Chacun connaît l'intensité de la crise migratoire dans nos pays européens. Chacun a pu aussi mesurer que si cette intensité avait diminué dans un certain nombre de pays voisins, elle a augmenté chez nous en raison des flux secondaires – où un certain nombre de demandeurs s'étant vu refuser l'asile dans des pays voisins tels que l'Italie ou l'Allemagne viennent le solliciter en France.
Le Président de la République a tenu à Orléans un discours très juste, considérant que la procédure de demande d'asile doit être améliorée en Europe. Quel est aujourd'hui le droit commun ? Il repose sur l'équilibre né du règlement Dublin : chaque personne demandant l'asile est assurée que sa demande sera traitée par un État mais, en contrepartie, elle ne peut profiter de l'espace de Schengen pour la demander dans tous les autres États.
Aujourd'hui, mes chers collègues, pourquoi souhaité-je que le Parlement se prononce ? Parce que le 7 mars dernier, la Cour de justice de l'Union européenne a rendu un arrêt – qui concerne non la France mais la Tchéquie – disposant que si un État ne définit pas dans son droit national ce qu'est un « risque de fuite non négligeable », il n'est plus possible d'utiliser la procédure de rétention contre un réfugié ayant déjà fait une demande d'asile – ce que l'on appelle d'un mot qui n'est pas très élégant un « dubliné ».
Nous sommes ici ce soir pour répondre à une première question : souhaitons-nous donner au Gouvernement, à l'administration, les mêmes outils juridiques que ceux dont ils disposaient il y a quelques mois, avant le mois de mars dernier, permettant que la procédure de rétention soit utilisée contre une personne dans cette situation ?
C'est plutôt rassurant dans un État de droit mais, en septembre dernier, la Cour de cassation a conclu qu'après la décision de la Cour de justice de l'Union européenne, les autorités nationales ne pouvaient plus utiliser la procédure de rétention.
Nous devons traiter une deuxième question : à partir de quel moment de l'étude du dossier d'une personne relevant du règlement Dublin le Gouvernement, l'administration peuvent-ils utiliser la procédure de rétention ? Une partie de notre administration a cru que c'était possible dès le début. Or, le 27 juillet, le Conseil d'État a rendu un avis selon lequel il appartient au législateur d'en décider.
Nous sommes donc là ce soir pour répondre à deux questions. La première, à la suite de la décision de la Cour de justice de l'Union européenne : rendons-nous au Gouvernement et à l'administration le droit dont ils disposaient d'utiliser cette procédure de rétention ? La deuxième, à la suite de l'avis du Conseil d'État, donnons-nous au Gouvernement et à l'administration la possibilité de l'utiliser dès le début, avant la procédure de transfert ?
Vous avez les chiffres en tête : 85 000 demandes d'asile l'année dernière, dont 25 000 au titre du règlement Dublin – je pense que nous atteindrons 100 000, dont probablement plus de 30 000 au titre de ce règlement. Tel est le sujet qui nous préoccupe aujourd'hui.
Nous ne sommes pas là ce soir pour renégocier le règlement Dublin, nous ne sommes pas là ce soir pour renégocier le régime du droit d'asile, nous ne sommes pas là ce soir pour renégocier les conditions d'entrée et de séjour des étrangers. Nous sommes simplement là ce soir pour dire au Gouvernement quelles conséquences nous tirons de l'arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne et de l'avis du Conseil d'État.
Le taux d'exécution des transferts est de 9 %. Nous tous et nous toutes, qui sommes ici en contrat à durée déterminée