Intervention de Agnès Pannier-Runacher

Réunion du mardi 15 septembre 2020 à 17h25
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi d'accélération et de simplification de l'action publique

Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'industrie :

L'accélération et la simplification de l'action publique font l'objet d'une attente forte qui est régulièrement exprimée par nos concitoyens et nos élus. C'est aussi un axe important de notre politique depuis le début du quinquennat, avec la loi pour un État au service d'une société de confiance, dite loi « ESSOC », présentée dès 2017, avec la loi « PACTE », présentée en 2018, qui a prévu de nombreuses simplifications pour les entreprises, comme la suppression de seuils ou la mise en place d'un guichet unique, avec la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, dite loi « ELAN », également de 2018, qui s'est attelée à la simplification dans le domaine du logement, et enfin avec le projet de loi portant suppression de sur-transpositions de directives européennes en droit français, dont beaucoup de dispositions ont été reprises dans différents textes, notamment celui que vous examinez.

Les Français ont réitéré leur attente forte de simplification lors du grand débat. Ils ont exprimé un besoin de proximité de l'action publique, et je crois que la crise sanitaire, puis économique, que nous traversons n'a fait que renforcer le besoin de simplification et de proximité. Cela nous a surtout montré que nous sommes capables d'aller beaucoup plus loin dans des situations de crise et que cela peut éventuellement être pérennisé. Face à la crise économique actuelle, l'État a répondu présent, avec puissance et efficacité dans la plupart des situations. C'est la même puissance et la même efficacité que nous voulons pour l'avenir.

Un recensement réalisé en juillet 2020 pour la préparation du plan de relance a permis d'identifier deux types de simplifications. D'abord, des mesures adoptées en urgence depuis mars 2020 pourraient être pérennisées. Le Gouvernement s'est interrogé sur l'intérêt de chaque mesure et de chaque ordonnance. Des pérennisations sont proposées dans le cadre du présent projet de loi. Ensuite, des mesures de simplification additionnelles sont nécessaires, à titre temporaire ou pérenne, pour accélérer la relance de notre pays.

Les titres Ier et II du projet de loi, que vous avez examinés avec Mme la ministre de la transformation et de la fonction publiques, concernent le fonctionnement de l'administration, je n'y reviendrai donc pas. Je vous propose, en revanche, d'entrer dans le détail des titres III à V, dont l'objet est de rendre plus efficaces les relations entre nos concitoyens et leur administration, qu'il s'agisse de sujets du quotidien ou de nature économique.

Le projet de loi vise à simplifier le quotidien des Français. Notre objectif est de faire gagner du temps à nos concitoyens et à nos administrations, pour que celles-ci se concentrent sur les sujets ayant la plus forte valeur ajoutée pour les Français.

Nous voulons ainsi simplifier la délivrance de différents documents, comme les papiers d'identité, le permis de conduire et le titre de séjour, grâce à un dispositif permettant de dispenser le demandeur de présenter un justificatif de domicile ou tout simplement de renvoyer à une administration ou à un fournisseur détenant déjà le justificatif.

Il s'agit également de simplifier des démarches concernant les jeunes adultes. Dans le prolongement de la réforme du permis de conduire, nous allons faciliter l'inscription à l'examen grâce à une plateforme en ligne où les places seront attribuées sans quotas ni classement selon l'ordre d'inscription. Le texte supprimera, par ailleurs, la délivrance d'un certificat médical pour la pratique d'un sport dès lors que certaines conditions seront réunies.

En ce qui concerne des sujets plus complexes qui ont aussi un impact sur la vie quotidienne des Français, comme l'accueil de la petite enfance et le service national universel, le texte habilite le Gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour définir des dispositifs techniques tout en s'accordant le temps de la concertation et de la consultation.

Pour nos concitoyens aux revenus les plus modestes, nous voulons faciliter l'ouverture de livrets d'épargne populaire, auxquels 40 % des Français peuvent prétendre. C'est avantageux puisque le taux du livret A est actuellement de 0,5 % et celui du livret d'épargne populaire de 1 %. Un des freins est qu'il faut présenter un avis d'imposition à son banquier. Nous souhaitons faciliter la procédure en rendant directe la transmission du document, non seulement à l'ouverture du compte mais aussi les années suivantes pour les réactualisations.

