Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi d'accélération et de simplification de l'action publique

Réunion du mardi 15 septembre 2020 à 17h25

Résumé de la réunion

Les mots clés de cette réunion

  • CODERST
  • ICPE
  • consultation
  • simplification
  • simplifier

La réunion

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La séance est ouverte à 17 heures 25.

(Présidence de M. Bruno Duvergé, président)

La commission spéciale poursuit l'examen du projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, d'accélération et de simplification de l'action publique (n° 2750 rect.) (M. Guillaume Kasbarian, rapporteur).

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Mes chers collègues, nous poursuivons l'examen du projet de loi d'accélération et de simplification de l'action publique. Nous accueillons aujourd'hui Mme Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'industrie, pour examiner les titres III à V. Je vous remercie, madame la ministre, pour votre présence. Nous allons commencer par une discussion liminaire.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la relance, chargée de l'industrie

L'accélération et la simplification de l'action publique font l'objet d'une attente forte qui est régulièrement exprimée par nos concitoyens et nos élus. C'est aussi un axe important de notre politique depuis le début du quinquennat, avec la loi pour un État au service d'une société de confiance, dite loi « ESSOC », présentée dès 2017, avec la loi « PACTE », présentée en 2018, qui a prévu de nombreuses simplifications pour les entreprises, comme la suppression de seuils ou la mise en place d'un guichet unique, avec la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, dite loi « ELAN », également de 2018, qui s'est attelée à la simplification dans le domaine du logement, et enfin avec le projet de loi portant suppression de sur-transpositions de directives européennes en droit français, dont beaucoup de dispositions ont été reprises dans différents textes, notamment celui que vous examinez.

Les Français ont réitéré leur attente forte de simplification lors du grand débat. Ils ont exprimé un besoin de proximité de l'action publique, et je crois que la crise sanitaire, puis économique, que nous traversons n'a fait que renforcer le besoin de simplification et de proximité. Cela nous a surtout montré que nous sommes capables d'aller beaucoup plus loin dans des situations de crise et que cela peut éventuellement être pérennisé. Face à la crise économique actuelle, l'État a répondu présent, avec puissance et efficacité dans la plupart des situations. C'est la même puissance et la même efficacité que nous voulons pour l'avenir.

Un recensement réalisé en juillet 2020 pour la préparation du plan de relance a permis d'identifier deux types de simplifications. D'abord, des mesures adoptées en urgence depuis mars 2020 pourraient être pérennisées. Le Gouvernement s'est interrogé sur l'intérêt de chaque mesure et de chaque ordonnance. Des pérennisations sont proposées dans le cadre du présent projet de loi. Ensuite, des mesures de simplification additionnelles sont nécessaires, à titre temporaire ou pérenne, pour accélérer la relance de notre pays.

Les titres Ier et II du projet de loi, que vous avez examinés avec Mme la ministre de la transformation et de la fonction publiques, concernent le fonctionnement de l'administration, je n'y reviendrai donc pas. Je vous propose, en revanche, d'entrer dans le détail des titres III à V, dont l'objet est de rendre plus efficaces les relations entre nos concitoyens et leur administration, qu'il s'agisse de sujets du quotidien ou de nature économique.

Le projet de loi vise à simplifier le quotidien des Français. Notre objectif est de faire gagner du temps à nos concitoyens et à nos administrations, pour que celles-ci se concentrent sur les sujets ayant la plus forte valeur ajoutée pour les Français.

Nous voulons ainsi simplifier la délivrance de différents documents, comme les papiers d'identité, le permis de conduire et le titre de séjour, grâce à un dispositif permettant de dispenser le demandeur de présenter un justificatif de domicile ou tout simplement de renvoyer à une administration ou à un fournisseur détenant déjà le justificatif.

Il s'agit également de simplifier des démarches concernant les jeunes adultes. Dans le prolongement de la réforme du permis de conduire, nous allons faciliter l'inscription à l'examen grâce à une plateforme en ligne où les places seront attribuées sans quotas ni classement selon l'ordre d'inscription. Le texte supprimera, par ailleurs, la délivrance d'un certificat médical pour la pratique d'un sport dès lors que certaines conditions seront réunies.

En ce qui concerne des sujets plus complexes qui ont aussi un impact sur la vie quotidienne des Français, comme l'accueil de la petite enfance et le service national universel, le texte habilite le Gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour définir des dispositifs techniques tout en s'accordant le temps de la concertation et de la consultation.

Pour nos concitoyens aux revenus les plus modestes, nous voulons faciliter l'ouverture de livrets d'épargne populaire, auxquels 40 % des Français peuvent prétendre. C'est avantageux puisque le taux du livret A est actuellement de 0,5 % et celui du livret d'épargne populaire de 1 %. Un des freins est qu'il faut présenter un avis d'imposition à son banquier. Nous souhaitons faciliter la procédure en rendant directe la transmission du document, non seulement à l'ouverture du compte mais aussi les années suivantes pour les réactualisations.

Enfin, nous voulons améliorer la protection et la couverture des Français par les services publics, notamment en matière de santé, à la suite de la crise de la Covid-19. Très concrètement, le projet de loi permettra de faciliter l'utilisation du dossier médical partagé (DMP) et du dossier pharmaceutique pour assurer une meilleure prise en charge des patients. Le texte permettra en outre de supprimer la nécessité d'une autorisation préalable pour les sites de vente en ligne de médicaments des pharmaciens, afin de permettre un plus grand déploiement du système et un meilleur approvisionnement en médicaments, dans les communes sans pharmacie, par des officines de communes limitrophes.

Par ailleurs, le projet de loi vise à simplifier la vie de toutes les entreprises qui ont des projets de développement. Le Gouvernement souhaite simplifier les procédures afin d'accélérer les implantations et les extensions industrielles, sans modifier nos normes en matière d'urbanisme, d'archéologie ou d'environnement.

Lorsque nous avons travaillé sur le pacte productif, l'année dernière, avec M. le ministre Bruno Le Maire, nous avons confié à M. Guillaume Kasbarian une mission relative à l'accélération des procédures obligatoires préalables à une implantation industrielle. Le cahier des charges que nous avons fixé était de ne pas bouger une ligne des exigences du code de l'environnement et de se concentrer sur les processus administratifs, pour mieux les coordonner. Les articles correspondants du projet de loi s'appuient sur les conclusions de M. Guillaume Kasbarian qui a analysé des cas de projets ayant rencontré des difficultés d'installation et d'implantation liées à des raisons de nature administrative. Je saisis cette occasion de remercier et de féliciter le rapporteur pour ses travaux qui sont à l'origine du projet de loi.

Les délais des décisions d'autorisation sont deux fois plus longs en France qu'en Suède. Or on ne peut pas dire que le rapport à l'environnement soit moins exigeant dans ce pays. Concrètement, nous allons renforcer la sécurisation des porteurs de projets face aux changements réglementaires qui interviennent pendant l'instruction des dossiers. Il est évident qu'une nouvelle réglementation doit s'appliquer, mais de la même manière que si un opérateur dispose déjà d'un site. Il faudra se mettre en conformité – il n'y aura pas d'effet d'évitement – mais nous laisserons aux acteurs concernés la possibilité de s'organiser pour y parvenir. Quand une nouvelle réglementation entrera en vigueur, le dossier d'extension d'un site industriel en cours d'instruction ne devra pas redémarrer à zéro : il faudra se mettre en conformité dans les mêmes délais que pour une installation existante.

Nous souhaitons ensuite faciliter l'instruction des dossiers et adapter les procédures aux réalités du terrain en permettant aux préfets d'accélérer les délais au cas par cas. On pourra démarrer une partie des travaux lorsqu'il n'y a pas d'enjeux environnementaux.

Enfin, il s'agit d'anticiper et de faciliter les procédures pour accélérer le déploiement de la relance, notamment dans le domaine de la transition écologique. Nous proposons de déployer 30 milliards d'euros de crédits visant, essentiellement, à financer des investissements. De même, le projet de loi facilitera l'installation d'éoliennes en mer pour favoriser le développement des énergies renouvelables.

D'autres mesures visent également à simplifier la vie des entreprises et des Français. Je citerai des simplifications en matière d'intéressement, qui tendent à encourager un meilleur partage de la valeur. Ces mesures reposent sur l'expérience tirée de l'application de la loi PACTE qui a permis d'identifier des points de blocage. Il y aura également des simplifications pour la commande publique, par la pérennisation des mesures prises par ordonnances adoptées pendant la crise, et une pérennisation de celles concernant les entreprises en difficulté.

Simplifier pour rendre plus efficace, c'est une formule que l'on a l'habitude d'entendre ; au-delà du slogan, la simplification doit être une réalité. C'est la conviction du Gouvernement qui propose, avec ce projet de loi, une simplification administrative concrète, efficace, qui permettra aux administrations de se concentrer sur les vrais enjeux, parfois complexes – je pense, en particulier, à certaines autorisations environnementales –, pour mieux répondre aux attentes de nos concitoyens. Il s'agit de décider mieux, plus vite, plus simplement et plus clairement, afin de garantir un service public plus proche, plus à l'écoute et plus protecteur des intérêts de nos concitoyens. Par ailleurs, ces mesures contribueront à renforcer l'attractivité de nos territoires et de nos entreprises et, en conséquence, à créer des emplois au bénéfice de tous. Les temps exceptionnels que nous vivons ne font que renforcer la nécessité et l'urgence de cette réforme.

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Grâce aux deux premiers titres du projet de loi, nous allons supprimer des commissions consultatives devenues inutiles et déconcentrer des décisions administratives individuelles. Je vous remercie, mes chers collègues, pour vos contributions.

Nous en arrivons à l'examen des titres III à V du projet de loi, pour lesquels la philosophie du texte reste la même. Ce projet de loi part du terrain, de ce que vivent les Français au quotidien, et vos amendements reprennent souvent cette méthodologie. Quand une commission ne fonctionne pas ou ne sert à rien, nous avons proposé sa suppression ou son regroupement avec une autre instance. Quand une démarche administrative du quotidien fait perdre du temps aux Français ou n'est pas efficace, nous la changeons. Quand nous constatons des blocages pour les relocalisations, les extensions ou les créations de sites industriels, nous les levons tout en préservant, comme l'a très bien dit Mme la ministre, les standards environnementaux dont nous sommes fiers et qui font de la France un des pays les plus en pointe dans la lutte contre le réchauffement climatique et pour la protection de la biodiversité. Rien dans ce projet de loi ne viendra la menacer. Nous y reviendrons tout à l'heure.

Le titre III me tient particulièrement à cœur puisque je suis, effectivement, à son origine. Dans le cadre des travaux menés pour la préparation du rapport que j'ai remis en septembre dernier au Premier ministre, les acteurs économiques m'ont fait part d'une série de difficultés qui tiennent notamment à une insécurité juridique, à la durée des délais et à la complexité des procédures environnementales. Le titre III propose une série de mesures pour répondre à cette situation et assurer une adaptation souple des procédures aux cas concrets. Je ne citerai que quelques exemples.

L'article 21 vise à éviter une application automatique de nouvelles règles du code de l'environnement à des projets d'installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) dont le dossier a déjà été déposé. La situation actuelle est génératrice d'une forte insécurité juridique tout au long de la procédure. Lorsque les règles changent, on doit repartir de zéro.

L'article 25 permettra au préfet d'adapter la procédure de consultation du public pour les projets soumis à une procédure d'autorisation mais ne nécessitant pas une évaluation environnementale. Le préfet aura le choix entre une enquête publique et une participation par voie électronique.

L'article 26 autorisera, sous conditions – il est important de le préciser –, l'exécution anticipée de travaux avant que l'instruction de l'autorisation environnementale soit finalisée.

Par ailleurs, le titre III aménage le code de l'énergie pour simplifier la gestion de nos industries. L'article 28 harmonise les conditions d'approvisionnement en électricité de sites de production regroupés au sein d'une plateforme industrielle. L'article 28 ter, introduit par nos collègues du Sénat, permettra de faire réaliser simultanément le raccordement au réseau électrique d'un site de production et la pose d'une ligne de télécommunications à haut débit en fibre optique. Cette mutualisation des travaux conduira à un gain de temps et à un moindre coût pour les producteurs, mais aussi à moins de désagréments pour le voisinage, ce que chacun pourra apprécier.

Les titres IV et V regroupent diverses mesures de simplification qui ont été considérablement complétées par le Sénat, il y a plusieurs mois.

Outre les mesures de toilettage des codes et de suppression de procédures qui ne sont plus utilisées, le titre IV a pour ambition de simplifier les démarches de nos concitoyens, souvent par la voie de la dématérialisation et toujours dans une logique de suppression de formulaires, de récépissés ou de demandes redondantes qui empoisonnent la vie des Français dans leurs démarches du quotidien. Il faut entrer dans le détail de notre droit pour déceler, point par point, les blocages et les lenteurs des procédures.

