Intervention de Cécile Untermaier

Réunion du mercredi 26 janvier 2022 à 9h00
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCécile Untermaier :

Le traumatisme causé par les fraudes au vote postal constatées en 1975 pèse lourd, et de manière injuste, en 2022. Le dispositif proposé est en effet tout autre. J'ai moi-même déposé une proposition de loi analogue à celle-ci en septembre 2021 : les deux textes diffèrent sur la forme mais, sur le fond, les objectifs sont les mêmes.

L'instauration de modalités de vote différentes est plus que pertinente : c'est une exigence démocratique. Elle nous paraît même tardive, compte tenu des difficultés liées à la pandémie, mais nous nous sommes heurtés à l'opposition du ministère de l'Intérieur. Si nous soutenons ce texte, c'est pour une raison simple : il faut faciliter l'expression de la volonté souveraine des Françaises et des Français. C'est pour cette raison que le vote a lieu le dimanche et qu'à 18 ans, on est inscrit automatiquement sur les listes électorales, et c'est à cette fin que le vote par correspondance doit être généralisé. En s'y refusant, la France fait figure d'anomalie parmi les démocraties libérales : il est possible de voter par correspondance en Allemagne, aux États-Unis, en Suisse, en Espagne, au Royaume-Uni et en Australie – la liste n'est pas exhaustive.

Lorsque, au cours d'une réunion de l'Assemblée parlementaire franco-allemande, j'ai demandé à Angela Merkel pourquoi le taux d'abstention était plus faible en Allemagne qu'en France, elle m'a répondu que cette différence s'expliquait uniquement par le vote par correspondance ! C'est du reste à la suite de cet échange que j'ai décidé de déposer la proposition de loi que j'évoquais au début de mon propos.

Le vote par correspondance n'est pas, dans les pays où il est autorisé, un phénomène marginal ou cosmétique : la part des voix exprimées par correspondance a été, en Allemagne, de 28,6 % aux élections législatives de 2017, en Australie, de 8,5 % en 2016 et, aux États-Unis, de 26 % à la présidentielle de 2016 et de 42 % à celle de 2020, la participation ayant par ailleurs augmenté de onze points entre ces deux élections.

Ce n'est pas la panacée de la démocratie : le vote par correspondance ne supprimera pas le sentiment de confiscation qui résulte de l'injonction que constitue le vote utile, du fait majoritaire et des déséquilibres inhérents au semi-présidentialisme – pour ne pas dire à l'ultraprésidentialisme – de la Ve République. Pour y remédier, il faut modifier les modes de scrutin et l'équilibre des pouvoirs.

Mon regret est que le dispositif proposé soit expérimental, mais il est vrai que la date à laquelle nous examinons la proposition de loi est problématique. Il nous faut, comme vous l'avez dit, monsieur le rapporteur, simplifier l'inscription sur les listes électorales, car près de 8 millions de personnes ne sont pas inscrites sur les listes de la commune où elles résident. C'est, du reste, un problème pour les maires, qui ne rencontrent plus les nouveaux habitants de leur commune. Même si cela est très difficile, ceux-ci devraient être inscrits automatiquement sur les listes de leur commune de résidence et rencontrer le maire au moment de leur emménagement. Tant que cela ne sera pas le cas, le vote par correspondance apparaîtra comme d'autant plus nécessaire.

Enfin, la Commission supérieure du numérique et des postes a rendu, le 10 novembre 2021, un avis sur la modernisation des processus électoraux dans lequel elle conclut à la nécessité d'instaurer le vote par correspondance, qui est attendu par nos concitoyens.

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