Intervention de Élise de la Rochebrochard

Réunion du mercredi 28 août 2019 à 16h00
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique

Élise de la Rochebrochard, Institut national d'études démographiques (INED) :

S'agissant du nombre de gamètes, je pense que des informations établies nous permettent effectivement de réfléchir sur la façon dont nous allons pouvoir répondre à la demande nouvelle. Il me semble intéressant d'avoir un regard historique sur le don de sperme qui est pratiqué depuis de nombreuses années. Si l'on revisite les données d'il y a 30 ans, l'activité de don de sperme était deux fois plus importante qu'aujourd'hui. La diminution du don de sperme est liée à une nouvelle technique de fécondation in vitro, l'ICSI, qui permet de répondre aux infécondités masculines sévères. Ainsi, les personnes qui étaient traitées par don de sperme jusqu'à présent ont pu bénéficier d'une nouvelle technique où ils ont utilisé leurs propres gamètes, et le don de sperme a été divisé par deux. Si l'on a été capable de pratiquer le don de sperme à un niveau deux fois plus élevé aujourd'hui qu'il y a 30 ans, je ne vois aucune raison, dans une société qui est beaucoup plus favorable aujourd'hui au don de sperme qu'elle ne l'était il y a 30 ans, de ne pas être capable de revenir au moins à ce niveau-là. Je pense que les données historiques sont déjà une première source solide pour être confiant sur notre capacité à augmenter substantiellement l'activité de don de sperme.

La deuxième donnée qui me semble importante est une étude de l'Agence de la biomédecine qui indique que six Français sur sept ne sont pas informés sur le don de sperme. Aujourd'hui, les donneurs de sperme sont recrutés parmi le Français sur sept qui a une idée de ce que c'est. Pour augmenter le don de sperme, il faut donc informer la population française, et ce serait également extrêmement important par rapport à l'acceptation sociale du don de sperme, la levée du secret et des stigmates dont parlait Mme Rozée sur le modèle biologique, et cet aspect caché jusqu'à présent.

Je vais fournir une dernière donnée, puisque je suis quand même démographe de l'INED. Les donneurs sont les hommes âgés de 18 à 45 ans. La France est un grand pays en Europe, et nous avons plus de 11 millions d'hommes dans cette classe d'âge. Si nous voulons tripler le don de sperme, donc arriver à 1 000 donneurs, il faudrait que moins de 0,01 % des hommes de la classe d'âge acceptent de donner leur sperme. Le potentiel de la population française est donc extrêmement important par rapport aux besoins, même en considérant des chiffres qui ne sont probablement pas raisonnables. Nous avons à la fois des données historiques qui nous rassurent complètement sur notre capacité de doubler la capacité de don de sperme, nous avons identifié le fait que les personnes ne sont pas informées du don de sperme, et une population très importante devrait pouvoir fournir du sperme si on l'informe de cette possibilité.

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