Certains articles adoptés par le Sénat, avec une bonne intention que je comprends tout à fait, tendent à améliorer l'information des maires, mais cela me paraît ajouter de la complexité dans le quotidien de leurs administrés. Nous en discuterons.

Le titre IV est, pour moi, l'occasion de mettre fin à des situations ubuesques, voire scandaleuses, qui portent parfois atteinte aux droits fondamentaux des Français. Je pense notamment à la procédure d'expulsion de personnes occupant de façon illicite des logements occupés ou temporairement inoccupés, tels que les résidences secondaires. L'évolution que je propose devrait faciliter la protection du droit de propriété en simplifiant et en accélérant l'application des dispositions existant déjà, afin de lutter efficacement contre les squats de logements. J'espère, chers collègues, que vous me soutiendrez dans cette initiative.

Au-delà, ce projet de loi prend en compte la complexité administrative à laquelle les entreprises font face. On entend souvent dire que c'est autant le niveau des prélèvements qui dissuade les entreprises de s'implanter en France que la complexité et les nombreux changements de la législation. Gardons en tête que la clarté et l'intelligibilité de la norme sont fondamentales si nous voulons inciter à entreprendre.

Cette loi permettra aussi d'améliorer la vie quotidienne des Français. L'article 34, par exemple, facilitera la vente en ligne de médicaments, plébiscitée par nos concitoyens, tout en garantissant l'existence d'un cadre qui permet vraiment d'éviter les dérives. Nous avons auditionné longuement l'Ordre des pharmaciens.

En clarifiant et en complétant les obligations des prêteurs et des assureurs, mais aussi en renforçant les sanctions qui leur seront applicables en cas de manquement, l'article 42 bis redonnera aux ménages engagés dans un crédit immobilier le plein exercice de leur droit à changer d'assurance emprunteur. C'est un puissant levier pour obtenir une diminution des tarifs d'assurance qui pèsent lourdement dans le coût des crédits. Je suis sûr que les Françaises et les Français y seront particulièrement sensibles.

L'article 43, lui aussi prometteur pour le pouvoir d'achat, tend à créer un nouveau dispositif d'intéressement dans les entreprises de moins de onze salariés qui n'ont pas de délégués syndicaux avec lesquels négocier un tel accord. Depuis son examen au Sénat, cette mesure a été introduite dans le code du travail par la loi du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire. Je vous proposerai donc la suppression de l'article 43, dont je me félicite qu'il soit déjà présent dans notre droit.

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Avec les titres III à V, nous sommes au cœur d'une ambition qui nous anime depuis le début de notre mandat et que promeut le Président de la République : faciliter la vie de nos concitoyens et de nos entreprises.

Grâce au titre III, issu d'un brillant rapport de notre rapporteur M. Guillaume Kasbarian, nous allons faciliter les relocalisations et redynamiser nos territoires, notamment en simplifiant les procédures pour l'expansion et l'émergence de nouvelles industries, plus vertes et répondant aux ambitions de la transition énergétique, inscrite dans le plan de relance. Il n'aura échappé à personne que nous vivons une situation économique et sanitaire particulière. Ces dispositions sont très attendues, notamment pour notre souveraineté industrielle.

Raccourcir les délais n'implique pas d'amoindrir les exigences environnementales. On a trop tendance à croire, dans notre pays, que plus les études en la matière sont longues, plus on est exigeant, alors que ce n'est pas vrai du tout. On se retrouve parfois dans des situations complètement burlesques où des projets industriels partent chez nos voisins européens alors que ces derniers ont les mêmes exigences environnementales – voire des exigences supérieures dans certains cas –, tout simplement parce que nos délais sont trop longs et nos procédures trop complexes. Le titre III répond à une véritable attente au niveau économique.

Nous allons également simplifier des procédures afin d'améliorer la vie de nos concitoyens au quotidien en ce qui concerne le permis de conduire, l'accès à des médicaments ou la pratique du sport.

Grâce au titre V, nous mettrons fin à des aberrations liées à la sur-transposition de directives européennes.

Enfin, l'accélération des procédures en cas d'inondation ou de coulées de boue me tient particulièrement à cœur. Il est assez fou de constater qu'il faut parfois huit ans, alors même que les problèmes sont récurrents, pour réaliser des travaux permettant de mettre en sécurité nos concitoyens et leurs biens.

S'agissant des squats, nous vous soutiendrons, monsieur le rapporteur.

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Je peux adhérer, avec mes collègues du groupe Les Républicains, à l'objectif de simplification des procédures à condition que cela ne masque pas, en réalité, une complexification, si les simplifications sont bienvenues, justes et efficientes et si elles respectent les personnes concernées. On peut être favorable à certaines dispositions des titres III à V, mais plusieurs mesures inquiètent nos concitoyens.

L'article 25 promeut une consultation complètement dématérialisée à la place d'une enquête publique. L'accès à internet n'est pas aisé pour tous, surtout dans les territoires enclavés, et cela ne doit pas être un frein à l'exercice de la démocratie. Surtout, la suppression de l'intervention d'un commissaire enquêteur peut être préjudiciable. Le dialogue avec le citoyen qui rencontre le commissaire enquêteur permet de faire de la pédagogie, de donner des explications sur le projet. On court donc un risque d'éloignement avec le public. Certes, le préfet pourra décider s'il y a besoin d'organiser une enquête publique, mais cette décision se basera sur des critères qui ne sont pas clarifiés par le texte. La fin ne doit pas justifier des moyens qui peuvent exclure des citoyens de cet espace de démocratie. Ceux d'entre nous qui ont déjà participé à des enquêtes publiques, qui ont questionné en tant que citoyens ou qui ont apporté des réponses en qualité d'élus, savent qu'un tel dialogue permet souvent d'améliorer les projets, de les rendre plus équilibrés. Je vous invite, monsieur le rapporteur, à amender en profondeur cet article.

Les dispositions relatives à l'Office national des forêts (ONF) et aux chambres d'agriculture inquiètent aussi. Nous aurons l'occasion d'en débattre. Enfin, nous défendrons des amendements attendus par les agriculteurs – je pense notamment à l'encadrement des promotions – ou par les pharmaciens.

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Nous connaissons tous des exemples de complexité, de lenteur ou de lourdeur administrative – ce sont les mots souvent utilisés par des Français confrontés à une administration qui leur rend la vie difficile. Les entreprises peuvent aussi se heurter à des difficultés liées aux procédures administratives. Les maires et les élus locaux nous adressent les mêmes témoignages. La simplification, très attendue, relève aussi de notre responsabilité en tant que législateurs : nos amendements introduisent parfois de la complexité.

S'agissant du titre IV et de la simplification par la dématérialisation, il ne faudrait surtout pas oublier l'existence de fractures numériques. Des TPE peuvent avoir des difficultés à accéder à des marchés publics faisant appel à une procédure dématérialisée, des citoyens peuvent se trouver dans l'incapacité d'accéder à des plateformes pour obtenir une pièce d'identité. La fracture numérique revêt deux réalités, celle des territoires sans la fibre et des zones blanches, et celle de l'illectronisme, qui fait que des générations ne sont pas connectées à internet. Ce qui apparaît comme une simplification aux urbains peut être vécu par d'autres comme source de complexité.

Le projet de loi ASAP est un rendez-vous important, souhaité par tous, mais nous n'aurons pas le temps de traiter l'ensemble des simplifications attendues par les Français. Le groupe Mouvement démocrate et apparentés propose donc un rendez-vous annuel de la simplification, un « printemps de la simplification », par exemple. Il faut obtenir des résultats immédiatement visibles dans la vie quotidienne des Français, des entreprises et des collectivités territoriales.

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Le groupe Socialistes et apparentés est favorable à certaines évolutions, notamment celles relatives à la simplification de la vie des entreprises dans leurs démarches administratives ou le montage de leurs projets. En revanche, nous ne pouvons pas souscrire à une série de mesures qui, sous couvert de simplification, allègent les obligations et les réglementations en matière environnementale.

Deux exemples nous heurtent particulièrement. Tout d'abord, les préfets pourraient autoriser le commencement de certains travaux avant la fin des évaluations environnementales, dans certaines conditions. Que ces travaux soient réalisés aux frais et risques des porteurs de projets ne changera rien à l'irréversibilité des atteintes environnementales que pourrait permettre une telle dérogation. À cela s'ajoute le saucissonnage des études environnementales permis par l'article 23, qui pose un principe d'évaluation opération par opération. Outre que cet article est contraire au droit de l'Union européenne, chacun conçoit bien qu'on ne peut véritablement mesurer l'impact environnemental d'un projet ou d'un site qu'en intégrant l'ensemble des impacts et des externalités. Nous vous proposerons de supprimer cet article dangereux.

En l'état, les dispositions du titre III relatives aux questions environnementales entraîneront mon groupe à voter contre ce projet de loi.

Pour ce qui est des titres IV et V, nous appelons l'attention sur deux dispositions.

Au sujet de l'ONF, nous ne sommes pas opposés à ce qu'un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) emploie des agents de droit privé pour des missions qui ne présentent pas de spécificité en matière de service public. En revanche, les missions de police doivent rester dans les compétences des agents publics, en particulier s'agissant des délits.

L'article 38 prévoit la dématérialisation des récépissés des demandes de titres de séjour, qui concernent le plus souvent des personnes vulnérables, sans accès au numérique, maîtrisant mal la langue française. La dématérialisation revient, de fait, à créer une barrière à l'accès au séjour régulier. Pour nous, cet article est l'exemple type de la mauvaise mesure de simplification et de dématérialisation. Nous vous invitons vivement à accepter les amendements de suppression.

Enfin, si vous souhaitez faciliter et améliorer la vie des Français dans leurs rapports avec la puissance publique, nous vous demandons de soutenir l'amendement de notre groupe qui vise à créer un récépissé de demande d'acte notarié, afin de garantir l'effectivité du respect par les notaires de leur obligation d'instrumenter. C'est un corollaire indispensable de la situation de monopole dans laquelle se trouvent ces officiers publics et ministériels. Notre amendement s'inscrit dans l'esprit de la loi dite « Macron » : après la régulation économique, il faut une régulation déontologique.

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Nous abordons les derniers titres de ce projet de loi composé d'une accumulation de microréformes dans des domaines très hétéroclites, de la suppression de commissions administratives à la vente de médicaments en ligne, ce qui en fait, et on peut le regretter, un texte fourre-tout.

Même s'il répond à certaines attentes des Français et des collectivités locales, ce projet de loi laisse de côté certains sujets, comme la numérisation et l'informatisation des démarches administratives qui complexifient souvent la vie de nos concitoyens au lieu de la simplifier. Les trop nombreuses zones géographiques mal desservies par les réseaux internet se trouvent en grande difficulté, et on nous parle de la 5G…

Toutefois, ce projet de loi comporte un grand nombre de mesures pouvant simplifier la vie des entreprises, notamment dans leurs relations avec l'administration. Le groupe UDI et Indépendants tient à saluer cette volonté. En ces temps de crise, tout soutien au monde économique est à encourager.

Nous souhaitons également souligner l'important travail du Sénat qui a enrichi le projet de loi en complétant de nombreuses mesures prévues par le Gouvernement. Je n'en citerai que quelques-unes que nous espérons voir maintenues lors de l'examen du texte par notre assemblée.

L'article 25 bis renforce le droit d'information des maires s'agissant des avant-projets d'installation d'éoliennes. Si nous sommes pour une transition énergétique d'ampleur, nous pensons qu'elle doit se faire dans la concertation avec les élus locaux et les riverains ; sinon, les projets ne feront que renforcer la défiance des populations. C'est une question qui se pose d'une manière particulièrement vive dans l'Oise et dans le Grand Est.

L'article 34 bis A, adopté à la suite d'un amendement de la sénatrice Mme Nathalie Goulet, vise à faire coïncider les droits du titulaire de la carte Vitale avec la durée de vie de celle-ci. Ce sera une première mesure pour lutter plus efficacement contre la fraude sociale qui est le plus souvent une fraude documentaire – je pense au travail remarquable de notre collègue M. Pascal Brindeau. Ce sujet important mérite de nombreuses évolutions législatives et administratives.

L'article 44 bis B prévoit d'expérimenter pendant trois ans une clause de révision des prix pour les contrats agricoles. Ce sera une étape essentielle pour assurer un revenu décent à nos agriculteurs, dans le prolongement des propositions de la commission d'enquête sur les pratiques de la grande distribution présidée par M. Thierry Benoit.

Des interrogations persistent sur certaines dispositions, telles que l'article 33, qui prévoit le remplacement de fonctionnaires assermentés de l'ONF par des salariés de droit privé. Or l'instance rencontre des problèmes de gouvernance interne, marqués par une réduction du personnel et du budget, dans un contexte où les enjeux écologiques sont de plus en plus prégnants. Les forêts et l'avenir de cet établissement public méritent mieux qu'un débat tronqué, au détour d'un article d'une loi de simplification administrative.

