Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de coronavirus-covid 19 en france

Réunion du mardi 15 septembre 2020 à 17h00

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • grippe
  • masque
  • pandémie
  • test
  • vague
  • virus
  • épidémie

La réunion

Source

Mission d'information de la conférence des Présidents sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de Coronavirus-Covid 19

Présidence de M. Julien Borowczyk, président de la mission d'information

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Nous entendons M. Antoine Flahault, ancien directeur de l'École des hautes études de santé publique, épidémiologiste et professeur de santé publique à l'Université de Genève, où il dirige l'Institut de santé globale. Vous suivez de près, monsieur, l'évolution de la pandémie de Covid-19 ; nous avons souhaité bénéficier de votre expertise sur la crise sanitaire selon les pays touchés et sur les réponses qui lui ont été apportées.

L'article 6 de l'ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires imposant aux personnes auditionnées par une commission d'enquête de prêter le serment de dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité, à lever la main droite et à dire : « Je le jure ».

(M. Antoine Flahault prête serment.)

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Pr Antoine Flahault, directeur de l'Institut de santé globale de l'Université de Genève

Comme on le sait, la situation épidémiologique est hétérogène. Dans une grande partie des pays d'Europe de l'Ouest – France, Suisse, Espagne, Portugal, Royaume-Uni, Belgique, Pays-Bas, Danemark – mais aussi l'Ukraine, la République tchèque, la Roumanie et la Hongrie, l'activité du virus est paradoxale, avec un découplage persistant, depuis le milieu de l'été, entre l'augmentation quasi exponentielle des résultats positifs des tests d'amplification en chaîne par polymérase (PCR) et un taux de mortalité extrêmement bas comparé à ceux que connaissent d'autres pays du monde qui s'en sortent beaucoup moins bien. Les États-Unis ne parviennent pas à contrôler l'épidémie ; presque toute l'Amérique, Canada excepté, connaît une situation tendue, étant précisé que l'évaluation est difficile dans certains pays d'Amérique latine où l'on teste extrêmement peu. En Asie, la situation est contrastée : en Inde, l'augmentation du nombre de cas, couplé à une très forte mortalité, ne décélère pas, mais en Chine, au Japon et en Thaïlande, l'incidence est très basse, sans même la résurgence que l'on observe ailleurs ; en tout cas, celle-ci n'est pas rapportée. En Australie, la vague hivernale a causé 3,5 fois plus de morts que la première vague de mars à mai, et c'est aujourd'hui le dernier jour du confinement imposé à Melbourne. Israël voit aussi le taux de mortalité dû au covid 19 augmenter dans le cadre d'une deuxième vague épidémique. En Afrique, où très peu de pays sont suffisamment documentés pour qu'une analyse soit possible, on sait que le Maroc et la Tunisie connaissent une situation similaire à celle du Sud de l'Europe, Marseille ou l'Espagne en particulier, avec l'augmentation du nombre de cas mais pas du taux de mortalité. L'Afrique du Sud sort d'une vague hivernale très forte, tout comme l'Argentine et le Brésil, mais contrairement à ces derniers, elle est aujourd'hui « dans le vert ».

S'agissant du dépistage en Europe, en France particulièrement, la stratégie de testing est extrêmement active. Á mon sens, on ne voit le signal de cet événement sanitaire que parce que l'on teste de la sorte. Aujourd'hui, en France, les 130 000 à 190 000 tests pratiqués chaque jour montrent une circulation du covid 19 comme cela n'a jamais été fait auparavant pour aucun autre virus. On n'a jamais pu observer l'activité d'un virus épidémique hivernal tel que celui de la grippe ainsi ; si l'on testait la positivité à un virus donné au cours d'une saison « normale », peut-être obtiendrait-on des résultats voisins à quelques mois du démarrage d'une seconde vague. Autrement dit, il se peut que l'on en soit au démarrage d'une seconde vague et que l'on parvienne mal à interpréter ce signal parce qu'il est inédit. Les mesures à prendre pour faire face à ce risque sont en nombre limité. L'option douce est le rappel des mesures barrières, à organiser de façon un peu plus stratégique ; l'option beaucoup plus rude est le retour au confinement, et il est urgent de mettre sur la table les différents scénarios de confinement possibles.

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La multiplication des tests en France a donc permis de détecter une résurgence de la pandémie mais certains pays, l'Allemagne en particulier, ont adopté une méthode plus ciblée ; que pensez-vous des différentes stratégies de dépistage ? Une fois la positivité avérée, le dispositif d'isolement décidé en France est-il efficace au regard de ce qui est fait ailleurs en Europe ? On parle beaucoup du port du masque, mais parle-t-on suffisamment du renforcement des mesures barrières ? D'autres pays ont-ils expérimenté des méthodes innovantes que nous pourrions adopter pour améliorer la prise en charge de la pandémie ? Á l'approche des épidémies hivernales, singulièrement la grippe, comment prévenir des épidémies croisées ?

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Pr Antoine Flahault, directeur de l'Institut de santé globale de l'Université de Genève

Pour le dépistage, le traçage, la recherche des contacts et l'isolement, la France était en retard, en mars, sur l'Allemagne. Le retard dans le dépistage lui a été préjudiciable : les taux de létalité sont un très bon indicateur de l'efficacité comparée des stratégies de testing et la France a connu, rapportée au nombre d'habitants, une plus forte mortalité due au coronavirus que l'Allemagne. Ce retard a été comblé grâce à un dispositif qui permet aujourd'hui à la France de s'aligner sur les autres pays européens en matière de stratégie de testing. C'était impératif et l'on ne doit vraiment pas regretter d'avoir installé cette capacité, le test ayant pour autre vertu que lorsqu'on est positif on s'isole spontanément, même si l'on n'y est pas contraint par la loi, pour ne pas contaminer ses proches, en particulier lorsqu'on les sait à risque. Ce comportement a certainement prévalu tout l'été pour permettre le répit estival que la France et les autres pays européens ont connu, à la différence des États-Unis ou d'Israël. La stratégie de test a payé, permettant de sécuriser le déconfinement pendant toute la période estivale, qui se termine sereinement, si ce n'est dans les quelques régions – le Sud et peut-être Bordeaux – où des difficultés commencent à se faire sentir, des cas sévères arrivant dans les hôpitaux.

