Intervention de Jean-François Eliaou

Réunion du jeudi 29 août 2019 à 9h35
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-François Eliaou, rapporteur :

Je suis rapporteur de ces articles inclus dans le titre V. Je salue la nécessité d'encadrer ces pratiques et l'ANSM a évidemment toute sa place dans cet encadrement et le travail d'harmonisation des pratiques. Il s'agit en effet de médicaments ou quasiment et il est hors de question de faire n'importe quoi sur les patients.

J'ai quelques soucis sue l'article 26, qui sont principalement liés au caractère encore expérimental de ce type de pratique. Vous avez dit qu'il y a eu des accidents aux États-Unis, mais il y a également eu des accidents en France. Ces pratiques sont actuellement encadrées par un cadre juridique et réglementaire qui correspond aux études biocliniques. Compte tenu de l'avancée de ce type de travaux et des résultats obtenus, je me suis posé la question de savoir s'il n'était pas prématuré de légiférer sur le sujet.

Deuxièmement, il s'agit effectivement d'une thérapeutique innovante, mais je ne suis pas sûr que son régime juridique relève d'une loi de bioéthique. Un peu comme le Conseil d'État, je me pose la question de la présence de cet article dans une loi de bioéthique et j'aurais voulu avoir vos réflexions là-dessus.

Pour entrer dans les détails, il est dit dans l'étude d'impact qu'il y aura un contrôle du statut clinique et du statut microbiologique du donneur. Il n'est d'ailleurs pas précisé que le donneur est un donneur sain et je ne sais pas comment analyser le caractère sain d'un donneur au regard de ses selles, puisque c'est extrêmement dépendant de l'alimentation, de l'environnement, de la saison, du soleil, de l'état d'hydratation ou de déshydratation de cette personne saine. Il y a une très grande variabilité du microbiote, beaucoup plus importante, par exemple, que celles des prises de sang. Lorsque nous faisons des études cliniques et administrons des médicaments, nous sommes toujours obligés de regarder le ratio bénéfices-risques ; ici le risque est infectieux. Lorsque nous transplantons les selles d'un donneur à un patient, nous pouvons nous demander si le statut microbiologique de ce que nous transplantons est réellement vérifié, non seulement au niveau bactérien, mais également au niveau viral. Je ne suis pas certain que l'exploration biologique du donneur fera le tour de l'ensemble des virus potentiellement pathogènes.

Le deuxième article est évidemment très différent. La question porte ici sur cette notion d'une seule intervention médicale. En pratique, nous avons un patient, nous prélevons des cellules et manipulons ces cellules – vous l'avez précisé, la manipulation ne doit pas être substantielle – puis nous réinjectons ces cellules au même patient. La situation autologue doit donc absolument être précisée et je ne suis pas sûr qu'elle soit bien précisée dans le texte. Je voudrais avoir votre avis là-dessus.

Sur la notion d'intervention médicale unique, en pratique, lorsque vous prélevez des cellules, cela peut se faire au bloc opératoire et la manipulation ex vivo de ces cellules prend du temps. Il n'est pas indispensable que le patient reste au bloc opératoire pendant cette manipulation de ces cellules ex vivo avant la réinjection. La notion d'intervention médicale unique sur laquelle est basée l'architecture de l'article pose un problème en termes de durée. Il faudrait peut-être changer la caractérisation d'une telle intervention et je voudrais avoir votre avis là-dessus.

La deuxième partie de l'article 27 concerne la sous-traitance. Il est écrit qu'il y aura un contrat entre les parties. Il faudrait préciser ce qu'est ce contrat et quelle forme il prendra. Il peut également y avoir une responsabilité médicale du sous-traitant qui ne dépend pas forcément de la structure que l'ANSM a accréditée.

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