Nous abordons la suite des débats avec une attitude constructive, mais plusieurs dispositions, dont nous reparlerons, nous interrogent.

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C'est assez extraordinaire : ce n'est pas à des amendements constituant des cavaliers que nous sommes confrontés, mais à un projet de loi qui est, en soi, un cavalier ! Jamais je n'ai vu un texte de simplification aussi complexe, partant dans tous les sens. On n'y comprend rien, puisqu'il va de la détention provisoire aux avis rendus en matière environnementale en passant par la comparution par visio-audience des personnes détenues, sans parler des amendements introduits en cours de discussion par le Gouvernement. Si vous vouliez simplifier les choses, c'est, ne serait-ce que sur la forme, déjà raté.

J'ai été atterré par ce qui s'est passé hier : vous avez supprimé la Commission de suivi de la détention provisoire et l'Observatoire de la récidive et de la désistance, au motif qu'il existe un Contrôleur général des lieux de privation de liberté. D'abord, cela ne fait pas partie de ses missions. Ensuite, le Gouvernement serait bien avisé de nommer un nouveau Contrôleur général des lieux de privation de liberté, dont la mission très importante ne fait visiblement pas partie des priorités.

Vous voulez supprimer, par ailleurs, l'Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice en disant que vous donnerez les statistiques de la délinquance tous les mois, alors que cet institut abrite l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales. On marche sur la tête. Vous osez appeler cela de la simplification ?

Dans le contexte de la Covid-19, vous demandez par amendement la comparution par visio-audience des personnes détenues, sans que leur consentement soit requis. J'espère, mais j'en doute, que le garde des Sceaux a vu passer cet amendement et que ce n'est pas la machinerie de la simplification administrative qui s'est mise en route toute seule.

Vous voulez également simplifier les avis relatifs aux installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE) alors que nous sortons d'une catastrophe – à Lubrizol – dans laquelle l'État a une part de responsabilité : si les démarches sont très longues, c'est que les fonctionnaires manquent dans les services qui suivent la prévention des risques, les dossiers concernant les ICPE et les usines Seveso « seuil haut » et « seuil bas » – j'en sais quelque chose du fait d'une expérience professionnelle passée. Ce sont des services sous-dotés dont les budgets diminuent chaque année.

Enfin, vous vous permettez une réforme de l'ONF dans une loi de simplification. C'est juste énorme ! Un débat d'une demi-heure ou de trois quarts d'heure, au maximum, débouchera sur une modification radicale de la nature de l'ONF et du statut de ses agents. Ce n'est ni fait ni à faire !

Il ne s'agit pas d'un texte de simplification mais d'une nouvelle offensive pour détricoter la puissance de l'État, la capacité d'action publique, au nom d'un dogme libéral classique qui consiste à réduire les coûts et à faire des économies de bouts de chandelles. C'est lamentable.

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J'évoquerai pour ma part la simplification et l'accélération des procédures administratives préalables à la mise en activité des installations classées – les ICPE.

Ce régime administratif a été créé car de telles installations suscitent, par nature, des risques ou des inconvénients en matière de santé, de sécurité et d'environnement. Il n'est pas question de carrés de tomates dans un jardin mais de carrières, de stations d'épuration, de sites de stockage de déchets, d'usines d'enrobés, de stations-service ou encore de raffineries de sucre. Il ne s'agit pas, en appliquant ce régime, de faire perdre du temps aux industriels, mais de préserver des intérêts supérieurs constitutionnellement garantis – la santé, la sécurité, un environnement sain.

En dépit de ces considérations, nous faisons face à une volonté simplificatrice qui se matérialiserait, si nous venions à voter le titre III, par l'exécution de certains travaux avant la délivrance de l'autorisation environnementale, par une consultation facultative du conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques (CODERST) préalablement à certains actes administratifs ou encore par une réduction du champ d'application des enquêtes publiques.

Pour le groupe Écologie, Démocratie, Solidarité, ce texte consacre une politique du fait accompli, menée au mépris des grands principes du droit de l'environnement, tels que celui de non-régression qui a été rappelé par de nombreux juristes avec qui nous avons travaillé, ou encore le droit à l'information du public, prévu par l'article 7 de la Charte de l'environnement et par la convention d'Aarhus.

Bien loin de sécuriser les porteurs de projets, les évolutions législatives que vous proposez risquent de cristalliser encore plus les tensions qui peuvent exister entre les industriels et une population préoccupée par son droit à un environnement sain, préoccupation d'autant plus légitime après la catastrophe de Lubrizol et les longs mois du confinement.

Afin de prévenir une importante régression sur le plan du droit et de la démocratie environnementale, mon groupe défendra de nombreux amendements de suppression. Ce texte n'était pas politiquement opportun avant la crise de la Covid-19, il l'est encore moins aujourd'hui.

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Les lois de simplification ne sont pas nouvelles : vous rappelez l'engagement du Gouvernement, madame la ministre, mais il ne faut pas oublier le choc de simplification voulu par le gouvernement précédent. Pourtant, nos concitoyens n'ont pas l'impression que cela produise les effets attendus.

Loin de moi l'idée de dire que rien n'est fait, mais tout en apportant des simplifications, on crée toujours plus de normes. Ces changements incessants sont complexes pour les Français, et nous, parlementaires, au même titre que le Gouvernement, ne sommes pas sûrs de simplifier vraiment. Il serait temps d'adopter un pilotage de la simplification, comme l'ont fait depuis des années le Royaume-Uni, l'Allemagne et les Pays-Bas, avec de bons résultats.

Le groupe Agir ensemble est sensible à ce sujet. Pour assigner des objectifs concrets à la simplification, il convient de mesurer l'évolution de la charge administrative et de fixer des objectifs de réduction à chaque ministère. Inspirons-nous des bonnes pratiques de nos voisins européens.

Le titre III est très directement inspiré par le travail de M. Guillaume Kasbarian, qui rejoint de nombreux rapports précédemment réalisés sur la simplification industrielle. Enfin ! La simplification administrative répond à une attente des entreprises, elle est un gain de compétitivité pour notre pays. Vous pouvez compter sur nos voix pour poursuivre en ce sens.

Nous soutenons également les dispositifs du titre V qui visent à supprimer des surtranspositions de directives européennes en droit français. Ce phénomène qui consiste à aller plus loin que ce qui est demandé est une source de complexification. Cet excès de zèle peut peser sur la compétitivité des entreprises et l'inflation législative et réglementaire alimente la charge mentale, tant des élus que des entreprises et des citoyens.

Le groupe Agir ensemble soutiendra ce texte, même si nous aurons à cœur de proposer des amendements que nous considérons comme des améliorations.

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Sous couvert de simplification, les titres III à V reviennent sur des garde-fous pensés par le législateur pour garantir un juste équilibre entre intérêts économiques, aménagement du territoire et intérêts environnementaux et de santé publique.

Les trois premiers articles du titre III créent des droits acquis pour les entreprises. Si l'on peut certes partager l'objectif d'accélérer l'installation des projets industriels, cela ne peut justifier que l'on ferme les yeux sur certains nouveaux impacts écologiques, ni que l'on considère artificiellement comme existantes des installations classées en cours d'instruction ou encore que l'on aménage les mesures d'archéologie préventive ! Ces mesures, que vous considérez comme une simplification de l'évaluation environnementale, ne constituent ni plus ni moins qu'en un retour en arrière. Outre que l'on voit mal en quoi ces modifications pourraient motiver un regain d'activité industrielle, elles envoient un très mauvais signal aux entreprises. Les citoyens attendent de nous tout le contraire : selon une étude récente, 56 % des Français déclarent préférer « un pays qui va faire le choix d'un autre modèle de développement avec comme objectif la préservation des ressources naturelles ». Il ne s'agit pas de s'opposer à l'industrie, moteur de notre économie – d'ailleurs, nous refusons cette dichotomie –, mais ce projet aurait dû être l'occasion de proposer des outils simples qui, sans alourdir les procédures, permettent de mieux concilier les différents intérêts.

Nous devons poser les bases d'un nouveau modèle de développement et non perpétuer un système ancré dans le passé. C'est le sens des amendements que nous proposons, en particulier sur l'évaluation environnementale et la prise en compte du public dans les procédures d'autorisation de projets industriels. Du sort qui leur sera réservé dépend le soutien du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

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Ce texte nous offre une formidable opportunité de faciliter la vie de nos concitoyens dans de nombreux domaines. Je ne doute pas que nous aurons des débats nourris sur l'inscription au permis de conduire, la résiliation de l'assurance emprunteur ou encore le certificat médical pour la pratique sportive.

D'autres questions ne sont pas abordées. Alors que nous passons notre vie de consommateurs à nous abonner et à nous désabonner à des services, il est plus difficile de résilier un abonnement que d'y souscrire, notamment lorsqu'il s'agit de téléphonie mobile ou de box Internet. Madame la ministre, seriez-vous favorable à des mesures qui obligeraient les entreprises à simplifier les démarches ? Il devrait être possible de se désabonner directement en ligne sans avoir besoin d'envoyer un courrier avec accusé de réception !

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Deux principes me semblent importants.

Premièrement, si le projet de loi couvre des sujets variés, c'est que la simplification attendue par les Français concerne différents domaines et que leur quotidien est riche de contacts avec diverses administrations. Nous répondons donc à la question qui est posée et non à celle qui nous arrangerait. C'est nous qui sommes au service des Français, monsieur Bernalicis, ce ne sont pas les Français qui doivent s'adapter aux lois et aux procédures administratives.

Le deuxième point concerne la méthode et l'esprit dans lequel nous abordons les sujets, notamment la question environnementale et l'archéologie préventive. Le rapport de mission du député M. Kasbarian a été présenté au groupe de travail sur le volet industriel du Pacte productif, dont fait partie France nature environnement. Les associations environnementales avec lesquelles nous avons travaillé ont bien compris que ce n'était pas une régression du code de l'environnement.

Il faut savoir regarder la réalité telle qu'elle est : ce n'est pas parce que nous écrivons des choses qui semblent nous protéger qu'elles nous protègent réellement des difficultés environnementales. Pour avoir présenté dans une autre vie des dossiers à la direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL), je peux vous dire que les questions qui m'étaient posées n'avaient pas grand-chose à voir avec l'environnement. L'entreprise pour laquelle je travaillais était plutôt mieux-disante au plan environnemental – elle avait, la première, créé des observatoires de la faune et de la flore dans un certain nombre de régions pour soutenir les dossiers d'autorisation – mais les problèmes étaient essentiellement de nature administrative – on nous parlait de dossiers mal arrivés, de photocopies non faites, de surcharge des services, etc.

Nous sommes partis des obstacles administratifs, sans toucher à une seule virgule du droit de l'environnement. Je ne peux vous laisser affirmer le contraire, même si je vois bien le potentiel politique qui vous amène à soutenir une telle position. De même, le projet de loi ne s'oppose pas aux directives européennes et le Conseil d'État, qui n'est pas avare de recommandations, a bien évidemment examiné ces dispositions.

S'agissant de la méthode, je retiens l'idée de la récurrence de l'exercice et la proposition du MODEM d'un « printemps de la simplification ». Je ne saurais me prononcer dans la mesure où cela relève de l'organisation du Parlement, mais sachez que je participerai volontiers à ce type d'exercice, utile au niveau législatif, mais aussi au niveau réglementaire puisque les députés peuvent faire remonter les dysfonctionnements de l'administration. L'écoute de nos administrés est essentielle.

En ce qui concerne le dossier de Lubrizol, il ne faut pas tout mélanger et je me permettrai de me référer au rapport de M. Damien Adam sur le sujet. Nous avons tenu compte de ce qu'il s'est passé : l'amendement n° 674 du rapporteur clarifie le principe de pollueur-payeur ; l'amendement n° 538 de M. Damien Adam permet de rendre publics les dossiers des CODERST. Il faudra par ailleurs légiférer afin de créer un bureau d'enquête accidents industriels. Une proposition de loi est en cours de rédaction.

Monsieur Adam, le sujet que vous soulevez fort légitimement entre dans le cadre des simplifications, mais je dois avant tout mesurer l'impact de votre proposition. Il me semble que les formalités de certains abonnements et désabonnements sont déjà alignées.

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Merci, chers collègues, pour vos propos.

Cela n'aurait aucun intérêt que je rouvre la discussion que nous avons eue hier ni que je prenne part au débat auquel nous invite M. Bernalicis sur les dogmes libéral et marxiste.