Mais la France ne pourra manifestement pas continuer à tester comme elle le fait. Elle devra très probablement cibler le dépistage, à la japonaise ou à l'allemande, en privilégiant ceux des tests qui visent à essayer de casser dans l'œuf les risques de superpropagation, d'apparition de foyers d'infection – les clusters – qui peuvent être extrêmement invasifs et qui conduisent la pandémie. Le taux de reproduction du virus, dit « R effectif », est une distribution statistique. Dans la plupart des cas, un individu infecté ne contamine pas deux ou trois personnes mais aucune ou une seule, parfois deux ou trois et jusqu'à vingt ; un superpropagateur peut à lui seul contaminer trente personnes, voire 300 lors d'un mariage comme la littérature récente l'a montré. Autrement dit, de nombreux cas positifs, peut-être 80 % de la distribution statistique, ne contaminent personne ; et si une personne en contamine une seule autre, le taux de reproduction reste contrôlé : il n'y a pas de risque épidémique. Il faut donc s'atteler à isoler tous ceux qui risquent de contaminer plus d'une personne. C'est la chasse aux clusters, qui doit être conduite très activement. Les Japonais expliquent qu'ils ne le font pas de manière rétroactive : ce n'est pas tant la recherche des contacts passés qui les intéresse que la recherche de tous les contacts qui risqueraient de « superpropager » la pandémie dans le futur. Je pense aussi qu'il faut prendre contact rapidement avec ceux-là, et à cette fin adopter des stratégies qui auront aussi pour effet de soulager les autorités sanitaires, lesquelles ne pourront probablement pas continuer d'investiguer tous les cas de façon systématique.

Les mesures barrières visent à réduire le taux de transmission qui résulte de trois paramètres : la probabilité de transmission, le nombre de contacts et la durée de la période contagieuse. Si on veut réduire le R effectif au-dessous de 1, il faut s'attaquer aux trois et pour commencer réduire la probabilité de transmission par le port du masque avant tout, le lavage fréquent des mains, le maintien de la distance physique, et cætera. C'est bien ce « et cætera » qui doit être explicité, parce que tout dépend de quelle manière le covid 19 se transmet.

Si la transmission se fait par gouttelettes, la situation n'est pas la même que si le virus se transmet par aérosol ou par une surface plane contaminée, et il y a un débat scientifique à ce sujet. L'analyse de la littérature la plus récente m'incline à penser que les aérosols jouent un rôle beaucoup plus important que ce que l'on a cru au début de la pandémie. Les aérosols ne sont rien d'autre que les postillons que nous émettons lorsque nous parlons, chantons et crions, et nous en émettons tous, surtout des postillons lourds que la gravité fait retomber au bout d'un à deux mètres sur une surface plane, sur le sol et éventuellement sur le visage de celui sur qui on tousse ou éternue, ce qui est assez rare.

Les gestes barrière visent à prévenir ce type de contamination. Á ma connaissance, il n'existe guère de notifications de contamination par des surfaces planes ; en tout cas, aucune superpropagation par ce biais n'a été rapportée, même si des modèles animaux ont montré une transmission par aérosol et aussi, probablement, par les surfaces planes. Une surface plane très infectée doit donc pouvoir infecter, mais il faudrait pour cela porter assez vite la main à ses yeux ou à ses muqueuses respiratoires quand on a un coronavirus vivant sur la main, parce que l'enveloppe du virus s'y dégrade très rapidement.

Toutes les mesures barrière doivent être associées, en priorité contre les aérosols. Dans une salle telle que celle dans laquelle vous êtes réunis, il en va pour un porteur du virus comme il en irait avec un fumeur : si le fumeur est assis loin de vous, si la salle est bien ventilée, si vous n'êtes pas trop nombreux et si vous portez un masque, vous courez moins de risque d'inhaler les particules fines dangereuses qui entraînent le tabagisme passif. Le coronavirus aérosolisé n'a pas d'odeur et on ne le voit pas mais il flotte de la même façon qu'un nuage de fumée : s'il est loin, si vous ne restez pas trop longtemps dans ce nuage, si vous n'êtes pas trop nombreux dans la salle, vous ne risquez pas grand-chose.

Une certaine proportion de postillons finira par se déposer sur les surfaces planes, et pour prendre le minimum de risques, vous vous laverez les mains fréquemment. Le Centre pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC) d'Atlanta a publié aujourd'hui une étude menée en Thaïlande ; elle montre que le respect de la distance d'un mètre et mieux encore de deux mètres, le port du masque en tissu ou chirurgical et le lavage des mains réduisent significativement le risque de contamination dans le grand public. Si vous ne parlez pas, ne chantez pas et ne criez pas, vous diminuerez encore le risque d'émettre des particules d'aérosolisation. Enfin, la ventilation, problème difficile, est très bien résolu dans les avions et particulièrement dans les trains, où l'air est remarquablement filtré. Les risques de propagation sont très inférieurs dans les trains, où la ventilation est renouvelée plusieurs fois par heure ; elle devrait l'être six fois par heure puisqu'une exposition de dix à quinze minutes au virus est nécessaire pour risquer la contamination.

Les méthodes innovantes, beaucoup plus utilisées en Corée du Sud et à Singapour qu'en France, consistent à utiliser des applications de traçage par le biais des smartphones ; elles permettent de repérer où vous êtes et avec qui vous avez été en contact les jours précédents. Une application semblable a été développée en France, assortie d'un arsenal de protection des données personnelles qui n'existe pas dans beaucoup de pays asiatiques même démocratiques. Peut-être la réticence du public français cédera-t-elle car ces applications ont été extrêmement utiles là où elles ont été bien employées, mais elles l'ont probablement été à un moindre degré dans les démocraties occidentales. Il faut admettre que ces dispositifs innovants supposent une acceptation culturelle qui n'est pas complète dans les pays occidentaux.

Vous vous inquiétez d'une possible épidémie croisée, mais on a constaté un phénomène inédit : il n'y a pas eu de grippe dans l'hémisphère Sud cette année, ou à peine. Le virus de la grippe a été très peu isolé, alors qu'il a été très activement cherché, puisqu'on le recherchait également lorsqu'on faisait des tests PCR chez des personnes symptomatiques. L'Australie, pour la première fois, n'a pas connu d'épidémie de grippe pendant l'hiver austral. Ce n'est pas lié à la vaccination, car le temps a manqué pour une campagne très poussée, mais à l'arsenal de mesures barrière déployées, qui sont allées jusqu'au reconfinement de la région de Melbourne. Les Africains du Sud ont également beaucoup recherché le virus de la grippe et ne l'ont pas trouvé. Aussi ne suis-je pas très inquiet d'une possible collision entre le virus de la grippe et le coronavirus cet hiver ; à mon avis, les mesures que nous allons déployer pour lutter contre le covid 19 et qui n'ont jamais été déployées dans le passé contre la grippe, la préviendront très efficacement ainsi que probablement les gastro-entérites hivernales.

Enfin, la promotion énergique du télétravail contribue aussi à réduire la probabilité de transmission en conduisant à diminuer le nombre de contacts. Les Suédois l'ont rappelé récemment en demandant sa prolongation jusqu'à la fin de l'hiver. Il faut mener à ce sujet une politique très active, très confiante à l'égard des travailleurs ; les employeurs doivent se persuader que le télétravail, lorsqu'il est possible et choisi, est une bonne chose. Il ne doit peut-être pas être obligatoire, mais plus on y incitera et plus la pression dans les transports publics diminuera – les déplacements dans les transports publics sont des occasions de contact avec des gens que l'on n'a pas l'habitude de fréquenter. De plus, télétravailler allégera les espaces de travail, dont les open spaces qui portent mal leur nom puisque ce sont souvent des lieux clos mal ventilés.

