Intervention de Agnès Pannier-Runacher

Réunion du mercredi 16 septembre 2020 à 15h05
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi d'accélération et de simplification de l'action publique

Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée :

Adopter cet amendement reviendrait à supprimer tout contrôle a priori des mariages que les Français souhaitent contracter à l'étranger devant l'autorité locale compétente, tel qu'il est effectué par les officiers de l'état civil communaux lorsque le mariage est célébré en France. Cela introduirait une différence entre les mariages célébrés en France et ceux célébrés à l'étranger.

Or c'est dans l'optique d'apporter aux Français souhaitant se marier à l'étranger une protection identique à celle dont bénéficient ceux qui se marient en France que la loi du 14 novembre 2006 relative au contrôle de la validité des mariages a été adoptée. Ses dispositions permettent de s'assurer du consentement non vicié des futurs époux, afin que l'institution du mariage ne soit pas détournée pour obtenir ou faire obtenir la nationalité française ou un titre de séjour sur le territoire. Elles permettent également de vérifier la réalité du consentement et de l'intention matrimoniale des futurs époux en vue de lutter contre les mariages forcés – qui ne sont pas un problème théorique.

Voilà pourquoi, lorsqu'il est célébré par une autorité étrangère, le mariage d'un Français doit être précédé de la délivrance d'un certificat de capacité à mariage par l'autorité diplomatique ou consulaire ainsi que de l'audition des futurs époux. Au vu de ces éléments et, le cas échéant, après enquête, le procureur de la République peut s'opposer à un mariage projeté par un Français à l'étranger s'il estime que ce mariage est susceptible d'encourir le risque de nullité pour absence de consentement ou consentement vicié. Un tel mariage peut également être annulé a posteriori à l'initiative du procureur de la République lors de la demande de transcription de l'acte de mariage étranger sur les registres de l'état civil français.

La loi de 2006 a aussi permis d'harmoniser le dispositif en reprenant celui existant déjà pour les mariages célébrés en France et qui, conformément à l'article 63 du code civil, inclut une audition préalable des futurs époux afin de contrôler leur consentement libre et éclairé. Ce dispositif a en outre allégé les formalités de transcription des mariages contractés à l'étranger : il autorise une transcription quasi automatique dès lors que le fameux certificat a été délivré. Il s'agissait donc déjà d'une mesure de simplification : auparavant, les contrôles de validité des mariages contractés à l'étranger ne s'opéraient qu'au moment de la demande de transcription et pouvaient être beaucoup plus longs et contraignants.

Ainsi, le dispositif rend plus efficace la lutte contre la fraude, harmonise le droit du mariage quel que soit le lieu où celui-ci est célébré et allège les procédures de transcription, formalité rendue obligatoire pour les conjoints étrangers de Français voulant obtenir des titres de voyage – carte d'identité, passeport – ou de séjour.

Ces mesures ont bel et bien un sens et une utilité. Je rappelle que le parquet de Nantes a prononcé en 2016 et 2018 respectivement 231 et 365 oppositions à mariage et 100 et 93 oppositions à la transcription d'un mariage célébré à l'étranger.

Nous sommes parvenus à un dispositif équilibré, qui s'attache à concilier les impératifs que constituent la liberté fondamentale du mariage et la lutte contre les mariages frauduleux – que le mariage ne résulte que d'un groupement d'intérêts l'espace d'un instant ou, plus grave encore, qu'il soit forcé. Avis défavorable.

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