Le même a affirmé n'avoir jamais vu un texte de simplification aussi complexe. Certes, nous aurions pu nous en tenir à de grands principes comme : « la création d'industries doit être simple » ; « les médicaments doivent être vendus de façon dématérialisée » ; « l'inscription aux activités sportives ou au permis de conduire doit être simplifiée ». Mais la réalité est qu'il faut mettre les mains dans le cambouis, s'intéresser à ce que vivent les créateurs d'entreprises. J'ai interrogé des dizaines et des dizaines d'industriels, je les ai suivis sur le terrain et j'ai résumé étape par étape dans un document le « parcours du combattant de l'industriel pour créer son industrie ». Voyez, entre l'idée initiale et la première pierre, ce sont vraiment Les Douze Travaux d'Astérix !

Première étape : je choisis un territoire en fonction de mes implantations précédentes, des ressources, des transports, de sa culture industrielle ; je réactive et cherche des contacts locaux ; je visite des terrains et en choisis un ; je me renseigne sur les subventions et construis un plan d'investissement ; j'arbitre entre les promesses d'achat et de location ; je choisis un opérateur pour réaliser les travaux.

Deuxième étape, je monte mon dossier de projet : je fais le point sur les démarches administratives à suivre et je décide de me faire éventuellement accompagner parce que c'est très complexe ; je fais réaliser une étude par un cabinet privé à l'expertise technique et administrative reconnue ; j'élabore un pré-projet avec un cabinet d'architectes ; je demande à rencontrer la DREAL pour présenter mon projet ; je reçois l'avis de la DREAL quant à la complexité de mon projet, avec éventuellement des modifications substantielles, la préparation d'une enquête publique, etc.

Troisième étape : je dépose mes demandes. Si vous prenez le temps de lire le détail des démarches pour une demande de permis de construire, une évaluation environnementale et un diagnostic archéologique, vous verrez que les délais ne sont pas maîtrisés, que les projets ne sont pas sécurisés, bref que le processus est très compliqué.

Quatrième étape, je réponds aux demandes au fur et à mesure de l'examen de mes dossiers : je reçois des demandes de pièces supplémentaires, d'information complémentaire, de corrections ; je m'adapte aux nouvelles normes puisque, entre le moment où j'ai déposé mon dossier et le moment où on l'étudie, le législateur a modifié la loi et de nouvelles normes et nouveaux décrets ont été pris ; je contacte les différents acteurs et multiplie les échanges avec eux pour compléter au mieux mes dossiers ; je fais réaliser de nouvelles études d'impact si nécessaire ; j'essaie d'obtenir l'accord de chaque partie prenante.

Cinquième étape, je prépare la consultation du public : je fais valider chaque point de mon dossier avec la DREAL pour limiter les recours ; je démarre ma communication par la visite des maires alentour ; j'explicite mon projet – prise de parole, création d'un site web dédié, réunion avec des journalistes – ; je rends disponible mon dossier, consultable en mairie et sur internet.

Sixième étape, je suis le déroulé de la consultation ou de l'enquête publique : le public renseigne ses observations dans le registre – papier ou numérique – et je réponds à chacune des questions ; je fais un point régulier avec le commissaire enquêteur ; je reçois le rapport du commissaire enquêteur ; j'échange avec la DREAL et le maire et aménage éventuellement mon projet en fonction des réclamations du public.

Septième étape, j'attends d'avoir l'ensemble des autorisations : je reçois mon permis de construire et attends qu'il soit purgé d'un recours de tiers ou d'un retrait administratif ; j'attends le retour de consultations facultatives – CODERST, commission départementale de la nature, des sites et des paysages (CDNPS) – ; si des fouilles doivent être opérées sur mon terrain, j'attends l'appel d'offres, le choix de l'opérateur et leur réalisation ; une fois les fouilles réalisées, je reçois une lettre d'autorisation pour entreprendre les travaux. On a demandé à certains de faire des fouilles, mais sans leur donner l'autorisation de défricher, chaque administration se renvoyant la balle. Je vous passe les détails, c'est une cocotte-minute.

Huitième étape, l'autorisation délivrée fait l'objet d'un recours : je reçois un recours contre mon permis de construire ou mon autorisation environnementale ; je remplis mes obligations et me conforme aux prescriptions complémentaires éventuelles.

Après de longs mois, voire de longues années, je peux enfin poser la première pierre de mon chantier ! Il faudra encore du temps, et des difficultés, pour que l'usine ne sorte entièrement de terre.

J'ai donc repris chaque procédure, examinant la façon dont on pouvait la simplifier, la raccourcir. Le Gouvernement a fait ensuite un certain nombre de recommandations. Mme la ministre a lancé le plan « 78 sites clés en main » qui constitue une valeur ajoutée fondamentale pour les industriels. S'ils choisissent un terrain qui a été purgé des études préalables relatives à la biodiversité et à l'environnement – pas de crapauds ni de chauves-souris, pas de zone humide, pas de site gallo-romain – ils ont trois mois « top chrono » pour poser la première pierre. Je peux vous assurer que ce système a une énorme valeur ajoutée pour les industriels.

Oui, faire simple est compliqué lorsque l'on part d'une procédure kafkaïenne qui empêche la création d'usines et l'extension de sites industriels. On ne peut pas faire de grands discours sur la relocalisation, la souveraineté industrielle, la croissance verte, l'industrie en général et la maîtrise de nos technologies avec des procédures administratives que beaucoup seraient incapables de mener à terme. C'est là qu'il faut mettre les discours en cohérence avec les actes : nous devons en finir avec des procédures qui nous classent parmi les pires pays d'Europe en matière de fardeau administratif. On ne peut pas inviter des industriels à investir en France sachant qu'il leur faudra trois ou quatre ans pour voir naître leur projet.

Oui, c'est compliqué, cela va chahuter, on nous accusera de casser le code de l'environnement, mais comme l'a dit Mme la ministre, nous ne toucherons pas à une ligne des exigences légales. S'il y a une chauve-souris, une grenouille, un scarabée ou toute autre espèce protégée sur le terrain, les autorisations ne seront pas données, si le projet recouvre les restes d'une villa gallo-romaine, il est évident qu'il faudra creuser, fouiller et répertorier. Ce que nous voulons, c'est aller plus vite, que les délais soient encadrés, que des ajustements locaux soient possibles. Notre seul objectif est, je crois, partagé : restaurer la grandeur industrielle de la France, recréer des emplois industriels dans une période où l'on en a bien besoin !

(Applaudissements.)

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Je retiens de cette discussion liminaire qu'un rendez-vous annuel est nécessaire. Avec ce projet de loi et les précédents, nous traitons le stock, mais je ne suis pas certain que nous parviendrons à résoudre toute la complexité qui existe en magasin. De plus, au fur et à mesure que nous légiférons, nous adoptons de nouvelles réglementations qui rajoutent à la complexité. C'est une bonne idée que de revenir chaque année sur la simplification. Je retiens également de la brillante démonstration du rapporteur que nous avons besoin de méthode, d'un savoir-faire quant à l'analyse des procédures auxquelles sont confrontés les citoyens et les entreprises. C'est en réitérant chaque année l'exercice que nous pourrons avancer.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Comme vous le savez, il existe un classement mondial en matière de complexité administrative. Nous sommes passés de la 122e à la 105e position, mais le chemin est encore long ! Lorsque mes équipes expliquent que le classement est mal construit, je réponds que si l'on a passé le centième rang, c'est qu'il y a certainement une part de vérité.

TITRE III – DISPOSITIONS RELATIVES À LA SIMPLIFICATION DES PROCÉDURES APPLICABLES AUX ENTREPRISES

Chapitre Ier Dispositions relatives aux procédures environnementales et à la participation du public

Suivant l'avis favorable du Gouvernement, la commission adopte l'amendement rédactionnel n° 654 du rapporteur modifiant l'intitulé du chapitre Ier du titre III du projet de loi.

Article 21 (articles L. 512-5, L. 512-7 et L. 512-10 du code de l'environnement) : Modalités d'application des nouvelles prescriptions en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement aux projets en cours

La commission examine les amendements de suppression n° 185 de M. Gabriel Serville et n° 229 de Mme Frédérique Tuffnell.

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Je veux tout d'abord remercier le rapporteur d'avoir distribué ce document qui montre son souci de faire de la pédagogie. Mais, sous couvert de simplification et d'accélération des procédures environnementales, l'article 21 vise tout simplement à faciliter les implantations industrielles. Cela nous met très mal à l'aise puisqu'il prend le contre-pied de tous les combats que nous avons menés sous la XIVe législature pour renforcer le droit de l'environnement. Contrairement à ce qu'explique M. le rapporteur, cet article comporte les germes de véritables atteintes au code de l'environnement. Je pense notamment à l'implantation de projets ICPE qui seraient en cours d'instruction et qui pourraient tout simplement bénéficier du principe de droits acquis, alors qu'ils n'auraient pas encore reçu d'autorisations régulières. Je vous laisse imaginer les conséquences si l'on avait appliqué ce principe au projet Montagne d'Or, en Guyane – que le Président de la République a choisi finalement d'écarter car il ne remplissait pas toutes les garanties, notamment en matière de protection de l'environnement.

La sensibilité environnementale des députés du groupe GDR est telle qu'ils demandent la suppression de l'article 21 : considérer des projets en cours d'instruction comme des installations déjà existantes pose problème car cela ne laisse pas le temps d'apporter les réponses nécessaires.

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Cet article concerne les ICPE soumises à autorisation et à enregistrement et contient deux dispositifs distincts : il propose de traiter les installations en cours d'instruction de la même façon que les installations qui ont déjà leur autorisation ; il intègre ensuite, dans le code de l'environnement, le principe de non-rétroactivité des nouvelles prescriptions affectant le gros œuvre.

Prenons le cas d'une station-service soumise à autorisation au titre du régime des ICPE, pour laquelle un arrêté de prescription générique vient imposer que les pompes soient espacées de deux mètres. Pour appliquer ces nouvelles règles, elle bénéficie d'un délai de mise en conformité. Mais la totalité de ses études, portées au dossier, ont prévu un espacement d'un mètre entre les pompes. Si la demande d'autorisation complète a été déposée, le projet de loi permet d'échapper à la nouvelle règle de deux mètres.

En droit positif, il est nécessaire de se conformer à la nouvelle règle édictée dans un souci environnemental, tandis que l'article 21 consacre un droit acquis au moment du dépôt du dossier, ce qui est contraire au principe fondamental de légalité qui impose qu'une décision soit appréciée à la date de la signature de la décision d'autorisation. Nous demandons la suppression de l'article 21 car il est dangereux pour la sécurité des installations et revient sur des prescriptions initiales.

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L'objectif de l'article est de protéger les industriels face aux aléas de la réglementation. J'ai montré qu'un industriel qui a fait réaliser les études environnementales et déposé son dossier à la DREAL et à la direction régionale des affaires culturelles (DRAC) peut se voir demander des années après de repartir de zéro parce que la réglementation a changé et que l'administration s'est montrée incapable de lui donner le feu vert en quelques mois. Un industriel qui se conforme de bonne foi aux normes et aux règles ne doit pas être constamment soumis à des aléas qui l'empêchent de sortir de la procédure !

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Je veux revenir sur l'exemple de la station-service, même si, en l'occurrence, elle n'est pas soumise à autorisation. L'autorisation sera instruite sur le dossier tel qu'il aura été déposé, en l'état du droit, mais l'installation en devenir devra se trouver en conformité avec la nouvelle loi, dans les délais prévus.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

C'est ce que prévoit le texte. Comme vous l'avez dit, il ne peut pas y avoir des installations qui respectent un droit A et d'autres un droit B. Ce serait contraire à un certain nombre de principes fondamentaux. Ce que nous proposons, c'est de geler le dossier, qui poursuit sa trajectoire, non de recommencer l'instruction du dossier. Par ailleurs, il reviendra au porteur de projet de se mettre en conformité avec le droit.

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Tel qu'il est rédigé, je crains que l'article 21 ne crée des contentieux supplémentaires. Nous avons travaillé avec des juristes pour tenter de comprendre comment ce dispositif fonctionnerait pour des ICPE soumises à autorisation et à enregistrement.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Je précise que ce texte est passé en Conseil d'État et que nous avons travaillé main dans la main avec les équipes du ministère de la transition écologique. Ce sont elles qui ont rédigé ces textes.

Mais il faut clarifier le point que vous soulevez et s'il faut écrire dans une circulaire qu'il n'y a pas d'ambiguïté, nous le ferons. Je m'engage à ce qu'il n'y en ait aucune : l'entreprise devra se conformer aux réglementations qui pourraient survenir avant que le projet ne soit bouclé.

La commission rejette les amendements identiques n° 185 et n° 229.

Elle en vient à l'amendement n° 230 de Mme Frédérique Tuffnell.

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La procédure d'autorisation concerne les ICPE qui présentent les risques ou les nuisances les plus significatifs en matière de santé, de sécurité ou d'environnement. Pour en tenir compte, cet amendement de repli les écarte du champ d'application de l'article 21.