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Laquelle des stratégies de lutte contre la pandémie mises en œuvre à l'étranger vous paraît, avec quelques mois de recul, la plus efficace, et donc celle que nous pourrions reproduire ? Á l'approche de la saison hivernale, assiste-t-on en France à une seconde vague de la pandémie ? Les cas semblent moins graves que précédemment ; le virus a-t-il muté et perdu en dangerosité ? La multiplication des tests permet de dépister un nombre croissant de personnes contaminées ; va-t-on, et dans quel délai, vers une immunité collective ? Se trouve-t-on aujourd'hui en France dans la situation dans laquelle on se trouvait sans le savoir en février dernier parce qu'il n'y avait pas de tests disponibles ou les choses sont-elles entièrement différentes ?

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Pr Antoine Flahault, directeur de l'Institut de santé globale de l'Université de Genève

La transposition d'une stratégie suppose que l'on compare des États aux systèmes de santé et aux systèmes économiques comparables. C'est pourquoi je ne fonderai pas ma comparaison sur la stratégie choisie par le Pakistan, qui est pourtant un modèle du genre. Alors que l'Inde suit une trajectoire épidémique continue vers le haut extrêmement préoccupante, le Pakistan, pays voisin aux conditions socio-économiques similaires, a réussi à contrôler l'épidémie grâce à un Premier ministre visionnaire. Très attaché à ce que la science guide sa politique, son discours sur le coronavirus n'a rien de populiste et il a appliqué des dispositions parfois quelque peu éloignées des préconisations de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), considérant que dans un pays très pauvre, le confinement strict ne fonctionnerait pas et qu'il fallait lui préférer une stratégie très ciblée de confinements localisés aux quartiers, voire aux rues dans lesquelles démarraient des clusters. Si je m'y attarde bien que le Pakistan n'ait pas le niveau économique et social de la France, c'est pour souligner que l'on peut trouver dans des pays à faible niveau de revenu des solutions ou des propositions intéressantes ; le Vietnam, qui a de multiples contacts avec la Chine, a également réagi de manière particulièrement efficace.

Parmi les pays qui ressemblent davantage au nôtre, l'Australie a bien répondu à la vague hivernale, en appliquant un confinement strict qu'elle qualifie de localisé mais qui concerne néanmoins cinq millions de personnes à Melbourne, dans un pays où la population est relativement faible ; ce n'est pas peut-être pas la situation optimale que vous rêvez de promouvoir en France en cas de seconde vague. Les stratégies allemande et japonaise sont particulièrement intéressantes. Pragmatiques, elles mettent l'accent sur la responsabilisation du citoyen. Fondées sur la confiance en l'expertise, même si les experts doutent et font des pas en avant et en arrière, elles se traduisent parfois par des messages qui ne sont pas très populaires. Japon et Allemagne ont en particulier adopté une stratégie de testing intéressante.

On peut donc découper les stratégies adoptées ailleurs en retenant ce qui peut nous intéresser. Á cet égard, la France s'est mise totalement à niveau s'agissant de la capacité de testing, mais elle peut encore progresser en matière stratégique et, sur ce plan, on ne peut pas ne pas évoquer le modèle suédois, vers lequel tendent tous les pays occidentaux sans trop en parler. Je puis vous dire, pour m'en être entretenu avec Anders Tegnell, que la Suède ne recherche nullement l'immunité collective et ne refuse pas davantage le principe du confinement. L'approche qu'a choisi ce pays s'apparente en réalité à celle des autres pays européens : elle a confiné, mais ce fut un auto-confinement. En Suisse, nous avons pratiqué le semi-confinement, qui diffère du confinement strict appliqué en France, où l'on a assisté à une assignation à résidence dérivée du modèle chinois autoritaire. Le semi-confinement est un modèle voisin du confinement strict pour ce qui concerne la fermeture des commerces non essentiels et le gel de l'économie, mais il se distingue du modèle français en ce qu'une autorisation n'était pas nécessaire pour sortir de chez soi ou traverser le pays – simplement, personne, ou très peu de personnes, sortait de chez soi ou traversait indûment le pays. L'adhésion à ce modèle a été très grande en Autriche, en Allemagne, en Suisse. Dans le modèle suédois d'auto-confinement, bien que personne n'ait jamais demandé la fermeture des aéroports, toutes les lignes domestiques se sont arrêtées faute de passagers : on a demandé aux gens de télétravailler, ils l'ont fait. Les transports publics étaient vides, comme étaient vides les rues de Stockholm ; les bars et les restaurants restaient ouverts mais ils avaient un quart de l'affluence ordinaire ; les commerces non essentiels ont pour beaucoup fermé, jamais sur ordonnance ou par décret mais faute de clients. L'auto-confinement consiste à confier la gestion de la crise à l'expertise scientifique des agences de sécurité sanitaire d'une part, et aux citoyens d'autre part. En Suède, les décisions politiques de gestion de la crise ont été très peu nombreuses pendant la période du confinement dans le reste de l'Europe ; on y a quand même interdit les rassemblements de plus de cinquante personnes et fermé les lycées, collèges et universités.

Certains diront que le bilan suédois est navrant, avec un taux de mortalité par habitant supérieure à celui de la France. Le bilan est mitigé, c'est exact, mais il faut y regarder de près parce que cette mortalité élevée est principalement due, comme le reconnaissent les Suédois, à la mauvaise protection des personnes âgées en particulier dans les maisons de retraite, dont le personnel était peu formé et mal équipé et où l'hécatombe a été forte – en France aussi, d'ailleurs. Les indicateurs de santé suédois sont parmi les meilleurs du monde ; c'est un pays à très forte culture de santé publique, qui n'est pas une santé publique imposée ou autoritaire mais une santé publique acceptée, qui suppose une adhésion et de la pédagogie. La santé publique est plus l'affaire des spécialistes que des politiques – mais ce modèle ne s'adapte pas forcément à toutes les cultures ni à tous les pays.

Vous m'interrogez sur la « seconde vague ». Tout dépend de la manière dont on définit une vague. Certains considèrent que nous y sommes déjà ; on peut le penser puisque la courbe des nouveaux cas quotidiens montre effectivement une deuxième bosse, presque plus haute que la première. Cependant, il y a un effet de loupe certain, car on ne faisait pas 190 000 tests par jour en mars. Quand on teste beaucoup, on obtient beaucoup de résultats positifs. De plus, les individus testés positifs sont le plus souvent des asymptomatiques qui représentent donc une bonne partie de l'élévation de la courbe.

Il ne faut pas parler de « seconde vague » aussi longtemps que l'on n'assiste pas à la croissance concomitante de la morbidité, c'est-à-dire du nombre de cas testés positifs, et de la mortalité. Cela étant dit, je ne veux pas minimiser ce qui se passe en ce moment. On sait que le virus circule très activement, en particulier dans les départements du Sud de la France, avec l'augmentation des hospitalisations, notamment en réanimation. Aussi n'est-on peut-être pas très loin, en effet, d'une augmentation de la mortalité qu'il ne faudrait pas attendre les bras croisés mais à laquelle il faudrait véritablement se préparer pour éviter l'engorgement du système de santé. En bref, le signal que l'on mesure aujourd'hui est inédit parce que l'on n'a jamais fait 190 000 tests PCR par jour pour aucun virus ; en aurait-on fait que l'on constaterait peut-être que l'on assiste à un phénomène habituel quand une seconde vague se prépare.

