Intervention de Bruno Lina

Réunion du mercredi 29 avril 2020 à 17h15
Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19 en france

Bruno Lina, professeur au CHU de Lyon et chef d'équipe au centre international de recherche en infectiologie (CIRI) :

J'ai l'honneur d'être membre du conseil scientifique Covid-19, qui se réunit chaque jour pendant deux ou trois heures pour aborder divers sujets et produire des avis destinés à éclairer le pouvoir exécutif.

En outre, je suis en relation suivie avec plusieurs membres du CARE au sujet notamment des outils de diagnostic et de surveillance virologique. Je dialogue assez fréquemment avec certains membres du groupe de M. Jean Castex, notamment MM. Didier Roussin et Benoît Vallet, au sujet de la mise en place des outils de diagnostic et des plateformes PCR, qui sont en cours de déploiement en France.

Il s'agit d'un enjeu essentiel de logistique et de diagnostic, car leur installation n'est pas simple. Nous devons relever le défi de parvenir à être rapidement opérationnel, afin de rendre le service attendu. De nombreux acteurs travaillent simultanément au développement de ces outils et à leur mise en place. Obtenir le maillage territorial que nous souhaitons pour tous les citoyens présente un degré de complexité assez élevé.

Je suis également coresponsable du centre national de référence des virus des infections respiratoires. Nous avons participé au développement et surtout à l'évaluation des divers outils de diagnostic. Les membres de mon équipe travaillent d'arrache-pied pour procéder à l'évaluation des tests PCR et des tests sérologiques, conjointement avec l'institut Pasteur.

La quantité de travail est astronomique. Nul n'imagine le nombre de kits qu'il faut tester et évaluer, la difficulté que cela représente et la pression qui s'exerce sur nous. Nous savons que ces outils sont particulièrement importants et très attendus et il ne faut pas se tromper : certains ne sont pas bons du tout, d'autres sont de qualité acceptable, voire bonne.

Par ailleurs, en raison de mes activités hospitalières, j'ai de très nombreux contacts avec les autres laboratoires de diagnostic hospitaliers, pour les accompagner dans le développement des outils. Pendant toute une période, la disponibilité des tests de diagnostic était soumise à une pression très forte, en raison d'une demande européenne et internationale gigantesque dans un contexte où la ressource avait été pour ainsi dire consommée par les pays asiatiques, de sorte que, même lorsque nous voulions monter en puissance, nous n'y parvenions pas faute de pouvoir sécuriser l'approvisionnement des laboratoires. Au mois de mars et au début du mois d'avril, de très nombreux laboratoires en France avaient une visibilité de deux à trois jours en matière de réactifs. Cette situation est résorbée, après avoir été très tendue, avec très peu de volant de souplesse.

En complément, nous développons et coordonnons des activités de recherche au sein du centre international de recherche en infectiologie, dont certaines des vingt-trois équipes se mobilisent au sujet du Covid-19, souvent en lien avec les hospices civils de Lyon, car nous sommes dans un temps de recherche très orienté vers la clinique, beaucoup plus que vers la recherche fondamentale. Des partenariats très forts s'établissent entre des équipes de virologie, d'immunologie humaine et de bactériologie pour tenter de comprendre les mécanismes du virus.

Nous avons obtenu quelques résultats décisifs, notamment sur le défaut de régulation du système immunitaire lorsque l'on développe une infection, ainsi que sur les phénomènes de cascade de cytokine et d'absence de contrôle de l'inflammation que l'on observe chez certains patients développant des formes graves de la maladie. Un article a été récemment publié à ce sujet.

Ainsi, notre activité de recherche couvre un champ très large, allant des sciences humaines et sociales à des dispositifs assez innovants, permettant d'avoir des diagnostics rapides – quinze secondes – sur de l'air expiré. Il y a là une véritable richesse. Je souscris à ce que disait tout à l'heure Florence Ader : la ressource humaine que constituent les chercheurs français, ainsi que leur inventivité, doit véritablement être exploitée. Notre créativité scientifique est très forte. Nous aimons à dire que, même si nous n'avons pas toujours autant d'argent que d'autres pays, notamment ceux qui se trouvent de l'autre côté de l'Atlantique, la recherche que nous menons est au même niveau de qualité de production que la leur car nous sommes bien plus inventifs qu'eux – je me permets ce bref cocorico !

Je serai ravi de répondre aux questions portant sur le virus et la virologie, ainsi que sur tout sujet dont vous voudriez débattre, notamment certains aspects de nos recherches et les travaux du conseil scientifique.

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