Intervention de François Bourdillon

Réunion du mercredi 17 juin 2020 à 15h30
Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19 en france

François Bourdillon, directeur général de Santé publique France de 2016 à 2019 :

Lorsque survient une crise de cette ampleur, Santé publique France se mobilise dans son ensemble pour assurer ses fonctions d'alerte, de surveillance, de prévention et de réserve sanitaire, voire d'établissement pharmaceutique. Nos collaborateurs ont une très grande expérience des épidémies ; l'institution en recueille la mémoire. Nous avons essayé toutes les modalités de communication, à un moment ou à un autre. Cela étant, face à une crise de cet ordre, le monitoring relève d'une architecture interministérielle, car il faut penser au-delà de l'aspect strictement sanitaire. La question est de savoir comment Santé publique France contribue au processus de décision. J'ai vu que la directrice générale était associée au comité d'experts placé auprès d'Emmanuel Macron, mais j'ignore si elle a été impliquée dans tous les processus de décision.

Toute crise aboutit à un retour d'expérience de Santé publique France écrit et classé. La question du pilotage et de la coordination est systématiquement soulevée. Après le passage de l'ouragan Irma, on a mis en lumière la complexité des chaînes de commandement, qui impliquaient les responsables du Samu, les réservistes, la sécurité civile, les préfets et le directeur général de la santé. Il faut élaborer un système, qui doit être prévu dans la doctrine de réponse. Celle-ci est très importante, car elle permet de fixer le cadre et de procéder à des tests, concernant, par exemple, les établissements de santé de référence pour les risques infectieux ou le bioterrorisme : en fonction de la réactivité des hôpitaux, on réalise des corrections. Il est essentiel d'avoir une doctrine écrite, et de la faire évoluer. Nous étions sans doute préparés pour faire face à une pandémie grippale, mais pas pour affronter un coronavirus. On a connu précédemment deux coronavirus, le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) et le coronavirus du syndrome respiratoire du Moyen-Orient (MERS-CoV). À chaque fois, la France s'en est bien sortie, ne déplorant que deux cas de MERS-CoV. On a estimé qu'on savait gérer un coronavirus et on en a ressenti une forme de toute-puissance. Lorsque l'alerte chinoise a été lancée, on pensait donc arriver à y faire face. Personne n'imaginait que le virus circulait – comme cela a probablement été le cas – dès septembre en France.

La doctrine émane, par définition, du Gouvernement. Il paraît logique d'associer à son élaboration des agents de Santé publique France, mais il ne faut pas être juge et partie : l'agence ne doit pas bâtir des doctrines, car elle risquerait de prêcher pour sa paroisse. Dans le processus de décision, les agences sanitaires ne peuvent avoir cette attribution. Les arbitrages doivent être réalisés par les ministères de la santé et des finances. On ne peut pas imaginer qu'une agence aille frapper à toutes les portes.

Cela dit, j'ai beaucoup plaidé, avant mon départ, pour que l'agence soit financée exclusivement par l'assurance maladie, en lieu et place de l'État, afin de protéger l'emploi et, de manière générale, l'institution. L'assurance maladie a en effet la santé dans ses gènes et dispose des moyens de fonctionner. Nous avons subi, depuis 2010, une baisse de 20 % de nos effectifs.

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