Nous avons évoqué le futur article 342-11, qui paraît anodin – c'est plutôt l'ancien procureur qui réagit plutôt que l'actuel premier avocat général… Le législateur a en effet de coutume de passer par le procureur, qui doit ensuite se débrouiller. Nous nous sommes posé la question de la remise différée de la DAV. Nous pouvons penser que dans le temps de la maternité, de l'accouchement, il est possible de régulariser, mais ouvrir une telle possibilité à la majorité du mineur, dix-huit, dix-neuf ou vingt ans plus tard, revient à imposer au procureur de transcrire. Le texte le subodore : « La mention de la déclaration est portée en marge de l'acte de naissance ». Cela ne donne pas l'impression d'ouvrir un quelconque pouvoir d'opportunité. C'est simplement la direction des officiers d'état civil.
Vous me direz que nous voyons toujours malice dans les textes. Dans dix-neuf ou même vingt ans, si un jeune garçon me remettait ce type de déclaration je me poserais cette question : était-elle valide au moment de sa naissance ? Cela sera précisé dans la loi, la déclaration suit les effets du consentement. Lorsque le consentement tombe, la déclaration tombe aussi. De quoi a-t-il connaissance s'il n'a que l'acte notarié ? A-t-il accès à un deuxième acte notarié qui serait une renonciation – prévue par le texte ? A-t-il connaissance d'une renonciation qui serait passée devant le médecin ? Y avait-il une rupture de la communauté de vie au moment de l'insémination ? Je me poserais toutes ces questions plutôt que d'automatiser, dix-neuf, vingt ou vingt-cinq ans plus tard, la création d'un deuxième parent. Je me dis qu'il y aurait matière à ouvrir un débat plutôt que de transcrire brutalement par une mention en marge de l'état civil une DAV qui date d'aussi longtemps, parce qu'un enfant aurait trouvé dans les affaires de sa mère décédée le nom de l'ancienne compagne, l'acte notarié, etc. Quelle en serait la légitimité ? Voilà ce que serait mon réflexe d'ancien procureur.
Pour ce qui est du représentant légal, nous imaginons que c'est la mère accouchée qui s'occupe du mineur. Quid cependant de « toute personne qui aurait intérêt à agir en justice » ? Je ne sais pas quelle est l'inspiration du rédacteur. Quel est ce tiers qui intervient dans ce trio formé de deux femmes et d'un enfant ? Qui est celui que nous pourrions qualifier de « toute personne qui aurait intérêt à agir en justice » ?
Enfin, j'imagine ce jeune qui viendrait voir le procureur en lui disant avoir trouvé des papiers, des échanges de lettres avec le notaire, laissant supposer qu'il existerait une DAV, mais qui ne l'aurait pas. Le procureur lancera une enquête. Il pourrait donc y avoir un fichier des DAV – nous n'avons pas eu cette idée par souci de ficher les gens… –, un registre, qui pourrait inclure les renonciations par acte notarié – pas celles recueillies par un médecin.
Cet article suscite donc des questions. Il n'est pas aussi simple qu'il en a l'air. Il est un peu nébuleux. Je redis que le fait de remettre en cause une situation filiative vingt-cinq ans après la naissance me dérange un peu, si ce n'est pas explicité. Le seul dialogue entre le jeune majeur et le procureur me paraît être un débat trop court.