Vos exposés sont riches et denses et je rejoins la remarque liminaire qui tend à souligner que les réponses techniques n'assouvissent pas les questions sociétales et philosophiques, qui peuvent être débattues plus largement.
Il se trouve que la filiation, sur son plan juridique, est la seule question qui n'a pas été abordée lors des États généraux de la bioéthique, car a été surtout discutée l'accessibilité de la PMA avant de discuter de ses modalités. Nous continuons ce débat pendant nos auditions et nous souhaitons qu'il puisse être enrichi des réflexions de l'ensemble de la société. À ce titre, je vous remercie des notes que vous nous avez transmises.
Peut-être faudra-t-il préciser le texte sur la levée de l'anonymat. Je ne sais pas si la formulation actuelle est parfaite. Il n'est pas prévu de redemander le consentement du donneur au moment où l'enfant demande à accéder à son identité. Il n'y a pas de double consentement. Au cours de précédentes auditions, d'autres associations et représentants de la société civile ont souhaité que l'on puisse instaurer un tel « aller-retour » avec le donneur, qui pourrait ainsi se rétracter. D'autres au contraire nous demandent de bloquer ce consentement au moment du don et de ne jamais revenir dessus. Je veux bien entendre votre point de vue sur la question. Il a été aussi demandé que les données non identifiantes puissent être révélées plus tôt, pour des raisons médicales ou autres. Certaines associations réclament que la totalité des enfants issus d'une AMP avec tiers donneur soient informés de leur mode de conception le plus tôt possible. L'État doit-il être à ce point intrusif dans la relation parent enfant, ou faut-il laisser la liberté aux parents ?
Pour revenir rapidement sur la filiation, deux options ont été soumises au Conseil d'État sur la déclaration anticipée de volonté (DAV) : la DAV réservée aux familles monoparentales ou la DAV pour tous ceux qui s'engageraient dans une AMP. Une troisième option n'a pas été retenue par le projet de loi, mais elle retient aussi l'attention de la commission spéciale : il s'agit de la simple extension du droit commun actuel, applicable aux couples hétérosexuels non mariés, et pour qui le consentement au don est recueilli chez le notaire préalablement à la mise en place du processus d'AMP, puis, pendant la grossesse ou après la naissance, une déclaration vaut reconnaissance à l'état civil. La question est posée d'étendre ce système aux familles homoparentales. On retombe sur une réponse technique à des questions philosophiques, puisque cela vient percuter la grande, l'éternelle question : est-ce qu'au fondement de la reconnaissance anténatale par présomption se trouve une vérité, une vraisemblance biologique liée à l'engendrement, ou une question de puissance de la volonté ?