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Je ne pense pas qu'il faille écarter les ICPE pour les raisons qui viennent d'être évoquées. Défavorable.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Même avis.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle étudie les amendements identiques n° 668 du rapporteur et n° 554 de Mme Monica Michel.

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Les projets en cours d'autorisation doivent pouvoir bénéficier des délais impartis aux installations existantes pour se conformer aux nouvelles prescriptions en matière d'ICPE. Cet amendement supprime un ajout du Sénat qui vide la mesure de sa portée.

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En effet, les dispositions adoptées au Sénat risquent de restreindre la portée de l'article. À l'heure où un choc de simplification doit accompagner le plan France relance, il serait dommage de priver d'effets une disposition qui vise à alléger les procédures pour stimuler les relocalisations et les créations d'emploi.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Cette question a été examinée avec le Conseil d'État pour savoir sur quels motifs d'exception se fonde le droit de l'environnement. En règle générale, il s'agit des notions de sécurité, de santé et de salubrité publiques. La rédaction issue du Sénat était redondante et surtout, ouvrait grand la porte au contentieux. Avis favorable.

La commission adopte les amendements.

Puis elle adopte l'article 21 ainsi modifié.

Après l'article 21

La commission examine l'amendement n° 398 de Mme Laure de La Raudière.

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Actuellement, une simple déclaration de travaux est nécessaire pour le remplacement intégral d'une éolienne. Comme les modèles économiques ont été calculés sur la durée de vie d'une éolienne, qui est de vingt ans en intégrant le démantèlement, le porteur de projet n'est pas obligé de déposer une nouvelle autorisation et de tenir compte des avis locaux. Or il peut se trouver que les municipalités ne soient plus d'accord avec ces projets. Il conviendrait donc que le remplacement intégral soit soumis à la délivrance d'une nouvelle autorisation.

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Je connais votre engagement sur le sujet. L'article L. 181-14 du code de l'environnement requiert de demander une nouvelle autorisation uniquement lorsque l'installation fait l'objet d'une modification substantielle. Votre souhait que toute modification, substantielle ou non, soit soumise à autorisation va à l'encontre de l'esprit du projet de loi, qui est de simplifier les démarches et de raccourcir les délais.

Il ne s'agit pas pour moi d'ouvrir le débat sur l'éolien, mais d'éviter toute nouvelle contrainte.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Si la modification est substantielle, une autorisation est nécessaire, si elle ne l'est pas, elle n'est pas soumise à autorisation. Il semble que le droit soit simple, clair et adapté à la situation.

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Réhausser de 30 ou 40 mètres une éolienne n'est pas considéré comme une modification substantielle. Par ailleurs, les documents d'urbanisme peuvent évoluer, avec la mise en place, par exemple, d'une aire de mise en valeur de l'architecture et du patrimoine (AVAP). En l'état du droit, ces évolutions ne pourraient pas concerner les parcs existants en cas de renouvellement – c'est le cas en Eure-et-Loir.

Je vais retirer cet amendement, car il ne correspond pas à une simplification. Mais le suivant concerne un cas très précis pour lequel il convient vraiment de faire quelque chose.

L'amendement est retiré.

La commission en vient à l'amendement n° 396 de Mme Laure de La Raudière.

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Il s'agit de prévoir que l'autorité administrative compétente peut interdire le renouvellement complet d'une éolienne lorsque les documents d'urbanisme, adoptés après l'installation de la première éolienne, l'interdisent.

L'État s'apprête à prendre en Eure-et-Loir une directive paysagère protégeant les cônes de vue de la cathédrale de Chartres. Quatre parcs éoliens s'y trouvent actuellement. Nous n'aurons aucun moyen de faire respecter cette directive si les promoteurs éoliens veulent renouveler complètement les éoliennes. Une telle situation pourrait se reproduire ailleurs, comme dans la belle cité de Carcassonne, si une AVAP était mise en place. L'autorité administrative compétente doit pouvoir interdire le renouvellement des éoliennes dans les territoires protégés par des documents d'urbanisme.

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Madame, vous me prenez par les sentiments car je suis moi aussi très attaché à la protection de la cathédrale de Chartres, à ses cônes de vue et à la directive paysagère, lancée par l'ancienne préfète, Mme Sophie Brocas, en lien avec les élus locaux. Je serai à vos côtés pour les défendre.

Néanmoins, j'ai le sentiment que l'amendement est déjà satisfait, car le préfet peut déclarer qu'il s'agit d'une modification substantielle.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

En effet, le préfet peut considérer que la modification apportée est substantielle, selon la situation – ce que l'on appelle l'intelligence du terrain. Une modification substantielle est soumise à autorisation, qui doit respecter les règlements d'urbanisme au moment où elle est délivrée. Dans le cadre d'une modification non pas substantielle mais « notable », le préfet peut renforcer les prescriptions applicables pour prévenir les dangers et inconvénients, ce qui aura pour effet de les rapprocher des règles d'urbanisme en vigueur.

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Mon interprétation juridique ne rejoint pas du tout la vôtre et les services de l'État, auxquels j'ai soumis cet amendement, me confirment qu'il n'est pas satisfait. Les éoliennes qui se trouvent dans les cônes de vue de la cathédrale de Chartres, de Carcassonne ou d'autres lieux pourront être renouvelées à la fin de leur vie, si aucune modification considérée comme substantielle ne leur est apportée.

Quand bien même l'amendement vous semble satisfait, la commission pourrait tout de même l'adopter : il s'agit simplement de laisser la possibilité à l'autorité administrative compétente d'imposer des prescriptions complémentaires ou de décider l'interdiction de ces modifications lorsque les documents d'urbanisme en vigueur n'autorisent plus l'implantation de telles installations.

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Les administrations nous confirment que l'amendement est satisfait. Je vous propose cependant d'examiner ce point d'ici à la séance publique pour m'en assurer. Dans le cas contraire, nous reviendrions sur le sujet.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Nous examinerons aussi si nous pouvons établir une rédaction satisfaisante d'ici à la séance.

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Il ne s'agit pas uniquement du cas particulier de Chartres : l'AVAP d'Illiers-Combray ou d'autres documents d'urbanisme, qui évoluent pendant la durée de vie de l'éolienne, peuvent également être concernés. Les parcs éoliens sont interdits, mais le renouvellement des éoliennes autorisé.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Le renouvellement à l'identique d'un parc éolien n'est pas le cas le plus fréquent ; en général, des modifications sont apportées.

La commission rejette l'amendement.

Elle est saisie de l'amendement n° 184 de M. Gabriel Serville.

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Les territoires d'outre-mer sont souvent confrontés à une trop grande complexité administrative et à des situations inadaptées aux réalités et je serai le premier à plaider pour la simplification des procédures. Néanmoins, il ne s'agit pas de rechercher la simplification à tout prix, notamment lorsqu'elle pourrait aller à l'encontre d'impératifs de sécurité. La notion de « modification substantielle » est subjective et je souhaiterais qu'elle soit appréciée à l'aune de la sécurité.

J'ai ainsi en ligne de mire les grandes multinationales de l'industrie minière dont les projets réalisent des va-et-vient entre leur base, la préfecture de Guyane et les différents ministères. Sans garde-fous pour protéger les habitants et l'environnement, le principe des droits acquis est dangereux : nous en demandons la suppression. C'est une précaution d'usage, pour éviter les mauvaises surprises.

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Les acteurs économiques ont besoin d'un minimum de stabilité juridique pour développer leurs projets d'investissement. Je comprends votre intention mais suis opposé à la suppression des droits acquis, créatrice d'instabilité juridique. C'est pourquoi j'émets un avis défavorable.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Le droit actuel prévoit qu'en cas de modification de la nomenclature des installations classées, le préfet établit les garde-fous que vous mentionnez ; l'usine concernée peut alors travailler à obtenir une autorisation au regard du nouveau droit, mais elle n'est pas contrainte de cesser net son activité. Ces cas ne sont pas théoriques : une entreprise productrice d'alumines, qui emploie près de 800 salariés à Gardanne, est suspendue à l'autorisation délivrée par le préfet.

Je suis d'accord avec vous sur le fait que les entreprises doivent se mettre en conformité, mais dans un délai raisonnable. Dans le cas contraire, la modification réglementaire conduirait à une atteinte majeure au droit de propriété, alors que l'entreprise n'a commis aucune infraction, ainsi qu'à un dispositif non opérationnel. Il n'y a pas de droit acquis de façon permanente : tout doit converger, à un rythme qui soit compatible avec les opérations.

La commission rejette l'amendement.

Article 21 bis (nouveau) (article L. 515-1 du code de l'environnement) : Limites de durée pour le renouvellement des autorisations et des enregistrements pour les exploitations de carrières

La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques n° 115 de M. Thibault Bazin et n° 408 de Mme Danielle Brulebois, ainsi que l'amendement n° 163 de M. Jean-Marie Fiévet.

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L'article L. 515-1 du code de l'environnement dispose que la durée de validité de l'autorisation relative aux exploitations de carrières « ne peut excéder trente ans ». Or la réforme de l'autorisation environnementale a introduit de nouveaux articles, notamment les articles L. 181-15 et L. 181-28. Il semble utile de préciser, par cet amendement rédactionnel, que la limite de trente ans s'applique à toute procédure de renouvellement d'une autorisation.

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Les dispositions préexistantes à la réforme de l'autorisation environnementale fixent une durée maximale des autorisations de carrières et traitent des règles procédurales applicables à leur renouvellement. Dans un souci de clarification et de coordination entre ces différents articles, il est utile de préciser que la limite de trente ans prévue à l'article L. 515-1 s'applique à toute procédure de renouvellement d'une autorisation.

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Monsieur Fiévet, je vous demande de retirer votre amendement. Avis favorable aux amendements identiques.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Même avis.

L'amendement n° 163 est retiré.

La commission adopte les amendements identiques.

Après l'article 21

La commission examine, en discussion commune, les amendements identiques no 162 de M. Jean-Marie Fiévet et no 407 de Mme Danielle Brulebois ainsi que les amendements n°s 114 de M. Thibault Bazin et 380 de Mme Laure de la Raudière.

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Nombre de carrières n'ont pas achevé l'extraction de l'intégralité de leurs gisements autorisés avant l'échéance des autorisations en raison des récentes perturbations économiques. Pour éviter de fortes charges administratives aux acteurs du secteur, nous proposons de leur permettre de prolonger leur autorisation administrative d'exploitation jusqu'à épuisement des volumes, avant d'effectuer une nouvelle demande, dans la limite de cinq ans supplémentaires.

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La situation actuelle et les fortes incertitudes qui pèsent sur la reprise de l'économie du bâtiment au cours des prochaines années font que nombre des exploitations de carrières n'auront pas achevé l'extraction de l'intégralité des gisements autorisés avant l'échéance de leurs autorisations.

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La crise sanitaire a eu des incidences non seulement sur le secteur du bâtiment et des travaux publics mais aussi sur les carrières. Or la notion de durée d'exploitation entre dans le triple encadrement de l'activité des carrières. Ces autorisations arrivent bientôt à échéance.

Il serait dommage, alors que nous cherchons à limiter le mitage et la création de nouvelles carrières en optimisant les carrières existantes, de ne pas prendre en compte la crise sanitaire. Je propose de rallonger l'autorisation, non pas de cinq ans, mais d'une année supplémentaire si l'impact de la crise sanitaire sur l'exploitation de la carrière est avéré.

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L'objectif de mon amendement est sensiblement identique ; seule diffère la date à laquelle la demande complète devra être déposée pour être prise en compte.

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En application de l'article L. 181-15 du code de l'environnement, les autorisations de carrière peuvent déjà être prolongées. Il n'est pas souhaitable de superposer les dispositifs car cela pourrait porter atteinte à l'intelligibilité de la loi. Avis défavorable.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Le code de l'environnement permet déjà un renouvellement de l'autorisation, sans engager une nouvelle procédure complète, dès lors que le projet ne comporte pas de modification substantielle. Un arrêté du préfet suffit par exemple pour prolonger d'un an l'autorisation d'exploitation d'une carrière qui aurait été bloquée durant la crise sanitaire.

Les amendements nos 114 et 380 sont retirés.

La commission rejette les amendements identiques nos 162 et 407.

Article 22 (article. L. 522-2 du code du patrimoine) : Garanties concernant la réglementation applicable en matière de prescriptions d'archéologie préventive

La commission examine l'amendement n° 231 de Mme Frédérique Tuffnell.

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L'article 22 consacre un principe de sécurité juridique qui existe déjà pour les porteurs de projets : en matière d'archéologie préventive, notamment, des décrets prévoient systématiquement une application de leurs dispositions dans le temps. C'est pourquoi il convient de le supprimer.

