Intervention de Corinne Le Sauder

Réunion du jeudi 9 juillet 2020 à 10h30
Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19 en france

Corinne Le Sauder, présidente de la FMF :

Tirons les leçons de ce qui s'est passé pour éviter de reproduire les mêmes erreurs et profiter des initiatives positives. Arrêtons le système administratif. Ce ne sont pas des personnes qui ne connaissent rien à la médecine qui vont nous apprendre la médecine et nous empêcher de prescrire ! L'interdiction de prescription de certains médicaments était une honte. Nous sommes quand même capables de savoir ce que nous prescrivons – ou alors, il faut nous retirer notre diplôme de docteur. Aujourd'hui, en France, tout le monde veut jouer au docteur, il faut que cela cesse.

Dans l'optique d'une deuxième vague, il faut aussi tirer les leçons de ce qui se fait sur le terrain. Cela rejoint un peu le système de la recherche : en milieu libéral, elle est extraordinaire. Grâce à nos échanges dans le cadre de forums, nous savions que dans les EHPAD, les symptômes de Covid-19 n'étaient pas du tout les mêmes que dans les services de réanimation : les premiers malades étaient des personnes âgées qui tombaient ou faisaient des hémorragies vaginales. Nous avons également tiré la sonnette d'alarme face à l'agueusie – la perte du goût – et l'agnosie, la perte de l'odorat. Autant de signes presque pathognomoniques, qui signent la maladie. On a beaucoup entendu que le Covid-19 serait une grippette et nous n'avons pas vraiment su ce qui se passait en Chine. Mais nous avons tiré les leçons de nos observations. Les patients à l'hôpital et en réanimation n'étaient pas du tout les mêmes que ceux que l'on voyait en libéral. Mais certains médecins libéraux ont alerté sans être écoutés. Nous avons attendu dix à quinze jours avant de tenir compte de ce qu'ils disaient, et ils avaient raison. Il faut savoir nous écouter, nous qui sommes à l'écoute de nos patients et qui voyons la façon dont ils évoluent. Admettons qu'il est possible de faire de la recherche en médecine libérale.

Par ailleurs, la formation a eu toute son importance. Nous l'avons fait entre nous. Dès que nous constations un symptôme, nous le faisions savoir. Nos réseaux nous ont permis de savoir exactement quels signes pouvaient avertir que nous étions en présence du Covid-19. Cela a été très porteur. Tirons les enseignements de ce « système D ».

S'agissant de la prise en charge, il faut un double système d'appels d'urgence. Le 15 est dédié aux urgences vitales. Comme par hasard, il semblait ne plus y avoir d'infarctus ou d'AVC durant le confinement ! Et pourtant, il y en a bien eu. Les pompiers ont trouvé des personnes décédées dans leur appartement. Étaient-elles mortes du Covid-19, en raison de problèmes vasculaires ou d'une thrombose, ou bien d'un infarctus ou d'un AVC ? Prévoyons un double système d'appels : le 15 pour les urgences vitales et le 116-117 pour la régulation libérale. Il en va du respect des patients et des médecins libéraux, qui travaillent toujours en utilisant la permanence des soins ambulatoires, la PDSA, qui n'est rien d'autre qu'un appel entre nous pour faire une régulation.

Si une deuxième vague arrive, nous ne rencontrerons plus de problème de tests, puisqu'il y en a presque trop. Le problème des masques sera moindre, puisqu'on en trouve partout, même sur les trottoirs.

Dans les EHPAD, le personnel était très démuni puisqu'il n'était pas approvisionné en masques et n'a pas bénéficié de détection ou de test PCR, ce n'est pas normal. Ce sont des actions à effectuer régulièrement.

Le Covid-19 a entraîné une déshumanisation du soin. Des personnes sont mortes toutes seules chez elles. Nous avons laissé nos personnes âgées seules. Certaines sont mortes de solitude. Notre société est belle quand elle respecte ses anciens et ses jeunes – il faudrait parler de la situation des écoles, même si ce n'est pas notre domaine. Les enfants n'osent plus se toucher et être en contact les uns avec les autres. Ils sont, eux aussi, déprimés. Il faut réhumaniser le soin.

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