La proposition de loi simplifie, pour un citoyen, la possibilité de choisir, pour nom d'usage ou pour nom de famille, le nom du parent qui ne lui a pas été transmis. Il ne s'agit pas de revenir sur les modalités de dévolution du nom de famille, de déconstruire la famille et encore moins, comme j'ai pu l'entendre, d'effacer la place des pères, mais de répondre aux attentes de milliers de Français. Afin d'éviter toute équivoque, je souhaite préciser la portée de chacun des articles.
L'article 1er porte sur le nom d'usage, qui peut être utilisé dans les rapports avec l'administration mais qui n'est pas inscrit à l'état civil et ne peut se transmettre aux enfants. Le nom d'usage à raison de la filiation, consacré par la loi du 23 décembre 1985 relative à l'égalité des époux dans les régimes matrimoniaux, ne figure pas dans le code civil, contrairement au nom d'usage à raison du mariage. Il vous est proposé de le codifier, afin d'en garantir l'accessibilité. Par cohérence avec ce qui est déjà possible en matière de nom d'usage à raison du mariage, ou de nom de famille, l'article 1er prévoit que toute personne majeure peut porter à titre d'usage le nom de l'autre parent, par substitution ou adjonction.
L'article 2 porte sur le nom de famille, qui est inscrit à l'état civil et se transmet aux enfants. Il vous est proposé d'ouvrir une nouvelle procédure simplifiée de changement de nom, qui s'ajoutera à la procédure prévue aux articles 61 à 61-4 du code civil. Celle-ci suppose de saisir le ministre de la justice, de témoigner d'un intérêt légitime et d'accomplir des formalités, payantes, de publication au Journal officiel. Il faut attendre au minimum deux ans l'admission de la requête, qui demeure incertaine. Certes, la mise en œuvre de la procédure n'est pas aussi restrictive qu'il y a trente ans, les pratiques ayant évolué sous la pression de la Cour européenne des droits de l'homme. Alors que seuls quelques motifs étaient recevables – changer un nom ridicule ou difficilement prononçable, empêcher l'extinction d'un nom ou relever celui d'un illustre ancêtre –, le Conseil d'État reconnaît depuis 2012 qu'un motif affectif peut être légitime. C'est une avancée.
Mais est-ce au ministère de la justice d'apprécier la douleur d'une personne qui ne souhaite plus porter le nom d'un parent violent ou qui l'a délaissée, et qui, notamment, ne veut pas le transmettre à ses propres enfants ? Faut-il imposer à cette personne une procédure longue et payante ? Je ne le pense pas.
Je propose de simplifier la procédure dans le seul cas où il s'agit, pour une personne, de prendre, par adjonction ou substitution, le nom du parent qui ne lui a pas été attribué. Le texte prévoit qu'elle peut en faire la demande devant l'officier d'état civil de son lieu de naissance. Je vous proposerai un amendement visant à prévoir qu'il peut s'agir de l'officier de l'état civil du lieu de résidence. Cette procédure est réservée aux majeurs et ne peut être utilisée qu'une seule fois au cours de la vie ; le choix du nom est limité aux noms issus de la filiation. Cette procédure demeure inscrite dans le cadre familial et ne permet en aucun cas de choisir un nom fantaisiste.
Comme dans le cadre de la procédure administrative de changement de nom, le changement de nom acquis sur le fondement de cette procédure simplifiée s'étend de plein droit aux enfants du bénéficiaire lorsqu'ils ont moins de 13 ans, et sous réserve de leur consentement au-delà.
Il n'est pas prévu de procédure d'opposition semblable à celle figurant à l'article 61 du code civil. En revanche, les deuxième à cinquième alinéas de l'article 61-3-1 étant applicables, en cas de difficultés, l'officier de l'état civil peut saisir le procureur de la République, lequel peut s'opposer à la demande ou y faire droit.
Le changement de nom sera systématiquement inscrit dans le registre de naissance. Un avis de mention sera transmis aux officiers de l'état civil détenteurs des autres actes de l'état civil concernés – ceux du conjoint, du partenaire lié par un pacte civil de solidarité (PACS) et des enfants.
Cette procédure simplifiée s'inscrit dans le cadre du choix du nom issu de la filiation. Les autres demandes devront continuer d'être formulées sur le fondement de l'article 61 du code civil.
L'article 3 supprime la représentation obligatoire du majeur protégé par son représentant légal aux fins de déposer devant l'officier de l'état civil la demande de changement de prénom. Cette mesure permet de mieux garantir l'autonomie des majeurs protégés pour les prises de décisions relatives à leur personne.
L'article 4 prévoit de différer au 1er juillet 2022 l'entrée en vigueur de la proposition de loi afin de permettre à l'administration et aux services de l'état civil de prendre en compte les nouvelles procédures.
Depuis le dépôt de cette proposition de loi, je reçois chaque jour de nouveaux témoignages. Des milliers de personnes attendent une procédure simple et non coûteuse qui leur permette d'effectuer ce changement de nom, qui touche à l'intime, plus librement. C'est ce que contient cette proposition de loi, inspirée par un idéal de liberté et d'égalité.