Intervention de Didier Raoult

Réunion du mercredi 24 juin 2020 à 17h00
Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19 en france

Didier Raoult, directeur de l'institut hospitalo-universitaire Méditerranée Infection :

Bien que j'aie moi-même deux centres nationaux de référence, je n'y suis pas favorable s'ils deviennent le petit monopole ou le terrain de chasse de ceux qui les dirigent. Au moment de l'épidémie d'Ebola, seul le laboratoire P4 de Lyon pouvait faire des tests PCR. Dès qu'on avait un malade, il fallait envoyer le sérum là-bas, nous n'avions pas le droit de réaliser des tests, alors même que des réactifs étaient commercialisés pour le faire. Ce sont les militaires, à Paris, qui ont fini par décider de faire eux-mêmes leurs tests, à Bégin. Le risque, quand quelqu'un a un centre de référence, c'est qu'il s'approprie une maladie pour devenir l'homme de l'année. Au début de la crise, nous avons demandé à Bruno Lina de nous envoyer la souche pour avoir un témoin positif vivant, plutôt qu'un témoin positif artificiel : il ne nous a jamais répondu. Les humains sont des humains et il est dangereux de confier la sécurité du pays à des personnes qui considèrent que c'est leur affaire personnelle.

L'IHU a été fait dans la douleur mais j'estime que j'ai fait mon devoir. Nous avons prouvé qu'il fallait une structure de ce type et je pense même qu'il en faut plusieurs, pour qu'on ne dise pas qu'il n'y a qu'à Marseille qu'on arrive à faire s'écrouler le taux de mortalité et à avoir des statistiques sur les données. L'État doit se saisir de la question des épidémies mais j'ai constaté, quand j'étais chargé de mission auprès de Jean-François Mattei, que l'Institut Pasteur et l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) voulaient tout prendre en charge, alors que leur organisation ne s'y prêtait pas – que fait-on quand on a besoin d'un résultat le week-end ou après dix-neuf heures et que ces établissements sont fermés ?

Ce fonctionnement est d'un autre temps. La seule institution qui est ouverte jour et nuit, c'est le CHU. Dans les gros CHU, il y a du personnel en permanence et des machines. Il faut y regrouper les infectiologues et les microbiologistes capables de faire de la biologie moléculaire pour qu'ils travaillent ensemble. À l'IHU, nous sommes suréquipés et nous sommes les seuls à pouvoir relever le défi technologique lancé par l'Extrême-Orient. Je suis inquiet de voir que c'est la seule région du monde qui a encore un niveau scientifique compétitif : il n'y a rien de comparable, ni en Europe, ni aux États-Unis. Pourtant, si vous avez un synthétiseur pour faire vos amorces et que vous réalisez vous-même la préparation, vous pouvez faire des PCR pour tout ce que vous voulez.

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