Nous nous refusons, à Genève, à prédire quoi que ce soit au-delà de huit jours ; vous ne parviendrez donc pas à me faire prédire ce qui se passera cet hiver. Je peux seulement fournir des scénarios, dont l'un, qui n'est pas optimiste, serait que l'hémisphère Nord connaisse cet hiver une vague ressemblant à celle qu'a connue l'hémisphère Sud. On assiste aujourd'hui à une sorte d'ensemencement du territoire national et, probablement, de toute l'Europe, qui s'enflammera peut-être lors d'une seconde vague assez puissante parce qu'elle aura l'automne et l'hiver pour se déployer et non simplement la fin du mois de mars avant la butée de l'été – l'été a en effet offert un répit remarquable pendant la période courant depuis le déconfinement jusqu'à maintenant.

L'hypothèse selon laquelle le virus serait moins dangereux ne convainc guère les scientifiques. Celui qui circule aujourd'hui en Europe est le même que celui que circule au Pérou, en Colombie, au Texas, en Arizona, où il a pour conséquence un fort taux de mortalité. Je ne parierais donc pas, aujourd'hui, sur un virus beaucoup moins virulent. Il se pourrait que le virus, à force de muter comme ils le font tous, finisse par s'atténuer légèrement mais je crains que l'on n'y soit pas encore. Il a été question de saisonnalité et de chaleur. En réalité, la saisonnalité des virus n'obéit pas qu'à la chaleur, comme on le voit en des lieux très chauds d'Afrique et d'Amérique latine ; à Manaus, située au cœur de l'Amazonie, dans une zone qui n'est pas particulièrement fraîche, plus de 50 % des habitants ont très probablement été atteints. En réalité, la France s'est confinée en août comme elle a l'habitude de le faire : les magasins non essentiels ont fermé, les gens sont partis en vacances, ont adopté des compositions familiales plus restreintes, ne sont pas allés travailler. Tout au long de l'été, en Europe, on a l'habitude de vivre une sorte de confinement – économique également – agréable mais qui diminue considérablement les interactions. C'est la fin de ce confinement volontaire qui constitue peut-être un des risques importants de seconde vague.

J'en viens à l'immunité de groupe. Des épidémies ont concerné la moitié d'une communauté ou davantage : ce fut le cas du Charles-de-Gaulle, d'un lycée de l'Oise et, je l'ai dit, de la ville de Manaus. L'intéressant est qu'à Manaus, l'immunité de groupe semble avoir été atteinte après que 50 % de la population a été touchée, l'épidémie s'arrêtant spontanément ou presque. Certes, des mesures étaient prises, mais Manaus est une ville cosmopolite à très fortes interactions où de nombreuses compagnies internationales ont leur base et il était très difficile d'y imposer un confinement ou des mesures barrières très efficaces. Pourtant, l'épidémie n'a pas frappé l'ensemble de la population. L'hécatombe a été importante mais l'immunité grégaire semble s'être imposée. Ce n'est certainement pas le cas en Europe aujourd'hui. Peut-être de petites zones telles que le centre de Bergame ont-elles bénéficié d'une immunité un peu plus élevée que les autres si bien que le virus s'y frayera plus difficilement un passage, ce qui ralentira un peu l'épidémie, mais je ne pense pas que l'immunité acquise à Paris ou à Genève soit très protectrice contre une seconde vague alors que 80 ou 90 % de la population demeure à risque.

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Monsieur Flahault, vous avez l'une des paroles médiatiques les plus posées qui soient ; je vous en remercie. J'ai noté que vous ne partagez pas l'opinion selon laquelle les mutations du Covid 19 auraient affaibli sa virulence. Quel est, selon vous, le taux actuel d'immunisation ? Que les tests soient désormais réalisés en grand nombre en France n'empêche ni la longueur des files d'attente ni la lenteur des réponses ; quelles priorités définir pour permettre une stratégie de test pleinement opérationnelle ? Quel est le profil des personnes infectées hospitalisées ? Quel est l'âge médian au décès par rapport à ce qu'il était au printemps ? Des priorités doivent-elles être définies en conséquence pour éviter une recrudescence de la contamination ?

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Les stratégies nationales d'isolement consécutives aux tests diffèrent-elles ? Que recommandez-vous ? Plus généralement, la crise que nous traversons nous amène à réfléchir à nos institutions, l'OMS en premier lieu ; qu'en pensez-vous ?

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Vous avez indiqué que la France, après avoir accusé un retard certain sur l'Allemagne dans la mise en œuvre de dispositifs de dépistage, vous semblait maintenant disposer de tous les moyens nécessaires en cette matière. Or nos concitoyens nous disent la longueur de l'attente pour prendre les rendez-vous qui leur permettront de se faire tester, et la lenteur avec laquelle arrivent les résultats des tests – il y faut en moyenne une semaine, paraît-il, ce qui est très long. Des personnes qui n'avaient été en contact ni avec le virus ni avec des personnes qui l'avaient été se font tester. Comment, selon vous, le dépistage devrait-il être organisé ?

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Pr Antoine Flahault, directeur de l'Institut de santé globale de l'Université de Genève

Je ne privilégie pas l'hypothèse de la baisse de la virulence du virus mais je ne la rejette pas ni ne dis qu'elle est fausse. Les virus à ARN sont plus fragiles aux mutations et plus enclins à muter que les virus à ADN. On le sait pour le virus de la grippe, et l'on sait que le coronavirus mute, mais moins que celui de la grippe ; cela ne veut pas dire qu'une de ses mutations ne donnera pas, un jour, une souche atténuée. L'un des meilleurs vaccins existant est le vaccin contre la fièvre jaune, et c'est une souche atténuée de fièvre jaune. Or, bien que 200 tentatives de vaccin contre le Covid 19 soient en lice, aucun n'est un vaccin atténué car on ne réussit pas à le faire malgré le nombre de laboratoires qui s'y emploient. Aussi, je ne crois pas que, pour l'instant, une souche très atténuée circule.

L'enquête de séroprévalence que nous avons réalisée à Genève à la fin du mois de mai a montré que l'immunisation est de 10 % ; celle qu'a conduite le département du Morbihan a montré un résultat plutôt proche de 5 %. Aujourd'hui, des modèles mathématiques permettent d'évaluer entre 5 et 15 % la séroprévalence en France ; c'est insuffisant pour garantir une immunité grégaire. On peut, à mon sens, être optimiste – si l'on peut parler d'optimisme dans ce contexte – et penser que l'on sortirait probablement de l'hiver avec un niveau d'immunisation de la population plus élevé si une seconde vague se produisait, parce qu'elle ne serait sans doute pas très facile à arrêter complétement. Souvenons-nous toujours que l'objectif essentiel du contrôle n'est pas de bloquer l'épidémie mais d'éviter l'engorgement des hôpitaux. Si un vaccin est mis au point, il complétera cette immunité pour la transformer en immunité de groupe et, je l'espère, bloquera toute épidémie.