Enfin, nous voulons améliorer la protection et la couverture des Français par les services publics, notamment en matière de santé, à la suite de la crise de la Covid-19. Très concrètement, le projet de loi permettra de faciliter l'utilisation du dossier médical partagé (DMP) et du dossier pharmaceutique pour assurer une meilleure prise en charge des patients. Le texte permettra en outre de supprimer la nécessité d'une autorisation préalable pour les sites de vente en ligne de médicaments des pharmaciens, afin de permettre un plus grand déploiement du système et un meilleur approvisionnement en médicaments, dans les communes sans pharmacie, par des officines de communes limitrophes.

Par ailleurs, le projet de loi vise à simplifier la vie de toutes les entreprises qui ont des projets de développement. Le Gouvernement souhaite simplifier les procédures afin d'accélérer les implantations et les extensions industrielles, sans modifier nos normes en matière d'urbanisme, d'archéologie ou d'environnement.

Lorsque nous avons travaillé sur le pacte productif, l'année dernière, avec M. le ministre Bruno Le Maire, nous avons confié à M. Guillaume Kasbarian une mission relative à l'accélération des procédures obligatoires préalables à une implantation industrielle. Le cahier des charges que nous avons fixé était de ne pas bouger une ligne des exigences du code de l'environnement et de se concentrer sur les processus administratifs, pour mieux les coordonner. Les articles correspondants du projet de loi s'appuient sur les conclusions de M. Guillaume Kasbarian qui a analysé des cas de projets ayant rencontré des difficultés d'installation et d'implantation liées à des raisons de nature administrative. Je saisis cette occasion de remercier et de féliciter le rapporteur pour ses travaux qui sont à l'origine du projet de loi.

Les délais des décisions d'autorisation sont deux fois plus longs en France qu'en Suède. Or on ne peut pas dire que le rapport à l'environnement soit moins exigeant dans ce pays. Concrètement, nous allons renforcer la sécurisation des porteurs de projets face aux changements réglementaires qui interviennent pendant l'instruction des dossiers. Il est évident qu'une nouvelle réglementation doit s'appliquer, mais de la même manière que si un opérateur dispose déjà d'un site. Il faudra se mettre en conformité – il n'y aura pas d'effet d'évitement – mais nous laisserons aux acteurs concernés la possibilité de s'organiser pour y parvenir. Quand une nouvelle réglementation entrera en vigueur, le dossier d'extension d'un site industriel en cours d'instruction ne devra pas redémarrer à zéro : il faudra se mettre en conformité dans les mêmes délais que pour une installation existante.

Nous souhaitons ensuite faciliter l'instruction des dossiers et adapter les procédures aux réalités du terrain en permettant aux préfets d'accélérer les délais au cas par cas. On pourra démarrer une partie des travaux lorsqu'il n'y a pas d'enjeux environnementaux.

Enfin, il s'agit d'anticiper et de faciliter les procédures pour accélérer le déploiement de la relance, notamment dans le domaine de la transition écologique. Nous proposons de déployer 30 milliards d'euros de crédits visant, essentiellement, à financer des investissements. De même, le projet de loi facilitera l'installation d'éoliennes en mer pour favoriser le développement des énergies renouvelables.

D'autres mesures visent également à simplifier la vie des entreprises et des Français. Je citerai des simplifications en matière d'intéressement, qui tendent à encourager un meilleur partage de la valeur. Ces mesures reposent sur l'expérience tirée de l'application de la loi PACTE qui a permis d'identifier des points de blocage. Il y aura également des simplifications pour la commande publique, par la pérennisation des mesures prises par ordonnances adoptées pendant la crise, et une pérennisation de celles concernant les entreprises en difficulté.

Simplifier pour rendre plus efficace, c'est une formule que l'on a l'habitude d'entendre ; au-delà du slogan, la simplification doit être une réalité. C'est la conviction du Gouvernement qui propose, avec ce projet de loi, une simplification administrative concrète, efficace, qui permettra aux administrations de se concentrer sur les vrais enjeux, parfois complexes – je pense, en particulier, à certaines autorisations environnementales –, pour mieux répondre aux attentes de nos concitoyens. Il s'agit de décider mieux, plus vite, plus simplement et plus clairement, afin de garantir un service public plus proche, plus à l'écoute et plus protecteur des intérêts de nos concitoyens. Par ailleurs, ces mesures contribueront à renforcer l'attractivité de nos territoires et de nos entreprises et, en conséquence, à créer des emplois au bénéfice de tous. Les temps exceptionnels que nous vivons ne font que renforcer la nécessité et l'urgence de cette réforme.

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