Au départ, nous n'étions pas favorables à l'idée d'introduire dans cette loi relative à la bioéthique des dispositions sur la GPA, considérant que cela ne relevait pas de son champ. Lorsque nous avons commencé les débats, la jurisprudence de la Cour de cassation nous semblait cohérente avec nos positions : transcription à l'état civil de l'acte de naissance étranger à l'égard du père et lien de filiation à l'égard du parent d'intention par la voie de l'adoption. Cette solution équilibrée avait d'ailleurs été jugée valide par la Cour européenne des droits de l'homme.
Mais les arrêts du 18 décembre dernier ont modifié cette situation, puisque la Cour de cassation a ordonné la transcription totale des actes de l'état civil étranger établis à la suite d'une convention de GPA, même à l'égard de la mère d'intention. Ce revirement de jurisprudence, sur lequel je n'ai pas à porter de jugement, fragilise, semble‑t‑il au Gouvernement, l'interdit de la GPA en France et facilite son recours à l'étranger, au détriment de l'adoption. Ce mécanisme nous inquiète, notamment parce que la Cour de cassation ne vient plus exiger le contrôle judiciaire de l'intérêt de l'enfant, avant d'établir la filiation. Elle va interdire de vérifier dans quelles conditions l'enfant a été remis à ses parents d'intention, s'il a bien été issu d'une convention de GPA, s'il n'est pas victime d'un trafic, si la mère porteuse a réellement consenti à se séparer de son enfant et s'il ne s'agit pas, en réalité, d'un contournement des règles de l'adoption internationale. Il nous semble que le système qui découle de la dernière jurisprudence laisse trop d'incertitudes par rapport à l'intérêt de l'enfant.
Face à ces risques, nous avons jugé opportun de prévoir une disposition législative dans ce projet de loi. Pour éviter la règle de l'entonnoir, j'ai été favorable, au Sénat, à l'amendement présenté par Bruno Retailleau, non que sa rédaction me convenait, mais parce que j'en avais besoin sur le plan de la procédure pour proposer un texte correspondant à notre volonté. Il est important de revenir à l'état du droit antérieur, afin de rétablir l'intervention du juge par la procédure de l'adoption. C'est la raison pour laquelle je suis défavorable aux amendements de suppression, mais que je serai favorable à la réécriture de Mme la rapporteure.