Intervention de Emmanuelle Wargon

Réunion du mercredi 17 février 2021 à 15h00
Délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation

Emmanuelle Wargon, ministre déléguée :

Je partage les propos de Sébastien Jumel relatifs à la liberté donnée aux collectivités pour s'organiser et trouver leur propre équilibre dans l'organisation territoriale.

Nous avons fait le choix de placer la définition de la trajectoire de la désartificialisation à l'échelle régionale. Nous avons cherché un point d'équilibre entre les demandes de la Convention citoyenne et le respect de la libre administration des collectivités locales. L'idée est d'en rester à ce qui existe dans le droit commun, à savoir la cohérence entre les différents documents, et non d'imposer leur conformité. Je suis en revanche ouverte à l'idée d'allonger les délais de transposition : il serait en effet trop ambitieux de la faire en trois ans, alors que certaines collectivités sont sur le point d'adopter leur SCOT ou leur PLUI.

Nous avons réfléchi à une différenciation selon les régions, mais nous ne disposions pas de critères qui pourraient être acceptés par tous. De plus, les régions sont désormais suffisamment grandes pour que l'objectif de 50 % soit atteint partout. Pour la région Île-de-France et les outre-mer, toutefois, ce taux sera fixé dans la négociation locale car ces deux cas sont particuliers.

Le projet de loi définit l'artificialisation et le net, mais renvoie au décret pour préciser ces notions. Il faudra trouver un équilibre entre le net d'un côté et la renaturation de l'autre. Il est important de conserver cette soupape car nous aurons toujours besoin d'utiliser des terres naturelles, notamment en cas d'extension de villes, d'activités économiques ou industrielles. À l'inverse, nous devons être en mesure de rendre des terres à la nature, et malheureusement beaucoup de terres sont devenues des no man's lands.

Les surfaces commerciales et les entrepôts se situent sur des plans différents. Le choix du commerce physique conduit à se déplacer, tandis que l'e-commerce permet de se faire livrer sans se déplacer. C'est un choix de société. La localisation des entrepôts n'empêchera pas les gens de se faire livrer : s'il n'y avait plus d'entrepôts en France, l'e-commerce continuerait de fonctionner avec des entrepôts situés en périphérie, en Belgique ou en Allemagne. Il y aurait davantage de camions sur les routes et les délais de livraisons seraient un peu plus longs, mais le commerce à distance en France existerait toujours.

Néanmoins, ces entrepôts consomment beaucoup d'espaces. Le ratio espace consommé-emplois créés est extrêmement bas et la valeur ajoutée pour les territoires est faible. Face à cette difficulté, nous avons décidé de procéder différemment. Tout d'abord, une mission inter-inspections a été créée et nous attendons ses conclusions. Ensuite, l'installation d'un entrepôt sur une terre naturelle ou agricole crée une artificialisation brute importante, ce qui nécessitera une compensation. Ce mécanisme aura un impact sur l'installation des entrepôts sur des terres naturelles. Nous aurons vraisemblablement à traiter les entrepôts d'e‑commerce avec le tout-venant des installations, et non pas avec les surfaces commerciales, car ils ne sont pas tout à fait de même nature.

Il existe deux taxes sur la conversion des terres agricoles : une taxe d'État peu élevée et une taxe locale qui n'est pas toujours activée. Nous intervenons davantage sur les autorisations que sur la taxation, c'est-à-dire sur la restriction des zones à urbaniser ou déjà urbanisées et non utilisées.

Concernant les cœurs de ville et de village, nous avons ouvert des aides à la rénovation thermique. Toutefois, si la rénovation du patrimoine bâti des centres de village nécessite un financement exceptionnel, cofinancé par l'État et les collectivités, cela peut être étudié. L'envie de faire revivre des cœurs de bourg et de village est très cohérente avec la lutte contre l'artificialisation et le besoin de proximité. S'il manque un outil plus ciblé sur le patrimoine de cœur de ville et de village, je veux bien y retravailler avec vous et avec le ministère des collectivités territoriales.

Nous continuerons à avoir besoin de zones industrielles. C'est la raison pour laquelle nous nous orientons vers une réduction et non une suppression de l'artificialisation nette. C'est aussi pour cela que nous réfléchissons en net et non en brut. Nous continuerons à artificialiser – il est en effet illusoire de penser que nous ne le ferons plus jamais – mais nous le ferons moins et nous le compenserons.

Quant à la requalification des friches, c'est la première fois que l'on y consacre des crédits dans un fonds national. Ce n'est sans doute pas suffisant et je suis convaincue que les 300 millions d'euros seront consommés rapidement. Cet argent, qui provient du plan de relance, nous octroie un peu de marge de manœuvre. Il permet de payer la dépollution, notamment dans les cas où la recherche de responsabilité est vaine. C'est à cela que ce fonds sert.

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