Intervention de Brahim Hammouche

Réunion du mercredi 4 septembre 2019 à 18h45
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBrahim Hammouche :

J'ai beaucoup de questions sur cette intelligence connectée ou « artificielle ». Vous avez parlé de la responsabilité civile et professionnelle des professionnels, en particulier des médecins – ils ont une obligation de moyens et pas de résultats, notamment en termes de diagnostic. Aujourd'hui, il est démontré que certains programmes d'intelligence artificielle sont capables de détecter très tôt les tumeurs infra cliniques, par définition non visibles par le clinicien radiologue. Or plus la tumeur est prise en charge tôt, plus les chances de succès du traitement sont élevées.

Je considère que l'accès à ces technologies est une question fondamentale pour notre société, car elle est « ultra smartisée » avec des connexions un peu partout. Nous sommes capables aujourd'hui de faire un bilan de santé à la fin de la journée avec nos smartphones. Donc la réflexion éthique ne peut se désintéresser de la disponibilité, de l'accès. Je m'interroge aussi sur la transparence des programmes. De très nombreux logiciels apparaissent et nous ne savons pas toujours comment ils fonctionnent. Sommes-nous capables de le savoir ? Si ce n'est pas le cas, il sera compliqué de maîtriser une évolution. Que pensez-vous du RGPD et des tentatives de construire une identité électronique de type eIDAS, comme le prévoit le règlement européen du même nom ? Nous voyons bien qu'il faut être vigilant sur la question du consentement, qui est au cœur de l'éthique. Nous sentons bien qu'avec l'accroissement exponentiel des connaissances, le consentement est en train de glisser silencieusement vers quelque chose de moins éclairé que ce que nous disent les textes et les principes philosophiques et éthiques. Enfin, vous connaissez ce phénomène abusivement appelé « loi de Moore », qui veut que tous les 18 mois la puissance des processeurs double. Ne sommes-nous pas en train de créer une dépendance massive de nos sociétés à technologie numérique avec, à la clef, une perte de contrôle – c'est la définition de l'addiction ?

Avec ce projet de loi, l'IA fait son entrée dans la loi de bioéthique. Je pense que cette dimension prendra une place encore plus grande dans la prochaine loi de bioéthique.

Dernier témoignage, on a beaucoup parlé de gilets jaunes il y a quelque temps. J'ai eu des retours sur les craintes que crée l'intelligence artificielle dans la population ; je pense notamment à un gilet jaune qui était pilote d'avion – donc pas du tout le profil habituel – et dont la crainte était de voir disparaître son métier à cause de l'IA. Des chauffeurs de taxi m'en parlent régulièrement à Paris. L'IA est peut-être aussi un progrès destructeur d'emploi, c'est un problème éthique à souligner.

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