Le fait de se doter des pouvoirs d'une commission d'enquête a en réalité un objectif spécifique. Pendant la première phase des travaux de la mission, j'ai ressenti une certaine frustration concernant notre capacité à avoir des débats et à interpeller nos interlocuteurs. En effet, la mission d'information avait vocation à suivre ce que le Gouvernement faisait des pleins pouvoirs que nous lui avions donnés, et à nous informer de l'évolution de la situation.
Elle a désormais deux rôles : un rôle d'évaluation et de contrôle visant à dessiner un système susceptible d'améliorer notre préparation aux crises, et un rôle de recherche de failles. Nous n'aurions jamais dû subir cette crise. Nous n'y étions pas préparés. Dans un État moderne, tout ceci aurait dû être prévu, et tout ceci était prévu. Cependant, de mauvaises décisions ont été prises par les responsables administratifs et politiques successifs. Des dysfonctionnements organisationnels et individuels se sont produits.
Pour nos auditions à venir, je souhaite que nous puissions participer avec le président et le rapporteur au choix des personnes auditionnées et en suggérer certaines, et qu'un temps de parole continu soit alloué par groupe et pour chaque intervenant. Les commissions d'enquête ont pour spécificité de pouvoir interroger les personnes auditionnées sous serment, sans qu'elles puissent se soustraire à leur convocation. Il faut que nous puissions approfondir les questions que nous posons, au-delà des une à deux minutes de temps de parole réglementaire. Nous avions décidé d'agir ainsi dans la commission d'enquête que j'ai présidée sur la grippe H1N1. De la sorte, nous avons pu identifier les dysfonctionnements de certains acteurs qui n'avaient pas été à la hauteur de leurs missions.
Je regrette l'aspect prématuré de la décision de la transformation en commission d'enquête, car elle ne nous laisse que six mois pour terminer le travail sachant que le calendrier législatif sera chargé en juillet et que le mois d'août est généralement peu productif. Pour augmenter le temps dont nous disposerons, la Conférence des présidents pourrait-elle décider de « neutraliser » le mois d'août afin qu'il ne soit pas comptabilisé dans les six mois ?
Si nous choisissions un autre mode de travail nous risquerions de choquer, car les Français sont nombreux à se demander pourquoi la gestion de la crise s'est moins bien passée chez nous qu'ailleurs. Des raisons structurelles l'expliquent, mais aussi sans doute des raisons organisationnelles dans l'appareil étatique lui-même.