Il n'y a pas eu de changement de doctrine en 2013. Le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale a fait le choix d'une doctrine de protection de travailleurs face aux maladies hautement pathogènes à transmission respiratoire, qui ne modifiait pas celle du Haut conseil pour la santé publique.
C'est écrit noir sur blanc dans le document : la doctrine du SGDSN tire d'une part les conséquences du changement de doctrine de 2011, qui réduit drastiquement l'utilisation des masques FFP2. D'autre part, elle rappelle les dispositions des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, issus de l'ordonnance n° 2007-329 du 12 mars 2007, qui font porter sur les employeurs la responsabilité de la sécurité et de la santé physique et psychologique des salariés.
Ces deux changements sont intervenus avant 2012 et le SGDSN n'a fait qu'acter qu'il appartient désormais aux employeurs, au nom de leur responsabilité dans la protection de leurs salariés, de constituer des stocks s'ils le souhaitent. Le document n'y oblige pas les employeurs, mais précise que « l'employeur devra prendre les mesures d'organisation nécessaires pour que les travailleurs ne soient en contact qu'avec les personnes à qui on aura préalablement distribué des masques anti-projections et qui les porteront effectivement ». Il n'y a donc pas de changement de doctrine.
En conséquence, le SGDSN, rattaché aux services du Premier ministre, a demandé à chaque ministère de faire passer la consigne aux secteurs dont il a la tutelle. Il ne m'appartenait donc pas de transmettre ces consignes aux entreprises privées – cela relevait de la direction générale du travail. Je ne sais pas si cela a été fait, mais il existe un accusé de réception.
C'est également suite à cette publication que le ministre de l'intérieur, Manuel Valls, et moi-même avons pris une circulaire à destination des préfets de zone et des agences régionales de santé, le 21 août 2013. Elle précise notamment que la compétence d'achat et de gestion des stocks de masques relève désormais des établissements de santé.
La DGS – et elle seule, la décision ne relevant pas de mon niveau de compétence – adopte alors des procédures pour créer un système d'information, le SIGeSSE (Système d'Information et de Gestion des Situations Sanitaires Exceptionnelles). Les établissements le renseignent et il permet de s'assurer que ces derniers disposent bien des masques dont ils ont besoin. La plupart des établissements de référence avaient des stocks de masques en quantité variable, la moyenne semblant s'établir autour de deux mois – pour une utilisation en situation normale.
Ai-je commandé des masques ? La doctrine de 2011 ne parle pas d'un milliard de masques, mais j'ai toujours considéré que nous devions nous approcher au maximum de cet objectif. Je ne me levais pas tous les matins en me disant « un milliard, un milliard, un milliard ! », mais je n'ai jamais considéré que nous devions réduire le nombre de masques !
Il y a eu des interférences : les deux plus importantes ont été la variole et Ebola. Nous avons acquis 140 millions de masques, dont 56 millions le 21 février 2014, 20 millions le 20 mai 2015 et 10 millions en 2016. Nous sommes ainsi parvenus à 754 millions de masques. Cela ne fait pas un milliard mais c'est plus que les 730 millions que j'ai trouvés à mon arrivée. Cela démontre notre volonté, d'autant qu'on m'expliquait que nous étions parés avec 750 millions de masques et qu'ils n'avaient pas de date de péremption.
En ce qui concerne les FFP2, certes, l'analyse a été différente, mais nous disposions de stocks jusqu'en 2016. Ils ont ensuite décru au fur et à mesure de leur péremption. En période normale, leur consommation est très limitée car leur utilisation est très ciblée – moins de 10 millions par an. Peut-être faudrait-il maintenir des stocks ? C'est une piste à explorer.