Intervention de Alain Griset

Réunion du mercredi 20 mai 2020 à 15h00
Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19 en france

Alain Griset, président de l'U2P :

Je suis moi aussi gêné par la notion de secteurs prioritaires. On a bien vu que les secteurs que l'on ne mettait pas d'ordinaire en avant sont devenus essentiels à la vie quotidienne des Français durant le confinement. Il me semble choquant de faire passer certains secteurs à la trappe : les photographes ou les couturiers dans l'événementiel ne seront pas considérés comme prioritaires alors qu'ils sont directement touchés. Cela n'enlève rien au fait qu'il faut des actions spécifiques pour ceux qui sont encore fermés, comme les hôtels cafés restaurants.

L'action publique doit être cohérente : à quoi cela servirait-il d'avoir dépensé des milliards pendant trois mois pour aboutir au même résultat en septembre, avec un niveau de chômage similaire à celui que l'on aurait eu en mai sans dispositif d'activité partielle ? Mieux vaut réduire progressivement la prise en charge et accompagner les entreprises qui en ont besoin.

Je voudrais souligner la grande responsabilité des chefs d'entreprise, puisque beaucoup avaient demandé à recourir au dispositif en totalité mais ont finalement gardé une partie de leurs salariés. Il y a ainsi une grande différence entre les montants très élevés que le ministère du travail avait annoncés et ce qui sera effectivement payé par l'État. Certes, il y a eu des excès – nous les condamnons –, mais ce n'est pas une raison pour pénaliser toutes les entreprises.

J'étais très sévère sur la santé au travail, mon jugement ne s'est pas amélioré avec la crise. Les organismes de santé au travail auront été encore plus absents de nos entreprises, ce qui est pour le moins paradoxal. Les entreprises, de leur côté, considèrent qu'elles paient trop cher pour un service inexistant. Cela ne fonctionne pas.

Il y a moins de télétravail dans nos secteurs d'activité, mais nous participerons aux discussions sur le sujet. Certains éléments sont positifs, d'autres, comme les conditions de travail ou la mesure de la productivité par l'employeur, posent question.

Le risque est grand de voir disparaître l'apprentissage, fondamental pour nos secteurs, si l'on ne prend pas rapidement des mesures fortes. Il faut d'abord garantir aux centres de formation des ressources suffisantes. La loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel ayant modifié leur financement, ils perdront des recettes si le nombre d'apprentis baisse ; certains devront fermer leurs portes. Par ailleurs, leur équilibre financier risque d'être compromis par l'application des règles sanitaires – matériel de protection, dédoublement des classes – : ces surcoûts pourraient être compensés par une augmentation du coût au contrat.

Les entreprises ont peut-être autre chose à penser que de recruter un apprenti, il faut leur envoyer un signal fort. Nous proposons qu'elles n'aient rien à payer pendant un an si elles gardent leur apprenti ou si elles en recrutent un nouveau.

Enfin, beaucoup de jeunes sont prêts à venir en apprentissage, mais les maîtres d'apprentissage seront vraisemblablement moins nombreux. Nous demandons que la période durant laquelle un jeune peut suivre le cycle de formation sans entreprise soit rallongée. Il faut prendre garde à ne pas exclure ces jeunes du système et à en faire une génération sacrifiée. Voilà trois mesures qu'il nous semble primordial de prendre d'urgence, car c'est maintenant que cela se passe ; si l'on attend un mois ou deux, on aura raté le moment.

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