Intervention de Laurent Toulemon

Réunion du mercredi 28 août 2019 à 16h00
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique

Laurent Toulemon, directeur de recherche à l'INED :

J'ai participé à une conférence d'une association de familles homoparentales qui s'inquiétaient des relations entre les tiers donneurs et leurs enfants. J'ai essayé de leur expliquer que les questions qui se posaient à eux étaient des questions qui se posent dans des familles recomposées, et que l'immense majorité des familles recomposées sont des familles de sexe différent : un parent s'est remis en couple avec une autre personne, et le rôle parental de cette autre personne pose question. Nous nous intéressons aux familles recomposées, mais dans les familles recomposées, il y a très peu de familles de même sexe, parce que dans la population générale, il y a très peu de couples de même sexe. Pour voir leur situation, il faut faire des enquêtes spécifiques, et en général, on s'aperçoit que ces couples sont très peu différents des autres. Dans la vie quotidienne, il y a des enfants, des adultes, et les familles sont diverses. Le fait que la loi ait autorisé le mariage aux couples de même sexe, après le PACS qui date maintenant de 20 ans, fait qu'une sorte de normalité s'installe. Il y a bien sûr des questions spécifiques : c'est le cas du don dirigé qui pose la question de l'anonymat et celle du rôle du donneur. Si le donneur fait partie de la famille, quel va être son rôle familial ? C'est une question que nous nous posons, mais nous l'abordons uniquement dans le cadre de la révision de la loi bioéthique, alors qu'elle déborde ce cadre. De nombreux sujets concernent les familles dans lesquelles on a des géniteurs qui ne sont pas des pères, et l'immense majorité de ces situations ont lieu hors AMP. Évidemment, l'État ne les traite pas spécifiquement, puisque si on fait un titre VII bis, c'est bien pour régler les situations où intervient un tiers donneur. Le fait que ce soit encadré médicalement offre un large ensemble de garanties, et la question de l'ouverture à des donneurs non anonymes ne doit pas être posée en disant : « L'anonymat est-il bien ou pas ? », mais plutôt : « Y a-t-il des familles avec des parents et d'autres personnes autour de ces parents pouvant avoir un rôle pour les enfants ? ». On se rend compte que les enfants informés ne prennent pas leur géniteur pour leur père ou leur mère, ils font bien la distinction entre les parents et les géniteurs. De même que des enfants élevés par des oncles et tantes ou par des grands-parents savent quelle est leur place dans les générations. C'est ce sur quoi je voulais insister. Comme nous avons été invités à cette audition sans que nous soit communiquée préalablement une liste de questions, je me suis demandé ce que pourrait apporter l'INED. Mme de la Rochebrochard et Mme Rozée qui ont une enquête en préparation voyaient très bien en quoi l'INED pouvait vous apporter des informations utiles, mais j'étais un peu plus gêné, parce que je travaille plutôt sur la fécondité et les comportements familiaux. Encore une fois, les couples de même sexe sont très peu nombreux, et ils nous intéressent d'un point de vue sociologique, surtout parce qu'ils posent des questions à l'ensemble de la société. C'est un groupe très minoritaire, même s'il est assez actif politiquement, et leur discours mérite d'ailleurs d'être analysé. D'un point de vue purement statistique, le principal problème que nous avons vis-à-vis des couples homosexuels, c'est qu'on ne les voit pas. Ils ne sont pas assez nombreux. Il faut vraiment aller les chercher pour étudier leur comportement. Je ne sais pas si c'est plus clair comme ça.

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