Intervention de Bruno le Maire

Réunion du lundi 1er mars 2021 à 17h30
Commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets

Bruno le Maire, ministre :

Je considère que la décarbonation de l'industrie est une priorité absolue, et qu'elle se fera dans l'intérêt de celle-ci. C'est grâce à la décarbonation et à la lutte contre le réchauffement climatique, qui suppose recherche et innovation, que nous ouvrirons de nouvelles chaînes de valeur en France et en Europe.

Je donnerai deux exemples : s'il n'existait pas un tel appétit pour les véhicules électriques, nous n'aurions pas relocalisé la production de batteries électriques en France et en Allemagne – une usine, qui emploiera plusieurs centaines de personnes, ouvrira bientôt à Douvrin, dans le Pas-de-Calais ; nous nourrissons la même obsession pour la production d'hydrogène : créer la chaîne de valeur, et les milliers d'emplois que cela représente, sur le territoire français. Avec Air liquide, Faurecia ou McPhy, le contrat est très clair : les aides ne seront apportées qu'à la condition que l'hydrogène soit produit dans des usines installées en France. Il s'agit là d'un enjeu majeur.

En revanche, et je me permettrai d'insister sur ce point, la stratégie de décarbonation industrielle que nous conduisons aux niveaux national et européen n'aura de sens que si nous instaurons, le plus rapidement possible, une taxe carbone aux frontières de l'Union européenne. Ne soyons pas naïfs ! Nos produits, qui seront renchéris par la décarbonation, surtout lorsque les aides publiques viendront à diminuer, ne doivent pas être concurrencés par des produits venus d'Asie ou d'ailleurs, plus carbonés et moins chers. Cette taxe sera une priorité de la présidence française de l'Union européenne, malgré les réticences dont elle fait l'objet.

Je crois avoir été l'un des premiers ministres de l'agriculture à tirer la sonnette d'alarme sur l'artificialisation des sols ; j'ai d'ailleurs instauré une procédure d'avis préalable – une avancée à l'époque, désormais insuffisante. C'est dire l'importance que j'attache au maintien des surfaces agricoles. Seulement, il ne faut pas que l'arbre cache la forêt : l'artificialisation est causée à 50 % par la construction des habitations individuelles, à 1 % par la construction d'entrepôts et de plateformes logistiques. C'est cela la réalité, et c'est une écologie de la réalité que nous devons promouvoir. En tant qu'élu de la première circonscription de l'Eure, je peux en témoigner : l'extension des communes rurales sous forme de lotissements fait des ravages. Il est cependant plus facile de taper sur Amazon que de questionner le souhait de nos concitoyens de disposer d'un logement individuel. Je considère que le courage politique, c'est d'aller regarder ce qui pose vraiment problème dans notre modèle de développement économique. Or c'est bien l'artificialisation des sols par le logement individuel, plutôt que celle due aux plateformes logistiques, qui doit nous interroger – et les réponses sont plus difficiles à trouver.

S'agissant de la répression des atteintes à l'environnement et du délit d'écocide, nous devons veiller à respecter trois principes. D'abord, le dispositif doit être simple et compréhensible. Ensuite, le droit à l'erreur doit être préservé, et l'intentionnalité caractérisée. Enfin, nous devons maintenir l'attractivité du territoire français – je rappelle que nous avons pris beaucoup de dispositions pour favoriser la reconquête industrielle, comme la baisse des impôts de production, et qu'au moment où les investissements étrangers s'effondraient de plus de 60 % dans le monde, la France a mieux résisté que les autres pays.

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