Je partage votre objectif de supprimer l'article 47-1 que le Sénat propose d'introduire dans le code civil, afin d'interdire la transcription totale de l'acte de naissance ou du jugement étranger établissant la filiation d'un enfant né d'une gestation pour le compte d'autrui, lorsqu'il mentionne comme mère une autre femme que celle qui a accouché ou deux pères. Il apparaît en effet que la mise en œuvre d'un tel article 47-1 risquerait de soulever de gros problèmes d'inconventionnalité avec la jurisprudence de la CEDH, en particulier lorsque l'adoption par le parent d'intention n'est pas possible.
La CEDH a jugé que le lien de filiation doit pouvoir être établi à l'égard du parent d'intention. Or la Cour de cassation, dans l'arrêt Mennesson du 4 octobre 2019, a estimé que lorsque la filiation n'est plus possible dans des conditions respectant les droits garantis par la Convention, la transcription de l'acte de naissance étranger à l'égard du parent d'intention est la seule manière de reconnaître à l'état civil français le lien de filiation établi à l'étranger. Dans certains cas, les juges devraient donc écarter ce nouvel article au motif que son application ne serait pas compatible avec la Convention européenne des droits de l'homme.
Il apparaît par ailleurs que l'introduction de dispositions spécifiques réglementant une situation particulière – les conventions de gestation pour autrui – dans un chapitre relatif aux dispositions générales applicables à l'ensemble des actes de l'état civil pourrait être une source d'incohérence et d'illisibilité.
Toutefois, on ne peut laisser en l'état la jurisprudence de la Cour de cassation, après son revirement du 18 décembre 2019, au risque de favoriser le trafic d'enfants. Aussi, je vous proposerai dans un amendement de compléter l'article 47 du code civil, afin de préciser que la réalité des faits qui sont déclarés dans l'acte d'état civil est appréciée au regard de la loi française et non de la loi étrangère, comme l'avait proposé la Cour de cassation le 18 décembre 2019. Il s'agit ainsi, en maintenant un contrôle juridictionnel sur les GPA réalisées à l'étranger, de lutter contre les trafics d'enfants. Retrait ou avis défavorable.