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Comme l'article précédent, l'article 22 vise à garantir la stabilité juridique du cadre législatif applicable aux projets, non à la diminuer. Ce sont les mesures réglementaires du code du patrimoine en vigueur à la date de réception du dossier du projet d'implantation industrielle qui s'appliquent pour la suite des démarches relatives à l'archéologie préventive.

Ces dispositions ne concernent qu'un nombre infime de dossiers – seuls 1,5 à 2 % des dossiers instruits font l'objet de fouilles. Je salue à nouveau la création des sites clés en main, qui permettent de promouvoir des lieux déjà fouillés, répertoriés et dont le patrimoine a été préservé. Je vous demande de retirer votre amendement.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Même avis. Bien que le nombre de cas concernés soit peu élevé, il est loin d'être inutile de les sécuriser par la loi, ne serait-ce que dans la représentation que de nombreux industriels se font de la complexité administrative. M. le rapporteur l'a indiqué, ce sujet est souvent surestimé car on ne trouve pas de village gaulois exceptionnel dans tous les sites d'implantation !

L'article clarifie le dispositif, étant entendu que si des mesures réglementaires relatives à l'archéologie préventive sont nécessaires, le site doit se mettre en conformité, comme nous l'avons mentionné pour la partie environnementale.

La commission rejette l'amendement.

Elle adopte l'article 22 sans modification.

Chapitre II

(Division et intitulés supprimés)

Article 23 (articles L. 122-1-1 et L. 181-10 du code de l'environnement) : Actualisation des études d'impact

La commission examine les amendements de suppression no 131 de Mme Cécile Untermaier et no 451 de M. Gabriel Serville.

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L'article 23 allège l'instruction des dossiers s'agissant de projets d'éoliennes.

On pourrait se féliciter des mesures d'accélération et de simplification des projets visant à réussir la transition énergétique, inscrite dans le marbre et souhaitée par nos concitoyens. D'un point de vue écologique, pourtant, nous sommes persuadés qu'une évaluation environnementale peut s'apprécier non pas opération par opération, mais selon une vision plus globale des impacts et externalités générés par les composants d'un ou de plusieurs projets. Nous ne pouvons par ailleurs encourager l'émergence de projets sans maîtriser leur impact sur les territoires et leurs activités touristiques et culturelles.

Mme Elisabeth Borne, alors ministre chargée de l'écologie, du développement durable et de l'énergie, l'avait constaté en février en Thiérache : le développement anarchique de l'éolien peut menacer la visibilité des monuments historiques ou l'encerclement des bourgs. Dans les territoires concernés, le ressenti est unanime : trop c'est trop. Il ne s'agit pas d'être pour ou contre l'éolien – qui pourrait s'opposer à une production d'électricité à partir du vent ? –, mais de demander une meilleure régulation pour une implantation plus harmonieuse.

Force est de constater que le modèle économique de l'éolien et son développement méritent d'être ajustés car il entraîne un lobbying des opérateurs aux conséquences malsaines. Les conseils municipaux de nos villages devisent ; les villages s'opposent ; les conflits d'intérêts se multiplient.

Outre des mesures de simplification, fournissez-nous des outils de régulation, en confiant aux élus locaux la modification des périmètres d'implantation et en proposant une répartition plus collective et plus juste de la fiscalité locale générée par ces projets. Le développement de l'éolien ne peut se faire contre les territoires.

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L'article 23 prévoit qu'en cas d'arrivée d'un nouveau porteur de projet sur un site, les prescriptions accompagnant sa demande d'autorisation ne peuvent porter que sur la nouvelle demande, afin de ne pas affecter les activités déjà autorisées sur le même site. Le manque de clarté de cet article n'est toutefois pas sans conséquence sur l'objectif poursuivi.

La loi de 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a instauré une évaluation des impacts environnementaux pour l'ensemble des opérations d'un même projet, afin d'éviter le « saucissonnage ». Or l'article 23 peut être lu comme permettant d'évaluer les impacts de façon fractionnée, par législation ou par opération, plutôt que de façon globale, comme l'impose la directive concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement, dite directive « projets ». Cela aboutirait à fausser l'évaluation des impacts environnementaux, conduirait à une régression environnementale ainsi qu'à une fragilisation des projets qui pourraient être remis en cause pour non-conformité à la directive « projets ».

En outre, il est demandé aux industriels non de réévaluer l'impact d'une installation existante quand une nouvelle entreprise s'installe, mais seulement de vérifier les nouveaux impacts et les impacts cumulés. Au lieu de la simplifier, l'article 23 complexifie la législation et la fragilise in fine. Il convient donc de le supprimer.

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La portée de l'article est en réalité plus limitée. Actuellement, l'article L. 122-1 du code de l'environnement prévoit que le maître d'ouvrage doit actualiser l'étude d'impact lorsque les incidences d'un projet n'ont pu être complètement identifiées ni appréciées avant l'octroi de la première autorisation.

L'article 23 vise seulement à prévoir que l'avis de l'autorité environnementale qui est à nouveau sollicitée ne revienne pas sur les éléments déjà autorisés, et que les prescriptions nouvelles ne portent que sur l'objet de la demande concernée. Il s'agit d'une mesure de bon sens qui simplifiera la vie des acteurs économiques sans porter atteinte à l'environnement. Avis défavorable.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Même avis. L'article ne revient pas sur la notion de projet, introduite en 2016, qui oblige le maître d'ouvrage à prendre en compte le projet et ses impacts dans leur ensemble. L'objectif est de sécuriser la mise en œuvre du processus d'actualisation des études d'impact, actuellement prévu par le code de l'environnement. Lors de l'actualisation, le maître d'ouvrage devra bien prendre en compte les effets cumulés du projet avec les installations préexistantes. Il n'y a donc aucune ambiguïté.

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Même si les modifications peuvent être minimes par rapport aux enjeux écologiques, les projets éoliens ont des incidences très fortes sur les territoires. En Thiérache, ils sont trop nombreux, comme l'attestent les pancartes « non à l'éolien », visibles partout. L'éolien entre en confrontation avec les projets de territoire, parfois à visée culturelle ou touristique. Son implantation, parfois malheureuse, est encore facilitée aujourd'hui. Nous souhaitons qu'elle soit mieux régulée car la transition écologique n'avancera pas si vous allez ainsi contre les territoires.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Il s'agit de clarifier la manière dont le maître d'ouvrage principal, lors de l'installation d'un site industriel, prend en compte l'impact de son projet par rapport aux autres sites implantés. Les dispositions ne s'adressent toutefois pas à l'éolien, bien qu'il s'agisse d'installations classées, et ne facilitent en aucune manière l'installation d'éoliennes. Je comprends votre combat, mais la question n'est réglée ni par l'article 23, ni par sa suppression.

La commission rejette les amendements.

La commission examine les amendements identiques no 669 du rapporteur et no 232 de Mme Frédérique Tuffnell.

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L'amendement supprime les alinéas 2 et 3, par lesquels le Sénat a ajouté un dispositif qui complexifie le droit et rend la procédure peu lisible, ce qui peut empêcher l'administration de traiter correctement et efficacement les demandes.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Avis favorable.

La commission adopte les amendements.

En conséquence, l'amendement n° 552 de Mme Barbara Bessot Ballot tombe.

La commission examine l'amendement n° 327 de Mme Laure de la Raudière.

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Les modalités de l'évaluation environnementale des projets et des plans, définies notamment par la directive européenne, prévoient l'élaboration de documents d'étude de leurs incidences ou impacts, l'information et la participation du public. Ces textes imposent une séparation fonctionnelle légitime pour l'évaluation environnementale des projets soutenus par la puissance publique, mais ne prévoient pas de contrainte particulière pour l'évaluation des projets par les services de l'État en charge de l'environnement.

Il est ainsi à noter que les textes européens ne prévoient pas d'« autorité environnementale » à proprement parler et que nos voisins européens instruisent les projets des acteurs privés dans le strict respect de la directive, c'est-à-dire par les services de l'État compétents en matière d'environnement, sans une seconde instruction par un organisme tiers.

L'objet de l'amendement est donc de simplifier l'organisation de l'État sur ces procédures administratives en remplaçant « environnementale » par les mots « compétente pour l'autoriser ou en recevoir la déclaration » dans l'article L. 122-1 du code de l'environnement.

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L'amendement vise à remplacer l'autorité environnementale par l'autorité décisionnaire pour que celle-ci puisse rendre l'avis sur l'évaluation environnementale quand elle reçoit le dossier.

J'y suis défavorable car il est contraire au droit européen. Dans une décision du 6 décembre 2017, le Conseil d'État a ainsi rappelé que si les dispositions de la directive du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement ne font pas obstacle à ce que l'autorité publique compétente pour autoriser un projet puisse être en même temps chargée de la consultation en matière environnementale, il est nécessaire qu'il y ait une séparation fonctionnelle au sein de cette autorité.

La création des missions régionales d'autorité environnementale a permis de mettre fin à la situation où les préfets, autorités compétentes pour autoriser les projets, rendaient également un avis sur l'évaluation environnementale. Il convient de conserver ce dispositif car sa modification pourrait entraîner une augmentation des contentieux, donc une complexification supplémentaire. Je vous demande de retirer l'amendement.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Même avis : cet amendement, qui semble contraire aux jurisprudences européenne et nationale, nous mettrait potentiellement en difficulté.

La commission rejette l'amendement.

La commission examine successivement les amendements nos 313, 233 et 314 de Mme Frédérique Tuffnell.

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Afin de favoriser l'implantation de nouveaux projets, l'article 23 entend sécuriser le processus d'actualisation des études d'impact existantes, pour l'ensemble des acteurs. L'étude d'impact du projet de loi plaide en effet pour une telle sécurisation dans le cas d'un nouvel entrant, par exemple d'une zone industrielle nécessitant des autorisations environnementales délivrées pour chaque composante d'un projet, sur plusieurs années.

La rédaction actuelle du code de l'environnement laisse une marge d'interprétation quant au périmètre de l'évaluation environnementale. Elle comprend donc un risque d'incertitudes pour le site existant, lors de l'implantation d'un nouveau projet industriel à proximité. Les précisions introduites aux alinéas 4 et 5 paraissent superflues et complexifient l'appréciation du dispositif. Il convient de les supprimer, ainsi que l'alinéa 6.

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L'avis de l'autorité environnementale ne revient pas sur des éléments qui ont déjà été autorisés. La mesure semble donc de bon sens, en tant qu'elle maintient la stabilité du cadre juridique, tout en garantissant que le projet respecte les règles environnementales, lesquelles, je le rappelle, sont très protectrices. Adopter les amendements viderait l'article de son sens. Avis défavorable.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Ces alinéas ont été rédigés dans un souci de clarifier le droit – le contraire eût été étonnant. Les entreprises déjà implantées sur un site ne doivent pas voir leurs autorisations remises en question, et le nouvel opérateur doit intégrer son projet en tenant compte des autres intervenants.

La commission rejette successivement les amendements.

Elle adopte l'article 23 ainsi modifié.

Article 23 bis (nouveau) (article L. 121-15-1 du code de l'environnement) : Droit d'option entre la concertation prévue par le code de l'urbanisme et celle prévue par le code de l'environnement

La commission est saisie de l'amendement n° 623 du Gouvernement.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

L'amendement vise les projets relevant d'une concertation obligatoire à la fois au titre du code de l'environnement et du code de l'urbanisme. Il permet au maître d'ouvrage d'opter pour une seule concertation, en l'occurrence celle prévue par le code de l'environnement. Ce droit d'option se fera avec l'accord de l'autorité administrative chargée de la concertation au titre du code de l'urbanisme.

L'objectif est de simplifier la charge administrative en réalisant une seule procédure au lieu de deux, sans pour autant dégrader la qualité de la participation du public, puisque la concertation au titre du code de l'environnement est réalisée sur l'ensemble du projet alors que celle au titre du code de l'urbanisme l'est souvent sur une partie du projet. Il s'agit donc d'opter pour une consultation unique, mais la plus large possible.

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Certaines préoccupations d'urbanisme ne se retrouvant pas nécessairement dans le code de l'environnement, la concertation sur le périmètre le plus large inclura-t-elle des questions relatives aux deux codes ?

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Tout à fait.

La commission adopte l'amendement.

Après l'article 23

La commission examine l'amendement n° 553 de M. Vincent Thiébaut.

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L'article L. 181-8 du code de l'environnement prévoit d'inclure une étude d'incidence environnementale dans les dossiers de demande d'autorisation des projets non soumis à évaluation environnementale. Cette exigence constitue une surtransposition du droit européen.

Si l'obligation d'une étude d'incidence peut se justifier en raison de quelques articles spécifiques en matière d'eau ou d'espaces protégés, qui n'ont pas été intégrés au fur et à mesure des modifications de textes dans la réglementation générale sur l'évaluation environnementale, la généralisation de telles études à tous les cas pour lesquels l'évaluation environnementale n'est pas obligatoire semble excessive et injustifiée.

