Intervention de Claire Bordenave

Réunion du jeudi 18 février 2021 à 16h30
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets

Claire Bordenave, rapporteure de l'avis du CESE sur le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets :

. Nous avons d'abord fait le point, dans notre avis, sur l'effort qui est attendu, c'est‑à‑dire sur les objectifs fixés au plan national mais aussi international. Le cadre dans lequel s'insérait la commande passée par le Président de la République à la Convention citoyenne pour le climat était le suivant : une réduction de 40 % des émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2030, puis la neutralité carbone en 2050, conformément à ce que prévoit la stratégie nationale bas-carbone. La Convention citoyenne avait pour mandat de proposer des mesures structurantes, permettant de changer de braquet, afin d'atteindre ces objectifs dans un esprit de justice sociale, deux ans après les événements liés aux gilets jaunes et au refus d'une augmentation de la taxe carbone sur les carburants.

Où en sommes-nous ? Nos émissions ont été réduites de 20 % en trente ans, c'est‑à‑dire qu'il nous reste à réaliser le même effort en dix ans. Il faut donc tripler le rythme d'ici à 2030. En ce qui concerne l'objectif de neutralité carbone à atteindre en 2050, il faudrait diviser par six nos émissions. L'Union européenne a par ailleurs annoncé, à peu près au moment où nous étudiions le projet de loi, un nouvel objectif de réduction de 55 % des émissions de gaz à effet de serre d'ici à 2030. La référence n'est pas exactement la même que précédemment : l'objectif fixé par l'Union européenne inclut le stockage de carbone par les forêts. À périmètre comparable, cela représente une réduction de 46 ou 47 % des émissions. L'effort à réaliser d'ici à 2030 ne se limite donc plus à une baisse de 40 % : un renforcement est nécessaire pour répondre aux nouvelles ambitions européennes et il faut aussi tenir compte de l'objectif à atteindre d'ici à 2050.

Quand on regarde par secteur d'activité la façon dont la baisse de 20 % des émissions en trente ans a été réalisée, on voit que la part relative des transports a beaucoup augmenté, que celle du logement a plutôt évolué en sens contraire – il y a eu une baisse importante dans le secteur résidentiel mais le tertiaire a connu une légère augmentation – et que la part de l'industrie s'est beaucoup réduite.

Ce qui retranscrit le mieux la situation, c'est l'empreinte carbone, puisqu'elle tient compte non seulement du CO2 produit en France mais aussi de celui qui est importé pour notre consommation. Une partie de la baisse de 20 % des émissions a été obtenue parce qu'on a délocalisé des activités économiques. Selon les derniers chiffres, notre empreinte carbone est nettement plus élevée que les émissions territoriales.

Par conséquent, les résultats sont en trompe-l'œil : un décrochage entre le PIB et les émissions de CO2 est observable mais il n'est pas à la hauteur des attentes et, surtout, c'est l'empreinte carbone qui reflète réellement les efforts à accomplir : si on délocalise les émissions de carbone, on ne résout pas le problème à l'échelle de la planète.

Nous avons travaillé sur le texte en suivant ses grandes thématiques. Je vois que vous vous êtes réparti de même le travail au sein de votre commission spéciale, comme l'avait également fait la Convention citoyenne.

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