La qualité des relations maires-préfets a été très différente d'un département à un autre. Certains préfets ont pris les choses en main, en confiant parfois à un sous-préfet le rôle d'interlocuteur auprès des collectivités ou en s'attachant à synthétiser les directives de l'État pour les rendre plus lisibles ; d'autres, en revanche, n'ont pas cherché à instaurer ce dialogue et sont restés dans une gestion très verticale. Comme souvent, hélas, la personnalité des hommes et des femmes a beaucoup compté : c'est pourquoi il est difficile de faire une analyse globale. Le fait est que dans les départements où les relations entre les maires et le préfet ont été harmonieuses, la situation a été moins difficile pour nos concitoyens : ces départements exemplaires pourraient servir de modèle pour l'avenir.
Notre vision de l'ARS n'a, hélas ! pas changé avec la crise. L'ARS était déjà pour nous l'empêcheuse de créer des maisons médicales, du fait de contraintes trop strictes, qui a freiné le développement de la téléconsultation dans nos territoires, qui a fermé des lits de réanimation dans nos départements, alors que nous en avions vraiment besoin ; cette crise n'a fait que conforter la vision que nous avions de cet organisme, qui n'a pas l'habitude de travailler avec les élus et qui fait même tout pour vivre sa vie sans les avoir « dans les pattes ». Il faut réformer l'ARS pour la rendre plus fluide et pour que les élus prennent part aux décisions. L'ARS n'a pas travaillé avec le préfet, alors que cela aurait été très utile.
La reprise du travail par le personnel communal a beaucoup dépendu, là encore, de la dynamique propre à chaque village. Là où la dynamique était positive avant la crise, les choses se sont généralement bien passées. Là où la situation était délicate et les relations entre élus, citoyens et agents difficiles, les choses ont eu tendance à s'aggraver.
Nos villages doivent avoir un rôle dans la reprise économique, mais il faut en finir avec les appels à projets. Nous n'en pouvons plus des intercommunalités qui, dans leur course à la dotation globale de fonctionnement (DGF) bonifiée – qui n'existe plus mais qui a fait beaucoup de dégâts – ont pris certaines des compétences des communes sans vraiment les assumer. Pour favoriser la reprise économique, il faut laisser de la liberté à nos villages. Il faut que les communes récupèrent les compétences assumées par le département, l'intercommunalité, le pays, le pôle d'équilibre territorial et rural (PETR) ou que sais-je encore, lorsque ces échelons ne font pas leur travail. Il importe aussi que les services qui nous ont tant manqué pendant cette crise, qu'il s'agisse de la santé, de la mobilité ou du numérique, arrivent enfin dans nos villages. Laissez-nous la main pendant quatre ou cinq ans et nous vous montrerons ce dont nous sommes capables.
S'agissant du reconfinement, il faut que les élus aient conscience que si une ou deux familles doivent être placées en quarantaine parce qu'elles constituent un nouveau cluster, ce sera au centre communal d'action sociale (CCAS) ou aux services de la commune de les accompagner pendant ces quatorze jours, pour les courses et les soins. De nombreux élus vont très vite être confrontés à cette situation ; il importe de les y préparer.
Les dispositifs qui ont permis aux conseils municipaux de continuer de fonctionner durant la crise m'ont paru être les bons : il était nécessaire que les maires puissent prendre des décisions sans consulter le conseil municipal lorsque celui-ci ne pouvait pas se réunir. Cela étant, il est urgent de faire revivre la démocratie en demandant aux conseils municipaux de se prononcer sur tous les aspects de la vie de nos villages. On peut envisager des réunions en visioconférence, voire des procédures sécurisées de vote à distance.
S'agissant de la baisse de la commande publique, notamment en matière d'urbanisme, il est clair que des artisans aimeraient reprendre le travail mais qu'ils sont bloqués, parce que les collectivités tardent à délivrer les autorisations de permis de construire.
Toutes les communes ne font pas face aux mêmes difficultés financières et la situation peut être délicate pour les villages qui ont une école. Nous ne pouvons pas, à l'heure actuelle, garantir une éducation de qualité à tous les enfants. Si cette crise dure un an ou deux, allons-nous pénaliser une génération entière ? Il faudrait, en recourant à des emplois aidés, introduire le dispositif Sport-Santé-Culture-Civisme (2S2C) dans nos villages, afin de gérer les enfants en demi-groupe à la rentrée de septembre et d'accompagner le travail des enseignants. Il faudra faire un énorme effort en matière de transports si nous voulons accueillir tous les enfants dans les écoles de nos communes rurales. C'est un enjeu d'égalité sociale qu'il faut traiter en urgence.