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L'amendement, dont je comprends l'intention, simplifie un peu trop le dispositif en supprimant l'étude d'incidence environnementale pour les projets qui ne sont pas soumis à évaluation environnementale. Or une telle étude est proportionnée à l'importance du projet et à son incidence prévisible sur l'environnement. Il convient de la conserver afin de maintenir l'équilibre nécessaire entre la volonté de simplifier et d'accélérer les procédures et la protection de l'environnement.

L'amendement pouvant être de nature à remettre en cause l'équilibre trouvé, je vous propose de le retirer. À défaut, j'y serai défavorable.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

L'étude d'incidence environnementale est indispensable pour connaître, donc encadrer, les dangers et les inconvénients d'une installation de site. Nécessaire à l'administration, elle lui permet de s'assurer qu'il n'existe pas de difficulté ni d'incidence environnementale supplémentaire.

Si elle n'était pas réalisée, il faudrait approfondir la demande préalable d'examen au cas par cas, ce qui conduirait à davantage de papier et de travail, sinon de temps, pour déterminer non seulement l'impact du projet mais également la façon d'encadrer l'exploitation afin d'éviter les problèmes. Le fait d'alerter dès le départ sur les incidences environnementales permet de mettre en place les éléments pour encadrer le dossier.

L'amendement est retiré.

La commission examine en discussion commune les amendements n° 452 et n° 453 de M. Gabriel Serville.

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Le premier amendement introduit des règles relatives à l'évaluation environnementale des titres miniers dans le code minier. L'état actuel du droit ne permet toujours pas de prendre en compte les enjeux environnementaux lors de la délivrance de ces titres.

Certes, ces préoccupations ne sont pas absentes de l'instruction des demandes de titres, dans la mesure où l'article L. 161-1 du code minier fait référence à la protection des personnes, des biens et de l'environnement et que, la Charte de l'environnement ayant valeur constitutionnelle, ses principes s'imposent implicitement à toutes les décisions administratives. Mais il est fort regrettable que le code encadrant des activités qui ont, par nature, un impact sur l'environnement n'affiche pas clairement la volonté de trouver un juste équilibre entre nécessités économiques et intérêts écologiques.

La réforme du code minier promise depuis 2012 et annoncée pour fin 2019 étant constamment reportée, je propose de soumettre, dans un souci de sécurisation et de simplification de la législation minière, l'octroi et le renouvellement de titres miniers aux règles relatives à l'évaluation environnementale prévues par le code de l'environnement.

Le second amendement est de repli, mais nous n'aurons pas besoin d'en parler si vous acceptez le premier !

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Je vais vous décevoir, monsieur Serville…

Les enjeux environnementaux sont déjà pris en compte par la législation : les articles L. 122-2 et L. 132-1 du code minier prévoient que nul ne peut obtenir un permis exclusif de recherches ou une concession d'exploitation de mine s'il ne possède les capacités techniques et financières nécessaires pour assumer les obligations relatives à la préservation des intérêts mentionnés à l'article L. 161-1. Ce dernier vise notamment les contraintes et les obligations nécessaires à la préservation de la sécurité et de la salubrité publiques, la conservation des caractéristiques essentielles du milieu environnant, terrestre ou maritime, et la protection des espaces naturels et des paysages, de la faune et de la flore, ainsi que les équilibres biologiques et les ressources naturelles. Avis défavorable.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Même avis. Dès lors qu'il y a travaux et exploitation, il y a évaluation environnementale. En outre, le titre dans lequel s'insère votre amendement est relatif au droit de propriété – il n'a donc pas le même objet. Enfin, je vous confirme que nous préparons, avec le ministère de la transition énergétique, une réforme du code minier. Le sujet que vous abordez, spécifique, mérite un projet de loi.

La commission rejette successivement les amendements.

Article 23 ter (nouveau) (articles L. 103-2, L. 104-1, L. 104-2, L. 104-3 et L. 122-22 du code de l'urbanisme et article L. 121-17-1 du code de l'environnement) : Simplification et clarification des règles relatives à la participation du public et à l'évaluation environnementale en droit de d'urbanisme

La commission examine l'amendement n° 620 rectifié du Gouvernement.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Il s'agit de simplifier et de mieux articuler entre elles, les procédures d'évaluation environnementale et de participation du public pour les documents d'urbanisme, ainsi que pour les unités touristiques nouvelles (UTN), afin de sécuriser juridiquement les porteurs de projets sur trois points. En premier lieu, il s'agit de mettre fin à l'insécurité juridique qui caractérise l'état actuel du droit relatif à l'évaluation environnementale des documents d'urbanisme, en particulier des plans locaux d'urbanisme (PLU), comme l'a souligné l'avis du Conseil d'État dans son rapport public de 2019. En deuxième lieu, il s'agit de clarifier la procédure des autorisations préfectorales des UTN, largement complexifiée puisqu'elles sont désormais considérées comme des plans et programmes par le Conseil d'État – nous en tirons les conséquences. Enfin, il s'agit d'unifier le régime de participation du public pour tous les documents d'urbanisme, en les faisant relever du seul code de l'urbanisme.

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Mon avis est favorable car cet amendement permet d'ajouter les PLU dans la liste des plans et programmes qui font l'objet d'une évaluation environnementale systématique. Il permet également de préciser les règles d'évaluation environnementale des UTN.

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Ce n'est pas forcément une simplification pour les PLU, alors qu'il s'agit d'un projet de loi de simplification, monsieur le rapporteur…

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Ce n'est pas totalement faux…

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Mais cela a le mérite de la clarté et d'alignement de tous les PLU sur la même procédure. C'est donc une forme de simplification : la procédure est plus claire, ce qui évitera des contentieux.

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Mon amendement, précédemment rejeté, visait le même objectif…

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Il s'agit également de nous conformer au droit de l'Union européenne.

La commission adopte l'amendement.

Chapitre III

(Division et intitulé supprimés)

Article 24 (articles L. 512-7-3, L. 512-7-5, L. 512-12, L. 555-1 et L. 555‑12 du code de l'environnement) : Modalités de consultation du conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques

La commission examine les amendements de suppression n° 132 de Mme Cécile Untermaier, n° 203 de M. Pierre Morel-À-L'Huissier, n° 386 de Mme Laure de La Raudière et n° 454 de M. Gabriel Serville.

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Nous souhaitons la suppression de l'article 24 qui vise à rendre facultative la consultation, aujourd'hui obligatoire, pour le régime d'enregistrement. Le même régime va donc s'appliquer à toutes les procédures et la consultation, facultative dans les trois types de cas de figure que nous avons déjà évoqués, sera à la main du préfet.

Nous ne sommes pas favorables à cette simplification. Certes, c'est plus lisible, mais la consultation est facultative pour l'autorisation car le régime d'instruction est beaucoup plus lourd, ce qui permet de s'exempter de la consultation du conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques (CODERST). Pour les ICPE enregistrées, la procédure d'instruction étant moins lourde, les avis du CODERST et de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites (CDNPS) apportent des garanties. En outre, un tel alignement constitue un affaiblissement, peu opportun, de la démocratie environnementale.

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L'article 24 permet au préfet de ne pas consulter la commission départementale consultative compétente, et notamment la CDNPS en ce qui concerne les parcs éoliens, avant toute autorisation d'ICPE. Cette modification constitue un recul dans la transparence et l'association de la population aux projets, et expose à une augmentation du nombre de contentieux.

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Comme mes collègues, je m'oppose à cet article qui vise à supprimer la consultation obligatoire des commissions ad hoc, et en particulier de celle qui protège les paysages et le patrimoine.

À quel type d'installations s'applique l'article L. 181-11 ? Je voulais le vérifier mais Legifrance n'est plus accessible, ce qui ne simplifie pas nos débats sur un projet de loi aussi technique… C'est très agaçant !

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Lors de la discussion générale, je vous ai présenté les trois régimes – déclaration, enregistrement, autorisation – auxquels sont soumises les ICPE. Vous les retrouvez sur la dernière page du document présenté.

L'article 24 aligne la procédure prévue pour les ICPE soumises à enregistrement et à déclaration sur celle des ICPE soumises à autorisation. Les deux premières présentant moins de risques que les dernières, soumises à autorisation, cet article ne doit pas susciter de craintes.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Au CODERST, certains dossiers méritent attention, mais le conseil doit aussi en instruire beaucoup d'autres. Vous n'avez pas complètement tort quand vous affirmez que c'est une « voiture-balai » utile, mais cela reste une voiture-balai… De telles dispositions sont en outre de niveau réglementaire et ne devraient pas figurer dans la loi.

Il s'agit d'aligner la procédure appliquée aux installations soumises à déclaration sur celle prévue pour les installations soumises à autorisation. Il faut faire confiance aux autorités administratives de terrain : dans un souci d'efficacité, elles doivent être capables de transmettre les dossiers qui le méritent au CODERST, mais pas ceux, plus banaux, qui ne le nécessitent pas. Un préfet aura toujours intérêt à faire monter les bons dossiers au bon niveau de consultation pour éviter les contentieux.

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Je remercie M. le rapporteur et Mme la ministre pour leurs explications. Mais on parle d'ICPE : ce ne sont donc jamais de « petits » dossiers. En outre, l'éolien est un sujet sensible. Dans nos circonscriptions, comment expliquer que l'on donne la main au préfet, seul décisionnaire de la réunion – ou non – de ce conseil ou de cette commission ? Il s'agit de sujets environnementaux, dont nous voulons absolument que les citoyens s'emparent – la Convention citoyenne pour le climat a plaidé en ce sens.

S'agissant d'une ICPE, ce n'est pas au préfet de décider, mais au législateur ou à l'administration de fixer des règles.

Il ne faut pas faire de la démagogie de la simplification vis-à-vis des entreprises – en ne traitant pas les problèmes, on les retrouve plus tard –, mais de la pédagogie de la complexité. En l'espèce, la consultation permet à la complexité d'émerger et aux citoyens de s'exprimer. Il serait donc sage de revenir sur votre décision et de supprimer l'article 24.

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Je le répète, le régime d'autorisation concerne les projets les plus sensibles et prévoit déjà de donner la main aux préfets. Nous ne faisons qu'aligner les régimes de déclaration et d'enregistrement, plus souples car concernant des projets de moins grande ampleur, sur ce premier régime. N'est-il pas paradoxal, voire absurde, d'autoriser les préfets à déroger à la consultation du CODERST pour les projets les plus strictement réglementés, mais pas pour les moins sensibles ?

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Le rapporteur a raison, le régime d'autorisation est le régime le plus exigeant, mais la consultation du CODERST est facultative. Or les grandes installations d'éoliennes sont dans cette catégorie et donc déjà soumises, sur décision du préfet, à la consultation facultative du CODERST.

L'article 24 ne vise pas ces installations, mais uniquement celles soumises à enregistrement ou déclaration. Sur le terrain, certains dossiers, reportés d'un CODERST à l'autre parce qu'ils n'y ont pas leur place, perdent un ou deux mois. Ce n'est pas une gestion efficace… Un préfet a toujours intérêt à soumettre un dossier problématique au CODERST pour que le sujet soit traité le plus en amont possible et les contentieux évités.

Je le répète, le législateur peut se saisir du sujet, mais il s'agit d'une disposition réglementaire, d'organisation de l'administration, qui pourrait être déclassée.

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Votre réponse m'interpelle : en rendant facultative la consultation du CODERST pour les installations soumises à enregistrement ou déclaration, alors que c'est déjà le cas pour celles soumises à autorisation, vous affaiblissez un peu plus la démocratie environnementale, alors que nos concitoyens demandent à être consultés et à dialoguer.

Je rappelle que le CODERST comprend des représentants de l'État, un représentant de l'agence régionale de santé (ARS), cinq représentants des collectivités territoriales, neuf représentants d'associations, des personnes qualifiées, dont un médecin. Cela me semble équilibré. Il serait normal qu'il soit systématiquement consulté.

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Le rapporteur est de bonne foi dans ses explications. Le régime d'autorisation, strict dans sa procédure, peut effectivement justifier la saisine facultative du CODERST. En revanche l'ICPE « enregistrée » n'apporte pas les garanties nécessaires aux citoyens. Je serais membre d'une association participant bénévolement à ces conseils ou commissions, je percevrais mal cet article proposé par le Gouvernement…

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Il faut faire confiance au sens de l'intérêt général et des responsabilités des préfets. J'ai siégé pendant de longues années au CODERST : il s'agit d'assemblées pléthoriques et les fonctionnaires de l'État y passent beaucoup de temps, qui pourrait être bien mieux utilisé. Vous avez raison, madame la ministre, l'instruction des dossiers en est ralentie. Ainsi, il m'est arrivé de passer une heure sur un dossier de stockage de bois sec… Il s'agit donc d'un très bon amendement.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Comment le préfet choisit-il les dossiers soumis au CODERST ? S'agissant des dossiers soumis à enregistrement, il existe des prescriptions standardisées. Si le préfet va au-delà ou s'y conforme, il ne soumet pas le dossier pour avis au CODERST. À l'inverse, s'il prévoit des prescriptions plus souples, il le soumet.

