux. C'est une situation que nous avons vécue en 2015, et que nous vivons à nouveau aujourd'hui. Nous restons donc extrêmement vigilants.

Les clauses de revoyure que nous proposons dans le texte actuellement en examen sont essentielles, même si l'élection présidentielle nous empêchera probablement de nous retrouver dans deux mois. Elles ne sont pas une clause de style. Il est essentiel que le Parlement rappelle qu'il est là, non pour débattre, mais pour évaluer, au regard de données, notamment statistiques – dont nous ne disposons pas toujours – l'importance de cette exception, qui doit demeurer sous son contrôle. Je vous rejoins sur ce volet relatif au contrôle du Parlement. Nous avons agi en responsabilité en votant des textes, parce que nous pensions que la situation l'exigeait, tout en regrettant, en effet, que des garde-fous ne soient pas instaurés.

Nous devons nous interroger moins sur la suppression de l'outil que sur la façon dont il est utilisé. Nous partageons nombre de vos constats sur l'hôpital et sur la désertification médicale, qui est dramatique : 10 millions de personnes n'ont plus de médecin référent, c'est dire qu'elles ont renoncé à l'accès aux soins depuis longtemps ; les jeunes ne consultent plus car ils n'ont pas de médecin ou craignent que le prix de la consultation soit trop élevé.

Il est nécessaire d'encadrer fortement cet outil. Le Parlement aurait dû faire en sorte que les décisions prises dans le domaine réglementaire soient discutées en même temps que les décisions prises au niveau législatif, et qu'elles soient partagées. Car la lassitude de nos concitoyens est extrême : ils ne savent pas très bien ce que les parlementaires décident en ce moment, ce sur quoi ils ont la main, tandis que les décisions prises par l'exécutif ont de fortes répercussions sur leur vie quotidienne. Il convient donc de clarifier le rôle des parlementaires et d'imposer, dans un état d'exception, un partage plus resserré du travail réglementaire, au travers, par exemple, de la mise en place d'un groupe de travail.

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Je pensais qu'il était inutile de rappeler les raisons pour lesquelles nous avons été amenés à prendre des décisions douloureuses depuis presque deux ans, des décisions acceptées par nos concitoyens, bien conscients qu'aucun pays n'échapperait à cette pandémie, qu'importent les dirigeants. Et pourtant, nous voilà réunis pour examiner une proposition de loi qui vise tout simplement à supprimer, à défaut du virus, les règles sanitaires !

L'exposé des motifs met en lumière les fondements erronés de cette proposition de loi et ne fait que révéler les positions du groupe FI. La covid-19 ? Une aubaine pour le pouvoir macronien, qui l'utiliserait pour museler le pays et s'assurer une réélection. Le passe sanitaire ? Une mesure inefficace – comme toutes les autres d'ailleurs – prise dans le secret du Conseil de défense.

Vous expliquez que, grâce au régime de l'état d'urgence sanitaire, l'exécutif aura tous les pouvoirs pour bâillonner le débat démocratique à l'aube des élections présidentielle et législatives. C'est oublier que nous avons connu, pendant la pandémie, trois scrutins électoraux dont les résultats, pardonnez l'euphémisme, n'ont pas été très favorables à la majorité. Mais il a été aussi reproché au Gouvernement d'avoir maintenu ces élections, comme il lui a été reproché d'avoir pensé à les reporter de quelques semaines.

Aucune mesure sanitaire ne peut entraver l'expression de la démocratie. D'ailleurs, La France insoumise pourra prochainement en témoigner car, en vertu de notre Constitution, et comme toutes les formations politiques, elle ne sera pas concernée par les jauges établies pour les événements, en intérieur et en extérieur.

Vous déplorez le fait que le Parlement ne pourra pas débattre avant le mois de juillet en raison des élections, mais vous regrettez aussi la « continuité d'une valse de textes de loi votés par la majorité présidentielle depuis le 23 mars 2020 et leurs décrets d'application. » Parfois nous ne votons pas assez, parfois nous votons trop. Il faut choisir !