Je ne sais pas tout ce qui a été fait en France en matière de tests mais j'ai connaissance d'initiatives remarquables. Ainsi le directeur général de l'Agence régionale de santé (ARS) d'Île-de-France a-t-il déployé des barnums pour atteindre des groupes de la population d'accès difficile pour la prévention ; cela peut être reproduit ailleurs dans le pays et ce sera peut-être répété pour d'autres sujets de santé publique.

S'agissant de stratégie générale, l'Allemagne a fait d'emblée confiance au secteur privé. Le secteur public peut prendre en charge une partie du testing, en particulier les priorités définies par la puissance publique, par exemple la recherche de clusters. Quand on recherche un foyer infectieux, s'il faut une semaine pour obtenir le résultat d'un test PCR, tester ne sert à rien sinon à faire de la belle épidémiologie ; le résultat doit être donné dans les vingt-quatre heures au plus. Il faut donc prioriser des lignes capables de donner des résultats très rapidement, non à tout le monde mais aux 20 % de cas qui risquent d'être à l'origine de superpropagations. C'est la stratégie vers laquelle il faut tendre et, en connexion avec les ARS qui savent tracer les cas des clusters, on peut à mon avis régler ces problèmes au mieux ; il y aura toujours des couacs, mais c'est une façon de répondre aux problèmes actuels. Pendant ce temps, le secteur privé pourrait, comme c'est le cas en Allemagne, faire tous les autres prélèvements, dont les résultats ne seront pas nécessairement rendus dans les vingt-quatre heures, le degré d'urgence n'étant pas le même quand les transmissions sont sporadiques.

Le profil des personnes hospitalisées a effectivement changé : dans l'immense majorité des cas, elles sont désormais âgées de moins de quarante ans. Il y a donc, proportionnellement, davantage de malades plus jeunes parmi les cas sévères, mais à ma connaissance le virus n'est pas plus virulent et je ne pense pas que l'on doive craindre beaucoup de cas hospitalisés sévères dans cette population. La question plus compliquée à démêler est celle des formes longues, chroniques ou post-infectieuses, qui peuvent affecter les plus jeunes. Á ce jour, l'infection pour qui a moins de quarante ans reste une maladie bénigne ; elle est beaucoup plus grave que la grippe pour les personnes dont l'âge est compris entre quarante et quatre-vingt ans, et pour celles qui sont âgées de plus de quatre-vingt ans, le taux de mortalité est voisin de ce que Ebola peut donner en Afrique de l'Ouest. Le profil de risque n'a pas beaucoup changé.

Pour ce qui concerne la stratégie d'isolement, nous avons tous été frappés et déçus par l'expérience australienne : on isolait, très durement pour un pays démocratique, dans des hôtels de confinement où les gens étaient en réalité emprisonnés, et c'est par l'une des familles ainsi confinées que tout le personnel d'un de ces hôtels a été contaminé ; c'est ainsi qu'a démarré le cluster massif de Melbourne qui a entraîné l'épidémie de l'hiver austral. Je me demande donc si les modèles les plus sophistiqués sont les plus performants. Encore une fois, la responsabilisation individuelle est très importante ; c'est le modèle allemand, à mon avis très proche de la culture française. Je ne pense pas que tous les jeunes gens qui ont été isolés parce que positifs se soient précipités pour aller voir leurs parents et leurs grands-parents, dont chacun savait qu'ils étaient plus à risque. La prise de précautions massives que l'on a vu tout l'été en Europe pour les personnes à risque, en particulier les personnes âgées de plus de quarante ans, a plutôt bien fonctionné et pourrait continuer de bien fonctionner.

L'isolement de sept jours lorsque les gens sont porteurs du virus me paraît très raisonnable puisqu'ils ne sont pas contagieux plus de cinq jours après le début des symptômes et de deux jours avant, en général.

Très peu d'avis de l'OMS sont contestés sur le plan scientifique et technique. Mais, outre que l'Organisation est sous-dotée – son coût de fonctionnement est très inférieur à celui de l'Assistance publique des hôpitaux de Paris, un peu supérieur à celui des Hôpitaux universitaires de Genève –, les États membres lui ont donné une très faible possibilité d'action. On ne peut attendre d'une Organisation que l'on a privée de baguette qu'elle soit le chef d'orchestre de la lutte contre une pandémie. L'OMS ne peut faire que des recommandations, en appliquant le seul traité international relatif à la santé, le règlement sanitaire international, lui-même extrêmement peu contraignant. Si l'on a doté l'Organisation mondiale du commerce un règlement contraignant comprenant des possibilités de sanctions, l'équivalent n'a jamais été accepté pour l'OMS ; on ne peut lui reprocher de ne pas intervenir, de ne pas jouer le rôle de coordonnateur alors qu'on ne lui a pas donné les moyens financiers, juridiques et techniques de le faire.

J'ajoute que les critiques de l'OMS proviennent essentiellement d'États les plus riches de la planète, ou de personnes qui en sont issues. Les pays les plus pauvres, ceux qui n'ont pas d'école des hautes études en santé publique ou de grande expertise universitaire en ce domaine sont obligés de profiter de l'OMS, le font avec beaucoup d'allant, et critiquent très rarement l'action d'une Organisation qui a un bureau dans presque chacun des 194 États membres.

Enfin, les critiques sont parfois faciles, car le Conseil exécutif de l'Organisation, où siègent les États-Unis et la France, n'a pas jugé bon de convoquer le directeur général de l'OMS pendant toute la crise pandémique et ne lui a pas non plus demandé de se rendre à Taïwan, à Singapour ou au Japon étudier d'autres modèles que le modèle chinois. Ni la France ni le Royaume-Uni ni les États-Unis ni les autres pays siégeant au Conseil exécutif n'ont requis, comme il aurait été opportun, la convocation d'une assemblée mondiale de la santé extraordinaire, ni demandé au directeur général de conduire une action particulière.

Pour l'organisation des tests, il faut certainement observer de très près ce que fait l'Allemagne, qui adapte sa stratégie pour cibler les clusters et cette nouvelle doctrine fait école. L'Allemagne a testé très tôt, a fait confiance, avec succès, aux laboratoires privés, sans leur demander de montrer tous les résultats au centre de référence mais en leur donnant des protocoles assurant la qualité des tests. C'est donc un modèle intéressant si l'on est prêt à faire confiance et à prévoir des mesures incitatives : les tests étant remboursés par la Sécurité sociale, de nombreux laboratoires privés y ont vu une incitation et cela a eu un effet très positif, même si en Allemagne comme ailleurs, on s'est trouvé un temps à court de réactifs.

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Un certain nombre d'entre nous ont eu le sentiment d'un retard à l'allumage dans la réaction des autorités lors de la survenue du virus ; quelle est votre opinion à ce sujet ? Considérez-vous que le protocole d'accueil des malades et leur traitement se sont améliorés ? La puissance publique est-elle en mesure de prendre en compte l'évolution de l'immunisation de la population pour ajuster ses réactions face à la progression du virus dans certaines régions ? Enfin, comment appréhendez-vous la crise sanitaire due au covid 19, qui occupe tout l'espace – certains parlent d'un « effet tunnel » –, dans l'ensemble global des problèmes de santé et des problèmes sociaux en France ?

