Intervention de Philippe Portier

Réunion du vendredi 26 février 2021 à 16h30
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets

Philippe Portier, secrétaire national de la CFDT :

. Selon nous, l'accompagnement des salariés et la justice sociale ne sont pas assez présents dans le texte. Certaines propositions de la Convention citoyenne pour le climat ne sont pas reprises, mais tout n'est pas affaire de loi. Le maître mot est l'anticipation. La neutralité carbone en 2050 est un jalon indiscutable, mais entre 2021 et 2050, il faut poser d'autres jalons. C'est pourquoi nous critiquons le recul sur les 95 grammes de CO2 émis par kilomètre, marqué par l'emploi de l'expression « tendre à ce que », générateur d'incertitude. Quand il y a de l'incertitude, les entreprises attendent, puis agissent au dernier moment, mettant les salariés au pied du mur et donnant l'impression d'un écart entre le discours tenu par une confédération et la réalité du terrain.

Il existe plusieurs moyens d'anticiper, comme l'installation du comité stratégique de la filière automobile qui a depuis longtemps fixé les jalons des normes européennes de baisse d'émission de CO2. La gestion prévisionnelle des emplois et des compétences est passée sous silence. Cette consultation sur les orientations stratégiques permet pourtant de déduire l'évolution de l'emploi, des compétences nécessaires et les conséquences sociales qui en découlent. C'est ainsi que doit fonctionner le dialogue social dans l'entreprise, mais force est de constater qu'il n'est pas souvent respecté. Comment le remettre en vigueur ?

Comment inciter la fonction publique à devenir plus vertueuse en matière écologique ? Elle pourrait améliorer le dialogue avec ses agents.

La négociation des plans de déplacement est désormais obligatoire pour les entreprises et interentreprises de plus de cinquante salariés, mais cette disposition ayant coïncidé avec l'arrêt des déplacements, nous n'en avons pas encore de retour.

Afin de redonner du pouvoir aux organisations syndicales et de garantir la conditionnalité des aides, la CFDT demande que le rôle du CSE ne se limite pas à donner un avis car, qu'on dise oui ou non, cela ne change pas grand-chose, mais que tout projet soit soumis à son avis conforme. Le dialogue social en serait grandement renforcé, dans la mesure où l'employeur serait davantage incité à délivrer une bonne information pour aboutir à un diagnostic partagé. Afin que son projet voie le jour, il chercherait à l'amender en fonction des observations des représentants du personnel.

Dans l'introduction du dialogue social et environnemental, sans doute faut-il rester modeste et ne pas commencer par les entreprises de moins de cinquante salariés. Les labels RSE sont toutefois un bon moyen d'inciter les donneurs d'ordre à aider leurs sous-traitants, qui sont généralement des petites entreprises, à s'améliorer en matière environnementale et sociale. De même, le devoir de vigilance concerne la sous-traitance.

Nous sommes favorables au conditionnement des aides à l'absence d'évasion fiscale et au respect de l'environnement. Il est choquant qu'une entreprise qui perçoit des aides publiques fasse de l'évasion fiscale. Le partage de la valeur au sein de l'entreprise est un grand enjeu. Or l'évasion fiscale, évaluée à environ 36 milliards d'euros par an, pénalise les salariés. C'est un élément important pour réduire les écarts de revenus au sein de l'entreprise.

La consultation stratégique est un élément fondateur du dialogue syndical en matière environnementale. En termes de gouvernance, au-delà de la consultation du CSE, les questions relatives au travail et à l'environnement peuvent être discutées par les administrateurs salariés des conseils d'administration.

La taxation du CO2 est un sujet délicat. À la fois redistributive et source de financement de la transition écologique, elle serait fort utile. Il faut une justice sociale et être attentif aux ménages les plus fragiles, d'autant que les plus riches émettent beaucoup de CO2. Il existe de nombreux mécanismes. À l'instar de la TVA, nous proposons de créer une TCA (taxe sur le carbone ajouté).

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