Dans le même paragraphe, vous indiquez que l'état d'urgence sanitaire a été « désactivé, réactivé, prolongé, puis re‑prolongé, selon le bon vouloir du Gouvernement, en particulier dans les territoires d'outre‑mer. » Le Gouvernement est responsable de ne pas connaître à l'avance l'évolution d'une épidémie mondiale, de ne pas prédire l'apparition des variants, de ne pas contrôler ses formes, dans des pays étrangers comme le Brésil, l'Afrique du Sud ou encore l'Inde, qui affectent les territoires ultramarins.

S'agissant du Conseil de défense, vous expliquez que « tout ce qui s'y dit est couvert par le secret‑défense. Ainsi, les participants s'exposent à des poursuites pénales s'ils révèlent tout ou partie des discussions ou des propos tenus par Emmanuel Macron. » Cette phrase, qui laisserait croire au retour des lettres de cachet, dissimule le fait que la France est le seul pays au monde où des perquisitions ont été effectuées au domicile d'un Premier ministre et de deux ministres à la suite de plaintes. C'est bien la preuve que rien n'est bâillonné. Il est irresponsable de laisser croire à l'existence d'un clan autocratique, enfermé dans un bureau, qui dicterait le quotidien de 67 millions de personnes.

S'agissant de la prétendue inefficacité du passe sanitaire, je relève que les pays qui s'y étaient refusés ont dû revoir leur copie et prendre des décisions beaucoup plus strictes. En Allemagne, le passe sanitaire est désormais obligatoire dans les entreprises et les transports ; les Néerlandais ont passé les fêtes de fin d'année confinés et le resteront jusqu'au 14 janvier ; l'Espagne a réinstauré l'obligation du port du masque à l'extérieur.

Vous proposez de rendre à nouveau les tests gratuits en oubliant que, depuis le 15 octobre, ils ne sont payants que pour les majeurs non-vaccinés. Ceux-ci peuvent bénéficier de la gratuité si leur état de santé le justifie, s'ils sont cas contact, lorsqu'ils présentent une prescription médicale ou qu'ils ont besoin d'un test négatif pour recevoir des soins en établissement de santé. Loin d'être froide et inhumaine, la règle est juste et proportionnée.

Bien que vous ayez concédé que le vaccin évite les formes graves de la maladie, il est permis de croire que vous n'en ferez jamais une arme contre le virus.

Nous voterons contre cette proposition de loi visant à abroger tout l'arsenal juridique relatif à la crise sanitaire.

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L'histoire est souvent réécrite. Nous allons donc remonter dans le passé. Au mois de janvier 2020, Agnès Buzyn – que nous félicitons d'avoir été décorée de la légion d'honneur – nous annonçait que nous disposions d'un stock de masques en cas de pandémie, mais qu'il ne fallait pas s'inquiéter car le virus n'arriverait pas en France et que tout était sous contrôle. Nous voyons où nous en sommes !

Notre collègue du groupe MODEM a déclaré, en substance, que nous avions agi avec réalisme et science. Le stock de masques était tel que les soignants sont allés travailler sans masque ni gants. Je remercie d'ailleurs les entreprises de sacs-poubelles, dont celles de Ludres en Meurthe-et-Moselle, qui ont stoppé leurs chaînes pour fabriquer des tenues en sacs-poubelles pour les soignants, et qu'ils ont vendues sans réaliser de marge.

S'agissant de la vaccination, la position de La France insoumise est de convaincre plutôt que contraindre – nous ne le rappellerons jamais assez. J'ai été moi-même menacée, comme beaucoup d'entre vous, pour avoir remercié dans un tweet du 5 janvier 2021 le directeur du CHU de Nancy, où je travaillais en réanimation covid, d'avoir retiré la contrainte d'âge qui permettait aux seuls soignants de plus de 50 ans travaillant dans les services à risques de se faire vacciner. Cela m'a valu d'être accusée d'avoir incité à la vaccination, et d'avoir conduit à la mort les personnes concernées. Je rappelle donc qu'inciter à la vaccination n'a été simple pour personne. Notre position sur ce sujet a été claire dès le 5 janvier 2021.

