Intervention de Jean-Marie Woehl

Réunion du mercredi 8 juillet 2020 à 15h00
Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19 en france

Jean-Marie Woehl, président de la commission médicale d'établissement (CME) des hôpitaux civils de Colmar :

Ce plan blanc a été particulier par sa durée. Nous avons l'habitude de déclencher des plans blancs ou des plans de tension, mais pas pendant deux mois, et même bien plus, puisqu'il continue de courir. C'est une particularité qui pose des questions en termes de gestion des personnels, des congés et des repos, qui ne sont pas habituellement abordées dans les plans blancs.

À propos de la collaboration public-privé, j'insiste sur le fait que nous avons vécu, à Mulhouse et à Colmar, dès le 3 mars et en l'espace de quelques jours, l'arrivée d'un tsunami. L'image est juste. Très rapidement, la collaboration avec nos collègues du privé s'est mise en place, mais ces établissements ne peuvent donner que ce qu'ils ont. Si je prends l'exemple du Haut-Rhin, deux gros établissements, à Colmar et Mulhouse, réalisent 25 000 actes chirurgicaux par an, et une grosse fondation privée, la Fondation de la maison du Diaconat, qui a trois cliniques chirurgicales et médicales – deux à Mulhouse et une à Colmar – 30 000 actes chirurgicaux par an. C'est donc une activité très importante. Lorsque nous nous sommes réunis pour voir comment graduer l'offre de soins, nos collègues du privé n'avaient que trois respirateurs lourds, alors que, nous avions quarante lits équipés à Colmar et autant à Mulhouse. C'est dire que le concours du privé – qui nous a été d'un grand secours – n'a pu se faire que dans une gradation de l'offre de soins, en deuxième rideau. Je répète que cela nous a énormément servi, mais on ne peut pas demander aux gens ce qu'ils ne peuvent pas faire.

Cela vaut aussi pour les personnels, médicaux et non médicaux. Nos collègues de la clinique, majoritairement des anesthésistes, ont l'habitude de gérer des blocs opératoires et des anesthésies, pas de la réanimation lourde. Notre chef de pôle d'anesthésie-réanimation a travaillé avec nos collègues d'anesthésie du privé lors de séquences de mise à niveau leur permettant d'accueillir des patients lourds. De même, une infirmière anesthésiste diplômée d'État (IADE) ne fait pas le même travail qu'une infirmière de réanimation. C'est donc par la gradation et la complémentarité de l'offre, que nous avons réussi à sortir de cette difficulté.

Vous avez évoqué les GHT. Le sud du Haut-Rhin est organisé en un GHT unique autour de l'établissement fusionné de Mulhouse, alors que Colmar a un GHT plus fédéral, avec deux autres établissements MCO (Médecine-Chirurgie-Obstétrique) de tailles beaucoup plus réduites. La complémentarité a été bonne, puisque nous avons pu réactiver dix lits d'unité de soins continus en réanimation lourde dans l'établissement partenaire de Sélestat. Cette gradation dans la prise en charge nous a permis de répondre à la demande.

Vous nous interrogez sur la répartition entre le 18 et le 15. Pour ma part, je suis médecin lieutenant-colonel de sapeurs-pompiers, je réponds donc aux deux numéros… Ma réflexion n'engage que moi, mais je crois que cette polémique est mal venue. Nous n'en sommes pas à l'heure de la revendication. Il y a probablement dans le rapport que vous avez évoqué énormément de maladresse, d'exagération, tout comme il n'est pas vrai, comme l'affirment mes collègues des centres de régulation 15 que tout s'est bien passé.

Dans le Haut-Rhin le flux habituel de 500 à 600 appels par jour au SAMU 68 est monté en 48 heures à plus de 2 000 appels quotidiens de patients. Bien sûr qu'il n'a pas pu y répondre seul. Avec l'aide des médecins libéraux, des étudiants en médecine, nous avons monté une première puis une deuxième salle de délestage, qui n'ont pas suffi. Nous en avons monté une troisième, en cellule de crise à la préfecture ; puis une quatrième… Tout cela a été réalisé avec les médecins-pompiers, les médecins des SAU (Service d'accueil des urgences), médecins pompiers eux-mêmes, qui régulaient, tous ensemble. Et je pense que nous n'aborderons efficacement la deuxième vague – dont la probabilité est loin d'être éliminée – que si nous restons unis et de convergents.

Bien sûr qu'il y a à redire, des deux côtés – j'y insiste : des deux côtés. Mais, très sincèrement, l'heure n'est pas à la polémique mais à se demander de quelle manière on peut travailler ensemble. Dans le Haut-Rhin, l'immense majorité des médecins-pompiers sont médecins du SAU et médecins SMUR (Service mobile d'urgence et de réanimation). Nous sommes même bleu-blanc-rouge, puisque nous équipons l'hélicoptère de la gendarmerie et que nous médicalisons l'unité médicale d'intervention du RAID de Strasbourg. Nous participons aux gardes de sapeurs-pompiers, aux gardes de SAU… Je crois que c'est le modèle que l'on doit suivre à l'avenir.

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