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Á propos de la transmission de la maladie, il est assez surprenant que le débat gouttelettes – surface plane ne soit toujours pas tranché scientifiquement. Est-ce habituel en pareil cas ou cette impossibilité à conclure s'explique-t-elle par une spécificité du virus ?

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Je suis une des élues du Grand Est, région qui a connu la vague épidémique en premier ; il suffisait de regarder ce qui se passait outre-Rhin pour constater que l'Allemagne adoptait, dès le mois de mars, une tout autre stratégie de dépistage et de prise en charge que la nôtre. Actuellement, en France, on teste à l'aveugle : on doit tester les bébés enrhumés pour qu'ils puissent retourner à la crèche et on doit se faire tester avant d'aller chez le dentiste et avant toute hospitalisation. Si je vous entends bien, cette stratégie est inadaptée ; pourriez-vous préciser votre propos, et nous dire aussi quelques mots de la sensibilité des tests, sachant que l'on recense énormément de PCR positifs chez des personnes très souvent asymptomatiques mais que les tests de contrôle font apparaître une certaine proportion de faux positifs ? Enfin, si l'on reprend les chiffres mensuels publiés par l'Insee, on constate pour la période de janvier à septembre, le pic de mars et avril excepté, moins de décès en 2020 que pour la même période depuis 2015 ; quelle est l'ampleur de la pandémie en France ? Est-elle aussi mortelle que cela ?

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Pr Antoine Flahault, directeur de l'Institut de santé globale de l'Université de Genève

Y a-t-il eu « retard à l'allumage » de la France ? Si l'on observe l'ensemble du monde, on peut considérer que la France, comme toute l'Europe, a probablement eu l'une des meilleures réactions, avec l'Asie ; les petites démocraties asiatiques, en particulier, ont remarquablement tiré leur épingle du jeu, et parfois même bloqué l'arrivée de l'épidémie. L'Europe qui, à commencer par l'Italie, a été très rapidement atteinte, avait comme presque seul modèle le confinement à la chinoise. C'est surtout dans la connaissance des autres modèles qu'il y a eu retard, mais l'Europe s'en est remarquablement sortie si l'on compare sa situation avec celle que connaissent les États-Unis et qui n'est pas liée à la géographie, puisque le Canada s'est comporté comme l'Europe tant dans la gestion politique de la crise que dans les modalités de sa gestion. L'Europe doit se féliciter d'avoir eu une réaction mesurée, proportionnée et efficace.

Vingt-et-un traitements sont en cours d'essai. Certains ont déjà disparu des radars internationaux mais d'autres restent prometteurs, ou même un peu plus que prometteurs. Il en va ainsi, par exemple, pour de la dexaméthasone. Cet anti-inflammatoire, qui n'est pas un médicament très innovant, a surtout été prescrit par les réanimateurs pour les patients atteints de formes sévères, entraînant la réduction d'un tiers des décès. Le remdesivir aussi est prometteur, l'administrer réduisant de 15 à 11 jours la durée d'hospitalisation des formes sévères. Ce n'est pas le médicament miracle, mais ce résultat n'est pas négligeable ; pour la plupart des traitements du cancer, et du SIDA avant la révolution des trithérapies, on progressait ainsi, par avancées successives. De nombreux médicaments sont en cours de test dont la chloroquine et l'hydroxychloroquine ainsi que l'ivermectine, médicament utilisé contre la maladie du sommeil et pour lequel il n'y a pas de grande évidence, pas plus d'ailleurs que pour la chloroquine, qui est probablement sortie des radars.

Des tentatives ont lieu avec le plasma de convalescence, par injection des anticorps produits par les convalescents. C'est très séduisant et cela peut avoir un effet pour certaines maladies, mais cela ne marche pas très souvent, soit que l'on arrive trop tard, soit que les quantités d'anticorps sont trop faibles ; ce traitement est encore en cours d'essai. Les anticorps monoclonaux, des interférons qui agissent sur le système immunitaire, sont peut-être prometteurs. Les inhibiteurs des cytokines ne semblent pas, pour l'instant en tout cas, totalement convaincants, et les anticoagulants n'ont pas non plus complétement prouvé leur efficacité.

Il faut accepter la lenteur de la recherche clinique après que des espoirs semblent fondés en laboratoire. J'avais utilisé l'hydroxychloroquine contre le virus du chikungunya, et il était très efficace en laboratoire – c'est d'ailleurs à Marseille que l'essai avait eu lieu. Mais lors d'un essai à La Réunion, la molécule s'est révélée inefficace contre placebo, et lors d'un essai chez des macaques de l'Île Maurice, on n'a vu aucune efficacité. Autrement dit, ce n'est pas parce qu'on est efficace en laboratoire que les essais cliniques le seront, et les essais cliniques sont absolument nécessaires pour le savoir.

Il y a donc peu de molécules à proposer aujourd'hui, et pourtant la France a réduit de moitié la mortalité en réanimation. Je pense donc que l'on a amélioré les techniques de prise en charge des patients atteints de formes très graves de la maladie et que, mis bout à bout, les progrès commencent à être extrêmement substantiels.

Nous avons, à Genève, fait huit enquêtes de séroprévalence à partir du déconfinement, car nous voulions savoir très rapidement comment évoluait l'immunisation. Ces enquêtes ne sont ni très compliquées à réaliser ni très coûteuses, puisqu'un échantillon de 500 à 1 000 personnes représentatives d'une population donnée suffit pour déterminer son taux d'immunité. Á défaut, les modèles mathématiques ne sont pas mauvais, mais il est préférable d'observer la réalité. Il faudrait donc faire des enquêtes de séroprévalence répétées, pas nécessairement au niveau national, pour savoir où en est l'immunisation collective et suivre son évolution.

« L'effet tunnel » est une notion intéressante. Il y a, bien sûr, d'autres problèmes que le coronavirus et on a très peur que régressent la vaccination des enfants en Afrique, le traitement du paludisme et celui du SIDA. On n'en est pas là en France, mais confinement et mesures barrières ont des répercussions sociales et économiques que vous mesurez beaucoup mieux que moi. Une bonne pluridisciplinarité est indispensable dans l'appréhension de ces questions qu'il ne faut pas négliger parce qu'elles peuvent avoir des effets collatéraux.

Je comprends que la population s'agace de la persistance du débat sur les voies de la contamination, mais ces incertitudes ne sont pas nouvelles. Les relais médiatiques de la communication sur la pandémie ont été parfois critiqués ; ils m'ont pourtant semblé exceptionnels dans beaucoup de pays, en particulier en France. Sans doute nos concitoyens ont-ils le droit d'être fatigué d'entendre parler du coronavirus à longueur de journée depuis des mois, mais une démarche scientifique se déploie sous nos yeux, avec les tâtonnements qu'implique l'émergence d'un nouveau virus. J'ai eu la chance, en m'intéressant à cette pandémie depuis l'origine, de pouvoir pendant quelques jours ou quelques semaines connaître toutes les publications sur le sujet, mais ce moment fut bref. Il est normal que, dans une société où l'information est transparente, interconnectée et internationalisée, on ait le sentiment d'y perdre son latin et que l'on ne comprenne pas que les scientifiques ne sachent toujours pas déterminer si la contamination passe par les gouttelettes ou par les surfaces planes, mais l'exercice n'est pas facile.