Lorsqu'Olivier Véran expliquait que, quand 90 % de la population serait vaccinée, le Gouvernement retirerait le passe sanitaire et qu'alors la crise serait derrière nous, nous répondions que ce n'était certainement pas la seule position à adopter, que la vaccination ne réglerait pas tout, et que la stratégie « tester, tracer, isoler » s'imposait.

Lors de l'examen du texte en commission, la semaine dernière, je n'ai cessé de répéter qu'il était ubuesque de vouloir à la fois diminuer le nombre de jours d'isolement et imposer le passe vaccinal, car cela conduirait à une augmentation du taux de contamination. Le rapporteur m'a répondu que le délai d'isolement pouvait être raccourci car il était probable que la contagiosité des personnes contaminées diminuait au bout de cinq jours. Est-ce cela, agir avec réalisme et science ? À force de répéter la même chose, nous avons obtenu que le nombre de jours d'isolement soit réduit, mais seulement en cas de test négatif.

Il faut tester, mais on constate l'insuffisance du nombre de tests dans notre pays. Par ailleurs, même si nous ne cessons de le répéter, vous ne voulez pas entendre qu'il faut produire des tests pour pouvoir les proposer en nombre suffisant.

Enfin, il faut tracer. Les employés des caisses primaires d'assurance maladie (CPAM) n'ont cessé de le dire, jusque dans la presse : ils ne sont pas assez nombreux pour rappeler toutes les personnes contaminées, repérer les cas contact et les prévenir. Sans traçage, on ne peut pas protéger nos concitoyens. Tout miser sur la vaccination ne permet pas de protéger nos concitoyens.

Cela passe aussi par la société du roulement. Lundi soir, dans l'hémicycle, le ministre Véran a repris, sans le savoir, l'ensemble de notre argumentaire lorsqu'il a évoqué les stades de football. Il a expliqué que l'on ne pouvait pas accepter plus de 5 000 personnes dans un stade, car cela supposait qu'elles prennent toutes le métro en même temps pour s'y rendre. Le même raisonnement pourrait s'appliquer au travail ! Or cela ne semble pas poser de problème au Gouvernement : contaminez-vous dans le métro en allant travailler !

Chers collègues, il va falloir réfléchir à ce que vous faites et répondre quand on vous propose des solutions. Vous avez voté contre un amendement d'un député du groupe MODEM encourageant les purificateurs d'air. S'agissant des moyens que nous vous proposons d'octroyer aux établissements de santé, le Ségur ne suffit pas et on constate que les démissions continuent de progresser. Et non, n'en déplaise à ceux qui avaient peut-être lu l'article du Parisien avant l'heure, elles ne sont pas dues aux non-vaccinés. Nous vous proposons d'auditionner les représentants des 180 000 infirmiers diplômés d'État qui pourraient revenir si des propositions leur étaient faites.

Une précision d'importance, sur le tri. Le tri signifie qu'une personne arrive aux urgences et qu'on ne la prend pas. C'est, pour moi, une ligne rouge à ne pas franchir. Des pays ont vécu le tri, lorsque, au début de la crise, des parents, des enfants se sont entendu dire : on n'admet pas votre proche, on ne lui donne pas sa chance. En France, nous n'avons jamais été confrontés à de telles situations. Aujourd'hui, il n'y a pas de tri.

Je suis informée constamment par des capteurs, sur le terrain. Des personnes ayant refusé de se faire vacciner arrivent aux urgences, obligeant le transfert d'autres patients. Mais nous ne sommes pas dans une situation où les services ne seraient pas en mesure d'accueillir tous les patients. Dans la mesure où vous justifiez votre politique – passe vaccinal, urgence sanitaire – par les déprogrammations et le tri dans les hôpitaux, il faudra expliquer que les soignants mentent. Ou alors, le Président de la République et Olivier Véran mentent.

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Je viens de citer les propos du Président de la République, repris dans Le Parisien.

