Intervention de Jean-Marie Woehl

Réunion du mercredi 8 juillet 2020 à 15h00
Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19 en france

Jean-Marie Woehl, président de la commission médicale d'établissement (CME) des hôpitaux civils de Colmar :

S'agissant des circulaires sur l'orientation des patients, personnellement je n'ai pas vu passer d'orientation officielle donnée par l'ARS ou par quelque organisme que ce soit. Je répète que nous avons essayé d'avoir des discussions collégiales, en fonction de l'état du patient.

Je serais bref sur le rapport des pompiers. J'ai lu ce matin que le vice-président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers avait déclaré qu'il y avait des points à amender, des choses à revoir dans ce bilan. Visiblement, on assiste à un rétropédalage.

Un mot des renforts sanitaires : ce n'est pas se lancer dans une diatribe anti-ARS, que de dire que, si l'on veut faire évoluer notre organisation, il faudra s'interroger sur les ARS. Les renforts sanitaires nous ont posé énormément de problèmes. Il y a deux systèmes distincts : les volontaires et la réserve sanitaire qui dépend de Santé publique France. Elle est plus ou moins bien organisée, mais elle donne au moins une certaine lisibilité sur les personnels qui arrivent, ceux qui repartent et sur la durée de leur présence. Les listes de volontaires étaient beaucoup plus aléatoires : l'ARS transmettait une liste et huit fois sur dix, lorsqu'on appelait ces volontaires, ils n'étaient plus disponibles. Très sincèrement, cela ne nous a pas servi à grand-chose, pire, cela nous a désorganisés.

Les renforts de PACA que vous avez évoqués ont été destinés quasi exclusivement à Mulhouse. Nous en avons quelque peu souffert à Colmar, puisqu'on nous a même pris le peu de réserve sanitaire que nous avions reçue pour armer encore davantage Mulhouse. De mémoire, Mulhouse a bénéficié de plus de cent dix ou cent vingt renforts en tout, entre réserve sanitaire et volontaires, alors que nous avons plafonné à dix-huit. Un samedi on nous a retiré la moitié de nos volontaires pour les envoyer à Mulhouse, alors qu'ils étaient prévus au planning du lundi. Plusieurs fois, nous avons vu des gens arriver le vendredi soir, annoncés de nulle part, que nous devions intégrer à un moment donné dans nos équipes mais dont on ne savait pas combien de temps ils allaient rester… L'organisation des renforts sanitaires n'a vraiment pas été efficiente alors que nous avions la chance que tout un corps soignant soit prêt à se déplacer et à donner son temps.

Pour le matériel, attention aux masques FFP2. La crainte d'une transmission aérienne du covid-19 circule de plus en plus dans la presse. Dans ce contexte, les masques chirurgicaux seraient insuffisants et, pour protéger les soignants, les malades et l'ensemble des intervenants, il faudrait des masques FFP2. Je ne suis pas persuadé que ce soit anticipé.

Enfin, sur les soixante-dix lits de réanimation qui auraient disponibles dans le Grand-Est, alors qu'on a transféré des malades depuis Mulhouse, je pense qu'il y a là aussi quelques effets d'annonce. Tous les matins, une application indiquait les vacations de lits libres de tous les réanimateurs du Grand-Est. Je peux vous assurer que les jours où les transports militaires partaient de Mulhouse, il n'y avait pas soixante-dix lits libres dans la région. Là encore, il faut prendre du recul et se laisser le temps d'analyser l'ensemble des données. Ces transferts nous ont permis de passer des caps extrêmement difficiles : si nous ne les avions pas eus, je pense que nous aurions été conduits à faire des choix non éthiques. Ce n'est pas la panacée : un transfert, c'est lourd ; il faut des patients stabilisés ; ce n'est pas forcément bon pour eux. Les établissements qui accueillent les transferts trient en fonction de leurs capacités : la dialyse est par exemple un élément totalement rédhibitoire pour des cliniques privées, qui n'étaient pas en mesure, pour la plupart d'entre elles, de faire de la dialyse au lit du malade. Tous ces éléments devaient être pris en compte avant de choisir le patient pour le transférer. Pendant les trois semaines les plus difficiles, les transferts nous ont permis de sauver la prise en charge des patients les plus lourds.

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