Je me garderais de répondre concernant la stratégie en matière de tests car il s'agit d'une prérogative du directeur général de la santé.
S'agissant de la formation, nous travaillons avec les réanimateurs sur deux temporalités. La première porte sur les prochaines semaines. Il s'agit d'être prêt dans l'éventualité d'une reprise de l'épidémie. Nous établissons des listes de renforts sur lesquelles figurent notamment d'anciens professionnels ayant travaillé dans des services de réanimation et étant revenus spontanément aider leurs anciens collègues. Certaines sociétés savantes ont en outre créé de petits modules de formation destinés aux infirmiers-anesthésistes diplômés d'État (IADE) ou aux infirmiers de bloc opératoire diplômés d'État (IBODE).
La seconde doit permettre d'évaluer le nombre de professionnels dont nous devons disposer de manière pérenne et, par conséquent, celui des formations aux soins critiques que nous devons organiser. Nous allons travailler avec les réanimateurs dans les quinze jours qui viennent pour répondre à ces importantes questions.
Le pragmatisme impose de dissocier ces deux temporalités. Vous avez raison : on ne forme pas un réanimateur en quelques mois.
Quelles relations entretenons-nous, via le ministère de l'Europe et des affaires étrangères, avec les États membres de l'Union européenne ? Lors du retour d'expérience mené au sein du Conseil national de l'urgence hospitalière (CNUH), plusieurs urgentistes ont considéré que la piste d'un conventionnement entre nos établissements de santé et leurs homologues limitrophes devait être creusée en ce qu'elle permettrait des transferts de patients à proximité. Cette démarche me semble intéressante.
J'en viens à l'hospitalisation des personnes résidant en EHPAD. Nous avons dit qu'il fallait que le besoin de santé de chacune d'entre elles soit identifié, ainsi que le meilleur moyen de le prendre en charge : hospitalisation conventionnelle, réanimation, hospitalisation à domicile (HAD) ou soins de suite et de réadaptation (SSR). À cet égard, des initiatives très intéressantes et parfois temporaires ont été engagées, notamment dans le Grand Est, mobilisant parfois des équipes mobiles.
Nous avons également souhaité qu'aucun EHPAD ne se retrouve sans appui sanitaire. Mais la décision d'hospitaliser était médicale. Il est possible, même si je n'en ai pas eu connaissance, que des refus soient intervenus. En tout état de cause, ce n'est pas ce que nous avions demandé. Nous avons pour notre part levé à la fin du mois de mars ou au début du mois d'avril certains obstacles, comme celui interdisant l'HAD dans les EHPAD, afin de fluidifier l'intervention de médecins généralistes ou d'infirmières libérales au sein de ceux-ci.
Aurions-nous dû hospitaliser massivement les résidents des EHPAD ? Je pense, même si leur gestion relève, non pas de ma compétence, mais de celle de la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), que la réponse est délicate et diffère selon chaque résident. Il appartient au médecin de décider.
J'en arrive, monsieur le député, à votre dernière question, très personnelle : oui, et c'est normal, j'ai préparé cette audition notamment pour répondre le plus précisément possible à vos interrogations. Pour le dire très simplement, le choc a été rude pour nous aussi : nous nous sommes tous fortement mobilisés, jours et nuits, en permanence, sans compter notre temps, avec la volonté de nous adapter le mieux possible. Nous savions que l'heure était grave ; nous n'avions jamais connu une telle situation. Vous avez l'impression d'un récit, sachez que nous avons puissamment ressenti cette crise, dont j'imagine que vous mesurez l'impact qu'elle a eu sur nous aussi.
Nous sommes rétrospectivement très fiers que l'hôpital ait tenu, et du travail remarquable accompli par les professionnels. Nous nous sommes employés à faciliter, grâce à toute l'énergie et à tous les outils à notre disposition, l'organisation sur le terrain : on nous a d'ailleurs reproché de ne pas le faire en permanence, ce que j'entends.
Cette audition, comme les échanges que nous avons avec les professionnels, doit nous conduire à nous interroger sur ce que nous pourrions mieux faire à l'avenir. Si nous devions revivre un tel épisode, il nous faudrait en effet être le mieux armés possible. Cette préoccupation nous anime tous.