Pour savoir si la surface plane était contaminante, on a fait humer des surfaces contaminées par des hamsters, qui ont effectivement été contaminés. Les chercheurs se sont ensuite avisés que, d'une part, les hamsters ne se contaminaient pas avec des mains qu'ils n'ont pas et que, d'autre part, les humains, jusqu'à preuve du contraire, ne reniflent ni l'écran de leur ordinateur ni leur clavier, et que ce n'est donc pas ainsi qu'ils se contamineraient. En revanche, on a pu montrer par un modèle animal qu'il y avait des aérosols et que ces aérosols étaient contaminants, et l'on a pu montrer en laboratoire que les gouttes d'aérosol étaient cultivables, c'est-à-dire que ce qui flottait dans l'air pendant plusieurs heures étaient des virus contaminants. En résumé, la science progresse, et même extrêmement vite, mais jamais assez rapidement au regard du défi que représente la lutte contre cette pandémie.

J'ai été étonné, au début de la pandémie, qu'il n'y ait pratiquement pas de cas à Bâle, pourtant située très près de Mulhouse, en dépit des allées et venues quotidiennes de multiples frontaliers. Aussi importe-t-il d'essayer de comprendre pourquoi certains pays ont mieux endigué le phénomène que d'autres. Á la sortie du déconfinement, le taux de létalité des personnes testées était de 20 % en France, de 5 % en Suisse ; cela signifie que l'on testait beaucoup plus en Suisse, comme en Allemagne.

Parce que le test PCR n'est pas très sensible, il peut produire de faux négatifs alors que la personne testée porte le virus et qu'elle est peut-être même contagieuse. C'est fâcheux, évidemment, et il faut espérer que les poissons contagieux qui passent ainsi entre les mailles du filet ne sont pas trop nombreux. Cela se produit probablement davantage chez les petits enfants parce que l'on a parfois du mal à réaliser un test désagréable sur un enfant qui se débat. Il peut se faire aussi que le virus ne soit pas au fond du nasopharyngé où l'on frotte mais dans les poumons ou ailleurs. Pour ces raisons, il y a peut-être 20 ou 30 % de faux négatifs.

Les faux positifs sont probablement en nombre bien moindre puisque le PCR est un test moléculaire : lorsqu'on a identifié le génome du virus, il est certain qu'il est là. S'il y a des faux positifs, c'est que le prélèvement a été contaminé par le virus dont le patient précédant était porteur parce que la procédure n'a pas été faite très proprement, ou bien sur la paillasse du laboratoire, l'ouverture de l'écouvillon pouvant provoquer un effet « bouchon de champagne » et donc un aérosol. Un prélèvement qui aurait dû donner un résultat négatif sera alors faussement positif. On estime que le nombre de faux positifs est très inférieur à 1 % des cas testés, mais c'est difficile à mesurer. Il en va ainsi pour tous les tests, ce n'est pas particulier au PCR.

En Suisse non plus qu'en France il n'y a surmortalité, si bien que les gens disent « Tout ça pour rien ! ». Ce n'est pas vrai. Á ce jour, le covid 19 a provoqué 1 700 morts en Suisse, ce qui est beaucoup rapporté à la population, et plus de 30 000 morts en France. S'il n'y a pas de surmortalité, cela signifie peut-être qu'au cours du semestre considéré des gens dont l'espérance de vie était très faible seraient morts quoi qu'il en soit ou qu'il y a eu moins d'accidents de la voie publique ou que la gravité de certaines pathologies a été atténuée par les effets collatéraux du confinement. Il faudra examiner ces questions, mais je puis déjà vous dire que dans les pays qui n'ont pas su bien contrôler la pandémie, tels le Royaume-Uni ou, plus encore, les États-Unis, la surmortalité est importante et dépasse celle qui est liée au coronavirus. Cela signifie que l'on entre dans « l'effet tunnel » dont vous parliez tout à l'heure : en raison de l'engorgement des hôpitaux à cause de la mauvaise gestion de la pandémie aux États-Unis, des gens sont probablement morts en plus de ce que l'on attendait en raison du covid. En bref, si la surmortalité n'est pas trop élevée en France, vous devrez vous en féliciter et non pas regretter les mesures qui ont été prises, car si elles n'avaient pas été décidées la France serait aujourd'hui, à mon avis, dans la situation des États-Unis.

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Puisque la distanciation et le port du masque préservent de la contamination, n'aurait-on pas mieux géré la pandémie en imposant rapidement et totalement le port du masque au lieu de dérouter les gens par des recommandations du corps médical parfois contradictoires et par des injonctions propres à semer la confusion ?

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Étant donné la similitude entre certains symptômes de cette infection virale et ceux du rhume ou de la grippe, il est difficile de déterminer si l'on a affaire ou non à un cas de Covid 19. La question risque de se poser tout au long de l'hiver ; or de nombreux établissements scolaires, préférant ne prendre aucun risque, n'acceptent plus les élèves présentant le moindre symptôme sans certificat médical. Cette situation met parents et médecins dans l'embarras ; que préconisez-vous à ce sujet ? Vous avez indiqué que les mesures barrières auront vraisemblablement un effet bénéfique sur l'épidémie de grippe attendue : recommandez-vous toutefois une campagne vaccinale antigrippale ?

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Je me félicite de la montée en puissance du dépistage en France. Cependant, ce dépistage massif est bien souvent fait à l'aveugle : aujourd'hui, on demande un test comme on demande un café, une, deux, trois fois, parce que l'on se sent fatigué ou pour un grattement de gorge. Cela ne peut durer. Il faudra établir des priorités, vous l'avez dit, pour obtenir une réponse plus forte et plus ciblée sur les clusters en formation. C'est d'autant plus nécessaire qu'un nouveau public apparaît : les enfants. Le nombre de ceux qui nous sont adressés à nous, biologistes, est très surprenant ; ce qui était très rare au premier semestre 2020 est devenu très fréquent, et ils sont parfois très jeunes. Les enfants développent fort peu de formes graves de la maladie, mais ils peuvent éventuellement la transmettre à leurs enseignants, parents et grands-parents ; qu'en pensez-vous ? Selon vous, à partir de quel âge les enfants devraient-ils porter un masque ?

