Avec les pouvoirs publics, nous entretenons des relations plus ou moins régulières et étroites selon les sujets. Avec les ministères, nous avons des contacts réguliers, la question la plus importante étant de savoir si nous considérons être convenablement associés à leur réflexion. La chose est assez variable selon les thématiques, les ministères et les sujets – mais, d'une façon générale, nous considérons ne pas y être suffisamment associés.
En ce qui concerne ce que beaucoup de ministères appellent désormais la co‑construction, nous sommes souvent assez déçus du résultat et du peu d'importance que l'on accorde à notre avis et à notre expertise. Nous avons en effet, au fil du temps – nous sommes une fédération quasi centenaire – acquis de l'expérience, et nous disposons d'un maillage territorial de proximité. À ce titre, nous avons une parole et une vision qui pourraient être davantage prises en compte sur un certain nombre de sujets.
Avec les représentants du pouvoir législatif, nous avons des contacts réguliers, notamment du fait de l'importance de notre maillage, ce qui fait que beaucoup de députés, en nombre variable toutefois selon les départements et la vivacité de nos associations au plan local, connaissent la FNATH qu'ils rencontrent sur le terrain. Cela nous permet d'accompagner des personnes que les députés reçoivent dans leurs permanences et orientent vers nous. Sur le plan national, nous rencontrons aussi régulièrement les parlementaires, souvent dans le cadre d'auditions, ce qui est l'occasion de faire entendre notre point de vue sur un certain nombre de sujets, notamment sur des projets de loi.
Mais, de façon globale, il serait utile que nous puissions être entendus plus en amont des diverses prises de décision.
S'agissant des obstacles les plus fréquents rencontrés sur le lieu de travail, je ne pense pas qu'il faille distinguer les accidentés du travail en tant que tels, car ces obstacles sont rencontrés par les handicapés en général.
En revanche, les taux d'incapacité résultant d'accidents du travail ne sont pas très élevés : de 9 % pour les troubles musculo-squelettiques (TMS), par exemple, ce qui n'est pas perçu comme très lourd et peut conduire à penser que l'intéressé peut continuer de travailler sans dommage. Or, il faut avoir présent à l'esprit qu'un taux de handicap, même faible, peut avoir des impacts extrêmement importants.
Ainsi, par exemple, la caissière atteinte d'un trouble musculosquelettique évalué à 9 % d'incapacité, qui ne peut plus bouger son poignet, va rencontrer des difficultés accrues en termes de maintien dans l'emploi par rapport à quelqu'un connaissant un taux de handicap plus lourd, mais qui sera susceptible de bénéficier d'aménagements de poste.
Par ailleurs, les difficultés que peuvent rencontrer les travailleurs handicapés et les personnes handicapées dans le monde de l'entreprise sont liées à la sensibilisation des employeurs et des collègues et à l'image du handicap. La perception de celui-ci peut être négative quant à l'aptitude des intéressés à contribuer à la vie du collectif de travail. Cela risque de rendre laborieux les aménagements de poste ou les efforts d'amélioration de l'accessibilité des lieux de travail – ainsi qu'il m'a semblé pouvoir l'observer à l'Assemblée nationale, bien que j'aie constaté que des efforts avaient été faits.
Les obstacles sont notamment liés à l'accessibilité globale, qui ne se résume pas à la simple accessibilité pratique du bâtiment : je pense notamment aux personnes aveugles, mais aussi à l'accessibilité des logiciels internes que toute structure de travail est susceptible de développer, ainsi qu'à la difficulté, pour bon nombre de travailleurs handicapés, accidentés du travail ou non, d'accéder à la formation tout au long de la vie.
Voilà ce que j'avais à dire au sujet des accidentés du travail, bien que je ne sois pas certain que les obstacles qu'ils rencontrent se distinguent particulièrement de ceux rencontrés par les handicapés en général.
Vous m'avez demandé si les administrations publiques protègent mieux leurs agents handicapés. J'aurais tendance à penser que non, ce qui est d'ailleurs dommage, puisque l'on attend toujours des institutions publiques qu'elles soient exemplaires dans leur comportement. Notre vision est probablement quelque peu biaisée, car on ne parle jamais des trains qui partent à l'heure ; mais de plus en plus de fonctionnaires gagnent nos rangs, ce qui me laisse à penser que la situation n'est pas aussi bonne qu'elle pourrait l'être.
Vous m'avez encore demandé si la prévention des risques professionnels était suffisante et comment elle pouvait être améliorée.
Le nombre d'accidents du travail et de maladies professionnelles demeure trop important, même s'il tend à diminuer dans certains secteurs et pour certains types d'accidents. Je reconnais toutefois qu'un effort global est fourni pour diminuer l'occurrence des accidents du travail et des maladies professionnelles.
L'impulsion politique existe bien, mais sa traduction dans les faits reste compliquée. Il serait d'ailleurs souhaitable qu'un lien plus consistant puisse être tissé entre les pouvoirs publics et les employeurs publics et privés. Il faudrait surtout intervenir le plus en amont possible, et cibler le plus grand nombre possible de situations à risque.
C'est le cas du risque routier, qui concerne tous les employeurs, Assemblée nationale comprise. Le risque d'accident de trajet est souvent sous-estimé dans bien des entreprises, qui toutes ne s'occupent pas de transport, alors que le sujet concerne tout le monde. Des actions restent donc à mener pour ce type de risques, comme pour les troubles musculosquelettiques, notamment dans les secteurs médico-social et sanitaire, seul secteur connaissant une augmentation des accidents du travail et maladies professionnelles. Les personnels employés dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) se plaignent d'ailleurs souvent de leur situation ; mais nous abordons là un sujet d'actualité…
Si elle demeure insuffisante, la prévention n'en consiste pas moins un axe majeur qui est en progression ; mais nous rappelons que ces progrès ne doivent pas être accomplis au détriment de l'indemnisation, car il faut agir sur les deux volets du diptyque.
Par ailleurs, je n'ai guère d'information sur le pourcentage de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH), car les statistiques font défaut, et j'ignore si un tel chiffre existe. En revanche, il est acquis que toutes les personnes titulaires d'un taux d'invalidité de 10 % lié à un accident du travail bénéficient automatiquement de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés. Cela peut persuader les employeurs de conserver leurs employés victimes d'une incapacité contractée sur leur lieu de travail, afin de remplir leurs obligations légales d'emploi de travailleurs handicapés.