Enfin, vous dites avoir suspendu les soignants non-vaccinés par altruisme, pour protéger les patients. Comment alors expliquer à un patient contaminé à l'hôpital que vous avez employé, aujourd'hui comme en novembre 2020, des soignants vaccinés mais positifs, qui risquaient de l'infecter ?

Vous me dites que l'urgence sanitaire ne piétine pas la démocratie ; je vous réponds qu'il y a bien des choses à revoir !

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Madame la rapporteure, nous vous avons écoutée réécrire l'histoire. Que chacun assume la responsabilité des termes qu'il emploie. Vous avez indiqué que les non-vaccinés étaient timbrés et flemmards ; j'espère que vous garderez ces termes pour vous, personne ne les a jamais prononcés avant vous ! Vous avez indiqué que le Président de la République avait déclaré vouloir « emmerder les Français ». Cela non plus, il ne l'a pas dit, il parlait des non-vaccinés. Je rappelle, en outre, qu'il s'agissait d'une expression spontanée, prononcée devant un public de soignants qui venaient d'exprimer leur grande fatigue.

À vous écouter, il n'aurait fallu que quelques incantations pour que les Français se fassent vacciner. Mais, madame la rapporteure, si nous n'avions pas embêté les non-vaccinés dès le mois de juillet, combien de morts supplémentaires aurions-nous connues en France ? Certains les chiffrent à plus de 4 000 par mois.

Alors, oui, embêter les non-vaccinés, c'est les sauver. Embêter les non-vaccinés c'est éviter des décès. Parmi les 342 personnes mortes hier – cent fois plus nombreuses qu'il y a quelques semaines –, 80 % d'entre elles n'étaient pas vaccinées.

Enfin, embêter les non-vaccinés, c'est permettre aussi à nos soignants de traiter des pathologies pour lesquelles, malheureusement, il n'existe pas de vaccin ! Gardez cela en tête, je vous prie !

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Madame Abadie, vous dites « embêter » plutôt qu'« emmerder », je constate que vous êtes plus polie que le Président de la République ! Lorsque j'évoquais les trois catégories de non-vaccinés, les personnes éloignées des soins, les flemmards et les timbrés, je ne faisais que traduire les propos tenus par Olivier Véran en commission, lors de l'examen du texte dont nous débattons aujourd'hui en séance publique.

Je ne vois pas en quoi – et personne ici n'a avancé les arguments qui le prouveraient – un passe, sanitaire ou vaccinal, pourrait aider, dans la situation où nous sommes. M. Balanant m'a opposé un chiffre : 10 millions de Français sont allés se faire vacciner. Oui, mais à quel prix ? Alors que l'OMS explique qu'il est préférable de convaincre que de contraindre, la politique que vous conduisez a radicalisé, dans sa défiance, tout une partie de nos concitoyens. Vous nous décrédibilisez en expliquant que nous sommes peut-être contre les vaccins. Nous l'avons répété 25 000 fois, je le redirai encore une fois : nous sommes pour la vaccination, nous croyons qu'elle empêche les formes graves. Seulement, nous pensons qu'elle n'est qu'un outil, parmi d'autres, pour lutter contre l'épidémie.

Vous ne pouvez pas, dans le même temps fermer des lits et supprimer 7 900 postes dans l'enseignement. C'est ainsi que, dans vos circonscriptions, faute de remplaçants, des enfants n'ont pas cours ou se retrouvent dans des classes bondées. Deux ans après le début de l'épidémie, les salles ne sont toujours pas équipées de purificateurs d'air et les enseignants, comme l'ensemble des personnels éducatifs, ne disposent pas de masques FFP2, censés diviser par cent les risques de contamination. C'est cela qui est insupportable !

En Guadeloupe, les gens n'ont pas accès à l'eau pour le lavage des mains, premier des gestes barrières. À quoi sert-il d'envoyer le GIGN et le RAID ? À quoi sert-il d'appliquer une politique de contrainte ? À quoi sert-il que le Président de la République ait des mots aussi insultants quand, dans certains territoires, 65 % des personnes ne sont pas vaccinées ? Croyez-vous vraiment que vous allez les convaincre ?

