Le secteur des transports a été, comme tous les autres secteurs d'activité, durablement et profondément touché par la crise. Quatre-vingts pays ont pris des mesures de confinement avec des restrictions très fortes des déplacements individuels, et les frontières se sont très souvent fermées de manière non coordonnée.
Cela a induit des conséquences économiques très lourdes, qu'illustrent les deux chiffres suivants : la réduction très forte du trafic aérien, de l'ordre de 95 % – aujourd'hui Air France opère une dizaine de vols par jour, là où, d'ordinaire, elle en opère environ mille –, et le fait que plus de 80 % des entreprises de la logistique et du transport routier émargent au chômage partiel ; on ne saurait donner image plus parlante du choc économique opérationnel et organisationnel qui a secoué le secteur des transports.
Dans ce contexte, le Gouvernement a eu deux priorités : d'abord gérer la crise, ensuite préparer le déconfinement. Gérer la crise a en premier lieu consisté à accompagner la décrue de l'offre de transport pour ne préserver que les déplacements essentiels. Aujourd'hui, seuls fonctionnent environ 30 % du réseau RATP, 15 % du réseau SNCF, avec une restriction supplémentaire sur les trajets longue distance – 6 à 7 % des TGV et des Intercités, 15 % des TER, et, en région parisienne, environ 25 % des Transiliens.
Dans le secteur aérien, nous avons eu comme priorité, en lien avec Jean-Yves Le Drian, au Quai d'Orsay, de rapatrier nos compatriotes qui étaient éparpillés dans plus de quarante pays. À ce jour, ce sont plus de 170 000 Français qui ont été rapatriés, grâce notamment aux efforts de la compagnie Air France, mais pas uniquement. Cela a nécessité un travail assez fin et beaucoup de contacts bilatéraux ; je tiens ici à saluer les efforts considérables du Quai d'Orsay.
S'agissant du transport maritime et fluvial, les ports fonctionnent, avec un niveau d'activité de l'ordre de 50 %. Ce chiffre recouvre des situations très hétérogènes, les ports de Calais et de Dunkerque fonctionnant, par exemple, plutôt à 80 ou 90 % de leur activité habituelle.
Le transport de marchandises et les sites logistiques n'ont pas, en tant que tels, subit de restrictions, mais ils ont forcément pâti de la déstructuration des flux. Ainsi le secteur maritime a-t-il subi les arrêts consécutifs des bassins chinois puis indiens et, aujourd'hui, dans une moindre mesure, du bassin sud-américain.
Concomitamment à la décrue de l'offre, nous avons sécurisé l'exploitation. Ainsi, dans les transports urbains, nous avons fait en sorte que les mesures sanitaires permettent à la fois de sécuriser les voyageurs et les opérateurs : nous avons, par exemple condamné les portes avant des bus, de manière que les passagers entrent par l'arrière, et laissé une rangée vide entre le chauffeur et les passagers.
Enfin nous avons accompagné le secteur des transports à la fois par des mesures générales – chômage partiel pour les salariés, prêts garantis par l'État, reports multiples de taxes et de charges – et, quand cela était nécessaire, par des mesures spécifiques de soutien, comme l'aide aux transporteurs routiers. Nous avons, avec Gérald Darmanin, il y a quinze jours, annoncé des mesures de soutien complémentaires, de l'ordre de 390 millions d'euros, en faveur de ces entreprises qui irriguent l'ensemble de notre territoire.
Il s'agit désormais de préparer le déconfinement. Pour cela, nous avons une méthode, un objectif une stratégie. La méthode, c'est d'abord celle de la concertation, avec les élus et les opérateurs. Nous leur avons proposé des éléments de cadrage national, une doctrine sanitaire assortie d'objectifs très précis définis en lien avec le ministère de la santé, éléments qu'il s'agit de décliner localement, là où les spécificités du terrain s'apprécient de la manière la plus juste.
Notre objectif est simple, c'est que les trajets nécessaires puissent être effectués à compter du 11 mai, dans de bonnes conditions sanitaires, et notre stratégie consiste en trois axes relativement simples : augmenter l'offre de manière à avoir le maximum de trains, notamment pour les trajets quotidiens, et de manière également à réguler le nombre de voyageurs dans ses trains ; lisser la demande, c'est-à-dire notamment désengorger les heures de pointe, ce qui implique le recours au télétravail, qui a déjà été acté dans bon nombre d'accords d'entreprise mais que nous préconisons pour la période qui s'ouvre jusqu'au 2 juin ; instaurer enfin de nouvelles mesures de protection sanitaire, qui font l'objet d'un décret qui sera très probablement publié, à tout le moins arrêté dans ses modalités fines jeudi et qui, pose comme principe obligatoire le port du masque dans les transports, parmi d'autres mesures en lien avec certaines spécificités territoriales.
Nous faisons face à une situation inédite. Nous essayons, dans ce contexte, de prendre des mesures lucides, qui correspondent aux réalités des territoires et qui auront vocation à s'adapter au jour le jour, parce que le 11 mai ne sera pas le 12, ni le 13, et que, tant du côté de l'offre que celui de la demande, les choses vont être très évolutives.