Intervention de Guillaume Kasbarian

Réunion du jeudi 17 septembre 2020 à 9h40
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi d'accélération et de simplification de l'action publique

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGuillaume Kasbarian, rapporteur :

Je serai un peu long car c'est un véritable casse-tête ; nous-mêmes, nous y avons passé beaucoup de temps lors de la préparation du travail en commission.

M. Adam soulève un véritable problème. Un jeune qui veut s'inscrire dans une auto-école doit passer une évaluation préalable avant de signer son offre de formation. Jusqu'à une date récente, il n'était pas précisé que cela devait se faire dans le véhicule ou dans les locaux de l'auto-école. Mais cette règle a changé depuis, ce qui interdit aux auto-écoles en ligne d'organiser l'évaluation préalable à distance : elles en viennent à amener une voiture devant le domicile des personnes qui souhaitent s'inscrire pour le permis en ligne… Nous nous sommes donc penchés sur la question.

Dans une auto-école classique, l'évaluation du nombre d'heures de formation nécessaires se fait de trois façons : soit dans une voiture, c'est-à-dire que le moniteur propose au jeune de faire un tour pour évaluer sa sensibilité, soit sur un véritable simulateur, soit sur une tablette, avec des vidéos de mise en situation et un questionnaire préétabli – sur lequel, d'ailleurs, le moniteur d'auto-école n'a pas beaucoup la main. Et il se trouve que le logiciel utilisé dans ce dernier cas est le même que celui des auto-écoles en ligne…

J'ai donc beaucoup de mal à comprendre la valeur ajoutée d'une évaluation « physique », réalisée sur place, d'autant qu'elle fait appel au même logiciel. En revanche, je sais que c'est un sujet éruptif pour les auto-écoles classiques qui y consacrent un local et facturent bien évidemment la prestation. Une évaluation sur tablette facturée au même niveau qu'une heure de conduite, cela représente un enjeu financier non négligeable pour les auto-écoles. Dans le même temps, cependant, on ne peut empêcher les auto-écoles en ligne de fonctionner. Or, comme elles ne peuvent pas faire passer l'évaluation préalable en ligne, les contrats de formation ne peuvent pas être signés. Pour elles, le blocage est complet.

Nous avons affaire à une situation un peu absurde, et pour ma part, monsieur Adam, j'irais encore plus loin que nous : je crois qu'en réalité l'évaluation préalable ne sert à rien. Nous sommes sans doute un des rares pays dans le monde où il faut passer une évaluation pour pouvoir commander sa formation… C'est kafkaïen. J'ai creusé la question. J'ai même téléphoné à quelques auto-écoles classiques dans mon département d'Eure-et-Loir, pour leur demander combien elles facturaient l'évaluation, quelle part de leur chiffre d'affaires elle représentait, si elle servait à quelque chose. L'une d'entre elles m'a même proposé de tester le logiciel d'évaluation préalable. Très objectivement, je crois qu'on s'est fait des nœuds au cerveau en proposant cette évaluation ; si l'on voulait vraiment faire de la simplification et de l'accélération, on devrait la supprimer pour tout le monde, pour les auto-écoles classiques comme pour les auto-écoles en ligne. Je comprends bien qu'elle représente un petit chiffre d'affaires pour les auto-écoles mais, très objectivement, la véritable question n'est pas de savoir s'il faut l'autoriser en ligne : un jeune qui veut passer le permis devrait pouvoir s'inscrire directement et commencer sa formation, sans avoir à passer une évaluation préalable pour estimer un nombre d'heures plus ou moins fictif, dans la mesure où il ne correspond pas forcément à celui qu'il lui faudra suivre. Cette évaluation n'est qu'une étape administrative supplémentaire qui ne sert à rien.

En ce qui concerne donc votre amendement n° 487, monsieur Adam, je m'en remets à la sagesse de la commission spéciale. Je sais qu'il va susciter des réactions, voire « mettre le feu », car vous touchez un point sensible. Je n'ai aucune envie de rouvrir la guerre entre auto-écoles en ligne et auto-écoles physiques, mais je comprends aussi que l'on ne puisse pas laisser les auto-écoles en ligne complètement bloquées dans cette situation kafkaïenne où elles doivent faire venir une voiture en bas de l'immeuble et demander au gamin de monter dedans pour lui dire de combien d'heures de formation il aura besoin… Cela s'appelle quand même mettre de la complexité là où il n'y en a pas besoin ! J'attends que le Gouvernement se positionne : n'y aurait-il pas moyen de supprimer l'évaluation préalable ?

Avis favorable, en revanche, en ce qui concerne votre amendement n° 565, relatif au délai pour l'expérimentation : je rejoins votre analyse.

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