Interrogez-vous sur l'un des chiffres que je vous ai livrés : 13 % des plus de 80 ans ne sont pas vaccinés. Ce ne sont pas des antivaccin, ce sont des personnes qui vivent en zone rurale, dans des déserts médicaux, éloignées des systèmes de soins, qui n'ont pas accès aux sites Vite Ma Dose ou Doctolib, lesquels ne sont pas des dispositifs publics de santé. Pourquoi la France est-elle l'un des derniers pays d'Europe où les plus fragiles, les personnes de plus de 80 ans, ne sont pas vaccinés ? Parce que, précisément, les outils utilisés sont inefficaces.

Tout le monde comprend que, pour se rendre dans un établissement recevant du public, un test négatif, pratiqué la veille ou le jour même, est plus fiable qu'un passe sanitaire ou vaccinal. Alors pourquoi les tests sont-ils aujourd'hui payants ?

Certains d'entre vous se sont essayés à retracer l'histoire du covid, vue du côté politique. Mais il faudra, un jour, écrire l'histoire du covid, vue du côté du peuple, et rappeler que le premier Conseil des ministres extraordinaire sur le covid a été l'occasion de décider de l'emploi de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution pour faire passer la réforme des retraites. Ce n'était pas prendre la situation au sérieux que d'agir ainsi !

Oui, avec cette proposition de loi, nous voulons réaffirmer que les passes ne sont pas des outils scientifiques, que nous devrions utiliser d'autres politiques d'« aller vers » et d'autres façons de convaincre, accorder plus de moyens à l'hôpital et procéder à la levée des brevets sur les vaccins.

Collègues, vous avez tous souligné que nous découvrions un variant. Si nous ne levons pas les brevets, ce que la France a refusé à deux reprises, nous en découvrirons beaucoup d'autres. L'OMS – dont, je l'espère, vous respectez les avis – nous a alertés encore récemment sur le risque de prolonger l'épidémie en procédant à des rappels de vaccination à tout-va, sans distinction.

M. Schellenberger a déclaré que se priver de régimes d'exception serait accepter que ces règles persistent. Telle est, en effet, notre plus grande crainte. D'ailleurs, certains juristes vous alertent sur le fait que des glissements de l'État de droit pourrait se produire et s'inscrire dans le droit commun, comme nous l'avons déjà vu à la suite d'états d'urgence sécuritaire.

Cela est d'autant plus inquiétant que l'épidémie de covid-19 ne sera sans doute pas la seule à laquelle nous devrons faire face. Les zoonoses ont été multipliées par dix en cinquante ans et nous connaîtrons des événements climatiques extrêmes dus au dérèglement climatique. Dès lors, la solution ne peut résider, périodiquement, dans l'établissement de régimes d'exception. Elle doit passer par la démocratie. Prendre des décisions en Conseil de défense n'est pas seulement nuisible pour notre démocratie, mais s'avère contre-productif, car les décisions– qu'elles soient effectivement dénuées de sens ou qu'elles changent constamment – ne sont pas comprises.

Le régime de sortie de l'état d'urgence sanitaire court jusqu'au 31 juillet 2022. Nous ne disons pas qu'Emmanuel Macron sera réélu, mais enjamber les élections présidentielle et législatives est déjà extrêmement problématique. La question de la temporalité a été soulevée. Il n'est pas vrai que le Parlement garde un pouvoir de contrôle face aux pouvoirs exceptionnels qui sont confiés à l'exécutif. Si le Gouvernement décide de mettre en place un couvre-feu ou un confinement, il dispose d'un délai d'un mois pour consulter le Parlement ! Si vous voulez conserver des régimes d'exception, ce que nous trouvons dangereux et inefficace, il convient, au minimum, que le Parlement ait, lui aussi, un pouvoir de contrôle exceptionnel.

