Comme le disait le philosophe cuisinier grec Ésope de la langue, internet est capable du meilleur – il donne facilement accès à d'innombrables informations – comme du pire.
Parmi les difficultés que soulève le présent texte, je mentionnerai d'abord le choix d'une proposition de loi et non d'un projet de loi. La première est dispensée de l'avis du Conseil d'État et d'étude d'impact. Étant l'auteur de plusieurs propositions de loi, je suis bien placé pour savoir que, de ce fait, leur objet et le temps que nous consacrons à leur étude sont souvent limités.
Ensuite, il faut veiller à la proportionnalité des limites qui sont posées à des libertés essentielles – je suis toujours inquiet de telles restrictions. Nous ne sommes pas en Chine mais ce qui s'y passe doit nous alerter : la facilité avec laquelle internet est instrumentalisé pour fliquer les citoyens est affreuse.
Les plateformes expliquent qu'elles devront recourir à des algorithmes pour se conformer à l'obligation de retrait en une heure. C'est donc soit une machine soit l'autorité administrative qui décidera des contenus autorisés ou non. J'aurais préféré que ce soit le juge. C'est certes plus long et plus compliqué mais aussi plus respectueux de la séparation des pouvoirs. Nous avons déjà vu des préfets prendre des décisions d'interdiction de manifestation ou de stade dans le seul but de limiter d'éventuels désagréments pour eux.
Certains estiment que le règlement européen serait contraire à la Constitution. Comment surmonter un tel obstacle ? La révision de la Constitution n'est pas envisageable dans les quinze jours qu'il nous reste… Quelle sera donc la pérennité de la proposition de loi ?
Il est bien difficile de concilier notre droit, les libertés essentielles et la nécessaire protection contre des contenus inacceptables.