Pire encore : votre texte n'est qu'une première étape dans la grande entreprise de déconstruction des normes en vigueur. Les pays de l'Union européenne sont en effet en train de négocier au sein du Conseil européen une procédure commune en matière de protection internationale. Cette dénomination technocratique comme l'Union européenne en a le secret ne cache rien de moins qu'une externalisation des frontières européennes hors de l'Union. Seront considérées comme irrecevables les demandes d'asile de personnes ayant transité par des pays tiers considérés comme sûrs. Ces personnes y seront ainsi renvoyées sans que leur demande soit traitée par le pays concerné.
Cela reviendrait à généraliser l'accord passé en mars 2016 avec la Turquie, par lequel, rappelons-le, l'Union européenne a confié à celle-ci la gestion des réfugiés syriens. Un an après, l'Europe considère qu'un tel accord est un succès puisqu'il a permis de fermer la route aux migrants, comme en témoigne la chute du nombre de traversées. À croire que nous sommes sourds, indifférents, impuissants devant les conséquences de cette disposition pour les demandeurs d'asile, abandonnés à leur sort alors qu'ils sont victimes de situations proprement dramatiques.
Demain, un pays pourra être considéré comme sûr même si certains territoires y sont en guerre ou certaines populations y sont menacées.