Je n'ai pas d'avis sur l'intégration de l'EPRUS au sein de l'Agence nationale de santé publique (ANSP) à sa création, en 2016 ; j'étais alors en poste en région, et je n'ai pas vécu suffisamment de situations délicates pour dresser un constat à ce sujet. Il était toutefois nécessaire que les missions initiales de l'établissement pharmaceutique se retrouvent intégralement dans la nouvelle agence et y soient effectuées de la même manière ; il me semble que c'est le cas.
Concernant les réformes à mener, nous avons collectivement découvert l'importance des autres équipements de protection – notamment les blouses, surblouses et charlottes – qui, contrairement aux masques, ne sont pas intégrés dans les stocks stratégiques nationaux, et qui ont constitué un sujet de préoccupation pour les personnels, en particulier dans les EHPAD. Dans certains hôpitaux, on a dû revenir à l'utilisation d'équipements en tissu, voire de sacs poubelle. Il faut tirer la leçon de ce que nous avons vécu pour lancer une réflexion au sujet de ces équipements indispensables dont on ne parle jamais.
Sur un plan plus structurel, au-delà de la question d'une deuxième vague, il ne faudra pas attendre trop longtemps pour revoir le circuit de distribution des stocks. Ce n'est pas un travail considérable ; il s'agit d'assembler des éléments existants et de régénérer la doctrine pour la moderniser et l'adapter aux réalités du terrain. Heureusement, on ne voit que très rarement une crise de cette envergure ; mais c'est entre les crises qu'il faut agir pour faire évoluer les dispositifs. Souvenons-nous de 2010 : à la suite de la pandémie de H1N1, le pays trouvait qu'on en avait fait beaucoup, et qu'il était peut-être inutile de continuer à entasser trop de matériel ; une réflexion avait été engagée en ce sens par la représentation parlementaire.
À l'aune de ce que nous venons de vivre, nous devons à nouveau réfléchir à nos méthodes pour les rendre plus modernes, plus adaptées et plus structurées, et revoir nos procédures de façon à les clarifier et à les simplifier. Il ne faut pas attendre, et nous devrons nous y plonger dès la rentrée, en gardant à l'esprit que ce qui était bon à une époque ne l'est plus forcément par la suite, et que nous devons donc rester vigilants.
Il faut aussi que chaque année, lors des discussions du PLFSS, l'état des stocks soit affiché. Vous conviendrez avec moi que ce sujet n'intervient pas souvent dans vos débats.
Enfin, il faut revoir l'organisation structurelle du système de santé dans les territoires. Je suis peut-être à contre-courant, mais je pense qu'il ne doit y avoir qu'une autorité sanitaire en région ; le positionnement des cellules d'intervention en région (CIRE) au sein des ARS doit être revu pour que ne subsiste plus qu'un interlocuteur. Une structure comme la Haute Autorité de santé (HAS), totalement indépendante en matière d'expertise mais reliée à l'État par un contrat d'objectifs et de performance (COP), pourrait remplir cette fonction. Une telle réorganisation permettrait une gestion des stocks coordonnée entre SPF et les ARS et une harmonisation de l'ensemble des dispositifs.
Dans notre région, le contact-tracing a été remarquablement effectué par le personnel de SPF, jusqu'à ce que mes équipes prennent le relais, partiellement puis totalement, alors que cette mission ne faisait initialement pas partie de leurs prérogatives. Il serait plus cohérent que toutes les personnes chargées d'un même type de mission soient regroupées dans une même entité. Sur le terrain, et surtout en temps de crise, il ne doit pas y avoir trop de responsables – trois, c'est un nombre impair et c'est beaucoup trop. Il faut donc revoir l'organisation pour pouvoir travailler plus efficacement, comme nous avons su le faire sous l'autorité du préfet ou même s'agissant du contact-tracing, pour lequel nous avons associé dans un point quotidien au niveau départemental le dirigeant de la caisse primaire d'assurance-maladie (CPAM), le DT de l'ARS et le préfet de département, de façon à ce que l'information circule.