Concernant la diffusion de la directive, je ne peux répondre à la place de ceux qui ont eu à gérer les crises avant mon arrivée – ni sur l'élaboration du plan Pandémie grippale de 2011 et de la directive de 2013 – ni à la place de ceux qui ont à gérer la crise de la covid-19.
La Direction générale de la santé (DGS), le 2 mai 2013, écrit à mon prédécesseur : « Au mois de février, vous m'avez indiqué être en attente d'une réponse formelle de la direction générale du travail (DGT)… Compte tenu de l'actualité épidémiologique internationale, il me semble nécessaire que cette diffusion puisse être organisée rapidement. » C'est bien la DGS qui a demandé que la diffusion de la doctrine soit accélérée. Ce que mon prédécesseur a fait le 16 mai 2013. Et, comme je vous l'ai indiqué, tous les ministères ont accusé réception et s'apprêtaient à la mettre en œuvre. Par ailleurs, j'ai procédé à une piqûre de rappel en février 2016.
S'agissant de l'organisation de la gestion de crise, vous avez raison de souligner qu'il convient de distinguer les plans ; et, dans ces plans, d'identifier les responsabilités. D'abord, celle des experts – qui est préalable. Selon les spécialités, les avis seront divergents. Prenons l'exemple de la crue de la Seine : le météorologue, qui prévoit la pluie, et l'hydrologue, spécialiste de la nappe phréatique, ont toujours eu des avis divergents, uniquement pour des problèmes épistémologiques.
Dans le cas de la covid-19, dès le 10 janvier, quand les Chinois communiquent à l'Institut Pasteur l'identité du virus, les virologues ont de quoi s'inquiéter quant au risque de dangerosité de ce virus. En revanche, les épidémiologistes, qui travaillent sur des données faussées – les Chinois n'ayant manifestement pas communiqué l'intégralité des informations – ne sont pas forcément inquiets.
Il est donc indispensable d'organiser un réseau d'expertises, afin de ne pas improviser à chaque fois. Par ailleurs, il est important que les avis divergents soient connus, car ils sont tous utiles. Enfin, la responsabilité opérationnelle du DGS, est pleine et entière : il est sur tous les fronts, il ne faut donc pas « charger sa barque » et lui demander d'être également le pilote d'une coordination ministérielle. Comment voulez-vous qu'il ait le temps de discuter de la problématique des ressortissants français à l'étranger, par exemple ?
La coordination ministérielle va s'appuyer sur les plans, les exercices, les directives et la réglementation qui a été préparée, ainsi que sur la cellule de crise – présidée par le Président de la République ou le ministre intéressé. Cette CIC réunit les responsables ministériels et fait le relais avec les échelons déconcentrés – qui font remonter les informations. Le ministre des transports, par exemple, est immédiatement impliqué, afin que des filtrages des passagers et des relevés de température soient instaurés.
La CIC peut être activée à tout moment. Normalement, elle l'est quand la crise éclate, mais elle peut l'être un peu avant, ce qui permet de bénéficier des remontées de terrain.
Enfin, le dernier échelon est éminemment politique. Sont responsables le Gouvernement et les ministres concernés, tandis que les arbitrages du Parlement permettent d'uniformiser les décisions. Lors de la crise Ébola, le Président Hollande réunissait régulièrement, dans le salon vert, un conseil de défense et de sécurité nationale. Depuis l'été 2016, ils ont lieu toutes les semaines.