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Pr Antoine Flahault, directeur de l'Institut de santé globale de l'Université de Genève

Le confinement vise à réduire le nombre de contacts à risque, les mesures barrières à diminuer le risque de transmission. Le virus devient moins virulent si vous portez un masque, si vous parlez peu, chantez peu et si vous êtes peu nombreux dans un endroit bien ventilé : vous courez alors beaucoup moins de risque d'être contaminé que si vous ne faites rien de tout cela. Dans ce cadre, l'imposition du port du masque aurait-elle dû avoir lieu plus tôt ? J'ai tweeté le 26 janvier une vidéo publiée par un de mes collègues de Wuhan qui, étant donné la pénurie de masques, avait décidé d'en fabriquer lui-même avec un mètre de papier toilette et un petit élastique, et qui montrait comment procéder. Je ne comprenais pas pourquoi on ne préconisait pas le port du masque à ce moment-là, en France et en Suisse, dans les maisons de retraite, les écoles et tous les lieux où on aurait pu le promouvoir, car qui manque de papier toilette et de petits élastiques ? Bien sûr, ce ne sont pas des masques normalisés, mais l'étude thaïlandaise que j'ai citée montre qu'un masque, quel qu'il soit, a une certaine efficacité s'il couvre bien les muqueuses respiratoires. Je pense donc qu'en effet on aurait pu promouvoir le port du masque beaucoup plus tôt, sans danger et sans aucune difficulté, tout en réservant les masques chirurgicaux ou FFP2 au personnel soignant.

De là à préconiser, comme le font certains préfets, le masque en tous lieux, en particulier à l'extérieur… Pour moi, c'est sans fondement scientifique. Je connais l'argument de certains de mes collègues, selon lequel ainsi le masque est mis une fois pour toutes quand on sort de chez soi et que l'on n'a plus besoin d'y toucher, mais il n'y a pas beaucoup d'évidence scientifique corroborant le fait que les masques soient très contaminants quand on les manipule ; on aura du mal à le démontrer, même en laboratoire. J'estime que l'on ne devrait porter le masque qu'en milieu clos, et le mettre très bien : mal placer son masque dans les transports publics est évidemment beaucoup moins efficace, en particulier pour celui qui le porte. Imposer le masque dans les transports publics, les écoles, les lieux fermés, les bureaux, est aussi une très bonne chose parce que cela évite la stigmatisation, voire l'agression de ceux qui ne le portent pas – ces débats sont parfois d'une violence qui dépasse l'entendement.

Oui, donc, aux arrêtés préfectoraux lorsqu'ils préconisent le port du masque à l'intérieur, mais je rappellerai l'analogie que j'ai faite avec le fumeur, ou le vapoteur : le risque le tabagisme passif à l'extérieur n'a jamais été démontré ; de même, ce n'est pas parce que vous passez dans une volute de coronavirus que vous serez infecté. L'exposition doit être beaucoup plus longue que celle qui se produit quand on croise dans la rue quelqu'un qui pourrait être infectant. Il n'y a aucun cluster en milieu extérieur : toutes les superpropagations se font en milieu intérieur, en tout cas toutes celles qui sont recensées. Voilà pourquoi je n'aurais pas préconisé le port du masque à l'extérieur.

Parce qu'on ne peut se permettre d'arrêter l'école pour un rhume, il faut tester. Je signale cependant que, non, on n'a pas envie de se faire faire un test comme on prend un café, et certainement pas les enfants, car le test est désagréable. Un test salivaire ne le serait pas, et on a donc hâte que des tests salivaires homologués et d'utilisation facile soient disponibles. Il faut un test de détection rapide, de manière, en particulier, qu'un enfant présentant quelques symptômes ressemblant à une infection par le covid 19 soit réadmis à l'école au plus vite quand le résultat du test est négatif. Bien sûr, le test ne sera pas sensible à 100 %, surtout en hiver, mais au moins évitera-t-on déjà une certaine circulation du virus, et le pragmatisme s'impose à nous. Vous avez évoqué « l'effet tunnel » ; l'école est un droit imprescriptible et les enfants doivent absolument être scolarisés. Il faut donc tout faire pour éviter les fermetures d'écoles. J'étais très favorable au port du masque dès l'école primaire ; on doit pouvoir commencer à porter un masque à partir de l'âge de six ans. En Corée et en Chine, les enfants le portent à partir de deux ou trois ans ; c'est peut-être excessif, exagéré ou simplement difficile à préconiser mais je suis favorable au port du masque très tôt, sans fanatisme, en acceptant que les maîtres le fassent enlever pour certains apprentissages qui demandent une meilleure visibilité du visage de l'enfant.

En raison des mesures barrières, je ne redoute pas spécialement la grippe cet hiver, je vous l'ai dit. Mais si l'on parvient du fait de cette crise sanitaire à une plus forte couverture vaccinale contre la grippe chez les personnes à risque et chez le personnel de santé, dans un pays où l'observance des personnes âgées à la vaccination antigrippale n'est pas très forte, ce sera très bien. Si, en raison de cette pandémie, des personnes âgées, qui ont des comportements très adaptés pour éviter d'être contaminées par le covid 19 – avec raison, comme elles n'ont pas envie d'être infectées par Ebola en se baladant dans le Nord-Kivu – ont envie de se faire vacciner contre la grippe, on s'en félicitera.

Les enfants sont-ils transmetteurs du virus ? Á ce sujet aussi, la science a évolué. Cet été, des clusters, très difficiles à contrôler, se sont formés en Israël ; il y en a eu dans des colonies de vacances aux États-Unis, et beaucoup dans les écoles qui ouvrent en Europe en ce moment. Pour toutes les maladies à virus respiratoires, l'enfant est un très grand vecteur de la transmission ; peut-être l'est-il un peu moins pour ce coronavirus mais cela n'a rien de certain et, étant donné la difficulté éprouvée à tester efficacement les enfants, je ne serais pas très étonné que l'on se rende compte qu'ils sont beaucoup plus transmetteurs qu'on ne le dit. Or, si, pour les enfants, l'infection par le Covid 19 n'est qu'une banale infection respiratoire virale, le risque sanitaire de transmission aux parents, aux grands-parents et dans les maisons de retraite, est très élevé. Il faudra donc être très prudents, et l'on sera confrontés à des situations parfois très difficiles, car toutes les fêtes de famille intergénérationnelles représentent un grand danger pour les personnes à risque et âgées. De même qu'elles ne seraient jamais allées dans les zones à risque de la République démocratique du Congo en cas d'épidémie d'Ebola, elles ne doivent pas participer à des réunions familiales où elles peuvent être contaminées en masse, risquant des effets très nocifs et de très graves complications. Que les enfants soient infectés ne les met pas eux-mêmes en danger, mais c'est un péril majeur pour leurs parents et grands-parents.

Membres présents ou excusés

Mission d'information sur l'impact, la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de Coronavirus-Covid 19

Réunion du mardi 15 septembre 2020 à 17 heures

Présents. - M. Julien Borowczyk, M. Éric Ciotti, M. Pierre Dharréville, M. Jean-Pierre Door, M. David Habib, Mme Sereine Mauborgne

Excusé. - Mme Sophie Auconie

Assistaient également à la réunion. - Mme Josiane Corneloup, M. Nicolas Démoulin, M. Jean-Jacques Gaultier, M. Bertrand Pancher, Mme Michèle Peyron, M. Jean-Pierre Pont, Mme Stéphanie Rist, Mme Martine Wonner