En outre, je rappelle que certains dossiers sont, avant éventuelle transmission au CODERST, soumis à enquête publique. La participation du public intervient donc bien en amont et la démocratie environnementale est bien respectée.

La commission rejette les amendements.

Elle examine ensuite l'amendement n° 670 du rapporteur.

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Cet amendement supprime les alinéas 2 et 3 qui réservent au seul porteur de projet la faculté de demander au préfet la consultation du CODERST ou de la CDNPS.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

J'y suis favorable. Cette modification du Sénat ne nous semble pas justifiée.

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Pourtant, cette disposition était intéressante : on mettait dans les mains du porteur de projet le pouvoir de juger de la pertinence de la saisine du CODERST. Cela lui permettait de s'interroger sur les conséquences pour l'environnement et les risques sanitaires et technologiques de son projet et de soumettre ses interrogations au préfet, qui n'aurait alors eu d'autre choix que de soumettre le dossier au CODERST.

La commission adopte l'amendement.

En conséquence, l'amendement n° 390 de Mme Laure de La Raudière tombe.

La commission en vient à l'amendement n° 234 de Mme Frédérique Tuffnell.

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Il s'agit de supprimer les alinéas 4 à 8 relatifs à la consultation du CODERST.

Suivant l'avis du rapporteur et du Gouvernement, la commission rejette l'amendement.

Elle examine ensuite l'amendement n° 455 de M. Gabriel Serville.

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L'article 24, que vous allez certainement adopter, permet au préfet de déroger à certaines consultations jusqu'ici obligatoires. À défaut de débat, l'amendement vise à prévoir que les dossiers soient adressés pour information aux instances consultatives. C'est un amendement de repli, par souci de transparence.

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Je partage votre objectif de transparence et suis favorable à la transmission d'informations. Si le CODERST n'est plus consulté, il doit rester informé. Mais votre demande est satisfaite puisqu'une telle disposition est prévue à l'article R. 181-39 du code de l'environnement.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

L'article R. 181-39 s'applique effectivement aux dossiers soumis à autorisation. Nous allons procéder à la même modification de la partie réglementaire du code de l'environnement pour les dossiers soumis à enregistrement ou déclaration. Je m'y engage : la CDNPS ou le CODERST seront informés.

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Je veux bien vous faire confiance, madame la ministre, mais je vais prendre le temps de lire attentivement l'article R. 181-39 pour être sûr que nous visons le même objectif.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Nous allons étendre les dispositions applicables aux dossiers soumis à autorisation à ceux soumis à enregistrement ou déclaration. Il ne s'agit donc pas d'une promesse en l'air, mais de bonne articulation entre les dispositions législatives et réglementaires.

L'amendement est retiré.

La commission passe à l'amendement n° 238 de Mme Frédérique Tuffnell.

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Cet amendement vise à supprimer les alinéas 7 et 8 qui prévoient également la suppression de consultations obligatoires, au risque d'affaiblir la protection de l'environnement.

Ainsi, en l'état actuel du droit, pour les canalisations de transport de gaz, d'hydrocarbures ou de produits chimiques soumises à un régime spécifique, la consultation du CODERST est obligatoire avant autorisation, ainsi que lorsque le préfet impose des prescriptions spéciales ou demande la réalisation d'analyses, expertises ou contrôles durant les phases de construction, d'exploitation et de cessation d'activité.

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Je ne suis pas sûr qu'une usine Seveso soit moins dangereuse que des canalisations… Or votre amendement vise à aligner les règles relatives aux canalisations de transport de gaz, d'hydrocarbures ou de produits chimiques sur celles applicables aux ICPE soumises à autorisation – celles qui font potentiellement courir le plus de risques à l'environnement. Une telle mesure n'est pas proportionnée.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Je suis également défavorable car le droit des canalisations n'est pas le même que celui des ICPE. Il n'est pas pertinent de revenir sur la logique du droit de l'environnement.

La commission rejette l'amendement.

Puis elle adopte l'article 24 ainsi modifié.

Article 24 bis (nouveau) (article L. 121-19 du code de l'environnement) : Réduction des délais pour demander une concertation préalable

La commission examine l'amendement n° 700 du rapporteur.

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Le droit d'initiative permet à des collectivités territoriales, à une association agréée ou à des citoyens représentant 20 % de la population de la commune ou 10 % de la population du département ou de la région concernés de demander au préfet que soit organisée une concertation préalable au projet, plan ou programme ayant fait l'objet d'une déclaration d'intention, publiée dans la presse et sur internet et également affichée dans les locaux du porteur de projet.

Dans le cadre de la relance, dans un souci d'harmonisation avec les autres délais prévus par le code de l'environnement et de maîtrise des délais des procédures d'autorisation, il est proposé de réduire à deux mois le délai mentionné à l'article L.121-19 du code de l'environnement.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Le droit d'initiative concerne les plans ou programmes soumis à évaluation environnementale ainsi que les projets soumis à évaluation environnementale de plus de 5 millions d'euros, hors champ de compétence de la Commission nationale de débat public – dans ce dernier cas, la concertation est automatique.

Pour mémoire, lors de la réforme de la participation du public en 2016, le délai du droit d'initiative avait été fixé à deux mois par l'ordonnance du 3 août 2016 relative à la modification des règles applicables à l'évaluation environnementale des projets, plans et programmes. Mais la loi de ratification du 2 mars 2018 avait ensuite porté ce délai à quatre mois, suite à un amendement parlementaire visant à favoriser la participation du public. Cet allongement aboutit à ce que le délai pour faire valoir le droit d'initiative soit supérieur à la durée de la procédure de concertation elle-même.

Le retour d'expérience sur le dispositif souligne qu'au-delà des délais, ce sont les conditions de publicité des déclarations d'intention, visant à informer le citoyen de l'existence du projet, du plan ou du programme, et les conditions d'exercice de ce droit d'initiative, afin de faciliter le recueil des signatures, qui pourraient être améliorées.

Des réflexions en ce sens sont en cours. Votre amendement n'est pas incompatible avec elles. Il est également en phase avec les objectifs du présent projet de loi, puisqu'il permet de mieux maîtriser les délais des procédures d'autorisation.

En conséquence, je m'en remets à la sagesse de votre commission.

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Mme la ministre ne prend donc pas position. Lorsque le Parlement a voté pour le délai de quatre mois, il avait de bonnes raisons, qu'elle a d'ailleurs rappelées.

Quand un projet voit le jour, informer et mobiliser les citoyens prend du temps. Deux mois sont courts – d'autant que le courrier est un peu lent en ce moment… Vous risquez de couper l'herbe sous le pied de nombreuses initiatives de citoyens ou d'associations qui devront agir dans la précipitation ou renoncer à se prononcer. Dans un souci de bonne écoute de ces citoyens et associations, je souhaite que nous en restions à quatre mois – et j'espère que nous serons nombreux à le souhaiter.

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Mme la ministre l'a souligné, ce n'est pas tant le délai que les conditions d'information qui pèchent. Tant que ces dernières ne sont pas améliorées, je suis opposée à ce que l'on revienne sur le premier.

Un exemple pour illustrer mon propos : celui du parc éolien en projet à Puissalicon. Une association de riverains qui y est opposée a organisé une réunion d'information avec des élus locaux. Parmi eux, plusieurs maires de communes riveraines n'en étaient pas informés, alors que ce même projet avait été rejeté pour des raisons environnementales en 2012. Redéposé sous une autre forme, il avait redémarré. Vous le voyez, les conditions d'information ne sont pas toujours optimales…

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Mais ces projets font l'objet de publications dans la presse ou sur internet. Certes, il est complexe d'être toujours bien informé, et il y aura toujours des gens qui ne lisent pas la presse ou internet.

Je viens d'une circonscription très rurale et connais bien le sujet. Je vous rappelle que cette procédure a été utilisée trois fois depuis sa création, et jamais au bout de trois mois et demi ! Quand un sujet pose vraiment problème, les associations et les citoyens s'en saisissent tout de suite.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

L'information de la commune et des communes limitrophes est couverte par l'article 25 bis dont nous allons débattre, madame Ménard. Le Sénat a ajouté une précision qui répondra probablement à votre inquiétude.

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Les communes limitrophes ne sont généralement pas informées. Quatre mois ne sont rien à l'échelle d'un projet éolien, d'autant que le porteur du projet ne reste pas inactif durant cette période et que cela ne s'ajoute pas à la durée de la procédure. En outre, le préfet a toujours la possibilité d'optimiser les délais et de faire se chevaucher les instructions. Aucune ICPE n'aurait vu le jour dans le cas contraire !

Il s'agit simplement de laisser quatre mois aux citoyens pour se rassembler et, le cas échéant, demander la tenue d'une concertation préalable qui, si elle n'est pas réalisée, aboutit ensuite à des problèmes pour les porteurs de projets.

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Vous l'avez tous souligné, c'est l'information, et non le délai, qui pose problème. Je suis favorable à une amélioration en la matière, tant en faveur des citoyens que des élus. C'est pourquoi j'émettrai un avis favorable sur un amendement ultérieur, présenté par Mme de La Raudière, qui prévoit la transmission de l'avant-projet aux maires des communes limitrophes.

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Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée

Soyons clairs, nous parlons là d'un délai de quatre mois en amont du dépôt du projet. Il ne s'agit pas de toucher aux délais de l'examen du dossier et des procédures en aval – autorisation, déclaration, etc. En outre, l'article 25 bis prévoit bien l'information des maires. S'agissant des éoliennes, elle intervient quinze jours avant le dépôt de l'autorisation.

Enfin, la procédure visée par l'amendement du rapporteur n'a jamais couvert un projet d'éoliennes. Il faut être attentif à ne pas analyser ce projet de loi uniquement par le prisme des éoliennes. Je comprends parfaitement qu'il s'agisse d'un sujet sensible, mais ne passons pas à côté d'autres sujets, comme les sites industriels.

Je maintiens mon avis de sagesse.

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Nous parlons beaucoup d'éoliennes car ce sont des ICPE, comme les sites industriels. Or elles bénéficient d'une législation spécifique, ce qui pose problème : en supprimant un niveau de recours pour les éoliennes, on a facilité leur implantation, plus que celle des sites industriels dans certains cas.

Partout dans les territoires, la sensibilité est extrême, surtout depuis que le gouvernement socialiste a supprimé les zones de développement de l'éolien (ZDE). Nous nous en mordons les doigts ! Le Gouvernement doit l'entendre car les députés de tous les bancs l'alertent !

Le délai, qu'il soit de deux ou de quatre mois, est neutre pour le chef d'entreprise – l'instruction de son projet d'ICPE durera plus de quatre mois ! Il faut laisser ces quatre mois aux citoyens pour se saisir de l'enjeu – il n'est pas simple de rassembler 20 % de la population dans une commune rurale. En ramenant ce délai à deux mois, vous affaiblissez la portée des dispositions législatives…

La commission adopte l'amendement.

La séance est levée à 20 heures 10.

Membres présents ou excusés

Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi d'accélération et de simplification de l'action publique

Réunion du mardi 15 septembre 2020 à 17 h 25

Présents. - M. Damien Adam, M. Thibault Bazin, Mme Sophie Beaudouin-Hubiere, M. Ugo Bernalicis, Mme Barbara Bessot Ballot, M. Philippe Bolo, Mme Pascale Boyer, Mme Danielle Brulebois, Mme Anne-Laure Cattelot, M. Rémi Delatte, Mme Marguerite Deprez-Audebert, M. Bruno Duvergé, M. Jean-Marie Fiévet, Mme Séverine Gipson, Mme Christine Hennion, Mme Catherine Kamowski, M. Guillaume Kasbarian, M. Jacques Krabal, M. Jérôme Lambert, Mme Laure de La Raudière, M. Philippe Latombe, M. Michel Lauzzana, Mme Annaïg Le Meur, Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, Mme Emmanuelle Ménard, Mme Monica Michel, Mme Mathilde Panot, Mme Isabelle Rauch, M. Rémy Rebeyrotte, M. Gabriel Serville, M. Vincent Thiébaut, M. Nicolas Turquois, Mme Cécile Untermaier, M. Pierre Venteau

Excusée. - Mme Paula Forteza

Assistaient également à la réunion. - M. Éric Alauzet, Mme Claire Bouchet, M. Jean-Louis Bricout, M. Jimmy Pahun, Mme Frédérique Tuffnell, M. Jean-Marc Zulesi