Comme on le sait, la situation épidémiologique est hétérogène. Dans une grande partie des pays d'Europe de l'Ouest – France, Suisse, Espagne, Portugal, Royaume-Uni, Belgique, Pays-Bas, Danemark – mais aussi l'Ukraine, la République tchèque, la Roumanie et la Hongrie, l'activité du virus est paradoxale, avec un découplage persistant, depuis le milieu de l'été, entre l'augmentation quasi exponentielle des résultats positifs des tests d'amplification en chaîne par polymérase (PCR) et un taux de mortalité extrêmement bas comparé à ceux que connaissent d'autres pays du monde qui s'en sortent beaucoup moins bien. Les États-Unis ne parviennent pas à contrôler l'épidémie ; presque toute l'Amérique, Canada excepté, connaît une situation tendue, étant précisé que l'évaluation est difficile dans certains pays d'Amérique latine où l'on teste extrêmement peu. En Asie, la situation est contrastée : en Inde, l'augmentation du nombre de cas, couplé à une très forte mortalité, ne décélère pas, mais en Chine, au Japon et en Thaïlande, l'incidence est très basse, sans même la résurgence que l'on observe ailleurs ; en tout cas, celle-ci n'est pas rapportée. En Australie, la vague hivernale a causé 3,5 fois plus de morts que la première vague de mars à mai, et c'est aujourd'hui le dernier jour du confinement imposé à Melbourne. Israël voit aussi le taux de mortalité dû au covid 19 augmenter dans le cadre d'une deuxième vague épidémique. En Afrique, où très peu de pays sont suffisamment documentés pour qu'une analyse soit possible, on sait que le Maroc et la Tunisie connaissent une situation similaire à celle du Sud de l'Europe, Marseille ou l'Espagne en particulier, avec l'augmentation du nombre de cas mais pas du taux de mortalité. L'Afrique du Sud sort d'une vague hivernale très forte, tout comme l'Argentine et le Brésil, mais contrairement à ces derniers, elle est aujourd'hui « dans le vert ».
S'agissant du dépistage en Europe, en France particulièrement, la stratégie de testing est extrêmement active. Á mon sens, on ne voit le signal de cet événement sanitaire que parce que l'on teste de la sorte. Aujourd'hui, en France, les 130 000 à 190 000 tests pratiqués chaque jour montrent une circulation du covid 19 comme cela n'a jamais été fait auparavant pour aucun autre virus. On n'a jamais pu observer l'activité d'un virus épidémique hivernal tel que celui de la grippe ainsi ; si l'on testait la positivité à un virus donné au cours d'une saison « normale », peut-être obtiendrait-on des résultats voisins à quelques mois du démarrage d'une seconde vague. Autrement dit, il se peut que l'on en soit au démarrage d'une seconde vague et que l'on parvienne mal à interpréter ce signal parce qu'il est inédit. Les mesures à prendre pour faire face à ce risque sont en nombre limité. L'option douce est le rappel des mesures barrières, à organiser de façon un peu plus stratégique ; l'option beaucoup plus rude est le retour au confinement, et il est urgent de mettre sur la table les différents scénarios de confinement possibles.