Quant à l'élection présidentielle, l'instauration, ou la prolongation, de l'état d'urgence sanitaire à La Réunion et à la Martinique, aura des répercussions. Le Conseil constitutionnel a demandé que le passe vaccinal ne s'impose pas pour l'accès aux meetings politiques. Dans moins de cent jours, les citoyens devront décider du projet qu'ils veulent pour les cinq prochaines années et je ne vois pas comment nous pourrions exclure des meetings ceux qui souhaitent se forger une idée ni empêcher des candidats de faire campagne dans certains territoires.

Oui, trois élections se sont déjà déroulées en période covid. Que s'est-il passé ? Lors des dernières élections régionales, 85 % des jeunes se sont abstenus. Voulez-vous que le Président de la République soit choisi en dépit d'un tel taux d'abstention ?

Notre premier défi, c'est de faire en sorte de restaurer la démocratie sanitaire, que les enseignants, les syndicats, les travailleurs de certaines unités de production définissent la façon dont la démocratie sanitaire doit s'insérer, à leur échelle. Ne sont-ils pas les mieux à même de savoir comment se protéger ?

Sans un système de santé restauré, un écran de fumée obscurcira toute discussion sur la conduite des politiques de santé. Le maître-mot devrait être celui de la confiance, or les états d'exception et les passes la détruisent méthodiquement, instaurant la défiance. Nous pourrions faire bien mieux dans notre pays, d'autant que la France fera face à de nouveaux défis, qui soulèveront les mêmes questions.

Article unique (chapitre Ier bis du titre III du livre Ier de la troisième partie et art. L. 3136-1 du code de la santé publique, art. 7 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 et art. 1er à 4 de la loi n° 2021-689 du 31 mai 2021 relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire) : Abrogation des régimes d'exception créés pendant la crise sanitaire

La commission rejette l'article unique.

L'ensemble de la proposition de loi est ainsi rejeté.

La réunion se termine à 11 heures 40.

Informations relatives à la commission

La commission a désigné :

M. Dominique Potier, rapporteur sur la proposition de résolution européenne de M. Dominique Potier et plusieurs de ses collègues visant à inscrire parmi les priorités de la présidence française de l'Union européenne l'adoption d'une législation ambitieuse sur le devoir de vigilance des multinationales (n° 4328) ;

M. Patrick Vignal rapporteur sur la proposition de loi de M. Patrick Vignal et plusieurs de ses collègues pour garantir l'égalité et la liberté dans l'attribution et le choix du nom (n° 4853) ;

Mme Élodie Jacquier-Laforge, rapporteur sur la proposition de nomination de M. Didier Leschi comme directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) par le Président de la République.

Membres présents ou excusés

Présents. - Mme Caroline Abadie, M. Pieyre-Alexandre Anglade, M. Erwan Balanant, M. Florent Boudié, Mme Yaël Braun-Pivet, M. Xavier Breton, M. Vincent Bru, Mme Émilie Chalas, M. Éric Ciotti, M. Alexis Corbière, M. Éric Diard, Mme Nicole Dubré-Chirat, M. Jean-Michel Fauvergue, M. Philippe Gosselin, M. Guillaume Gouffier-Cha, M. Sébastien Huyghe, Mme Élodie Jacquier-Laforge, Mme Catherine Kamowski, Mme Marietta Karamanli, M. Olivier Marleix, M. Fabien Matras, M. Stéphane Mazars, Mme Emmanuelle Ménard, M. Paul Molac, M. Pierre Morel-À-L'Huissier, Mme Naïma Moutchou, Mme Valérie Oppelt, Mme Mathilde Panot, M. Jean-Pierre Pont, M. Dominique Potier, M. Éric Poulliat, M. Bruno Questel, M. Rémy Rebeyrotte, M. Thomas Rudigoz, M. Raphaël Schellenberger, M. Jean Terlier, M. Alain Tourret, Mme Cécile Untermaier

Excusés. - M. Philippe Dunoyer, Mme Lamia El Aaraje, Mme Isabelle Florennes, Mme Paula Forteza, Mme Camille Galliard-Minier, M. Mansour Kamardine, M. Guillaume Larrivé, M. Ludovic Mendes

Assistaient également à la réunion. - Mme Caroline Fiat, M. Dimitri Houbron, Mme Michèle Victory